Documenti di Didattica
Documenti di Professioni
Documenti di Cultura
Si tratta della copia digitale di un libro che per generazioni è stato conservata negli scaffali di una biblioteca prima di essere digitalizzato da Google
nell’ambito del progetto volto a rendere disponibili online i libri di tutto il mondo.
Ha sopravvissuto abbastanza per non essere più protetto dai diritti di copyright e diventare di pubblico dominio. Un libro di pubblico dominio è
un libro che non è mai stato protetto dal copyright o i cui termini legali di copyright sono scaduti. La classificazione di un libro come di pubblico
dominio può variare da paese a paese. I libri di pubblico dominio sono l’anello di congiunzione con il passato, rappresentano un patrimonio storico,
culturale e di conoscenza spesso difficile da scoprire.
Commenti, note e altre annotazioni a margine presenti nel volume originale compariranno in questo file, come testimonianza del lungo viaggio
percorso dal libro, dall’editore originale alla biblioteca, per giungere fino a te.
Google è orgoglioso di essere il partner delle biblioteche per digitalizzare i materiali di pubblico dominio e renderli universalmente disponibili.
I libri di pubblico dominio appartengono al pubblico e noi ne siamo solamente i custodi. Tuttavia questo lavoro è oneroso, pertanto, per poter
continuare ad offrire questo servizio abbiamo preso alcune iniziative per impedire l’utilizzo illecito da parte di soggetti commerciali, compresa
l’imposizione di restrizioni sull’invio di query automatizzate.
Inoltre ti chiediamo di:
+ Non fare un uso commerciale di questi file Abbiamo concepito Google Ricerca Libri per l’uso da parte dei singoli utenti privati e ti chiediamo
di utilizzare questi file per uso personale e non a fini commerciali.
+ Non inviare query automatizzate Non inviare a Google query automatizzate di alcun tipo. Se stai effettuando delle ricerche nel campo della
traduzione automatica, del riconoscimento ottico dei caratteri (OCR) o in altri campi dove necessiti di utilizzare grandi quantità di testo, ti
invitiamo a contattarci. Incoraggiamo l’uso dei materiali di pubblico dominio per questi scopi e potremmo esserti di aiuto.
+ Conserva la filigrana La "filigrana" (watermark) di Google che compare in ciascun file è essenziale per informare gli utenti su questo progetto
e aiutarli a trovare materiali aggiuntivi tramite Google Ricerca Libri. Non rimuoverla.
+ Fanne un uso legale Indipendentemente dall’utilizzo che ne farai, ricordati che è tua responsabilità accertati di farne un uso legale. Non
dare per scontato che, poiché un libro è di pubblico dominio per gli utenti degli Stati Uniti, sia di pubblico dominio anche per gli utenti di
altri paesi. I criteri che stabiliscono se un libro è protetto da copyright variano da Paese a Paese e non possiamo offrire indicazioni se un
determinato uso del libro è consentito. Non dare per scontato che poiché un libro compare in Google Ricerca Libri ciò significhi che può
essere utilizzato in qualsiasi modo e in qualsiasi Paese del mondo. Le sanzioni per le violazioni del copyright possono essere molto severe.
La missione di Google è organizzare le informazioni a livello mondiale e renderle universalmente accessibili e fruibili. Google Ricerca Libri aiuta
i lettori a scoprire i libri di tutto il mondo e consente ad autori ed editori di raggiungere un pubblico più ampio. Puoi effettuare una ricerca sul Web
nell’intero testo di questo libro da http://books.google.com
A propos de ce livre
Ceci est une copie numérique d’un ouvrage conservé depuis des générations dans les rayonnages d’une bibliothèque avant d’être numérisé avec
précaution par Google dans le cadre d’un projet visant à permettre aux internautes de découvrir l’ensemble du patrimoine littéraire mondial en
ligne.
Ce livre étant relativement ancien, il n’est plus protégé par la loi sur les droits d’auteur et appartient à présent au domaine public. L’expression
“appartenir au domaine public” signifie que le livre en question n’a jamais été soumis aux droits d’auteur ou que ses droits légaux sont arrivés à
expiration. Les conditions requises pour qu’un livre tombe dans le domaine public peuvent varier d’un pays à l’autre. Les livres libres de droit sont
autant de liens avec le passé. Ils sont les témoins de la richesse de notre histoire, de notre patrimoine culturel et de la connaissance humaine et sont
trop souvent difficilement accessibles au public.
Les notes de bas de page et autres annotations en marge du texte présentes dans le volume original sont reprises dans ce fichier, comme un souvenir
du long chemin parcouru par l’ouvrage depuis la maison d’édition en passant par la bibliothèque pour finalement se retrouver entre vos mains.
Consignes d’utilisation
Google est fier de travailler en partenariat avec des bibliothèques à la numérisation des ouvrages appartenant au domaine public et de les rendre
ainsi accessibles à tous. Ces livres sont en effet la propriété de tous et de toutes et nous sommes tout simplement les gardiens de ce patrimoine.
Il s’agit toutefois d’un projet coûteux. Par conséquent et en vue de poursuivre la diffusion de ces ressources inépuisables, nous avons pris les
dispositions nécessaires afin de prévenir les éventuels abus auxquels pourraient se livrer des sites marchands tiers, notamment en instaurant des
contraintes techniques relatives aux requêtes automatisées.
Nous vous demandons également de:
+ Ne pas utiliser les fichiers à des fins commerciales Nous avons conçu le programme Google Recherche de Livres à l’usage des particuliers.
Nous vous demandons donc d’utiliser uniquement ces fichiers à des fins personnelles. Ils ne sauraient en effet être employés dans un
quelconque but commercial.
+ Ne pas procéder à des requêtes automatisées N’envoyez aucune requête automatisée quelle qu’elle soit au système Google. Si vous effectuez
des recherches concernant les logiciels de traduction, la reconnaissance optique de caractères ou tout autre domaine nécessitant de disposer
d’importantes quantités de texte, n’hésitez pas à nous contacter. Nous encourageons pour la réalisation de ce type de travaux l’utilisation des
ouvrages et documents appartenant au domaine public et serions heureux de vous être utile.
+ Ne pas supprimer l’attribution Le filigrane Google contenu dans chaque fichier est indispensable pour informer les internautes de notre projet
et leur permettre d’accéder à davantage de documents par l’intermédiaire du Programme Google Recherche de Livres. Ne le supprimez en
aucun cas.
+ Rester dans la légalité Quelle que soit l’utilisation que vous comptez faire des fichiers, n’oubliez pas qu’il est de votre responsabilité de
veiller à respecter la loi. Si un ouvrage appartient au domaine public américain, n’en déduisez pas pour autant qu’il en va de même dans
les autres pays. La durée légale des droits d’auteur d’un livre varie d’un pays à l’autre. Nous ne sommes donc pas en mesure de répertorier
les ouvrages dont l’utilisation est autorisée et ceux dont elle ne l’est pas. Ne croyez pas que le simple fait d’afficher un livre sur Google
Recherche de Livres signifie que celui-ci peut être utilisé de quelque façon que ce soit dans le monde entier. La condamnation à laquelle vous
vous exposeriez en cas de violation des droits d’auteur peut être sévère.
