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REVUE BIBLIQUE
Typorrraphie Firmin-Didot et C". — Paris.
NOUVELLE SERIE TREIZIEME ANNEE TOME \III
REVUE BIBLIQUE
PUBLIEE PAR
PARIS
LIBRAIRIE VICTOR LECOFFRE
J. GABALDA, ÉDITEUR
RUE BONAPARTE, 90
1916
QIELQ[IES PROCÉDÉS LITTÉRATRES
DE SAINT >[ATTIIIi:i]
miraculeux. Voyez les cinq grands discours qui forment comme cinq
chapitres de la doctrine sur le royaume de Dieu L'esprit du nouveau
:
tionnés par saint Matthieu api'ès le sermon sur la Montagne dans ses
chapitres viii et ix, sont réunis dans un dessein tout autre que la suite
n'a pas rattaché ces faits entre eux par des transitions ayant une
valeur de précision historique (1). On ne le voit pas non plus s'arrê-
ter d'ordinaire au détail des événements saint Marc ou saint comme
Luc : il se liAte d'arriver,ou à la parole de Jésus comme à la chose
essentielle qui dévoile le sens du fait, ou" à la prophétie qui rattache
le fait cité à l'idée principale de son évangile. Avec de telles préoc-
(I Les fiirimili^s vaRUCs cmnnx; c/i cr linips-hi, nltirs. voici (pie, <'k-. soiil |iluliil
< (tinme un ii lio do la |irA(lirntinii n|iiislnli<|iir |>riinitivc. dans l,i(|(i('llo on (oinnKMKail les
f«its vn ro|«irlanl la pensée des ainliteurs a ri|>o(|iie ^irnérale de l.i vie pulilique de
Jj'sus-Chrisl.
MUELuLi'S im;o(.kih:s i.iïTi:fiAmi:s df. saint MViTiiiiiii. 7
(1) Le récit du second évangéliste (xiv, 4) est à peu de choses prés identif|ue. Cependant
au lieu de la formule générale ttoàXoj, « très cher », pour le prix du parfum, il donne une
appréciation précise : trois cents deniers.
8 HKVUE BIBLIQUE.
ajoute : <( Il dit cela, non par souci des pauvres, mais parce qu'il était
voleur et qu'ayant la bourse, il dérobait ce qu'on y mettait. » Dans
ce lécit le quatrième évangéliste est beaucoup plus précis que le pre-
mier : il désigne le nom de la femme, Marie; le prix du parfum,
de la réflexion intéressée. Judas, le disci-
trois cents deniers; l'auteur
ple habitué à compter, qui, d'un simple coup d'œil, a su apprécier
la valeur du parfum. Eu regard, saint Matthieu parait bien imprécis;
il do formules générales.
se contente
Pour concilier les deux récits, nombre de commentateurs ont pensé
«juc Judas ayant exprimé à ses voisins de table le mécontentement
que lui causait la profusion faite sous ses yeux, plusieurs autres
disciples auraient fait écho à sa plainte. Saint Jean mentionnerait
spécialement Judas comme étant l'instigateur de ces murmures, et
|)ropositi<»n que vient faire Judas aux princes des prêtres do leur
livror colui dont ils rh-siraiont tant se débarrasser. Va\ mettant le
ne prétend pas que tous dans la populace, que tous parmi les mem-
bres du sanhédrin insultaient le Sauveur mourant; il en est de même
pour les voleurs. Selon son habitude le premier évangéliste va au plus
court et, dans le dessein de rappeler seulement les injures subies par
Jésus dans son dernier supplice, il passe rapidement en revue et
d'une façon générale les catégories d'insulteurs. Saint Luc, qui entre
en plus de détails nous montre comment en réalité
et précise les faits,
(1, Saint Marc parle ici comme saint Matthieu : son récit dépend étroitement de la
ne vint pas lui-même le tr(juver, mais lui envoya ses amis? Ne laut-il
pas (pi'unc observation attentive nous fasse comprendre que S. Mat-
thieu a employé
une figure de langage assez haltituclle?... Nous
ici
[\) l^s Père-, un les coiiiiiirnl.il('iir> .iru iens qui sniM-nl l'oiiininn df s.iiiil Auniislin, scjnl
plus nornbri'iix (|tir Icn parli^aiis du sontiiiHtil dr- s.iinl Chryso^lniiM-.
QUl^LUUES PUOCliDKS l.ITTKHAIliKS l»K SAINT MATTHIEU. 13
Dans saint Jean, Jésus salue Marie en l'appelant par son nom.
Dans S. Mattli., Les saintes femmes iy.paTr^sav, saisirent les pieds
de Jésus, les tinrent embrassés. Dans S. Jean, Jésus, comme s'il invi-
tait .Madeleine, tenant ses pieds embrassés, à cesser de le retenir,
Ce sont donc les mêmes traits de part et d'autre. Mais saint Jean
reproduit la scène dans toute sa netteté et fraîcheur primitive, tandis
<juc le récit de saint .Matthieu est comme un sommaire de cette
même apparition les contours particuliers se sont un peu efîacés
:
(\) Sflon la roiitume orientale, les saiiilps fi'inmcs sont rcpH-Ncnlcos |>roslerni'<'s disant
Jésus el Irnaiil sos pieds emhiassi'S. Cf. IV lien., iv. '.?:. SainI .Lan ^n|tp(^sn la inrim- altl-
liide rhtv. .Madeleine; tenant li-s |lied^ du divin Mailp' fml»ra>M^, eile clierdie à le relenir.
Mï; i-Tu/. ri' n «-si [Kis seulein» ni »ab>lenir de inclire la main mit une chose, mais aussi
retirer la main i|ui a déjà saiM
OLKLOLtS l>ROCi:i)i:S LlTTliliAlKES DE SAINT MATTHIEU. i:\
dans cette première partie des récits sur la résurrection est singu-
lièrement facilitée. Les saintes femmes, dès l'aube du premier jour
de la semaine, s'empressent d'aller au tombeau pour compléter lem-
baumement et rendre les derniers devoirs au Maître bien-aimé. En
arrivant, elles constatent que la lourde pierre qui fermait le sépulcre
a été roulée, que l'entrée est libre et que le corps du Christ n'est
plus là. Madeleine, tout émue, croyant à un enlèvement, quitte
précipitamment ses compagnes et court avertir Pierre et Jean, qui
ne devaient pas alors se trouver avec les autres apôtres. Ces der-
niers, qui avaient fui dès l'arrestation de Jésus dans le jardin de
(retlisémani, s'étaient cachés ensemble dans une maison de Jérusalem,
celle où le Christ les trouvera réunis au soir de la résurrection, celle
sans doute où s'était célébrée la dernière cène. Mais Pierre, honteux
de son reniement et de sa lâcheté, s'était retiré daus la solitude,
loin de tous les regards, pleurant amèrement
Il pouvait sa faute.
s'être caché dans quelque maison connue de Jean, où celui-ci l'avait
iO HKVl !•: lUIJLInl L-
retrouve' apit-.s .sou ictour du Calvaire. Saint Luc (\\iii, 3ï) constate
que l'ierro notait pas avec les autres disciples, quand Jésus ressus-
cité lui apparut. .Mais Pierre et Jean étaient tous les deux ensemble,
lorsque Madeleine viut leur annoncer ce qu'elle avait constaté au
sépulcre.
De leur côté, femmes, restées au tombeau après le départ
les saintes
-le Madeleine, avaient reçu des aniies l'annonce que le Christ était
(die aussi, mais plus tardivement que les autres saintes femmes,
(1) Bien entendu, le second évangéliste en suivant son dessein n'avait pas à relever,
jcomine le premier, ce qui concerne la garde du tombeau et la mauvaise foi des Juifs
xxvm, 2-4 et 11-15).
(2) S'il y avait ol [iév, ol os, il y aurait alors un partage, dans le sens de ceux-ci, ceux-là.
REVUE BIBLIQUE 1916. —
N. S., T. XIII. 2
18 l'.KVLK lUBI.lU'l^l-^-
"Ir.jcj;, que Jésus leur avait indiquée, itbi constituerai illis Jésus. »
On ne traduit pas à la montagne que Jésus leur montra dans le
:
Ipxli's, l'iiiir no citer que Ur Nonvp.iii Tr^tanicnl un |»enl voir Lnr., xix. 1.".; wiv. 1; Jo;in.,
le vrai royaume : avec ces deux idées qui forment le dessein de son
évangile, il n'oublie pas ici, comme dans le reste de son œuvre,
de montrer la mauvaise foi des juifs, qui par leur infidélité s'excluent
eux-mêmes de ce royaume.
tous : -"^car ceci est mon sang, le sang de la [nouvelle^ alliance, qui
est répandu pour la multitude en rémission des péchés.
« -'•
Je vous le dis. je ne boirai plus désormais de ce fruit de la vigne,
(1) Vient ici rallusioii à celui qui rievait le trahir (v. 21-25).
