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Arzanà

Fragments d'un discours politique


La violenza illustrata de Nanni Balestrini
Ada Tosatti

Riassunto
Frammenti d'un discorso politico. La violenza illustrata di Nanni Balestrini
Interamente costruito attraverso il collage di testi preesistenti, secondo una pratica ricorrente di Nanni Balestrini fin dall'epoca
neo-avanguardista, il romanzo La violenza illustrata (1976) si fonda su una poetica che mira a svelare, tramite il riuso
metalinguistico di frammenti d'articoli di giornale, la valenza ideologica e l'apparente neutralità del linguaggio della
comunicazione. Nel corso del romanzo, utilizzando come materiale di partenza il linguaggio giornalistico, Balestrini illustra
svariati episodi di quella violenza politica o sociale che nel decennio Settanta esplodeva nelle fabbriche e nelle piazze, e
costruisce un percorso che legittima la violenza rivoluzionaria come risposta alla violenza del sistema capitalistico. Partendo
dalla celebre definizione del «fatto di cronaca» data da Roland Barthes, ci siamo soffermati in particolare su due capitoli del
romanzo il cui contenuto è ascrivibile a questa categoria. Si è trattato di dimostrare come, tramite l'utilizzo di tecniche letterarie
di scomposizione e ripetizione, Balestrini non solo perviene a mettere a nudo la «violenza simbolica» — per dirla con Pierre
Bourdieu — che permea il linguaggio mediatico, obbligando il lettore a costituirsi in soggetto critico rispetto all'informazione, ma
dà riprova del fatto che anche i «fatti di cronaca» possono essere interpretati come frammenti d'un discorso politico.

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Tosatti Ada. Fragments d'un discours politique. In: Arzanà 15, 2012. Écritures italiennes du fait divers. Mirabile médiéval, fatto
di cronaca contemporain. pp. 207-220;

doi : https://doi.org/10.3406/arzan.2012.1018

https://www.persee.fr/doc/arzan_1243-3616_2012_num_15_1_1018

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Fragments d'un discours politique

La violenza illustrata de Nanni Balestrini

lin d'œil à l'œuvre de Roland Barthes, qui a été l'un des premiers
à élaborer une approche théorique du fait divers, le titre de mon
intervention fait aussi directement référence à la poétique de l'auteur au
centre de ma réflexion d'aujourd'hui, Nanni Balestrini, et plus particuliè¬
rement à son roman de 1976, La violenza illustrata1.
Dans son article « Structure du fait divers »2, qui constitue encore
aujourd'hui un des socles théoriques à partir desquels s'élabore l'étude du
genre journalistique3, Roland Barthes établissait une différence entre les
faits divers et les autres types d'informations, notamment les événements
politiques. Ainsi, le sémiologue débutait-il son article en affirmant : « Voici
un fait
assassinat
divers : »4.
s'il est politique, c'est une information, s'il ne l'est pas, c'est

Selon la définition qu'en donnait Barthes, une des principales caracté¬


ristiques du fait divers réside dans son immanence5. Du point de vue de

1. Nanni[Feltrinelli,
2001 Balestrini, La
1976],
violenza illustrata seguita da Blackout, Roma, DeriveApprodi,

2. Roland Barthes, « Structure du fait divers », Le bruissement de la langue, Paris,


Seuil, 1984, p. 188-197. Paru une première fois dans Médiations en 1962, cet
article a été ensuite republié en 1 964 dans les Essais critiques.
3. La spécialiste de faits divers Annick Dubied rappelle que bien qu'étant « retra¬
vaillées, réinterprétés, reformulées et réexemplifiées, ces thèses [celles de Roland
Barthes et de Georges Auclair, NDLR] restent néanmoins dominantes et sont
fort peu contestées par ceux qui les emploient, qu'ils soient linguistes, sociologues
ou encore critiques littéraires », Annick Dubied, Les dits et les scènes du fait divers,
Genève, Paris, Droz, 2004, p. 67.
4. R. Barthes, art. cité, p. 188.
5. L'immanence du fait divers est l'un des principes le plus remis en question par
les études successives qui ont mis en avant l'existence de faits divers à épisodes
(Georges Auclair, Le mana quotidien. Structures et fonctions de la chronique des
faits divers, Paris, Anthropos, 1970), le rôle de l'intertextualité et aussi le tra¬
vail de reconstruction et remplissage de données opéré par la lecture ( Tangence ,
Ada Tosatti