En favorisant la recherche et l’accès à un nombre croissant de livres disponibles dans de nombreuses langues, dont le frano̧ais, Google souhaite
contribuer à promouvoir la diversité culturelle grâce à Google Recherche de Livres. En effet, le Programme Google Recherche de Livres permet
aux internautes de découvrir le patrimoine littéraire mondial, tout en aidant les auteurs et les éditeurs à élargir leur public. Vous pouvez effectuer
des recherches en ligne dans le texte intégral de cet ouvrage à l’adresse http://books.google.com
sülfỆBIBLIUIHE
61.392. A
ALL
.0
GIPHANTIE.
PREMIER E PARTIE,
|
A BABYLO N E.
61392-i
|
|
·
|
·, ! *
|-|
|
-
-*
•-,
*
- *
|
|
|
----
|
|
- º* ·
|
|
|
·
T A B L E
D ES C H A P I T R E S.
P R E M I ÉR E PART I E.
|-
, .= :
*
* * :
* |- ,v
GIPHAWTIE.
G I P H A V T I E.
CHAPITRE PREMIER,
P R É F A c E.
Jamais perſonne n'eut plus de
goût que moi pour voyager.
Ayant regardé toute la terre
comme ma patrie, & tous les
|-
C H A P I T R E I I."
L o U R A G A N.
J’Érois fur les frontières de la
Guinée, du côté des déferts qui
la terminent vers le nord ; &e je
confidérois cette vafte folitude;
dont l’image feule effraye l’ame
la plus forte. Tout-à-coup ilme
prit le defir le plus ardent de
pénétrer dans ces déferts, & de
voir juſqu’où la nature fe refu
foit aux hommes. Peut-être ,
difois-je, y a-t-il au milieu de
ces plaines brûlantes quelque
cànton fertile ignoré du refte
de la terre; peut-être y trouve
L' O v R A G A N. ;
rai-je des hommes, que le com
merce des autres n’a ni polis, ni
corrompus.
En vain je me repréfentai
les dangers où m’expofoit une
pareille entreprife, & même la
mort prefque certaine qui y étoit
attachée ; jamais cette idée ne
put fortir de mon eſprit. Un jour
d'hiver (car c’étoit au temps de
la canicule) lė vent étant fud
oueſt, le ciel couvert, & l'air
tempéré, pourvu de quelques
tablettes pour appaifer la faim
& la foif, d’un mafque de verre
pour préferver les yeux des nua
ges de fable, & d'une bouffole
- Aiij
6. L’ O v R A G A N.
CHAPITRE IIÏI.‘"É
BELLE VUE.
LE fol'eil n’ét0it pas encore levé;
lorfque je m’éveilhi : mais l’es‘ *
Premiers rayons blanchiffoient
l’orient,&oncomlnenço‘ir à pou—‘
voir difcernef les objets.Le l’om4
meil avoit réparé mes forces. &
calmé mes efprits :à mon réveil ,
le trouble rentra dans mon cœur,
& l’image de la mon s’offrir de‘
nouveau à mon aine allal‘mé'e.
onrencontre desarbriffeaux,fous,
lefquels on peut marcherà cou
vert: & l’on trouve enfin des
arbres auffi anciens que la terre,
qui élèvent leurs têtes juſqu’aux
nues. Ainfi fe forme un amphi
théâtre immenfe qui fe déploie
14 B e L L E v v E.
majeſtueufement aux yeux du
voyageur, & lui annonce qu’une
telle demeure, n’eſt point faite
pour des mortels. |
- ,: o - -. . . ;
Tout me parut nouveau dans
cette terre inconnue ; tout mę
jettoit dans l’étonnement. Des
productions de la nature que mes
yeux parcouroient avidement,
aucune ne reffembloit à celles
, qu’on voit partout ailleurs. Ar
bres, plantes, infectes, repti
les, poiffons, oifeaux, tout étoir
d’une conformation extraordi
naire, & en même temps élé
gante & variée à l’infini. Mais
ce qui me caufait le plus d'adº
B E L L e v v e. r ;
miration , c’eſt qu’une fenfibi
lité univerfelle, revêtue de tou
tes les formes imaginables, vi
vifioit les corps qui paroiffent en
être le moins fufceptibles: juf.
qu’aux plantes, tout donnoit des
marques de fentiment. - 2-2
#:;
<s *: #:9
F:
-
. . . . 2#
C H A P I T R E V.
L E C O N T R E - S E N s.
De tous les pays du monde »
ajouta l’efprit élémentaire, Gi
phantie eſt le feul où la nature
conferve encore fon énergie pri
mitive. Sans ceffe elle y travaille
à augmenter les nombreuſes fa
milles des végétaux & des ani
maux, & à donner de nouvelles
eſpèces. Elle organife tout avec
une admirable intelligence; mais
elle ne réuſſit pas toujours à per
étuer tout. Le méchaniſme de
;: propagation eſt le chef-d’oeu
vre de fa fageffe : quelquefois
B iij
22 L E C o N r R E – s E N s.
B iv
24 L e Co N r r e-s en s.
J'ai actuellement une collec
tion de nouveaux fimples de la
plus grande vertu: & j’en aurois
déjà fait part aux hommes, fi de
fortes raifons ne m’euffent por
té à différer.
sắc
s:C#C#
( )
z?s
32 °
C H A P I T R E VI,
L E s A P P A R I T I o N s.
J E reviens aux efprits élémen
taires , pourfuivit le préfet de
Giphantie. Le féjour continuel
qu’ils font dans l’air, toujours
chargé de vapeurs & d'exhalai
fons; dans l’eau, toujours char
gée de fels & de terres; dans
le feu , prefque fans ceffe oc
cupé au tour de mille corps
hétérogènes; dans la terre, où
tous les autres éléments s'infi
nuent & fe confondent : ce fé
jour, dis-je, dégrade peu-à-peu
l’effence pure de ces eſprits,
dont
i E s AP P A R I T 1 o N s. 3 3
dont la nature primitive eft d’ê
tre (quant à leur fubſtance ma
térielle) tout feu ou tout autre
élément fans mêlange. Cette
dégradation a été quelquefois fi
loin, que, par la mixtion des dif
férens éléments, ces efprits ont
acquis affez de confiftance pour
être apperçus. Les hommes en
ont vu dans le feu, & les ont ap
pellés falamandres & cyclopes :
ils en ont vu dans l'air, & les ont
appellés fylphes, zéphyrs, aqui
lons : ils en ont vu dans l’eau, &
les ont appellés nymphes , naïa
des , néréides , tritons : ils en
ont vu dans les cavernes, les fo
litudes, les forêts, & les ont apº
Partie I. C
34 L És AP P A R I r 1 o N s.
pellés gnomes, fylvains, fau"
nes, fatyres, &c.
$.
„Dº
«G::D» ">
U+.
|
37
C H A P I T R E VII.
L E S S U R F A C E S.