•20 MME 151IUJQUE.
avec lui. *' Et il leur dit : .l'ai vivement désiré de manger cette pàque
avec vous avant de soufTrir. ^^' Car je vous dis que je ne la niang-erai
jplus] (1) jusqu'à ce qu'elle soit accomplie dans le royaume de Dieu.
'^Et ayant reçu une coupe, après avoir rendu grâce il dit Prenez et :
1 Les m»s. N A IJ C, e( f|tiel(|ucs aulns imporlanls, omeUpnl oùxeti devant oj (if, ^iyu).
On a dit t\ue les co|>isles laiiraifMil inséré pour (aire dire à .Ifsus <|iie celle pAciiic qu'il inan-
geail avec ses disciples scrail la dernière, tandis (|ue rox|irossion : je ne la mniigrrai /ms
ifitelle ne soif (iccnmplic ilrins le roiiaumc de DUti indique plutôt que Je-.us n'a [tas
j>ar le .lens de la phrase, sans quoi le mot y^P n'aur.iit j^lus de si;:nilication et on ferait
dire à .lesus une clirtse sin;!ulicre : J'ai viv<'ment désiré de manger celle j'Aque avec
vous, avant de soufTrir, rnr je ne la man^ierai pas... Au contraire a\cc o-jxeti tout se suit
Irei nalurelleinenl : " J'ai vivement désire^ de man;;er celte |âque avec vous a\ant de
soutirir,car je ne la mangerai plus ju.si|u'a <c qu elle soit accomplie »; c'est-à-dire : J'ai
vivement désiré de manger celle |)àque avec vous, car c'est la dernière ici-has. De plus
l'omission de oùxeTt se comprend aussi facilement que l'adililion, ('lanl donné la ressem-
Idance des deux finales ÔTi et o'Jy.ETt. Kniin le veisel 10 forme une sorte de p.tialléli-me avec
le verset \'.i, où on lit : Je ne boirai pas désormais ju.\(/ii'a etc., donc je ne Itoirai plus
après la circonstance présente. Comme nous montrons dans notre étudi-, par Icn paroles
le
des veL^et*. 10 et ly^ le Chrisl ne veut | as dire autre chose que c'est ma dernière pA(|ue,
c'esl mon dernier repas. Il prend donc ce repas.
OUPXQUKS PROCI-iDÉS I.ITTliUAlRKS DE SMM MATIIIIKI. 21
(1) Saint Marc, nous l'avons vu, a la même disposition et presque les mêmes expressions
que saint Matthieu.
:)-2 RKVUE l'.lBI.lL'Ll!:.
Apivs avoir dit que Jésus et ses disciples se mirent à table pour
niangei' la pàque, saint Matthieu ne fait allusjon à aucune partie du
repas pascal proprement dit. Il ne retient de la dernière pAque du
Sauveur, que le pain changé au corps du Seigneur, et le vin changé
en son sang. Ce rite nouveau, étant l'essentiel, résume pour lui tout
le repas. Comme il ne parle du vin (ju'à pro[)os de la coupe changée
«'11 sang, force lui est bien de rattacher h cet endroit la réflexion du
Sauveur, que nous trouvons plus naturellement placée par saint Luc
au début du repas, au moment où le rite pascal amenait la distribu-
tion de la première coupe et la bénédiction qui l'accompagnait.
I^e Sauveur annonçait à ses disciples que c'était la dernière fois
qu'il buvait du fruit de la vigne, que c'était son dernier repas, peu
d'instants après leur avoir dit en se mettant à table qu'il faisait
avec eux sa dernière pàque. Les deux réflexions se suivent naturel-
lement et n'ont leur place naturelle qu'au début du rej)as.
Saint iMatthieu nous a habitués à ces transpositions et à ces simpli-
fi<'a(ioiisdans le récit des faits; saint Luc au contraire nous a habitués
à une exposition plus détaillée, plus naturelle, ex ordine, selon la
promesse de son prologue.
Os procédés de saint Matthieu, que nous avons expliqués par ces
quelques exemples, répondent bien au plan de son évangile, plus
didactique qu historique. Il n'y a pas à en conclure qu en rappor-
tant les faits et les paroles du Christ, il ne tienne pas fermement k
leur vérité historique. Loin de là; il tient toujours à rauthenticité
de la parole ou du fait, mais obéissant aux nécessités de son plan
et de son but, il se préoccupe beaucoup moins des circonstances du
fait ou de la parole.
K. LF.vKSori:.
UNE PRÉTENDUE ANAPHORE APOSTOLIQUE
drais de ne pas rappeler celle que lui adressa Dom Germain Morin :
iiistonj (19ul), p. 25, y voyait déjà « tiie earliest form of the old Eucharistie anaphora ».
Dans un livre assez confus, elle avait été étudiée par R. M. \A'olley, The liturgy of the
primitive Church (1910), où la Constitution ecclésiastique égyptienne est estimée un
peu antérieure à 2Ô0 ^p. 15;, et où l'anaphore qu'elle contient est tenue pour « the type of
liturgy generally acce(jted and in gênerai use throughout the Church » (p. 80;. Funk, dans
la Theologische Quartalschrift de Tùbingen, 1898, « Die Liturgie der .Vethiopischen
Kirchenordnung », p. 513-547, rapporte les vues antérieures, Bunsen (1853), Kônig (1865;,
Probst (1870;, Hammond 1878), Kleinert (1883), Brightman (1896), et s'applique à montrer
que la Coiist. eccl. égypt. dépend du VIIl' livre des Const. apost. C'est tout l'argument
de son article.
^24 REVUE lilBLIQUE.
ment un fout ([lie l'on pris habitude do désigner sous h^ nom i\v
;i 1
I C. Haï sciikn, dans lu Thcolofjisrhr Henie. V.H3. |». 32.S-330. Cf. liibliscfie /rilsclirif,
l'.n:;, p. 420.
''.) A. Vir.oiREL, |>. 22 : « fcrti'-i, il i
Dom Ca^^ini se ;;ar(li' jivcc soin de négligiT Ir moin-
dre. ri'nsci;;n»;menl, If f>liis l(''(j;ei' indice, fiminis par les doi mncnls datés, mais par unf
sorte dr si'conde vue il arrive a dé<:liilVrer la iiréhisloiri'. •
H. Tattam, en 18V8. —
que l'onginal ait été grec, on a
Nul d 'Ute
(t) Par Canones apostoloi-um, ^nims entendons les 85 canons qui se lisent à la fin du
livre VllI des Conslitulions apostoliques.
nime à dater cet npocryphe, dont Toriginal (grec; est perdu, des
environs de V75 (1).
Ces explications sommaires sont indispensables à la discussion qui
va suivre on ne saurait argumente^' sur des documents qu'on invoque
:
Post(iii;ini episcopus l'iictiis est, oinnes ci ore siio pacem dent, eum oscillantes.
iJiijconi autem ci obiationem adierant. Cumque mannm suam super oblatiouc posue-
rit et presbyteri. dieat L;ratias agens :
Doniinus ciiin oniiiihiis vobis. Kt universns populus dicat : Cluin spirilii tiio. Ki
<licat : Sursuni corda vestra. Kl popiilus dicat : llabemus ad Dominmn. Et nnsus
dicat : Gratias agamus Domino. Et universns populus dicat : Diguuni et iustuin lest/.
I'.
i'i-»7. —
Je ne inenlionne pas à lu suite les Caiioncs Hippoli/li, qui n'interessenl pas
nuire anapbore. l'unk est d'avis que tes Canones ne sont pas antérieurs au \' siècle,
loin qu'ils soient une source de la Consl. eccl. vfjypiienuf. Après les avoir crus jadis (à la
suile. lie M'' Duchesne romains et du ni" siècle, je me Miis laissé |)ersua(ler |»ar Funk, et ce
sentiment est aujourd'hui ;;énéral. Ciiiust-Stxkiilim. p. '.».ss.
(2 Kl \k. op. cit., p. 9;i lOo. Le texte de lanaphore iitamiue a la version copt»- de la
GiMtias agimus tihi ', Domine-, per dilectum lilium^ tuum lesum Christum, quem
in ultirais diebus '
misisti nobis salvatorein et redeiiiptorem, uunlimu consilii tui '.
Iste (est) verbimi, quod ex te est", per quod'omnia fecisti voluntate tua''. Et misisti
eum ^ de caelo in uterum "* virginis. Caro factus est et gestatus fuit iu ventre eiiis ".
et populum ''
tibi er(icer(»t
'"
expandendo '^ manus suas.