sa structure, précisait le sémiologue, le fait divers ne renvoie pas, à la dif¬


férence de l'information politique, « à une situation extensive qui existe
en dehors de lui » : « il contient en soi tout son savoir ». En même temps,
Barthes indiquait aussi qu'une «idéologie [...] du fait divers [est] pos¬
sible », bien qu'il s'agisse d'une élaboration « au second degré par celui qui
parle du fait divers et non par celui qui le consomme »6.
A travers le traitement littéraire de la matière journalistique, Nanni
Balestrini vise justement à mettre à mal la consommation passive de celle-
ci, à susciter une prise de conscience critique de la part du lecteur. Entiè¬
rement composé à partir du collage de fragments d'articles de journaux,
selon une technique récurrente de l'auteur dès les années I9607, La vio¬
lenza illustrata prend comme cible principale d'une opération systéma¬
tique de déconstruction et de distanciation le langage de la presse. Chacun
des dix chapitres du roman, organisé en « laisses narratives » au nombre
de 22 ou 33, porte en effet sur un épisode de violence politique ou sociale
relaté par les médias : affrontements entre les forces de l'ordre et les mili¬
tants extraparlementaires, séquestrations, occupations ouvrières, luttes
pour le logement. . .
Par cette réélaboration « au second degré », qui se passe de discours,
de commentaires, l'auteur fait apparaître les faits divers - aussi bien dans
leur essence événementielle que par la portée idéologique que véhicule la
représentation du monde qu'ils fournissent - comme des fragments d'un
discours politique. Où l'adjectif politique doit être compris non seulement
en relation avec la société au sens large - Barthes soulignait à ce propos que
bien évidemment le contenu du fait divers « n'est pas étranger au monde »
et qu'il renvoie « à l'homme, à son histoire, à son aliénation » 8 - mais
plus spécifiquement en termes de lutte des classes, selon l'approche idéo¬
logique qui était celle de notre auteur pendant les années 1970. En effet,

7.
8.
6. Auteur
diste,
tion
Burroughs.
R.
« Autopsie
bon
et p.Barthes,
nombre
assimilables
79.
Balestrini
parmi
du
art.
d'exemples
les
fait
cité,
emploie
aux
plus
divers
p.cut-up
formalistes
188
189.
etde
», et
d'arguments

et
façon
p.
fold-in
37,189.
du
1992).
presque
Gruppo
déjà
» contredisent
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Dubied
63, dès
pardes
rappelle
sa
Bryon
cette
période
procédés
thèse,
Gysin
quenéo-avant-gar-
«op.
deou
à juste
cit.,
composi¬
William
p.titre
77

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en concomitance avec le mouvement de 1968, Nanni Balestrini s'investit


dans la lutte politique. Son engagement à l'extrême gauche le voit d'abord
cofondateur du groupe extraparlementaire Potere operaio avec Toni Negri,
Sergio Bologna, Oreste Scalzone et d'autres. A la suite de la dissolution de
Potere operaio en 1973, il évoluera dans l'aire dite de l'Autonomie ouvrière
et sociale, formation extrémiste aux contours assez larges.
Le réemploi métalinguistique du discours journalistique sert donc à
mettre en place une critique démystificatrice du langage de la communica¬
tion, à dénoncer la prétendue neutralité de celui-ci et aussi, par là même,
à faire œuvre de contre-information 9 à suggérer une contre-lecture révolu¬
tionnaire
de la sulfureuse
10 de cesdécennie
événements
1970.qui nourrissaient la chronique quotidienne

Contre la consommation de la violence médiatique

Objet difficile à appréhender, au croisement entre une catégorie d'événe¬


ments et une typologie de traitement informationnel, le fait divers recouvre
des réalités changeantes et hétérogènes. A ce propos, Annick Dubied sou¬
ligne que « l'on trouve parfois des événements qui deviennent fait divers
dans un journal, information politique dans un autre »n. Certes, il s'agit

9. Sur l'importance de »ladecontre-information


controinformazione A. Bonomi dans Nanni
pendant
Balestrini,
la période
Primo
voirMoroni
l'article(éd.),
« La

L'orda d'oro 1968-1977. La grande ondata rivoluzionaria e creativa, politica ed


esistenziale, Milano, Feltrinelli, 2005, p. 591-596 [1988]. Il est intéressant aussi
de rapprocher l'opération balestrinienne avec le concept de « guerriglia semiolo-
gica », élaboré par un des principaux critiques de la néo-avant-garde italienne,
Umberto Eco, dans l'article « Vietando s'impara », Quindici, n° 12, 15 septembre
1968 (aujourd'hui dans N. Balestrini (éd.), Quindici. Una rivista e il Sessantotto,
Milano, Feltrinelli, 2008, p. 281-294).
10. Dans l'article « "Avec les yeux du langage" : violence du texte et subversion poli¬
tique dans La violenza illustrata », je rappelais comment, de l'aveu même de l'au¬
teur, le « roman » comporte une dimension de propagande politique (Actes du
colloque international Littérature et Temps des révoltes (Italie 1967-1980), organisé
en novembre 2008 par l'ENS lettres et sciences humaines, les universités Stendhal
Grenoble 3 et Pierre-Mendès-France Grenoble 2. Actes en ligne : http://colloque-
temps-revoltes.ens-lyon.fr/spip.php?rubrique95).
1 1. A. Dubied, op. cit., p. 226.