CepeNDANT le préfet de Gi
phantie avançoit, & je le fuivois
tout étonné & tout penfif. En
fortant de l’épaiffeur du bois ;
nous nous trouvâmes en face
d’un petit coteau , au pied du
quel s’élevoît une colomne
creufe,& groffe à proportion de
fa hauteur, qui alloit à plus de
cent pieds. Je vis fortir du haut
de cette colomne des vapeurs
affez femblables à ces exhalai
fons que les chaleurs de l’été
élèvent de la terre en fi grandę
C iij
38 L es $U R F A c e s.
abondance, qu’elles deviennent
fenſibles. De la même colomne
je voyois fortir & fe difperfer
dans l'air certaines formes hu
maines, certains fimulacres plus
légers encore que les vapeurs
qui les emportoient, |
$ð
46
= =
C H A P I T R E v III.
L E G L o B E.
Tel est le fort des efprits élé
mentaires, continua le préfet de
Giphantie. A peine fortis de la
colomne probatique où ils font
purifiés, ils retournent à leurs
travaux ordinaires: &, pour voir
où leur préfence eſt le plus né
ceffaire, & où les hommes ont
le plus befoin de leurs fecours,
au fortir de la colomne, ils mon
tent fur ce coteau. Là , par un
méchaniſme auquel toute l’in
telligence des efprits eut peine
à fuffire , on voit & l’on entend
t = G i o B e. 47
ce qui fe paffe dans toutes les
contrées du monde. Tuvas t’en
affurer par toi-même.
SUR P R is de ce prodige , je
mis la pointe de la baguette fur
Babylone; je prêtai l’oreille, &
j’entendis ce qui fuit . . . . . “, “
J’appuyai la pointe de la ba
guette une demie-ligne plus bas;
& j’entendis probablement un
partifan qui jettoit fes calculs fur
le peuple.
L e s P r o P o s. 5;
» N’eſt-il pas vrai, difoit-il,
» que, dans le befoin de l'état,
» chacun doit contribuer à pro
» portion de fon bien, déduc
» tion faite des dépenfes qu’il eft
» tenu de faire? N’est-il pas vrai
» encore qu’un très-petit hom
» me dépenfe moins en habil
» lements qu’un autre de très
» grandetaille ? N’eſt-il pas vrai,
» enfin, que cette différence de
» dépenfe eft très-confidérable,
» puiſqu’il faut aujourd'hui des
» habits d’été, des habits d’hi
» ver, des habits de printemps,
» des habits d’automne, des ha
» bits de campagne, des habits
sº de chaffe , & je ne fçais com
D iv
56 L e s P r o p o s.
» bien d’autres ? On en auroit
ɔɔ auffi du matin & du foir; mais
r;
ɔɔ
on ne connoît point de matin
» à Babylone. Je voudrois donc
» que, la toife à la main, on fit
» contribuer les fujets de Sa
» Majeſté; & que chacun payât
» en raifon renverſée de fa hau
º teur . . . . Autre confidération
» du même poids. On a parlé de
» de mettre un impôt fur les cé
» libataires; on n’y penfoit pas.
» C’eſt chez ceux qui font affez
» riches pour femarier,&fur-tout
» chez ceux d’entr'eux qui font
» affez riches pour s’expofer à
» avoir des enfants,qu’ilfautcher
» cher de l'argent. Ainſi, il fau
L e s P r o p o s. 57
s» droit taxer les pères de famille
» en raifon compoſée du montant
» de leur capitation & du nom
» bre de leurs enfants. J’ai dans
» mon porte-feuille je ne fçais
» combien de projets qui valent
* ceux-là, & que j'ai imaginés
» le plus heureufement du mon
» de. Chacuna fon talent; voilà
» le mien : & l’on fçait combien
» il eſt à prifer aujourd'hui «.
#:#:;
’0':
CHAPITRE X.
LE BONHEUR.
L E hazard voulut que la poin-‘
te de ma baguette tombât fur
une alfemblée où l’on parloir du
' Bonheur. Chacun difoit fon avis;
& je recueillis liés voix.
- * * |- ::
-----
- -- - -- * , a
* : {:}; . U 2 * *, , } Č
|
|- i - -
– -: | O « » •* • «.«*
:
|-
} , : |-
; ::
-- |- 1.
* |- |
.
7o - - - - - -.
C H A P I T R E X I.
L E P O T - P O U R R I.
CHAPITRE X11,
LE Mrnorn'
COMME je m’amufois de tous
ces propos, le préfet de Giphan—
tie me préfenta un miroir. Tu
ne peux que deviner les chofes,
me dit—il :mais, avec ta baguette
& cette glace , tu vas entendre
& voir tout-à—la—fois; rien ne
t’échappera ; tu feras connue
préfent àtout ce qui fe paife.
Je cherchai longtemps le
bonheur, & ne le trouvai nulle
part, pas même dans ces royau
mes que nous appellons florif
fants : j’en apperçus feulement
quelques traces dans les cam
pagnes que l’éloignement met
toit à couvertdela contagion des
villes, J’embraffai
Ł E P D T - P o U R R 1, 8i
tes féroces. . . : :
C H A P I T R E XIII.
L' É P R E U V E.
Ce coup d’oeil général jetté fur
toute la terre, je voulus voir Ba
bylone en particulier. Ayant
tourné ma glace au Nord, &
l'inclinant lentement fur le ving
tième méridien, je tâchois de
joindre cette grande ville. Parmi
les cantons qui paffoient fuccef;
fivement fous mes yeux, il s’en
trouva un qui fixa mon atten
tion. J'y apperçus une maifon
de campagne ni petite ni gran
de, ni trop ornée ni trop nue.
La nature, plus que l'art, em
* , F iV
88 L’ E P R E U V E.
belliffoit les dehors. Elle domi
noit fur des jardins, des bofquets
& quelques étangs qui termi
noient un coteau tourné à l'O
rient. On y célébroit en ce mo
ment une fête champêtre; les
habitants des environs y étoient
accourus. Les uns, couchés fur
le gazon, bůvoientà longs traits,
& s’entretenoient de leurs an
ciennes amours; les autres à leur
voix mêloient le fon des mufet
tes; & pluſieurs exécutoient des
danfes que les vieillards ne trou
voient pas auffi belles que cel
les du temps paffé.
-- -*
*
conomie qui inclinoit à l’avari
ce. Vis-à-vis de Sophie, dit-il,
qui penfe folidement, le meil
leur eft de fe montrer capable
d'amaffer beaucoup de bien: jet
tons-nous dans le commerce.
*
Enfin
L'EFREUÎÆÈg 92
Enfin; le t'emps s’:1€cbulay’;‘&,‘
fion fans bien de réflexions , Soi
phier fe dëtèmfinæ à_ prendre un
P àrd;ï
..fl . ï
V\ -\_. : ... . .:,
‘ . . ‘.. .m':)
n. .
.. .. . . ',.
..,.'.'J ,_‘
dl ‘ ,‘ l:y.’J-’T
"‘.