Passus est '", ut patientes -" iiberaret, (jui in te credunt-'. Oui traditiis est volun-
-^
tate sua ad passioneni --, ut mortera dissoheret -^ et vincula satanae-' ruinperet
et conculcaret infernum -" et sanctos educeret-' et statuta conderet -'^
et resurrectio-
Hic est sanguis meus, qui pro vobis effunditur: cuni l'aeitis hoc ^'', in commemora-
'^'
tionem mei id facielis
Suppliciter oramus te '*, ut mittas spiritura tuum sanctum super oblationes huius
ecclesiae '% pariterque largiaris ''^
omnibus qui sumunt " de eis, (ut prosit eis ad)
sanctitatem^*, ut repleaniur spiritu sancto ^'',
et ad confirmationem fidei in veritate,
''''.
ut te célèbrent '^'^
et laudent '' in (ilio tuo ^- lesu Christo in quo^* tibi :sil) laus et
potentia *''
in sancta ecclesia •'''
et nuuc et semper ''
et in saecula saeculorum. Amen.
voluntatis tuae. — 6. Iste-te eslj qui est verbuin tuum inseparabilem. — 7. quem. —
8. voluntate tua] et beaeplacituin libi fuit. — 9. eum] omiitit. — 10 matricem. — 11. Caro-
eius quique in utero Iiabitus incamatus es(. — 12. Et Et lilius tilii ostensus
filius-fuit]
est. — 13 a] ex. — 14. saactoj addit et virgine nalus. — 15. ul-tuamj qui voluntatem tuarn
conplens. — 16 populum] addit sanctum. — 17. adquirens. — 18. extendit. — 19. eum pate-
retur. — 20. patientes] a passione. — 21. qui-creduntj eos (|ui in te crediderunt. —
22. Qui-passionemj qui cumque traderetur voluntariae passioni. 23. solvat. — — 2i. dia-
boli. —
2.5. dirumpat. 26. et infernum calcet. —
27. et iuslos inluminet. — — 28. et
lerminum Ugat. — 29. manifestet. — 30. ergo] oni. — 31. egit] tibi agens. — 32. et] om.
— 33. raanducate. — 34. confiingetur. quoque] om. — —
36. quando boc facitis.
35. —
37. in-facietis] meam — —
commemoratitjnein facitis. —
38. memores. 39. eius] om.
40. hune] om. — 41. — redd. dignos habuisti. — 41. ut stemus] adstare. — 42. et sac.
d.]
t. et
f.] ministrare. — 44. S.
tibi Et petimus. — 45. in oblationem sanctae eccle-
o. t.]
siae.— 46. pariterque largiaris] in unum cougregans des. — 47. percipiunt. — 48. de iis
sanctitatemj sanctis. — 49. in repletionem spiritus sancli. — 50. laudemus. — 51. • glorifi-
cemus. — 52. per puerum tuum. — 53. lesum Christum. — 54. per quem. — 55. gloria
et honor patri et cuin sancto spiritu. — 56. ecclesia tua. —
filio et semper] om. 57.
28 ]\KME niHI.lOLE.
(1) SiiANMKKp. 4'>. pailanl de 1 aiia|>lnire. dlle (|n elle est rejnésenléc |iar le laliii «le
thèse lexls is llie fotmdaliDn of the normal annpiiora ot llie Elliio|iic Cliiinti. » A. H. Mkhi kh.
Tlie cHiinpic liturfjij. ils soiircrs, develo/tnifiit mid /ursenf /odii (Milwankee l'.U.'i), ne
m'est connu i|iie de litre.
(2) P. B. L l.uclinristie V.)\3). p. :ill-3i:. .•r':-:{:f;{.
Pcrl. l'-ijypt) and 2 (celle du Tc.sinin. Domini) on Ihe liliirnies belon^fin^ lo llie région of
Alexandria (Sarapion and ï>l. Mark) luit... Iheir inllucnre found only in llie remote
is
(2) F. E. Brioiitman, Liturgies eastern and western (1896), p. 50i-509 ; The liturgv
from the writings of the egyplian fatheis.
1,, KKVLK 151l{LIni:i:.
l.ntin : Elliiopirn :
(Jiii nnniqiiei tniderctur voluntarine Qui Iraditiis est voliiiil.itc sua ad pas-
pnssioni, \\\ mortem solvnt. -- ut vincula sioiiem. nt mortem dissolvciel. — et vin-
' !'. I)i;i:w>. arl. • .Messe i., de la Healeiicylilopardir de IIaick, 1. XII d'.io.i , j). 702 :
. In Hoin s< hon damais (also das Trisliagioii ans Jes. 6,3
Knde des 1 .lalirlninderls'
iicl.-l <len Einl<'iliin;;sformeln ans Da. 7,10 bei der Kiicliarisliefeier iii (lebraïuh war. » Cf:
jd. I iiii rsHilniiiijrn iibrr dir sog. rlemcntiiiisclic Lilinijie i lOOCi, p. i:{'». Tiiai.ihifeu-
KisiMi.Mi llandhuch I'.M:! . I. II, p. 13. C\iiiuii.-Li;r:r kuco, HcllUiniav (l'.tO!?), p. 5il.
Pour iMi' illusion au Sinutus liliirniqne dans la Pas.siu s. l'erpchuie, SnAwi.KV, p. t3H.
(3; Per .lil.iliiîii purntm liiuiii lesuiii Clirisluin : Martijr. Pohjcnrp. \\ (prière de
l'évdquc iiiartvr sur le hùclirr) : o toO àYaxrjoj -/.al iO)oYr,To-3 Traiôii; ffo-j 'Ir,*oj XpniTOÛ
raTTip. — Gralias a|?ente« libi (|uoJ nos reddidisli dif<nos iil slcimis coratn le et sacerdotio
r.M-: im{i;ti:m)Li-: anaimiouk apostolioi k . 31
stravit, et insoluta vincula disrupit» i/.aî o\ o£or,;j.£vo; -xvthç vsxpoi lÀ-jôr.jav t'ov oet^wv).
22 (p. 727) : « Quis ergo es tu, qui... de nostris vinculis omnes auferre conaris ».^
manque au grec). — 23 [p. 729) : « Eoce iani iste lesus... tirma ima carcerum con-
fregit et eiecit captivos, solvit vinctos » [le grec manque).
Conculcaret infernum ;— 22 p. 723) : « Haec videns inferus et mors... excla-
maverunt dicentes : Vieti sumus a te » (xai eùOùç ï6dr)a£v ô Aîo/iç- Èvt/.r]0/;;Acv, oja\ Tjaiv),
— ibid. I
(ibi fungamur = eO.oyw at ôtc rilîwcrâ; |j.£... to-j /agïîv ^z [xÉpo; bi àp'.6(A(';> twv [j.apTupwv,...
Èv ol; -poCTÔEyflîtrjV svwTtiov ao\> <Tri[jL£pov vi 6uc7ta... — Ut te célèbrent et laudent in puero
tuo les.li Christo, in quo tibi laus et potentia in sancta ecclesia et nunc et semper et in
saecula saeculorum. Amen = oè aîvw, <ji sOàoyôj, aï ooEâÇw, Ôtà to-j alwvCoy xal suoupavtou
àpyispÉci); 'Iy]<TOy XptcToO àyci.'!zr\xo\i ao-j na.iBô:, Si' o-j aol erùv aOTw xat Trveûjj.ati &yi'({) 9[ 86Ça
xxi vùv xal eî; xoù; [iéWovra; aiôva;. 'A[j.r,v. Cf. Cabrol-Leclerco, RelUqiiiae, p. X5\iv-
XXXVII.
(i; Peut-être y a-t-il là une réminiscence d'Isaïe, v, 14 : « Dilatavit infernus animam
suam et aperuit os suum absque ullo termino Mais le grec du texte disaïe ne suggère ».
'jpoi ou opo-jç (= (erminum= régulas, d'où statuta). Le mot terminus du latin s'enten-
drait mieux que le mot statuta de l'éthiopien le Christ a mis fin à la captivité des justes :
textes patristiques des trois premiers siècles relatifs à la descente du Sauveur aux enfers,
t't on constatera qu'aucun tle ces textes ne s'adapte à celui de notre anaphore.
32 UEVLE IIIHLlgUE.
extendens Dominns maiiuni siiam fccit si^mirn crucis siippr Adam et super omnes
saartos siios, et teneiis dexteram Adae ascendtt ab inferis. et omnes sancti secuti
sunt eiim > ... ïjXovTJaa; ô atoTr,p tûv 'Aoàu. iv Toi orjtxeîio toj araupou, touio oï ^o'.j^aa;
y.7.\ r.r.'Ji toj: -a'p'.apya? /.ai -poarlTaç xa\ aâpTupa; xa\ j:poriTopai;, zal toÛto-jç Àa^jtov â/.
foi m.
— —ty'f'i ^^
DIEU ET LE 310NDE
D'APRÈS LES CONCEPTIONS JUIVES AU TEMPS DE JÉSUS-CHRIST
1. LA CRÉATION (1).
(It Sur la création dans l A. T., cf. Owen C. Whitehouse, art. « Cosraogony », dans Has-
tings. D. B., vol. 1, 1898, p. 501-50J. — H. Zimmern et T. K. Chevne, art. « Création »,
dans l'E. B., vol. I, col. 1899, 938-954. — A. Vacant, art. Création « », dans Vigouroux,
D. B., vol. II, 1S99, col. 1101-1105. — Dans les Apocryphes, L.Gry, La créatioh en sept
jours, d après les Apocryphes de l'A. T.. dans la Revue des Sciences philosophiques et
théologi^ues, 1908, p. 277-293.