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là de cas relativement peu fréquents mais qui « illustrent néanmoins que


[...] le fait divers est ontologiquement médiatisé », qu'il « ne devient tel
que parce qu'il est configuré d'une certaine manière [. . .] et ne saurait être
fait divers de lui-même »12. A la suite de Barthes, le sociologue Georges
Auclair reconnaît que le fait divers est apolitique, non signifiant, décon-
textualisé. Celui-ci a un caractère privé et ordinaire mais toutefois excep¬
tionnel, faisant intervenir un écart ou une dérogation aux normes. Enfin,
s'il est vrai, comme l'écrivait Barthes, qu'en termes de « fait divers, l'inex¬
plicable se réduit à deux catégories de faits : les prodiges et les crimes »13,
le fait divers, sans que cela soit une condition sine qua non , implique la
plupart du temps une dimension tragique ou dramatique liée à la présence
d'une violence exercée ou subie. Autant de caractéristiques qui définissent
les événements relatés dans les deux chapitres de La violenza illustrata sur
lesquels nous concentrerons notre analyse, le troisième et le cinquième, qui
portent respectivement sur des chroniques d'accidents du travail et sur un
hold-up dans une banque.
La portée tragique, violente des faits divers est un élément sur lequel
insiste le sociologue Pierre Bourdieu, qui dans son court ouvrage Sur la
télévision, rappelle non seulement comment « le sang et le sexe, le drame et
le crime » sont les principaux ingrédients des faits divers mais surtout voit
en ces derniers les vecteurs d'une « violence symbolique » 14. Par ce concept,
le sociologue fait référence à des formes de violence qui passent par l'impo¬
sition de la part de sujets dominants sur des sujets dominés d'une vision
du monde, de rôles sociaux, de catégories de connaissance à travers lesquels
la relation au réel est pensée et perçue. La transmission de cette « violence
symbolique » par les faits divers pose la question de la fonction sociale de
ces derniers. Selon Bourdieu il s'agit de faits omnibus , accessibles à tout le
monde, « des faits qui font diversion », par lesquels s'opère une réduction
du politique à l'anecdotique qui vise à écarter les informations pertinentes
par lesquelles le citoyen peut « exercer ses droits démocratiques »15.

12. Ibid.
13. R. Barthes, art. cité, p. 191.
14. Pierre Bourdieu, Sur la télévision , Paris, Liber, Raisons d'agir, 1996, p. 16.
15. «[...] en mettant l'accent sur les faits divers [...] on écarte les informations per¬
tinentes que devrait posséder le citoyen pour exercer ses droits démocratiques »,
P. Bourdieu, ibid., p. 16-17.

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Dans la conclusion à son article, Roland Barthes voyait d'ailleurs dans


le fait divers un genre visant à « rassurer » et « déresponsabiliser » les indi¬
vidus16. C'est une fonction similaire que le philosophe et sociologue Jean
Baudrillard, dans son ouvrage, La société de consommation , identifiait dans
la communication de masse en général où règne selon lui l'universalité du
fait divers17. La quiétude de la société de consommation aurait besoin pour
s'exalter et se déculpabiliser « de perpétuelle violence consommée ». Elle
serait avide de violence, pourvu que celle-ci « lui soit servie chambrée »18,
qu'elle soit « conditionnée, homogénéisée » 19 .
La démarche de Balestrini dans La violenza illustrata , ainsi que le titre
même l'indique, consiste justement à illustrer, à mettre à nu, à dévoiler
l'exercice de la violence qui s'exerce dans et par le langage. Elle dénonce
la consommation édulcorée de la violence médiatique, sa tentative de
rassurer et déresponsabiliser les individus, la banalisation de la violence
opérée par le langage journalistique. L'usage par Balestrini du fait divers
s'applique donc à empêcher toute absorption passive par le lecteur des
informations qu'il reçoit et à dévoiler de la sorte la « violence symbolique »
qui les traverse20.