\ Elledfiau q&iguez:Sij’aïéré
Je bai; de? vos dépenfes , '.jïè'n fuis
fâêhéæ ' :2 mâiä ce îque: vous aveâ
fâit‘xPaur m‘ai; vmis‘ l’àurieg fäi-t
indégimdaxfimeñväæ;fiñi.: .V,ontc
ÿ6fiôhæir‘1Ê à iædép€nfeefi dëëidÿ;
W’cuè ava idif(ïjäé îune partje de _
‘üëtrè:bîèn ', poub abtenir ;1;né
famine; Vous diffiperiei l’aune; ‘
fÿotm'îÿrdus dèfimirè (des; fennuis
du-'méfiàgéi Je:'vous 'confeü}p de
h?yÏ‘/jalmis fangermdî' si 1:2:ux.-'Ë
«un :51 : In ;::IJJIË { ‘2' r."r'Î'e :>i ‘
Partie I.
y3 L’ E P R E U y E.
- Elle dit au marchand, au mi
litaire & au fçavant: Je fçais que
vous m’avez marqué beaucoup
d'attachement : mais je penfe
auffi que vous n’en avez pas
moins marqué, vous pour les
richeffes, vous pour la gloire,
& vous pour les fciences. En
effayant de fixer mon penchant,
chacun fuivoit le fien; chacun
agiffoit autant pour foi-même
que pour moi. Que je me donné
à quelqu’un de vous, il lui ref
tera toujours des vues fur d'au
tres objets; l'un' s'occupera de
l’augmentation de fa fortųne,
l'autre de fon avancement dans
le fervice, l’autre de fes pro
! Y * . . . .. . r
- - • . , , - *
L’ E P M E U P É: 99
* * |
- - -
*
-*
* -- - -
::st •
---- -+ - - ~
* {} 4. *** f
e. |- - * * * |- * * * |
|- ? |- |- :
|- |- , : , :
* ** - * - - - - , : Ccii
: f ſin C,
* . . . gºT3 ;; *
|
* - |- * |-
*
|-
{- a *
, -* *
f :* * - · ;* ;* *-* - ,- -:* :* r* *~* <:*.
s' - -
|-
- - - -
iO ,a
f: O ,
•
, ?" : C :
*3 * * - -
,
*
,
-, «- - * - - -
-- *** |-
-
~, |- |
* ; :: : i f . ,f { *
|- * *
-y ** f: ? *«
*- * * |- - - *--- * - : - |- -3
|- |
~. *-
=-- *
» * 4
*
« !
I C) I
C H A P I T R E x Hv. ·
L E S T A L E N T S. . .
Je revins à mon premier ob
jet: &, après avoir cherché long
temps avec le miroir, j’apperçus
un petit efpace de terre qui me
parut comme enveloppé d’un
nuage. Il en fortoit un bruit con
fus, affez femblable à celui d’u
ne mer qui obéit en murmu
rant aux efforts du reflux. Un
rayon de foleil eut bientôt dif
fipé les vapeurs, & je reconnus
Babylone, : »
G iv
I o4 L Es : FA L E N T s;
a : » Le génie de Babylone n’at
» tendit pas le jour marqué, &
» fe rendit le premier de tous
» au palais de Jupiter. Il fe pré
» fenta avec cet air de confian
» ce qui lui est naturel; il débita
* je ne fçais combien de com
» pliments. tournés le plus jo
» liment du monde, & fit des
» préfents à la cour célėfte avec
» cette grace qu'on lui connoît.
T 08 Les TA L e N r s.
* Il commerça, acquit beau
* coup, dépenfa encore plus, &
* devint plusriche & moins aifé.
#
-- , , , - - - To9
-
C H A P I T R E XV.
LE GOUT DU SIÉCLE.
-- - -- •••• • • • • • ~ . . . --
f: - , rr; * * * ., * , , ... ~ ~ Fiiii es
. . . . . Słc') A : |
- as as №r, des », “”
* *:C#:#| - - - - .{ --
2 : ld.: , 7;: < ......:i:i' e
C
: 3
- ->
- C “+” ·
*
:: | ſo se
-- --- - - - - - --
*
r13
--
№i -
C H A P I T R E xv I.
LA R A IS ON NEUS E.
|
r 14 LA RA i s o N N EU s E.
» compter fur moi. Nous autres
» femmes, il faut que nous de
sº vinions les chofes, on ne nous
» les dirajamais nettement: mais,
» avec un peu d'attention , il
» nous eft aifé de voir où nous
» en fommes. Pour moi, j’ai ré
» fléchi fur les maximes des hom
» mes fages de nos jours, &
» voici ce que j’en ai conclu.
» Il n’y a plus que le petit peu
» ple qui s’occupe encore d’une
» vie future; les peines & les ré
» compenfes de l'autre monde
» font des mots vuides de fens,
» que le bon ton a profcrits de
» puis long-temps. Les animaux
» & les hommes (les premiers
LA RA1 so N N EUs E. I 1 ;
» d’entre eux) font faits pour fe
» laiffer guider par les fens; l’in
» térêt feul des paffions doit les
» faire agir. Que chacun écoute
» au fond de fon coeur ce que
» la nature lui infpire, qu’il fuive
» ces infpirations; c’eſt la voie
» du bonheur. D’un autre côté,
» la fociété ne peut fubfifter fans
» loix, & ces loix ne peuvent
» être d'accord avec les paffions
» de tous les citoyens. Ceuxdonc
» qui ont placé leur bonheur
» dans ce que la loi défend ne
» peuvent fe conduire avec trop
» de circonfpe&tion. Il faut que
» fans ceffe ils marchent dans
» l’ombre; le myſtère doit fui
Hij
}
r r 6 LA RAI so N N E vs E.
» vre leurs pas, & jetter fon
» voile fur toutes leurs ac
» tions : en un mot, ils peu
» vent faire ce qu’ils veulent,
» pourvu qu’ils paroiffent faire
» ce qu’ils doivent. Voilà, chè
» re comteffe, les principes que
» j'ai recueillis de la philoſophie
» du temps. Je ne te parlerai
» point de leur influence fur
» ma conduite. Peut-être fuis
» je, en effet, ce que je pa
» roîs être : mais je ferois tout
» autre, que je paroîtrois tou
» jours tellec: .
s?
3.
¿
¿R.?
ºrº . é.
a
S$
“
Hiij
|
r I8
E= -T m. --
C HA P I T R E XVII. -
LE S C R O C O D I L E S.
*
1 2 ổ les Croco DILEs.
|
#:;.
kệ* �
1 28
C H A P I T R E XVIII.
LA T E M P E S T E.
A quelques pas du globe
bruyant, la terre creuſée pré
fente, dans une profondeur, qua
rante ou cinquante dégrés de ga
zon. Au pied de cet efcalier, fe
trouve un chemin pratiqué fous
terre. Nous entrâmes; & mon
guide , après m’avoir conduit
par quelques détours obfcurs,
me rendit enfin à la lumière.
í
LA TE M P E s T e. 13 t
que paffer à un autre : je m’ap
prochai avec un nouvel empref.
fement; mes yeux étoient tou
jours féduits, & ma main putà
peine me convaincte qu’un ta
bleau m’eût fait illufion à tel
point. -
{
LA TE M P E s T e. 133
enduit vifqueux, retient les fimu
lacres. Le miroir vous rend fidé
lement les objets , mais n’en
garde aucun; nos toiles ne les
rendent pas moins fidélement,
& les gardent tous. Cette im
preſſion des images eſt l'affaire
du premier infant où la toile
les reçoit: on l'ôte fur le champ,
on la place dans un endroit obf
cur; une heure après, l'enduit
eft defféché, & vous avez un
tableau d’autant plus précieux,
qu’aucun art ne peut en imiter la
vérité, & que le temps ne peut en
aucune manière l’endommager.