(2)Gen. 1; Ps. 8, 4-9; 19, 1-3: 24, 1-2; 33, 9; 104, 2-9; 148, 1-6; Job 12, 7-10; 38;
Is. 40, 20-28 etc.
revue bibliole 1916, — N. s., T. XllI. 3
3ï REVUE BIBLIQUE.
C. Ap. Il, 10). Le plus souvent on emploie des formules encore pins
compréhensives," et on proclame Dieu le créateur du monde (7),
l'auteur ou le créateur de toutes choses 8). Dieu a fait « ce qui est
(1) Ilén. 84, 3; Ps. Sal. 18, 13 s. (11 s.,; cf. 8, 7; Pr. de Manassé 2, 3.
(5)Gen. 1, I; Il R.-;;. 19, ir. ; II Chr. 2, \.>; 115. i:.: 123,8; 134.
Ps. :i 146. (.: Is. 37.
If.: 45, 18; 32, 17; \W\ et Dra};.
Jér. .%; Jmlith 13. 8 cf. Ti).
'6) III Em\t. 6. l.i; Jul). 22, r,; 25, U; 32. 1«; Sih. III, 786: les vers du Ps. -Sophocle
••1 du P.s.-()rph(:-e fS. .hislin, De Monnrch. III: .Mi«nr VI, col. 316): Ass. Mos. 12, 9. —
Uii'lquelois la formule s'élargit : « le ciel, la terre cl tout ce qu'ils contiennent •' (Ilén.
101. N .
le riel. la lorrc cl (ouïes choses » (Jub. 7. :{*; ; « le ciel, la terre cl toute leur
arni. I- Pr. de .Man. 2: cl. l'addition des Soplanic à Us. 13. ^).
Cl II .M.irh. 7, 23; 13, li (cod. V); Ass. .Mos. 1, 12; ArisK-c 16; IV Mach. 5, L':. ,
Tesl.
;8) Eccli. 43, 33; 24, 8; Sap. 1, I i; 9, 1 : Arisl. TM: II Mach. 1. !'. ;
III M.uh. 2, 3;
niKU ET LE MONDE IVAPIIÉS LES CONCEI'TIONS JUIVES. 3[)
petit et ce ([ui est grand » (^Sap. 6, "i; rien n'est excepté, car « celui
(jui vit éternellement, est, à titre égal, le créateur de toutes choses »
IV Mach. 11, 5; Hén. 9. 5; 81, 3; 84, 3; Jub. 12, 4. 19; Hén. si. 33, 8; 66, 4 Rec. A,
cf.10, G: 65. 1.
(1) Dans Job 40, 19 et Prov. 8, 22, cette idée est rendue par « le début des voies ».
(2) -/.Tt(7i,', Septante : Ps. 73 (74), 18; 103 :104), 24; 104 (105;, 21 cod. A S; Prov. 1,
13 cod. A: — Tob. 8. 5. 15; Judith 9, 12; 16, 14; Eccli. 16, 17 43, 25; Sap. 2,
; <1; 5, 17:
16, 24:19,6; III Mach. 2, 2. 7; 6, 2;,Ps. Sal. 8, 7; Test. Rub. 2, 3. 9; Lévi 4, 1; N'epht.
(3) y.tJciia. Eccli. 36. 20(17); 38, 34; Sap. 9,2; 13, 5; 14, 11; III Mach. 5, 11; cf. Hén.
18, 1; 36, 4; 75, 1; 81, 3; 82, 7; 84, 2- 93, 10.
(4) y.T;(7Tr,ç, H Reg. 22, 32 (Sept.); JudiSi 9, 12; Eccli. 24, 8; II Mach. 1, 24; 7, 23:
13, 14 (cod. V); IV Mach. 5, 25; 11, 5; Arist. 16; Sib. III, 704; fragm. III, «7; cf. Jub.
10, 8; 22, 27; 2, 31; 11, 17. —
Les Sibylles emploient encore les expressions y^vétt,.-
(III, 604) et TravYîvÉr/î; flll, 550).
3G HEVLt BlBLigUE.
33), et toutes reçurent l'approbation divine ^Ass. Mos. 12, 9). La fin
qui leur est assii^née répond à la noblesse de leur origine elles n'ont :
1, Il MacL. 7. 'M : oùx i'^ ôvtwv £-o;r,aev aCxà ô 0:6;; version syria(|ue : « île ce <|ui n étail
pas >i
; version latine : « ex nihilo fecil illa Deus ». ui% i\ ôvxwv est identique, pour le sens,
a i\ ovx èvTwv que présente le texlus receplus, car on sait qu'en grec classique les parti-
cipes et li's ailji'ctifs précédés d'une préposition, aiment à avoir leuis detrrminntions
adverbiales avant la préposition (Bi.ass, drammntil, dis Neulcstaincnllic/irti Criecliiscli.
19oL», p. 2«)2; cf. aussi Héhr. 11. 3). — I.a création ci nihilo sera énalenieiit aflirmée par
l'Ap. syr. de l(aru<'li, 21, i :
•' Au coinmenceinent du monde lu as appelé ( i* rpii n'était pas
endtre »; cf. 48. N : k d'une parole tu fais surgir ce (|iii netail pas ».
(2) TiM. I.ocr. '.»'i a; Iii0(;. L\i:u(;i; III. 41; Pi.LTAnyi k, Dr amie. muU. c. '.); cf. I'i.vton.
Tiiiifr: 51 a, et Piiii.o.n, De fiiga '.>, M. I Ui' : Quis rer. div. harr. IVi, .M. I 492: De spec.
leg. I, a28. M. Il 261.
(M) GiiiMM, h'ii rzyefasslr.s cxcgctisclirs Uandbueh zu dcn Apn/.rj/plicn. VI, Leipzig, 1860,
p. ;!lt ss. ; rxiiHAii, Wisdinn. dans Wnce, Apocrypha, Lomlon. 188N; Hiticn, Wctsheilslehre
DIEU ET LE MONDE D'APRÈS LES CONCEPTIONS JUIVES. 37
qui est petit aussi bien que ce qui est grand » (6, 7); « il a créé toutes
choses pour l'être » (1, li t r/.t'.Tsv ! 1
) yàp tl^ lo thxi -x r.h-x\ ;
sa sagesse
est « l'ouvrière de toutes choses » (7, 22 : y; vàp zâvTwv Tv/yX-iz) ; il aime
« tout ce qui existe » [-x h-x ~h-x), car s'il avait eu quelque être en
abomination, il ne l'aurait point fait (11, '2ï); tout lui appartient
(6, 7; 8, 3 : 5 -âvTwv oscr-iro?; cf. 11, 17. 23; 12, 16; — 11, 26 A i-i :
zx ijT'.v T.h-x)^ parce qu'il est l'auteur de tout : « Quel être pourrait
subsister, si vous ne le vouliez? être conservé, si vous ne l'aviez appelé
à l'existence? » (11. 25). au Sage d'employer ces ex-
Il était difficile
der Hebruer, Strasbourg, 1851, p. 353; Drumaiond, Philo Judaeus, London, 1888, I, p. 188;
Bois, Essai sur les origines de la philosophie judéo-alexamlrine, Paris, 1890, p. 264:
Zeller, Philosophie der Griechen, IIî, 2, p. 294; T. K. Cheyne, art. « Création », dans
l'E. B., voL I, 1899, coL 954.
(1) Nous ne voulons pas insister sur le sens du mot êxtkjev; dans les Sept, il répond le
plus souvent à N"12. Mais bien que les deux verbes soient employés de préférence quand il
s'agit de création proprement dite, ils n'ont pas nécessairement celte signification.
38 RKVUE BIBLIQUE.
15. 18; 15, 1) et son « Esprit incorruptible est dans tous les êtres »
matière doit dépendre de Dieu, dans son origine aussi bien que dans
sa conservation.
Ces considérations invitent à penser que le passage incriminé est
susceptible d'une autre explication.
Du fait que l'auteur se sert de l'expression « matière informe »,
on ne saurait encore conclure qu'il l'emploie dans le même sens (jue
les philosophes de la (irèce (1 ni surtout qu'il appron>e toutes les j,
'1 l.e contenu de ceUc expression «'liiil d'ailleurs loin diMn" !<• m^^nie dans les diflé-
rcnles «'•rôles.
avaient péché (11, 16) Dieu leur envoya « des reptiles et de vils
:
(1) Cf. Drummond, Pltilo Judaeus, I, p. 299-307; Zeller, Die Philosophie der Griechen,
III, 2, p. 386-393; Jules Martin, Philon, Paris, 1907, p. 68-75; Bréhier, Philo)i d'Alex.,
Paris, 1908, p. 80-82.