16. «[...] le fait divers est un art de masse : son rôle est vraisemblablement de pré¬
server au sein de la société contemporaine l'ambiguïté du rationnel et de l'irra¬
tionnel, de l'intelligible et de l'insondable ; et cette ambiguïté est historiquement
nécessaire dans la mesure où il faut encore à l'homme des signes (ce qui le rassure)
mais où il faut aussi que ces signes soient de contenu incertain (ce qui l'irrespon-
sabilise) [...] », R. Barthes, art. cité, p. 197.
17. «Toute l'information politique, historique, culturelle est reçue sous la même
forme, à la fois anodine et miraculeuse du fait divers. Elle est toute entière actua¬
lisée, c'est-à-dire dramatisée sur le mode spectaculaire - et tout entière inac¬
tualisée, c'est-à-dire distancée par le médium de la communication et réduite
à des signes », Jean Baudrillard, La société de consommation, Paris, Gallimard,
coll. « Folios Essais », 2007 [1970], p. 31.
18. Ibid., p. 34.
19. Ibid., p. 278.
20. Dès ses débuts Balestrini écrivait que son but était de « provocare quei nodi e que¬
gli incontri inediti e sconcertanti che possono fare della poesia una vera frusta per
il cervello del lettore, che quotidianamente annaspa immerso fino alla fronte nel
luogo comune e nella ripetizione », N. Balestrini, « Linguaggio e opposizione »,
in Alfredo Giuliani (éd.), I Novissimi. Poesie per gli anni '60, Torino, Einaudi,
1965, p. 197.

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Le cinquième chapitre de La violenza illustrata , découpé en 22 para¬


graphes ou « laisses narratives », prend comme point de départ différentes
chroniques journalistiques d'un même fait divers : l'issue tragique d'un
braquage de banque. En voici l'intrigue simplifiée : des bandits pénètrent
dans une banque, l'intervention malencontreuse d'un client provoque une
fusillade avec morts et blessés, un des bandits est lynché par le personnel et
les clients de la banque avant que n'interviennent les forces de l'ordre, tan¬
dis qu'un autre bandit s'échappe sous le regard indifférent de deux ouvriers
qui travaillent à la réparation de la voirie à côté de la banque.
Deux principaux procédés stylistiques, que l'on retrouve déclinés sous
différentes formes dans l'ensemble du roman, sont utilisés par l'auteur pour
empêcher l'assimilation passive de la violence, son apprivoisement. Une des
techniques récurrentes est certainement le traitement rythmique que l'au¬
teur fait subir aux matériaux recyclés, par rapport auxquels il accomplit
un travail de réécriture qui passe par une modification de la syntaxe et de
la ponctuation. Le deuxième procédé consiste en un usage désorientant
et démystifiant de la répétition. Aussi, le récit de ce hold-up est-il répété
à quatre reprises dans le chapitre, à partir de sources journalistiques diffé¬
rentes, la première fois sur 5 paragraphes, la deuxième sur 6 paragraphes,
la troisième sur 8 paragraphes et la quatrième sur 5 paragraphes.
Ces différents récits du hold-up sont soumis à une même transfor¬
mation de la matière textuelle qui les composent. Les phrases originales
sont réduites à leur noyau syntaxique minimal par une manipulation de
la ponctuation qui confère au chapitre une cadence paratactique particu¬
lièrement saisissante. Les phrases sont extrêmement courtes, la plupart des
liens de coordination ou subordination absents. Ce traitement syntaxique
de l'ensemble des matériaux qui composent le chapitre provoque un effet
de ralenti, comme si le lecteur assistait à une reprise filmée de la scène du
braquage, plan après plan, séquence après séquence21. Une sensation de
lenteur qui est évidemment renforcée par la répétition de la même scène,
bien qu'avec des variantes, à quatre reprises. Cette fragmentation du texte
débouche sur une objectivisation de la matière textuelle, provoque un effet
de distanciation, au sens brechtien du terme, par rapport au récit.

21 . Sera,
A ce sulle
come
film propos,
7simarzo
potrebbe
rapine
Umberto
1976).
inottenere
banca
Eco Ȏcrivait
montando
(U. Eco,
que« insieme
leLachapitre
violenza
senza
ressemble
illustrante
sosta gli
à « spezzoni
»,unIlgiallo
Corriere
did'azione
tutti
dellai

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Ceci est particulièrement évident dans les moments saillants du récit,


où l'auteur n'hésite pas découper les phrases en fragments plus courts
même lorsque celles-ci comportent des subordonnées, et notamment des
propositions relatives. Par cet expédient, l'auteur semble jouer du principe
de causalité sur lequel repose tout fait divers. C'est le cas dans ce passage
qui décrit le geste inconsidéré du client se ruant sur un des bandits :

La tragedia esplode improvvisa per la reazione di un cliente. Che era in banca


per effettuare un versamento per conto della sua ditta. Credendo di cogliere un
attimo di disattenzione da parte del bandito con le due pistole. Che teneva a
bada clienti e impiegati. L'uomo robusto gli è saltato addosso. [. . .] Una donna
ha avuto il viso sfiorato da un proiettile e ha riportato ferite. Che era entrata
nella banca insieme a una cognata per un prelievo. 22