Nous prenons dans leur fource
la plus pure, dans le corps de
- - I. iij. . .
134 L A TE M P es r e.
la lumière, les couleurs que les
peintres tirent de différents ma
tériaux, que le laps des temps
ne manque jamais d’altérer. La
précifion du deffein, la vérité
de l’expreſſion, les touches plus
ou moins fortes, la gradation
des nuances, les règles de la
perfpeĉtive; nous abandonnons
tout cela à la nature, qui, avec
cette marche fûre qui jamais ne
fe démentit, trace fur nos toi
les des images qui en impofent
aux yeux, & font douter à la rai
fon fi ce qu’on appelle réalités
ne font pas d'autres eſpèces de
fantômes qui en impofent aux
yeux, à l’ouie, au toucher, à
tous les fens à la fois.
1 A TE M P E s r g. 13 ;
L’eſprit élémentaire entra en
fuite dans quelques détails phy
fiques; premièrement, fur la na
ture du corps gluant, qui in
tercepte & garde les rayons; fe
condement, fur les difficultés de .
le préparer&de l’employer; troi
fièmement, fur le jeu de la lu
mière & de ce corps defféché :
trois problêmes que je propofe
aux phyſiciens de nos jours, &
que j'abandonne à leur fagacité.
Cependant, je ne pouvois dé
tourner les yeux de deffus le ta
bleau.Unfpestateur fenfible, qui,
du rivage, contemple une mer
que l'orage bouleverfe, ne ref.
I iv
*
1 3 6 1 A TE M P es T. E.
fent point des impreſſions plus
vives : de țelles images valent
les chofes. - -
|
1’37.
_
CHAPITRE XIX._
.
L A G A _L' E R 1 E
0. U , M .
L A GA È E R I E. 141
trente rois qui commandèrent
enfuite , un feul ferma les
plaies du genre humain, laiffa
refpirer l'Afie, & gouverna en
philoſophe : fon nom eft pref
que inconnu. L’hiſtoire, qui ne
s’échauffe qu’à l’afpećt des cho
fes d’éclat & des événements
tragiques, fe refroidit fur ces rè
gnes tranquilles : à peine nom
me-t-elle de tels fouverains. "
; :· · . .. . .
LA GA LE RI E. I5 3
L’Afie s’ouvrit bientôt à ces
conquérants infatiables. L’empi
re s’étend de jour en jour, &
cette puiſſance énorme accable
enfin toutes les mers & les ter
TCS COllIlllCS. -
|
1 54 LA G A L E R I E.
ros , ceux des Romains qui
fuccédèrent , défefpérant de
pouvoir faire fenfation dans le
même ordre, cherchèrent à fe
diftinguer par d'autres endroits.
Rome étoit la maîtreffe de la ter
re; il parut beau de devenir le
maître de Rome. Sylla, Marius
& quelques autres, montrèrent
qu'il n’étoit pas impoſſible de
venir à bout d'un tel projet: Cé
far l’exécuta. Ce conquérant fi
vanté, auquel on reprocha tant
de chofes, fit tout oublier par
fa vertu : vertu guerrière, qui fit
périr plus d'un million d'hom
mes, opprima fes concitoyens,
& donna des fers à fa patrie. En
LA GAL E R 1 E. I ýý
vain la république employa tou
tes fes forces pour fauver fa liber
té expirante; elle s’épuifa, & ten
dit les mains à Auguſte, qui, de
mauvais citoyen, devint le meil
leur des maîtres. - -
: : :: . . . . -
C H A P IT R E XX.
L' A U T R E c ở T É
DE LA GALERIE. - . --. . .
LE préfet reprit bientôt le fil
de fon difcours. La rapidité avec
laquelle il parcouroit la galerie
me laifſoit à peine le temps de
jetter un coup d’oeil fur les ta
bleaux divers dont il m’expli
quoit le fujet. Je ne l'avois point
encore vu, & depuis je në le
vis point parler avec autant d'ac
tion. Son vifage s’éteit enfiam
mé, fes yeux jettoient deséclairs,
& fes paroles précipitées tar
doient encore à fon empreſſe
II1€Ilt.
DE LA GAL E R 1 E. I 5 9
La langue, les moeurs, les
loix des Romains, difoit-il, s’é
toient répandues par toute la
terre. Les nations, conquifes &
policées, devenoient membres
de l’empire; & tous les peuples
connus ne formoient qu’une fa
mille. Par quelle fatalité la paix
qu’Auguste leur avoit donnée,
& qui fembloit inaltérable, fut
elle de fi courte durée? Le genre
humain ne fit que reſpirer, &
fut bientôt frappé de nouvelles
plaies. Quand Rome n’eut plus
de royaumes à fubjuguer, elle
eut desrebelles à foumettre. Dif
férentes nations, imaginant une
grande félicité ou une grande
† ốTO L’A U TRE Čór É
I 68 L’A U T R R cór#
D E LA GA L E R 1 E. I 69
Pendant les ravages d'Atti
7
la, quelques habitants d'Italie,
fuyant fa fureur, fe réfugient fur
le bord de la mer Adriatique.
Confidère dans ce tableau ces
hommes pâles, ces femmes éche
velées, ces enfants éplorés. Les
uns fe cachent entre les rochers;
les autres fe conftruiſent des re
traites fouterreines dans ces if
les défertes; quelques-uns mon
tent fur les hauteurs, & de toute
l’étendue de leur vue regardent
fi l'impitoyable conquérant,dont
|
le nom feul les fait frémir, ne
les pourfuit pas encore dans ces
plages fi peu faites pour fervir
d’habitation aux hommes. De
|
toute part, tes yeux n’apperçoi
17ø L’Avrr e cóT É
En ce temps, du fein de la
France, fortit un prince plein
de génie & de cette ardeur mi
DE LA GALERI É. 173
litaire qui, dans le calme, eût
amené la tempête ; mais qui,
trouvant l’orage formé, comme
un vent impétueux, le diffipa:
c’étoit Charlemagne. Dans ce
tableau, il réprime les Sarrafins;
dans cet autre, il fubjugue l'Al
lemagne; plus loin, il éteint en
Italie la domination des Lom
bards, fonde la puiſſance tem
porelle des Papes, & reçoit la
couronnedel’empired'Occident.
L’empire de Charlemagne ne
tarda pas à fe délabrer. Les par
tages des princes, & l'ambition
de quelques chefs, en détachent
des peuples entiers. Des empe
reurs foibles ou avares donnent
174 L’Avr R e cór É
ou vendent la liberté à d’autres.
Le refte obéit à des maîtres par
ticuliers : le fouverain garde à
peine le titre & l’ombre de l'au
torité.
A BABYLONE.
DCC. LX.
à.
w.
‘.
}fil)-
1l
w
.- nu .I.
T A B L E
DE S C H A P I T R E S.
S E C O N D E P A R T I E.
GIPHAWTIE.