40 REVUE BIBLIQUE.
330.
(3) De plcinl. .\oe 2-3, M. 329; De opif. m. ri, M.
I De spec. leg. 1, 828 s., M. II 2r.l.
I :. ;
(i) De opif. m. M. I 5,
21 s., —
Dans ces théories sur la maliî-rc on relroiivc sans peine
la doctrine de Platon; cf. Timée ''»9-52.
(5) De spec. ley. I, 329, M. II 201.
(G) De apec. leg. I. c. De opif. m. 22, M. 1 5.
;
(7) l>e fuga 9, M. I 5'i7; Quia rer. div. fiaeres 14(>. M. i')2. I
(8) De mut. nom. 135, M. I 598; De somn. Il, 4r., M. r,r,:,; De fuga 8. M. 547. I I
les choses sensibles (1). Aussi, quand il est dit : « Dieu vit tout ce
qu'il avait lait, et voicique tout était bien » (Gen. 1, 31), doit-on
sft garder d'étendre cette approbation à la matière sur laquelle le
démiurge avait travaillé, matière inanimée, désordonnée, dissolvable,
corruptible par sa nature, sans harmonie et inégale; il ne faut l'ap-
pliquer qu'aux productions de l'art divin (2). A Dieu « source de
vie » (Jérém. 2, 13), Philon oppose « la matière morte » (3). On —
voit ainsi qu'un dualisme latent est à la base de sa philosophie. La
matière e^t préexistante à l'activité divine, indépendante, éternelle.
Dieu apparaît uniquement comme démiurge, artiste, formateur du
monde, architecte de la grande cité, jardinier qui fait sortir toutes
les espèces d'une seule racine, en un mot comme l'organisateur de
la matière. Sans doute Philon ne dit jamais qu'elle est éternelle et
de la matière.
iMais d'autre part, Philon déclare que Dieu peut tout(i), possède
tout (5), a tout produit (6), et gouverne tout. Le monde n'existe pas
de toute éternité (contre Aristote) il a été f&it {-(éyo^vi) par Dieu (7), :
et « Dieu est antérieur à tout ce qui est fait (8), « Dieu se suffisait à
lui-même avant que le monde ne fût fait (9) >>. « Ceux qui nient que
le monde a été fait, font disparaître ce qu'il y a de plus utile et de
plus nécessaire, la Providence ; car ce qui n'a pas été fait, n'a point
de rapport avec celui qui ne l'a pas fait » [De op. m. 9 s., M. I 2).
— Dieu s'oppose nettement à tous les autres êtres, parce qu' « il n'est
pas devenu, mais a amené les autres choses à l'existence (10) ». lia
« amené les non-êtres à l'être (il) », il a « formé toutes choses du
(1) Qu. in Gen. iv, g 160: De ebriet. 61, M. I 366; cf. De Deo, g 3.
(6) Ë6y;x£ Ta Tràvia, De mut. nom. 29-, M. I 583; ëôvr/.e xal ÈTrotïiTS -zh ;;âv, De Vita Mos.
(8) Leg. M. I
ail. III, 4, 88.
(12) (Ty(iTr,'7aa8at Ta oXa ex (ir) ôvxwv, Leg. ail. III, 10, M. I 89.
(13) Ttoiwv Ta [iri ôvta, De mut. nom. 46, M. I 585.
42 lŒVUE HIBLIQUE.
n'est pas, vi il produit toutes choses (1) ><. En un mot, <' il a produit
au jour, du niju-être à l'être, l'd'uvre la plus parfaite, le monde (2) ».
Voilà des textes qui semblent bien aflirmer la création de toutes
choses ex niJiHo.
(Cependant im examen attentif diminue considérablement leur
portée. Notons d'abord que d'après l'enseignement de Piiilon, tout ne
sied pas cà Dieu, quoique tout lui soit possible (3). Sa providence
pourrait s'étendre sur le monde entier, même si l'on admettait qu'il
ne soit j)as l'auteur de la matière, car l'artiste prend soin de sa statue,
alors que cependant il n'a pas produit l'airain [Deprovidentia, II, § 48).
— L'expression la plus forte que Philon emploie en parlant de la
création, c'est le mot ';v/f:::. Or il a soin de nous dire lui-même ce
qu'il entend par -/Évs^.r : " Il y a une ';v/zzi:, déclare-t-il, c[ui est le
passage l'acheminement du non-rtre à ïé/re », et il ajoute que
et
-/aYiv) ;
il me semble en (ilfet (]ue les parents sont à leurs enfants ce
f/ue Ifieu est au inonde : de même que Dieu
donné rc.ristence à ce <i
(I) ô xi iir, ô/ta çéfiwv xai xà r.iizx yEvvôiv. (jiiis vrr. div. fiiicr. '.U'>, M. I MH.
;2j i% To'j |;.f, 6vTo; el; to thon... àv^^rjv;, De Viln Mos. 11, 20", M. Il 170.
(3, Di' cnnf. liny. 180. .M. I 4:J2; De opif. mundi 7'». .M. I 17; De sac ri/'. Ab.cl Caiiiibl,
M. I 17.-J.
DIKL" ET l.t: MONDI-: 1) AI'HÈS LES COxNCEPTIONS Jl IVES. 43
(1) -rà yip (ir, ôvra Èxâ),îar£v e;; to l'.'x: ri^'.v s; àtalia;: Platon, Timée 30 a : sU Ti?iv
aO-rb r,Yay£v êx. t?,; aTa^ia;. Voir ib. 51 a, comment Platon conçoit la matière : [iriti yf,v (atitî
àépa u.r,T£ tz^ç, [Lr,xz -jotop, fi.r,Tc ô'ya. èv. toO-ïwv (JLr,Ts zç wv xaÙTa l'éyovev à).).' àvôpatov siSô; Tt
idées, la matière est pour lui un véritable non-ilre. Cf. aussi Parmémde 16"y.
du mot, tandis que le monde sensible n'a reçu de Dieu que son orga-
nisation, par l'intermédiaire des Puissances. Par rapport au monde
visible. Dieu est démiiirrjf, à l'égard du monde intelligible, il est
créateur.
Nous pouvons donc conclure, avec la plupart des auteurs qui se
sont occupés de la question, que Philon a admis l'éternité de la
nisme
Il eu fut sans doute autrement dans la diaspora. Le livre des Secrets
Mais est-on fondé pour autant à admettre que, dans l'esprit de l'au-
teur, la production des créatures « du non-être à l'être », n'est que
leur passage « de l'invisible au visible », c'est-à-dire la sortie des
êtres organisés d'une matière primordiale, incréée? Il ne le semble pas,
car l'auteur compte les choses invisibles, aussi bien que les choses visi-
bles, parmi les créatures de Dieu « Avant que ne fût créée aucune :
créature, le Seigneur fit tout ce qui est visible et tout ce qui est invi-
sible » (65. 1; cf. 47, i ; 51. ô; 64, » ; 65. 6) ; Dieu est le créateur de
toutes choses (24. 5 Rec. A: ; il a « béni toute (sa) création, la visible
et l'invisible » 31. 1 ;
cf. 51. 5). Les deux êtres mystérieux eux-mêmes
obéissent à l'ordre divin. Dieu a « tout médité et tout créé » par sa
sagesse; il s'oppose à tous les autres êtres comme l" « éternel » et
r « incréé » ; ses yeux « considèrent tout ce qui est, et tout tremble de
crainte », mais s'il détourne son visage « tout est anéanti » (33, 3-V).
— Il de tenir un langage pareil, s'il avait
était difficile à l'auteur
admis que des êtres incréés aient coexisté avec Dieu de toute éternité.
On n"a pas de peine à constater combien les spéculations savantes
de Philon et d'Hénoch slave s'éloignaient de la simplicité des affirma-
tions bibliques, docilement acceptées par les foules. La doctrine révé-
lée se trouvait surchargée d'adjoncti(ms dualistes ou mythologiques
qui l'altéraient profondément et menaçaient de lui créer un péril
semblable à celui (pie les Gnostiques feront courir au christianisme
primitif.
Les descriptions (jui détaillent l'œuvre de la création ne sont géné-
ralmient qu'un commentaire du récit genésiaque (1 Cependant on .
vre qu'il avait faite ». Dieu aurait-il donc encore travaillé le der-
nier jour de la grande semaine? Le passage pouvait donner à réflé-
chir, et les Juifs chez lesquels le repos sabbatique était devenu une
caractéristique nationale (cf. .Tub. 2, 17-33), eurent à cœur de pré-
venir tonte équivoque. Les Septante traduisent : « et Dieu acheva le
des Septante.