Par le découpage syntaxique, le pronom relatif semble changer de fonc¬


tion, se transformer en un che polivalente , qui pourrait aussi recouvrir une

valeur
du fait causale.
divers réside
Mais dans
alors laque,
déviation
commedel'indiquait
la relationBarthes,
causale vers
un des
uneressorts
« cau¬

salité troublée », Balestrini insiste sur la relation de causalité là où elle est


évidente, où elle va de soi. Ce faisant, il parodie et détourne le langage
journalistique, en suggérant la gratuité et la superficialité des commen¬
taires qu'il fournit.
L'extrême fragmentation du chapitre, allant de pair avec l'usage de
la répétition, institue par ailleurs un rapport dialectique entre ordre et
désordre, entre multiplicité de points de vue et recherche du sens. Par la
technique de la fragmentation, le texte cherche à bousculer les points de
repères du lecteur, à le bombarder de données qu'il ne peut réorganiser en
une vision d'ensemble cohérente, structurée et de ce fait maîtrisable. La
structure répétitive du chapitre, en revanche, interpelle le lecteur, le force
à devenir sujet actif, l'oblige à sortir de la confusion et du désordre pour
tenter d'identifier un sens, une direction.
Aussi, le lecteur attentif est-il frappé par le nombre d'inexactitudes qui
émergent du rapprochement des articles. En effet, la confrontation entre
les articles souligne l'imprécision, l'à-peu-près du langage journalistique.
Le nombre de clients présents au moment de l'arrivée des braqueurs dans

22. N. Balestrini, op. cit., p. 72.

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la banque varie d'une source à l'autre : ils sont deux dans le premier et
le deuxième article, un seul dans le troisième, carrément quinze dans le
quatrième. Il est impossible de comprendre l'exacte dynamique des faits à
partir du moment où l'un des clients se rue sur le voleur. A quel moment
le bandit ouvre-t-il le feu? D'ailleurs, quel bandit ouvre le feu? Celui qui
contrôlait les clients et le personnel (comme le laissent entendre les trois
premières versions) ou celui qui était passé derrière les guichets (ce serait
la quatrième version) ? Le bandit vise-t-il volontairement les clients (troi¬

sième
Comme
version),
souvent
ou s'agit-il
chez Balestrini,
d'une balle la
perdue?
clé de lecture, sorte d'indication

métatextuelle qui suggère l'intention démystificatrice de l'auteur, est conte¬


nue dans les matériaux originaux qu'il retravaille. Aussi, au cours du pre¬
mier récit est-il affirmé : « Quello che è esattamente avvenuto è difficile da
ricostruire e da raccontare »23. Pourtant les récits s'enchaînent, avec la pré¬
tention, qui plus est, d'informer, de dire objectivement ce qui s'est passé.
En prenant à contre-pied cette prétention à l'objectivité du langage
journalistique, Balestrini démontre par le collage textuel que le fait divers,
comme le soulignait d'ailleurs Roland Barthes, « est littérature, même si
cette littérature est réputée mauvaise »24.
La technique de la répétition fait ressortir les ressemblances structurelle
et stylistique entre les quatre articles. La sensation éprouvée par le lec¬
teur est celle de récits stéréotypés, de « fabulae préfabriquées » - selon les
mots d'Umberto Eco25 — qui présentent toujours les mêmes fonctions dans
la même succession, ou de scénarios-motifs, offrant les mêmes acteurs,
décors, séquences d'actions. C'est ce que soulignent, là encore, deux frag¬
ments des articles utilisés par Balestrini. Ainsi, dans le paragraphe intro-
ductif, le deuxième article précise-t-il que les voleurs sont « in uniforme
da rapinatore » et qu'ils lancent « la solita frase scandita in tono professio¬
nale. Questa è una rapina fermi tutti »26. Ce que réitère aussi le quatrième
article, toujours dans le paragraphe introductif, où toutefois les éléments
des deux phrases sont inversés : « Uno grida la frase solita. Fermi tutti

23. R.
24. Ibid.,
Barthes,
p. 72. art. cité, p. 197.
25. U. Eco, Lector in fabula : la cooperazione interpretativa nei testi narrativi , Milano,
Bompiani, 1985 [1979].
26. N. Balestrini, op. cit., p. 73.