****
G I P H A V T I E.
s+ co n o r rar r; r.
CHAPITRE PREMIER.
L E R E P A s. ; :
Mon zèle m'a conduit plus
loin que je n’aurois cru, ajouta
te préfet; il eſt temps de penfer
à ce qui te concerne. L’air qu’on
refpire à Giphantie eſt vif &
chargé de corpufcules actifs; il
foutient tes forces; &, malgré
les fatigues que tu as effuyées
Partie II. A
2 LE R E F A s.
dans le défert, il ne te laiffe au
cun fentiment de laffitude. Cela
n’empêche pas que tu n'aies be
foin d’une nourriture plus foli
de. Je t'ai fait préparer un re
pas, & je veux te régaler à la
mode des efprits élémentaires.
Nous fortîmes de la galerie;
& le préfet me conduifit à une
grotte, dont l'architecture étoit
fi bifarre, que je n'ofe entre
prendre de la décrire. Pour tout
meuble, j’apperçus une table de
marbre, & un fiège de canne fur.
lequel le préfet me fit affeoir. ,
« Tu as eu la complaifance de
goûter du fruit & de la liqueur,
me dit-il; tu auras celle d’affai
fonner l'un & l'autre. Les pou
|- – v
L E R E P A s. ý
dres falines qui les environnent
ont peut-être plus de vertu que
tu ne penfes. Je t’invite à en
effayer.
IỞ
C HAPIT R E II.
L E S P E P I N s.
Mos repas fini & ma leçon
prife, nous nous remîmes en
route. Profitons, dit mon hôte
élémentaire, profitons du cou
vert que nous offre cette longue
allée, & marchons vers le bof ~4
|
L e s PE # 1 N s. 19
Nous n’avions garde de né
gliger les trois pepins échap
pés à la perte totale que ve
noit de faire le genre humain:
ce n’étoit pas de quoi réparer
fon malheureux fort, mais c’é
toit de quoi l’adoucir. Dès que
nous fûmes de retour à Giphan
tie, ňous tînmes confeil fur ce
que nous pouvions faire en fa
veur de l’humanité fi terrible
ment déchue. La plupart pri
rent leur département dans les
éléments, pour les gouverner,
&, autant qu’il dépendroit d’eux,
en diriger les mouvements, con
formément aux befoins des hom
mes. Ceux qui reftèrent à Gi
Bij
:0 Las Pairiiä;
phantiè furent chargés de met;
tre en terre les trois pepins, &
de veiller foigneufemerit à ce
qui devoir en provenir. '
- 2 1:
gm=
C H A PI T R E III.
L E V I E I L A M O U R.
Tour en diſcourant , nous
entrâmes dans un boſquet affez
vafte, au milieu duquel j’apper
çus une étoile formée par des
arbriffeaux de la plus grande
beauté. De toutes leurs parties,
s’élançoient au loin des gerbes
de matière lumineufe, où fe pei
gnoient toutes les couleurs de
l’iris. Tel le foleil, regardé au
travers des rameaux d'un arbre
épais , , femble couronné de
rayons étincellants, où éclatent
les couleurs les plus vives & les
plus variées. *
B iij
A
22 LE VIEIL AMOUR.
Le premier pepin tiré de la
pomme fatale & confié à la ter
re, reprit le préfet de Giphan
tie, produifit un arbriffeau de la
nature de ceux que tu vois. Ses
:feuilles refſembloient à celles du
myrte. Ses fleurs pourpres, ta
chetées de blanc , s’élevoient
autour de leurs tiges en forme de
pyramides. Ses rameaux étoient
ferrés, & s’entrefaçoient les uns
dans les autres en mille maniè–
res différentes. C’étoit l’arbre le
plus beau qu’eut jamais produit
la nature : auffi étoit-il l’objet
de fes complaifances. Un doux
zéphyr, agitant mollement fes
feuilles, fembloit les animer; &
LE VIEIL AMovR. 23
jamais elles ne furent emportées
par le fouffle impétueux des
aquilons ; jamais le froid des hi
vers n’interrompit le cours de fa
fève; jamais les chaleurs brûlan
tes de l'été n’épuifèrent fes fucs:
un printemps éternel règnoit au
tour de lui, Cet arbre unique
étoit l’arbre d’Amour.
Sł #
: já
*:C#C#
7 :)R
*$
C iij
33
: C H A P I T R E V.
L A V O L U P T É. .
Nous fortimes du bofquet. Les
hommes, dis- je au préfet de
Giphantie, vous doivent beau
coup de leur avoir confervé l’a
mour, tout dégénéré qu'il est.
Si vous fçaviez quel vuide il y a
aujourd'hui chez eux! Leurs plai
firs font fi rares, que le moindre
de tous doit leur être infiniment
précieux. L’amour ne fait plus
leur bonheur; mais au moins les
amufe-t-il. Que feroit-on à Ba
bylone, fi cette paffion ne met
toit en jeu toutes ces ſtatues am
LA V o L v P T É, 39
bulantes que vous voyez s’em
preffer autour des femmes? On
foupire, on fe plaint, on de
mande, on preffe, on obtient,
on eft heureux ou dupe; ce qui
revient prefque toujours au mê
me : mais le temps paffe , &
c’eſt beaucoup pour les Baby
loniens,
» Au commencement, reprit
» l’efprit élémentaire, la Nature,
» toujours attentive au bien-être
» des hommes, produifit la Vo
» lupté. C'étoit une beauté fim
» ple & naïve, mais pleine de
» ces attraits qui caractérifent
» tout ce qui fort des mains de
Q iv
r
. -
40 LA V o L v P T É.
» cette mère commune de tous
» les êtres. La Nature lui donna
» une coupe d’or, & lui dit: Al
» lez parmi les hommes; puifez
» le plaifir dans mes ouvrages;
» préfentez-le fans diffinétion à
» tous les mortels; & défaltérez
» le genre humain, mais ne l’eni
* vrez pas.
*
LA V o L U P r É. 41
» empreſſement. Comme elle fe
» donnoit fans fe livrer, elle fut
» toujours chérie , & n’infpira
» jamais de dégoût. Les hom
» mes, qui n’étoient point éner
» vés par les excès, confervoient
» dans l'âge le plus avancé toute
» la fraîcheur de leurs organes;
» leur goût ne s’ufoit point; &
» la vieillefſe puifoit encore dans
» la coupe de la Volupté.
|
.
42 LA V o L v P T É.
$ð
44
smìmme
ºmnis
C H A P I T R E VI.
JEUNESSE PERPÉTUELLE.
Il n'est point d’endroit, pour
fuivit l’eſprit élémentaire , où
ces diffipations, imaginées pour
remplacer la volupté pure, foient
plus néceffaires qu’à Babylone;
auffi n’est-il point d’endroit où
elles foient plus fréquentes.
JevNEsse PERPÉTUELLE. 49
» Ce que je retrancherai de mes
-
» dépenfes , je le mettrai aux
» mains de ce neveu, qui entre
» dans le monde, & devroit y
» entrer avec un certain éclat.
» Puifque je meurs en détail, il
» doit auffi hériter en détail cs.
2 - -i-, . : · º --
#
4 ::::
: : : : :.