On peut se demander sous quelle image les Juifs se représentaient
le monde i'2). Le livre d'Ilénoch donne à ce sujet les renseignements
les plus complets. L'ensemble des êtres créés se répartit en deux
fractions bien distinctes : le ciel et la terre. La calotte céleste est
ti'udue au-dessus de nous par la violence des vents 18. 3 ; elle
1^ Jiib. 2, 2-25: Piiii.oN, Dr <>p>f- mnnrU: Ilt-n. si. c. 24-31. - Philon pourlmt n'adincl
pas que la dislinclion tics .six jours ro(ionde à la rcalili' ; loul fut rrt'é « en même temps » ;
mais il fallait bien i|ue la «lesrriplion mosaïi|ue suivit ini ordre d»'lermin(^, elle va du
moins parfait au plus parfait [Dp npif. m. fû, .M. I !.'>). Les deux écoles rivales de Ilillel —
et di- Schatnmaï disputaient cliaudcment sur la question de savoir si le ciel avait été créé
avant la terre. Pour les Schammaïtes, c'est le ciel «fui fut créé le premier, " car un roi
fal)rir[iie d'abord le tntne, et ensuite seulement l'escabeau ». Les lliilélltes au contraire
donnaient i.i iiréférence A la terre, « car un roi qui se construit un palais fait d'abord réla;;e
inférifur, et insuile Neuleinenl leselaRCS su|)érieMrs » {Bi'rrscli. linh., par. L i" '•<''>• 1- •)•
parait suspendue (69, 16), mais en réalité elle repose sur la terre à
ses extrémités, là où le firmament touclie l'horizon (18, 1-5 La terre .
ello-mèmc est fondée sur l'eau '69, 17) et repose sur une pierre
angulaire (18, '2) ou sur une colonne ,57, :i,. D'ailleurs, les quatre
vents soutiennent la terre aussi bien que le firmament du ciel (18, 2).
Le ciel leur livre passage par douze portes aux extrémités de la terre
(34, 2; 35, 1; 36, 1 ss. 76, 1 ss. Au-dessus des portes des vents, ; .
Dieu est nommé grand Roi (1 , Roi saint (2), immortel (3), éter-
nel (4>, tout-puissant (5), Roi des rois (6), seul Roi (7 , Roi des
dieux (8), Roi du ciel (9), Roi du monde (10), Roi de toute la
création (11). Il est le Seigneur grand (12), le Seigneur des Sei-
(1) Grand Roi : Ps. Sal. 2, 36 [321; Sib. III, 499. 5G0 ; Hén. 84. 2. 5; 91, 13.
(4) Roi éternel ;= des siècles) Hén. 12, 3; 25, 3. 5. 7; 27, 3; cf. Tob. 13, 6. 10.
:
(6) Roi des rois II Mach. 13, 4; III Mach. 5, 35; Hén. 9, 4; 84, 2; cf. 63, 4.
:
(7) Seul Roi Il Mach. 1, 24; cf. III Mach. 2, 2; Sib. HI, 70i.
:
(8) Roi des dieux Hén. 9, 4; cf. Esther 14, 12 (Add. C 23}.
:
(9) Roi du ciel III Esdr. 4, 46. 58; II Mach. 15, 23; III Mach. 2, 2; Ps. Sal. 2, 34
:
[30];
Test. Benj. 10, 7; Hén. 39, 8 cf. Tob. 13, 7. 11. 16 (x).
si. ;
(11) Roi de toute la création III Mach. 2, 7: cf. .Judith 9, 12; Tob. 10. 3; Eccli. 50,
: 15
(izavêaci/.s'jç).
sance de Dieu, parce que tout a été crée par lui III Mach. 2, 3).
Cette domination souveraine continue à s'exercer par la conser-
valion et le gouvernement du monde.
De même qu'aucun être n'est venu à l'existence sans Dieu, ainsi
aucun ne peut se conserver sans lui. Car quel être pourrait demeu- ((
fondements de la terre sont sous sa g-arde (Ass. Mos. 12, 9). Dieu est
le maître de la vie et de la mort (Eccli. 11, 14; Sap. 16, 13), et c'est
(1) Seigneur «les Seigneurs : Ilén. 9, 4; Ass. Mos. 9, 6, cl des llois : lli-n. 63, 2. 4.
(2) Seigneur de toute puissance : Il Jlach. 3, 24; cf. Eslh. 14, 12 (Add. C 23).
(3) Seigneur du monde : Juli. 25, 23; Ilén. 81, Ki ; Ass. Mos. 1, 11 ; II Macli. 12, 15.
(4) Sei;;neur du ciel cl de la Icrre : Test. limj. 3. 1 ; Test, lnlir. Nephl. 9. 2; cf. Toi..
(6) Seanôrr,; : III Esdr. 4, 00; Tob. 3, 14 (X); 8, 17; Jud. 9, 12 (Maître du ciel et de la
terre); Sap. 6. 7 ; 8, 3 ; 11, 2G; 13,3. 9; Eccli. 23, 1 (.Maître de ma vicy ; 33(36), 1 (Seigneur
Dieu de toutes clicses) ; Dan. (L.\X) Sus. .^ ; 3, 37; 9, 8. 15. Ki. 17(bis). 19; — Tliéodot. Sus.
5; 3, 37; — Ep. .1er. 6; Il Macli. 5, 17. 20; 6, 14; 9, 13; 15, 22; III Madi. 2, 2 (Maitre de
toute la création ; 5, 12; 6, 5. 10; Test. Jos. 1, 5; — Piiii.on, De sprc. leg. II, 21!» (^^ De
f'csio Cophiiii 2; éd. Colin, vol. V. p. 140) ; Dr Clivruhim 119, M. I ICO '^Dieu est» Seigneur
«l Maitre de toutes choses »).
liinrjlivj : Sap. 12, 10. IS; Il Marli. 14, 'Ki Maitre di" la vie); 111 Mach. 7. '.) M.iitre dt>
toute |>ui8sanre .
cic-oTEJEiv : III .Ma(li. 5, (H Dieu niaitriM; toutes choses »). Cf C.istwk lUiiin, —
Ai7î:oTr,;, dans Ic^ llcr/irrr/ics de Scirnn; rclijjirusr, l'.MO |p. 373-379], p. 373 s.
(7) Ôuviarr,; : Eccli. 45. 5. C. If.; Il Mach. 3. 24; 12, 15. 28; 15. 4. 23. 29; III Mach. 2.
3; 5, 51 (K); 6, 39 R,.
r.,,^-.' ' 5 7
.
•
III Mach. 2. - 1 -ih 'I I'. 2| .
1)[I£L' ET l;l-: MU.NDt: I)A1MU:S LLS CONCEPTIONS JLT\ tS. 40
pose toutes choses selon une fin déterminée. Dieu n'abandonne pas
ses créatures au jeu aveugle du hasard : une intelliaence infinie et
une volonté sans défaillance président à leur évolution. Les titres énu-
mérés plus haut, suffiraient déjà à le prouver; il y a aussi des textes
explicites. « Le gouvernement de l'univers, dit le Siracide, est entre les
mains de Dieu » P^ccli. 10, i^ Il est « le conducteur du monde » Sib.
.
fragm. I, 15 car « celui par qui tout a été créé, guide aussi et domine
,
toutes choses » (Arist. Id, Les honneurs mêmes qu'on lui rend doivent
être fondés sur la conviction qu'il a tout créé et qu'il dirige tout selon
sa volonté (Arist. SSi.cf. 13*2 Tout est dans sa main » Jub. 12, 18;,
. <<
et son gouvernement sétend sur toutes ses œuvres (Hén. 84, 3; Ass.
Mos. 4, 2; 11, 17). Il surveille et inspecte toutes choses iSib. fr. I, 3;
fr. III, i'2 , et il les mène toutes à leur fin Arist. "254). — Sa Provi-
dence n"a pas seulement pour objet les hommes, mais encore les
êtres sans raison. C'est lui qui nourrit les oiseaux et les poissons, et
qui procure des aliments à tous les animaux (Ps. Sal. 5, Ils. [9-10 i) :
gile est au pouvoir du potier qui le façonne selon son bon plaisir,
ainsi l'homme est au pouvoir de son créateur qui en dispose selon
son jugement » Eccli. 33 36(, 13 Dieu agit à l'égard du genre .
Arist. 195; Ps. Sal. 8, 19; Sib. III, 300 i, et règle le sort des nations
(Sap. 12, 12 s.; Eccli. 10, i. liss.). En un mot. Dieu a prévu tout
.lub. 4, 31 s.).
ca^ur des .ïuifs du temps de .l.-C. C'est même à cette époque quoii
les voit employer, pour la première fois, certains mots dans un sens
9, 13, 10; 17, 22) (1). Philon composa tout un ouvraiic sur
2'i.; la
Providence », pour exposer les raisons de cette croyance et réfuter
les objections des adversaires (2).
Eu effet, bien c[ue la chose i)uissc paraître surprenante, cette
doctrine rencontra des opposants au sein même du .ludaïsme. Au
rapport de Josèphe, les Sadduce'ens niaient l'existence de la Provi-
dence Dieu n'intervient pas dans le cours du monde et ne s'en
:
(1) Il laiit noliT. loulefois. que ces expressions étaii'iiL déjii cmiiloyécs par les philoso-
phes Krecs, siirloul les Stoïciens, au sens de gouvcrnenn'iit divin, de Providence.