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questa è una rapina »27. Une petite variation qui ne sert qu'à accentuer
la profonde identité de ces « mises en récits », comme si les journalistes
eux-mêmes savaient que l'horizon d'attente de leurs lecteurs implique une
nécessaire répétition de clichés, de personnages-type.
Si les gestes des braqueurs sont décrits comme étant stéréotypés, la
confrontation entre les quatre récits montre comment l'écriture même
des articles est conventionnelle, répétitive. Ceci est vrai au point que l'on
retrouve exactement les mêmes expressions, les mêmes images d'un article
à l'autre. Ainsi, pour décrire le visage du bandit frappé par les clients, le
deuxième et le quatrième article emploient-ils le même syntagme avec une
minime variation : « una maschera orrenda di sangue », « una maschera di
sangue »28. De plus, on assiste à une sorte de crescendo dramatique dans
les quatre comptes rendus du fait divers. Si le premier présente un ton rela¬
tivement neutre et objectif, les deux derniers articles jouent en revanche
du pathos, visent à étourdir le lecteur par maints ressorts rhétoriques. Le
langage devient connoté, littéraire, il est truffé d'hyperboles, de comparai¬
sons, de métaphores. Un exemple pour tous, cette phrase qui décrit la mort
d'un client frappé par une balle : « Senza un grido lo sventurato col cuore
spaccato scivola a terra »29.
De cette façon Balestrini souligne comment l'une des caractéristiques
des faits divers et des médias de masse réside justement dans la repro¬
duction en série des mêmes informations, dans la réitération fragmentée
du quasi identique, qui non seulement provoque chez le destinataire une
forme d'insensibilité, d'accoutumance à la violence, mais cache derrière
une apparente objectivité la mise en place d'un ordre conformiste, d'une
homologation de la pensée.

Tout se tient : la question de la responsabilité

En réponse à cela, l'auteur vise au contraire à politiser le fait divers, à


le sortir de son immanence, comme l'indique d'emblée le sous-titre du
chapitre, « che cos'è una rapina in banca di fronte alla fondazione della

27. Ibid., p. 79.


28. Ibid., p. 75 et p. 80.
29. Ibid., p. 79.

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banca stessa? », qui reprend une célèbre citation de Bertold Brecht, tirée
de L'opéra de quat'sous.
Dans ce but, le choix du fait divers sélectionné par Balestrini n'est pas
anodin, car il présente en quelque sorte un brouillage, presque un renver¬
sement des rôles des bourreaux et des victimes. Certes, les bandits pro¬
voquent nombre de blessés et un mort, mais la fusillade débute à cause de
l'intervention imprudente d'un client. De plus, si le récit commence par
une tentative ordinaire de braquage, il se termine de fait par le lynchage
particulièrement brutal d'un des voleurs. Celui-ci est « percosso a sangue
da una due dieci venti persone. Gli sfasciano sulla testa un cartellone pub¬
blicitario. Lo percuotono con una sbarra di ferro. Lo calpestano. Infieris¬
cono con una furia selvaggia »30.
Un petit indice, disséminé dans le texte, colore d'ailleurs d'une nuance
politique l'ensemble de l'épisode. En effet, au cours du deuxième récit du
hold-up, le client qui se lance contre l'un de voleurs, dont on nous dit
qu'il s'agit d'un ancien militaire, est désigné soudainement avec le terme
de « fascista »31. Mais la valeur politique de ce fait divers est sous-entendue
surtout par la non-intervention des deux ouvriers travaillant dans la rue.
Si les trois premiers récits relatent sans commentaires particuliers cette
non-intervention, le dernier apporte un élément supplémentaire qui per¬
met de la comprendre non pas en termes de peur ou d'indifférence, mais
de solidarité de classe : « due edili abitanti nella borgata sono stati insul¬
tati dal direttore. Che stavano lavorando nei pressi della banca. Per non
avere tentato
carabinieri »32.di fermare l'auto dei banditi in fuga prima dell'arrivo dei

Ce fragment, sur lequel se conclut le chapitre, trouve tout son sens


dans la relation qu'il tisse avec le chapitre suivant, « Deportazione, mirate
ai punti neri o son fascisti o son carabinieri », qui décrit des luttes vio¬
lentes entre les militants extraparlementaires, les habitants d'une cité de
banlieue (parmi lesquels on peut imaginer les deux ouvriers du chapitre

31.
30. «Entrano
Ibid., p. 73.nuovi clienti. [...] L'ultimo è un giovane di 31 anni. Massiccio e
robusto ex paracadutista. Ha una borsa con dentro 1 milione e 700.000 lire. Las¬
cia la borsa e mettiti con gli altri. Gli ordina il bandito di guardia alla porta. Il
fascista gli ubbidisce », ibid. , p. 74.
32. Ibid., p. 80.