*: # # # ex ' ,
*:};:ğx
;/ 4 . # |
4- 5 :
«… - , : * * --
* - ,
53
C H A P I T R E vII.
LES D É MANGE A IsoNs.
Nous marchions au Midi. De
ce côté-là, Giphantie fetermine
en pointe, & forme un petit pro
montoire, d’où la vue s'étend
affez loin. Ce promontoire eft
tout couvert d’une plante, dont
les rameaux defcendent & ram
pent de tous côtés. C’eſt la pro
duction du fecond pepin. Cette
plante ne porte jamais, ni feuil
les, ni fleurs, ni fruits: elle eft
formée d'un nombre infini de
filets très-minces , qui fortent
les uns des autres.
- D iij
54 Les DÉMANGEAIsoNs.
Confidère attentivement ces
filets, me dit le préfet. Vois-tu,
à leur extrémité ,,de petits corps
ün peu allongés, qui fe remuent
affez vivement ? Ce font des ver
miffeaux qui naiffent de cette
plante; foit que la végétation,
portée au-delà de fes bornes or
dinaires, les produife; foit qu’il
furvienne, à l’extrémité des filets,
une forte de corruption qui les
engendre. Dans la fuite , ces
vermiffeaux s’amaigriffent au
point qu’ils deviennent imper
ceptibles: mais, en même temps,
il leur naît des aîles; &, deve
nus moucherons , ils s’envo
lent & fe difperfent fur la terre.
Les DÉMANGEAisons. 5 ;
Là, ces moucherons inviſibles
s’attachent aux hommes, & ne
ceffent de les piquer d’un ai
guillon dont la nature les a pour
VUIS.
|
***
67
= –a. - - =a
C H A P I T R E VIII.
1. Es co MPENSATIO Ns.
Vous me dites là des chofes
très-fingulières, repris-je. Mais
je ne conçois pas pourquoi les
efprits élémentaires élèvent &
cultivent cette plante avec tant
de foin. Eux, qui nous veulent
tant de bien, ne nous en font
guère à cet égard. Voir les hom
mes, aiguillonnés au vif, s’agiter
comme des fous, & perdre tête
pour des chimères, c’eſt une
chofe digne de pitié, felon moi;
mais peut-être eft-ce un amufe
E ij
678 Les CoMPENSATIoNs.
C H A P I T R E IX.
N I L A D M I R A R I.
Use fi grande timidité, reprit
le préfet, me furprend. Dis-moi,
je te prie, quelle idée te formes
tu de ce qu’on nomme gran
deurs, dignités, premiers rangs
de la fociété?
Je fuis en ce monde, répon
dis-je, comme un voyageur qui
paffe & regarde curieufement
les objets; mais qui n’en defire
aucun, parce qu'il ne fait que
paffer. Au furplus, fi l'on efti
me les chofes felon la mefure
WIL A D M I R A R 1. 73
de bonheur qu’elles procurent,
je ne penfe pas qu’on doive faire
grand cas des places les plus fu
blimes; car, je vois qu’elles ne
font la félicité de perfonne, &
qu’elles font le malheur de beau
coup de gens.
:
Et les richeffes, ajoutale pré
v.
fet ?
-
78 WIL A D M IR A R 1.
Et voilà préciſément pour
quoi tu n’en avois rien à crain
dre, interrompit le préfet. Tu
n’admires rien; il fuffit: ces mou
cherons ne peuvent avoir prife
fur toi. La přemière impreſſion
qu’ils doivent faire eft une im
preſſion d’étonnement & d'ad
miration; s’ils ne la font pas,
leur coup eſt manqué. Mais,
dès que l'admiration s’eft intro
duite, elle eſt bientôt ſuivie par
la foule des paffions. Car, dans
l’objet qui étonne, on imagine
un grand bien ou un grand mal.
De-là, l'amour ou l’averſion, &
tout ce qui les accompagne; le
defir inquiet, dont l’oeil ne fe
WIL A D M I RARI. 79
ferma jamais; la joie, qui em
braffe fon objet & le dévore; la
trifteffe qui, de loin & la larme
aux yeux, contemple & appelle
le fien; la confiance, qui va tête
levée & fouvent fe précipite; le
défefpoir, que précède la crainte
& que fuit la fureur, & mille au
tres. Si tu veux refter à couvert
de leurs attaques, garde copf
tamment ton fens-froid, & ne
pers jamais de vue le grand prin
cipe, Wil admirari.
Fð
80
C H A P I T R E x.
L’ARBRE FANTASTIQUE.
APR és avoir marché quelque
temps fur les bords d'un ruiſſeau,
nous entrâmes dans une belle
& vafte prairie. Elle étoit émail
lée de mille fortes de fleurs, dont
les couleurs variées fe confon
doient dans le lointain, & for
moient des tapis éclatants, tels
que l'art n’en a jamais tiffu.
Cette prairie eſt terminée par
une pièce de roche, comme par
un mur. Un arbre s’y étendoit
en efpalier, & ne s’élevoit guère
qu'à hauteur d'homme, mais fe
prolongeoit
L’ARBRE FANTASTIQUE. 8 †
prolongeoit à droite & à gauche
fur toute la longueur de la ro
che, c’eſt-à-dire, plus de trois
cents pas. Ses feuilles étoient
très-minces & très-étroites, mais
en fi grande quantité, qu’il n’é
toit pas poſſible d'appercevoir
la moindre partie, ni du tronc,
ni des branches, ni de la furface
du rocher qu’elles occupoient.
|- * : - - - : - - f; |
*
|-
* , * * * - :
|-
.. . . . .
?
#::
#:::::: } -
* *
:’
:::::::::::
* *# SA,
: :»
:
· : ·
*-*
|-
#*
, ’
* } a , :- ,
- r r |
* } .
89
z *** -
C H A P I T R E XI.
L E S P R É D I c T I o N s.
Voila à peu près, ajouta l'ef
prit élémentaire en me mon
trant l’étendue de l’Arbre fan
taftique, voilà des feuilles pour
un fiècle de vues, de découver
tes & d’écrits. Tu peux exami
ner, à ton aife, ce qui, pendant
tout ce temps, tourmentera plus
d'un million de têtes. . .
ai f :: :: ..) .…..vii
- Je m’approchai, & m'óccupai
long-temps à contempler cetar
bre merveilleux, fur-tout celles
de fes branches fur lefquelles vé
y o Les PRÉDicrions.
gettoient les fciences; &, après
en avoir confidéré jufqu’aux der
niers rameaux avec toute l'at-
tention & l’exaĉtitude dont je
fuis capable, je me crois fondé
v |- - - |- |
- * · *
LEs PrĚDICTIoNs. 99
fur les queſtions les plus com
pliquées, les plus obſcures & les
plus importantes, avec une con
fiance qui étonnera; mais, en
décidant tout, ils n’éclairciront
rien. La modeſtie la plus re
cherchée compofera leur exté
rieur; intérieurement ils feront
dévorés par l’ambition. Et, de
tellesgens, nous les nommeronş
philofophes! C’eftainſi que neuş
donnons le nom d'étoiles à ces
feux légers qui s’allument quel
quefois dans la haute région de
l'air, tracent un fillon lumineux,
& dans l’infant s’évanouiffent.