2) Cf. DiiLMMo.M), M, p. .5.")-(;2; J. Mautin, p. 88-li>'i.
3) On
peut se demander dans quelle ine.sure .loséphe lui-même accepinil la Providence.
Assurcmenl, il en parle parfois avec laccenl de la plus parlaile conviction {('. \p. II. il, vf.
22). ne faudrait point non plus se laisser tromper par le revëtcmeni urec qu'il donne le
Il
plus souvent h sa pensée, en app«lanl la Providence -'y/r,. //.em/, eljxapiwvr,. TtîTrpwiisvr, (cf.
liell. Ju<l. IV, \. 7). II n'en est pas moins vrai r|uc dans plusieurs fiassapcs il scmltle rap-
porter certains tvénements, non a Iiicii, mais au hasard Aut. \V, i\. l licll. Jml.
DIKL' ET l.l': MONDi: D'AIMIKS I.KS CO.NCEITIONS JUIVES. 51
souvent des hommes justes accablés d'infortunes, tandis que les mé-
chants jouissent de la plus florissante prospérité? Enfin, pourquoi-
Israël, le peuple de Dieu, est-il foulé aux pieds par les impies Gen-
c'est moi lahvé qui lais tout cela. (Is. 45, ô-7. ïrad. Condamin.)
VI, IV. 8; cf. III. vni. 7 donne parfois au Destin une importance telle qu'il
; bien plus, il
ne se fait {Ant. XVI, xi. 8}. La formation grecque de l'historien l'amena ainsi à des affir-
mations qu'un véritable Juif aurait dû désavouer.
(1) Ps. -.Justin, De Monarc/iia 2. Clément d'Alexandrie et Eusébe présenlent ici un texte
remanié.
!i2 lŒVLK UlHLInLt:.
légère atteinte.
D'où vient alors le péché? Les Juifs en cherchèrent toujours l'ex-
plication immédiate dans la liberté de riiomme. Le premier couple
était tombé, parce qu'il avait enfreint librement un précepte
(1) Cf. i:>: 10. 20.:^; 14, 8; I San;. 16, 14. 15. :>3;n Sam. 24. 1 ss.
Kx. 7. :',: 9. I H. 22, ;
20-23; Is. 19, 14; .1er. 6. :>! K/écli. 3. 20; 20, 2."i.
6. 1» s. ; :
porte volonliers tous les événements a Dieu, cause i)remière et principale. Celte concep-
tion est bien servie par la langue qui distingue mal les diverses sortes de causalité; ce que
Dieu permet, quand il le prévoit et pourrait l'empêcher, il est censé le faire : il endurcit
le cœur du Pharaon, etc. Maintenir partout le sens intentionnel strict de certaines locu-
tions (p*î2^ ou^E , en expliquant que, le bien étant un jour lire du mal, le mal entre
ainsi dans le plan providentiel et peut être, en quelque sorte, objet de l'intention divine
K>,vuEM!\Li:it, p. l'iO. au\ Sémites des temps anciens une
141), c'est attribuer, seinble-t-il,
métaphysique trop savante " (Le Livre, disaie. Paris. lîiOô, p. 46 P. Blzv « II est .
— :
cerlain <[ue les Sémites ne distinguaient pas avec notre application les diverses causes qui,
en vue d'un même eflet, peuvent se trouver subordonnées ou collatérales, non plus «jue
les divers niodes <|ui peuvent allecter une même causalité... I.a théologie sémitique néglige
avec la même tacililé les diverses altitude^ de la cause iiremiére dans le gouvernement du
monde. Pour nous, nous distinguons entre vouloir, désirer, permetire. commander, inviler.
conseiller, autoriser, ne |)as empêcher, donner occasion; ces expressions ont pénétre dans
le langage vulgaire où tout le monde les utilise, en respectant leurs nuances rospeclives...
La théologie îles Sémites est inliniinenl plus simpliste. Tout ce qui, île quelque manière,
relève du vouloir divin. Dieu le veut, simplement, enliéremenl. Tout ce qui se produil.
Dieu le fait » Inlrodnction aux Paraboles évanrjétiqiics. Paris, 1012, p. 330). P. Piivr — :
<' Les Sémiles ne distinguent pas comme nous les diverses modalités du vouloir divin et
de la causalité preniiere. Pour eux « vouloir, désirer, ordonner, permettre », quand il s'agit
de Dieu, s'expriment par le même mot; et de môme ( faire, faire faire, laisser faire, don-
ner occasion ». D après celle maniéru de parler, —
iuqiropre tant <|uon voudra, mais
fiiniiliere aux Hébreux, —
tout ce qui arrive, même l'abus de la volonlé humaine, est
lensé \oulu de Iiieu et causé par lui. puisque Dieu le permet quaud il pourrait l'empê-
cher ydlurr ri /lut des l'aralwles évungélit/ues. .1 propos d un oiirragr recrut, dans
)>
des Juif-, celle manière de jiarler ne porte aucun préjudii e a la .sainteté du Tres-llaul.
Jamais il ne serait venu a leur pensi-e que le péché puisse être réellement voulu, désiré,
ordonn '
par le !»ieu trois fois saint.
Dll^r HT l.K MU.NDE DAPltKS LES CONCEmoNS JUIVES. li.}
divin (1). A vrai dire, cette première faute avait été commise sur
l'instigatiou d'un agent mystérieux, le serpent ou le diable, et le
mal physique lui-même n'apparaissait que comme une punition intli-
géc par Dieu à cette désobéissance. Aussi un grand nombre de docu-
ments font-ils remonter aux anges déchus la responsabilité dernière
des défaillances humaines (2). Mais ici, nouvelle question quelle — :
c'est l'abus de la liberté dont Dieu leur avait fait don, qui les a
perdus. Du moment que Dieu donnait l'être à des créatures libres,
la possibilité de faire le mal existait. — Possibilité, mais non néces-
sité ! Qu'on se garde de rejeter sur Dieu les péchés des hommes :
Le livre d'IIénoch est tout aussi formel «Je vous jure à vous, pécheurs, :
que péché n'a pas été envoyé sur la terre mais l'homme l'a fait de
le ;
utiliser pour des fins dignes de lui (2). Rien ne peut échapper au gou-
vernement de la Providence divine.
Si les châtiments n'eussent atteint que les i)écheurs, et seulement
dans la mesure de leur culpabilité, le problème du mal n'aurait g-uère
tourmenté les Juifs. Us admettaient .sans peine cpu' la justice divine
put s'exercer contre les impies; mais ils avaient aussi un sentiment très
aigu des droits que la pratique du bien conférait aux justes. Dieu se
doit de protéger et de garder les hommes pieux ['.i)\ c'est pour ces
derniers que « les biens ont été créés dès l'origine, de même que les
maux pour les méchants » V); c'est aussi contre les pécheurs qu'ont
été faits «< la peste et le glaive, la nielle et la sécheresse, les calamités
et la famine et les autres fléaux » (.V. Le bonheur est la
destinetion, la
disent les Juifs ,ui roi Ptolémée Pliiladelphe. aucun niallieur ne vient
sur toi (G Sous l'action de iTieu toutes les créatures concourent à
•' .
pécln'" H).
verra s'évanouir ses richesses et il sera plongé dans la misère (5, 1-15 ;
10. 12-18; 11, 1V-2G: 12. 6; 39, 28-31). Enfm, l'infamie le poursui-
vra après sa mort, et même dans sa postérité il sera encore châtié ^10,
17 16, V-10 24-27: 41, 5-13).
: ;
Le juste, au contraire, ne doit pas —
perdre courage dans l'adversité; pour lui, le malheur n'est qu'une
épreuve qui passe (2, 1-11) ;
qu'il ait confiance, le Seigneurie tirera un
jour de son humble condition (11, 12-26) et lui donnera le bonheur
(10, li s. 11, 5 s. 36, 12 etc.). On n'est jamais à l'abri des coups de
; ;
des justes, elle est une épreuve en même temps qu'un avertissement
po.ternel ;11, 9 s. Même la mort prématurée, si redoutée parles Juifs,
i.
l'st un ellot de la miséricorde diviue pour ceux dont làmc est sans
tache i4. 9-1 V). Mais ce qui justifie surtout la Providence aux yeux du
Sage, cest la sanction de la vie future : alors la vertu sera enfin
récompensée, comme elle le mérite, tandis que la vengeance de Dieu
atteindra les pécheurs (2, 'il-3, 0; 5, 1 ss.).
Philon ne sépare pas, dans la solution de ce problème, le mal
le trésor des biens, et ferme celui des maux, car il convient à Dieu
mauvais •', il complote contre elle (ô); c'est lui (jui donne naissance
aux passions et à toute la vie sensitive dont les tendances sont si sou-
vent contraires h la droite raison ((>). Quoique l'homme ait reçu de
Dieu le don incomparable de la liberté (7), il lui est bien difficile,
en raison des éléments dont il est composé, de ne |)as pécher iz-j[j.z'jï:
-z 'xi.y.z~.'j:t'.':t) '8).