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précédent), et les forces de l'ordre qui procèdent à une évacuation forcée


de logements occupés illégalement. Le chapitre commence d'ailleurs par
la reprise du substantif « borgata » : « la borgata sorge nella parte orien¬
tale della città [...] »33. Si les deux ouvriers n'interviennent pas, suggère le
texte, c'est qu'ils reconnaissent dans les braqueurs des camarades et dans le
personnel de la banque des ennemis de classe.
Ainsi, grâce à la technique de la coblas capfinidas, qui relie les chapitres
les uns aux autres par la reprise de termes-clés à la fin et au début des
chapitres, Balestrini cherche-t-il à établir un réseau de renvois, à suggérer
une nécessaire mise en perspective des différents événements relatés par
les journaux. De la sorte, ce qui apparemment relève du délit commun,
peut être relu, dans l'économie générale de l'ouvrage, comme un épisode
de lutte politique. D'ailleurs, les braquages de banque, les vols à main
armée ou les rapines faisaient partie à l'époque des pratiques illégales que
les groupes extrémistes utilisaient pour « s'autofinancer » en vue de la cause
révolutionnaire34. En chargeant le fait divers d'implications qui dépassent
l'événement lui-même, c'est-à-dire en suggérant les mobiles qui se cachent
derrière le simple compte-rendu des faits, La violenza illustrata extrait le
fait divers de son immanence pour remonter de l'anecdotique au politique.
Ceci apparaît clairement aussi dans l'autre exemple sur lequel nous
voudrions nous arrêter, c'est-à-dire le troisième chapitre de La violenza
illustrata, intitulé « Deduzione, un nuovo modo di fare la produzione
nell'acido solforico mettiamoci il padrone ».
Le chapitre, composé de 33 paragraphes, est constitué de trois discours
parallèles qui alternent selon une succession thématique. Le premier fil de
discours assemble des fragments d'articles relatifs à différents épisodes de
fuites de gaz toxique dont les victimes ne sont pas uniquement les travail¬
leurs mais la population dans son ensemble ; le deuxième présente des cou¬
pures de presse qui évoquent une longue série d'accidents du travail (brû¬
lures, intoxications, blessures, décharges électriques); le troisième enfin

33. Ibid., p. 81.


34. Un des premiers épisodes de ces braquages politiques est le braquage organisé le
26 février 1971 par le Groupe XXII Octobre, l'une des premières bandes armées
avec les GAP de l'éditeur Giangiacomo Feltrinelli, contre le convoyeur de fonds
de l'Istituto Case Popolari de Gênes, Alessandro Floris, qui est involontairement
tué.

-217-
AdaTosatti

relate, toujours selon la méthode du collage de divers articles, la visite du


président de la République Giovanni Leone dans un hôpital napolitain lors
de l'épidémie de choléra de l'été 1973.
Dans son article sur les faits divers, Barthes soulignait que la deuxième
relation autour de laquelle s'articule la structure du fait divers est celle de
la coïncidence, reposant sur la répétition apparemment surprenante d'un
événement ou sur le rapprochement de deux termes antithétiques. A ce
propos, Barthes notait comment, dans le fait divers, la relation de coïn¬
cidence « implique une certaine idée du Destin », sert en général à faire
pointer l'idée d'un fatum derrière les faits relatés, car souvent « l'événement
est [. . .] vécu comme un signe dont le contenu est cependant incertain »35.
C'est par cette idée d'une fatalité tragique et inexplicable que débute le
troisième chapitre. Ainsi, dès le deuxième paragraphe peut-on lire :

Ieri mattina sotto la tettoia di recente costruzione stava lavorando su un'im¬


palcatura per montare una grondaia un giovane operaio altri due dipendenti
lavoravano all'interno per una tragica coincidenza poi un quarto lavoratore era
andato nella sede della ditta da cui era assente da giorni per malattia a ritirare
la colomba pasquale. Proprio mentre stava uscendo dagli uffici con la colomba
in mano e stava dirigendosi verso l'impalcatura per salutare il giovane compa¬
gno di lavoro la pesante tettoia è crollata ribaltandosi letteralmente in testa ai
due uno è stato completamente sommerso dalle macerie. 36

Tous les éléments visant à rendre émouvant et pathétique l'épisode sont


réunis : le hasard d'une mort qui survient quand on l'attend le moins, alors
que justement l'ouvrier est en arrêt maladie, le symbole, qui se révèle cruel¬
lement oxymorique en un jour de deuil, de la colombe pascale, le ressort
dramatique de l'amitié.
Toutefois, le récit de cet épisode en position initiale ne sert à l'auteur
qu'à prendre à contre-pied l'idée d'une fatalité inexplicable, d'une « tra¬
gique coïncidence ». En effet, tout le chapitre vise au contraire à montrer
que ce qui se cache derrière cette mort n'est par un hasard cruel, le « dieu
qui rode derrière le fait divers »37 dont parlait Barthes, mais au contraire
une série de causes et d'effets, une très humaine responsabilité.