ợr
rror,
C H A P I T R E XII.
LE SYSTÉME.
D'un nombre infini de plans
de différents ouvrages que je
vis tracés fur les feuilles de l’Ar
bre fantaſtique, je m’en rappelle
trois. Dans l’un, il eſt queſtion
d’un fujet très-abſtrait, mais trai
té fi fingulièrement, que peut
être on ne fera pas fâché d’en
trouver ici une légère efquiffe.
Hij
r r 6 L e str srz s M es -
: » L’ame univerfellé doit s'unir
» & fe féparer dans les mêmes
» circonfiances : mais, elle ne
» fe fépare pas toujours fans re
» tour. Quê, dans un homme
» quelconque, le mouvement
- effentiel à la vie, après s'être
* totalement éteint, vienne à fe
» renouveller, chofe que tout
» phyſicien fçait très-poſſible ;
» qu’arrivera-t-il ? L’ame rai
= fonnable, qui s'eſt retirée au
sº moment de l’extinêtion du
» mouvement vital, ne peut re
» paroître: mais, l'ame univer
» felle, préfente à tout, ne peut
» manquer de s’unir de nouveau
» à ce corps organique remis en
te Fr.sr es Me. rr7
* mouvement. Cet homme eft
» mort; car fon ame s’eft fé
» parée de fon corps. Il conferi
> ve pourtant l’air d’un homme
» vivant; parce que l'ame uni
s verfelle s’eſt rétablie dans fori
» cerveau, qu’elle dirige telle
» ment quellement. -
s
- * |-
* ... . . . - -<
* -
$s
† 26"
C H A P I T R E XIII.
É PITRE AUX EUROPÉENS.
Le fecond des ouvrages, dont
je me fouviens d'avoir vu le
plan tracé ſur les feuilles de
l'Arbre fantastique, étoit rédigé
en forme de lettre adreffée à
toutes les nations de l'Europe,
En voici le précis, -
» Peuples puiffants d'Europe;
» peuples polis, ingénieux, fça
» vants, guerriers, faits pour
» commander aux autres; peu
» ples les plus accomplis de la
» terre; les temps font arrivés:
*Pirrr Avx EvroPÉENs. r 27
» vos vues profondes fur le bon
> heur des hommes ont frusti
s fié : vous jouiffez enfin; & je
» vous en féclicite.
$.
x :$g.
*:C#C#
7 :R
74 †
C H A P I T R E XIV.
L E S M A X I M E S.
*.
C H A P I T R E XV. a
LES THERMOMÉTREs. '
Comme j’examinois attenti
vement une feuille de l’Arbre
fantaſtique, fur laquelle j’apper
cevọis de grands projets & de
petits moyens; j’envis une autre
amincie & recoquillée au point
d’être prefque inviſible, fe dé
tacher d'un rameau voifin, &
difparoître tout-à-coup. Au mê
me instant, je fentis une légère
piqure au front , & une forte
d'inquiétude dans la tête que
je ne fçaurois bien exprimer, &
qui depuis ne m’a point quitté.
K ij
r43 Les TherMoMÈrres.
Surement cette feuille aurà
pénétré dans mon cerveau , &
travaille à s’y développer; quel
que nouvelle invention en ré
fultera tôt ou tard. Je commen
ce même à foupçonner dans quel
genre; & je crois que c’eſt une
affaire de méchanique. La voici,
fi je ne me trompe.
|
|
Iýý
C H A PIT R E XVI.
L E S L E N T I L L E S.
,
Les petites loges du fruit phi
lofophique font pleines degrai
nes tranſparentes comme le cryf
tal, rondes & applaties comme
une lentille, mais infiniment
plus petites. Quand le fruit eft
1;8 Les LENTILLEs.
mûr, il fe rompt; les loges s’ou
vrent, les graines fortent. Mais,
comme elles font fort légères,
elles reſtent fufpendues en l’air,
& le vent les emporte de tous
côtés fur la furface de la terre.
-
: , |
Les LENTILLE.s. I 62
mais auffi il êft à couvert dè
toutes ces petites mortifications
qui les chagrinent fi fort, & je
crois qu’il y gagne. |
|
*
* * + *
|- |
|- , :,, '' z
| -
|-}|
|
| }}
|- |-
--
- - |- |
|
- - *
! - |
|
* . . . . . } | .- -* .*
• ·
|- r } * * * * * * , **,
R • | ** -- -- *
|
- * |
|-
|- |-
- *
|
|- - „! .
|- ; * . |-
}
4.
|
|- ~ |
f . . i‘.
.3 7
-'C H A P7’Ing'R E, XV»II.
‘CHEMÏN sous TERRE.
IL me relie une chofe à te faire
voir , pourfuivit le préfet de Gi—
phantie: prépare tes yeux & tes
oreilles, _& _neät’effraye de rien.
, l
, ‘\
Le ruiiï’eau ,p.dQnt nous avions
fuivi les bords"pour arriver à
l’Arbre fantafiique , en reçoit
plufieurs autres à droite & à gau—
che; ôc, comme s’il abandon
noit à regret un il beau féjour,
’ après avoir formé mille plis tor—
tueux dans la prairie, il s’élargit
confidérablement en la quittant,
JL
CHEMIN sovs rears. I 65:
& coule lentement vers fonem--
bouchure. En cet endroit, un.
foupirail, formé par la terre en
trouverte, le reçoit & le tranf
met dans des canaux fouter
reins.
F I N.
‘1 .7 1....m .1 ,v'qrv“
"-v
.- - ._....1
t
[Î-'||Î,IFIII
o
I
\
{.|||I
.\
y‘rlnll
tu
:
----
==-------
|
v.
|
|-
|
|
••
|
-- -
|
*
• Nationalbibliothek
|-
|
īīīī|Illllll
5
|
-,
*
F
v
|
|
|
v.
|
|- |-
~ -
-
------ – -
** -
|
| Österreichische Nationalbibliothek
+Z156091104
F
i |- |
|
|- |- |
|
|-
|- «
.*
|-
,
|
" < |
|
-
|-
|
|
|- |-
|-
|
|-
|
|- |
|- |
|-
|-
-
\,
|-
|- |- |- |
/ *
|- |
|-
|- v *
|
|- |- |-
|
|- |
|-
|- |
|-
|
v |- -- |
|-
^~ ~
|-
|-
*
«
|-
-* |
*
|- *
|-
|-
|
- W |
|
*
}
|-
*
|-
|
|-
\ |-
|
| v |
*
|-
|-
|- | }
|-
|
*
|- |
|- |
* |
x
|
|
|-
| )
- -
|
---- ----
|- ------
|- x . «. * -:- - |
- |- t. |- |- |
: •
*
-, |- | |
|-
|- |-
* v
|- |
|-
|- *:
|- ^~ |- ---- |- 3– -
/*
$s;
\ , erreichische Nationalbibliothek
|
*
īīīīīīīī |-
-r- - - - -
*
F
*
-
?
-
~ * v.
*
*
*
|- *
|-
}
|-
|
|-
|
|
|- -
-
|
-
/
|-
|- * -
|- |
: |
--
1.
|
|
|