35. R. Barthes, art. cité, p. 196-197.


36. N. Balestrini, op. cit., p. 42. C'est nous qui soulignons.
37. R. Barthes, art. cité, p. 196.

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Fragments d'un discours politique

C'est à cela que sert l'accumulation de très nombreux faits divers d'ac¬
cidents du travail regroupés dans un seul chapitre38. Car si le lecteur d'un
quotidien n'est confronté au récit de ces événements tragiques que de façon
ponctuelle, épisodique, Balestrini joue au contraire de la concentration de
ces drames, il en souligne la fréquence et l'abondance. Loin d'être le reflet
d'un hasard, la répétition permet de mettre l'accent sur le fait que les vic¬
times appartiennent toutes à une même catégorie, celle des travailleurs ou
des citoyens les plus démunis39.
Par des renvois contrapuntiques le texte souligne aussi, avec une ironie
amère, la différence de traitement entre les travailleurs, exposés constam¬
ment à des risques mortels par le non-respect des normes de protection de
la part de leurs employeurs40, et le président entouré de soins ridiculement
excessifs41. Enfin, c'est encore le rapprochement entre les trois discours qui

39.
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40. «Tutti i lavoratori dovranno essere muniti di maschera antigas [...]. All'origine
del provvedimento che ha suscitato tra le aziende un certo scalpore è la preoccu¬
pante frequenza con cui si registrano fughe di gas nocivi da impianti industriali
finalmente qualcuno si è accorto che esistono norme di legge per difendere la
salute dei lavoratori nelle condizioni di continuo pericolo in cui molti di loro
vivono », N. Balestrini, op. cit., p. 53-54.
41. « Dal reparto infettivi il presidente tenta di proseguire per il reparto medico ospe¬
daliero [. . .] poi le cose si complicano perché il direttore e i suoi collaboratori pre¬
tendono a tutti i costi di vestire il presidente con una tuta sterile uno gli infila i
pantaloni un altro tenta inutilmente di infilargli dei sottilissimi guanti di plastica
che si rompono in serie. Un terzo pretende di applicargli una mascherina sulla
bocca mentre un'infermiera lo asperge di talco disinfettante il presidente si scher¬
misce si terge il sudore e lascia fare [. . .] », ibid. , p. 53.

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AdaTosatti

colore d'une nuance sarcastique autrement inexistante le souhait qu'ex¬


prime le président à la fin du chapitre d'un prompt rétablissement permet¬
tant aux patients qu'il visite de retourner rapidement à leur travail : « [. . .]
a tutti augura di guarire presto di tornare tutti sani presto a lavorare »42.
Le caractère polyphonique du chapitre et la méthode de la répéti¬
tion servent donc à déjouer l'idée d'une fatalité inhérente aux faits divers
pour insister en revanche sur la notion de responsabilité. Responsabilité
politique, en premier lieu, d'une société dans laquelle il y a des morts
moins importantes que d'autres. Responsabilité médiatique, ensuite, liée à
une certaine exploitation de l'information qui, comme l'écrivait Georges
Auclair, « sacrifie [. . .] le représentatif à l'exceptionnel, le sociologiquement
significatif au sensationnel [...] »43.
L'œuvre littéraire, telle que Balestrini la conçoit, permet donc par le
détournement qu'elle opère des articles de journaux et dans ce cas précis,
par le recyclage du fait divers, d'affirmer la valeur politique d'événements
qui apparemment relèveraient de l'anecdotique, de montrer la portée idéo¬
logique du langage de la communication.
Dans ce but, l'auteur interpelle directement le lecteur, qu'il définit dans
l'introduction à la réédition de La violenza illustrata , « ignaro e pacifico let¬
tore », en parodiant l'apostrophe de Baudelaire à son hypocrite lecteur44.
C'est ce lecteur que l'auteur entend responsabiliser en l'obligeant, dans un
parcours actif entre texte et réalité, à devenir partie prenante de la consti¬
tution du sens, non seulement de l'œuvre, mais de sa propre condition
sociale et politique, à se constituer en sujet politique.

Ada Tosatti

42. Ibid., p. 54.


43. Georges Auclair, op. cit., p. 123.
44. Le renvoi indirect à Baudelaire, lu dans la clé ironique qui est celle de ce texte,
entend signifier que derrière la naïveté du lecteur, se cache de fait l'hypocrisie de
qui recherche dans les œuvres littéraires une « evasione », un « perduto paradiso »,
ou encore un « beato rifugio contro le avversità e brutture che ogni giorno feris¬
cono e umiliano », N. Balestrini, op. cit., p. 7-11.

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