(fi) Lerj. ail. Il, <.).ll, M. I 08; (Jiioil (Ici. pol. ins. KiO. M. I JKi, De spec. Irtj. IV, 7'.»,
M. Il 348.
7) Quoi! D. .lif iin. 'û-iH. M. I :>7'.» ; Dr l'roridnilin. l «0-84.
(8j De 1 idi Mus. Il, l'(7, M. II ir>7.
DIEU ET LE MOMIE U'APKÈS LES CONCEPTIONS .IIIVES. o7
ment le cours des lois naturelles. La pluie et les vents produisent les
effets les plus bienfaisants, et c'est ce bien que Dieu a en vue; cepen-
dant il produisent parfois quelque tort acciden-
est inévitable qu'ils
tel.La Providence considère le bien général. Dans la cité la mieux
ordonnée, les lois les plus sages peuvent avoir des inconvénients pour
tel particulier; mais s'il est raisonnable, il se réjouira des avan-
tion de la vie future dans les deux livres qu'il a écrits sur la Provi-
dence. Dans ses autres ouvrages aussi, il parle très rarement de l'au-
delà, et sa pensée n'apparait jamais avec beaucoup de netteté. Il
semble toutefois avoir connu l'argument « Quant à moi et à mes :
après la mort, tandis que la mort éternelle attend ceux-ci après leur
vie (5) ».
(1) Voir, outre la Safjes.sf, Ps. Sal. 8, :il s.;2(;: 13. 4-11
; :,-i:>\ ; 16. 1-i; 18. 4 (sur lo
rôle de la souJlrancr d'aprts les l'saumi's de SaUnnoii. cf. Viti;\i . p. .5:{-.")8) ; II Macb.
8, 10; 7, is. :ii s.; IV Mach. 6. 2'.»; 10. !<•; lest. Kiili. 1, 7-lo; 4, '«
, Siin. 2. W'.-i'i;
C.ml 5, 8-11.
'2, Cf. I .Marli. 2. :{7. 52; Il Mach. 6, 30 7. 2. î» ; IV Mach. 9. s. 1.^. >;• ; 10, 2ii; .lui..
V Cf. Il Mach. 7, 9. 13. 14; IV Mach. 9, « .s.; 16, 2.Î; 17, 12. 18; 12. l'i; 18. P>. :.
Sur le problè lu mal dans le IV livrt; d'Ksdras. cf. L. V,v<.\naï, Le l'iohlnnr rsr/iu-
lologirpir dans le l\ lirn- il lis/Iras. Paris. l*.»(»t>, y. 4i-<.3. '.tl-ll'.».
DlEl' ET LK MONDK I) Al'UKS LES CONCEPTIONS JUIVES. :;0
qui couve encore sous la cendre, car il y a espoir que si la vie est
prolongée, elle devienne meilleure. quand je vois un homme « Aussi
de bien habiter dans une maison ou dans une ^ille, je proclame cette
maison ou cotte Aille bienheureuse, car je suis persuadé qu'elle gar-
dera toujours la prospérité présente et qu'elle peut s'attendre à dos
biens plus grands encore; en effet, Dieu répand ses richesses immen-
ses sur les indignes eux-mêmes, par égard pour les dignes. Ne pou-
vant pas intercéder pour qu'ils ne vieillissent pas, je demande pour
eux une vie très longue, convaincu que les hommes se trouveront
bien aussi longtemps que durera la vie de ceux-là. C'est pourquoi,
lorsque j'apprends la mort d'un de ces justes, je suis rempli d'une
grande tristesse et d'une profonde douleur, et je pleure non pas tant
les disparus que les sur\ ivants. Car ceux-là, arrivés au terme naturel
de Baruch, sont pour celte ville (.lérusalern) comine une colonne Inébranlable et vos prières
comme un mur puissant « Et si d'autres ont commis l'iniquité, déclare Baruch en
» (2, 2).
s'adressantà Dieu, il pardonner à Sion par égard pour ceux qui ont lait le bien, et
fallait
ne pas l'accabler à cause de ceux qui ont fait le mal » (14, 7). « Priez de tout cœur le Tout-
Puissant, dit-il en s'adressant au peuple, pour qu'il vous rende sa bienveillance, et qu'il
ne compte pas la multitude de vos pécbés, mais qu'il se souvienne de la rectitude de vos
pères « (84, 10]. — Cf. encore Test. Benj. 3, 8; mais ce passage a subi l'inlluence chré-
tienne.
00 KEVUt: lllltIJnl K.
par des raisonnements philosophiques que par des motifs très parti-
culiers, tirés des interventions surnaturelles de Dien dans le monde,
«'t spécialement dans l'histoire du peuple d'isrard.
pour qu'il soit utile de la recommencer ici. On n'a pas abouti encore,
pour le moment du moins, à reprendre les grandes synthèses de Saba-
(1) CeUe étude servira d'Introduction au texte du psautier de saint llilaireque M. Jean-
nette publiera prochainement (.\. D. L. R.}.
(2) Bericht iiber die lateiniscfien Bibelùberselziingcn, dans Jahresberichl
CoF,ssi:>,
liber die Forschritte de)- klassischen Alterlumsnissencliaft, Leipzig, 1899, t. CI, p. 183 ss.
Nestli.. Jiibeliibersetzunfjen [lateinische], dans Realencyklopadic fiir prolestanlische
Theolofjie und Kirche, 3 Auf.. t. Ken\edv, Latin versions (The old), dans Ilastings,
III.
Dictionary of the Bible, t. III. MTcnixtAi. Latines [versions] de la Bible, dans Vigou-
ROLx, Dictionnaire de la Bible, t. IV.
ca HKvi i: r.iBLiouE.
I W i.sM.iiTT and Uiiiii , I Im .\iii Tcsltiinrut in Crccl-. (';iinliri(l;;e. IS.SI, //(//vk/ , pp. T.s-
8i.
[2] (T. Mi:iiiiM.\i, /.ritinex [rersitnts) de la Hililr, dans Vinoi nm \, Dicl. de la Ilible.
\. IV, p|>. ir.i-12',». Voir les réserves de im»m i»e Hiit'VM., Hcv. fini., l'.UI, pp. l'J-Ho, au
sujet de lii division en lexles européens cl italiens.
LE TEXTIl nu PSAl TIKIl DE SAINT IIII.AIUE DE POITIERS. 0:j
tration sans réplique. Etnous pouvons croire que cette édition repré-
sente fidèlement le Nouveau Testament tel qu'on le lisait en Afrique
au milieu du troisième siècle, au temps de saint Cyprion.
Dans une thèse récente sur le psautier latin en Afrique, M. Capelle
vient de faire une démonstration analogue pour l'Ancien Testament.
11 n'a pas eu de peine à démontrer que l'Afrique avait aussi une ver-
(1) Old-Latin biblical texts, II, Oxford, 1886. Introd., pp. 4.3-98.
(2) Monceaux, La Bible latine en Afrique, dan;^ la Hevue des éludes Juives, 1901. et
Histoire littéraire de l Afrique chrétienne, Paris, 1901, t. 1, pp. 97-177.
(3) Capelle, Le texte du Psautier latin en Afrique, Rome, 1913.
(4) BoNASsir.ux, Les Érangiles synoptiques de saint Hilaire de Poitiers, Lyon, 1906.
i;KVi i: nilil.lnl K.
(3n a dit que quand même tous les manuscrits de l'Kcriture seraient
perdus, encore possible d'en reconstituer le texte au moyen
il serait
des citations des anciens Pères. En supposant que tous les versets de
l'Écriture aient été cités, ce qui n'est guère vraisemblable, la tAche
de les réunir et de les ordonner ne serait assurément pas facile.
Klle lest davantage, quand il s'agit de tirer le texte d'un seul livre
très connu, comme le psautier, des (euvres d'un seul l*ère. et que
ce Père a commenté le psautier, en reproduisant à peu près in-
1 II rsl ccriaiii «|m' saiiil llilniri' .1 eu l'iiitiMiliou de (.lirc un (•nmincntairt' di' loul le
|isauluT. Il est mi-me |ir<)l).ittln que le cominenlnin- de iiuelqurs |)sauii)es i|uil nous dit
.noir ( iiin|ios('. h'esl jiprdu. Dorn ( OusIanI, l'édileur iiriiédictin, es|MTail reirouvcr ces fraj;-
inenN au fond de <|uei(|ue l>il)liolli«'i|ue. Mais ses rechcrrhes sont restées .sans
im-dils
résultat, i-l rien na été découvert depuis. Il est possildc <|ue la luorl ait surpris saint
Hilaire avant «luil eût terminé son ouvrage, et il faut renoncer à espoir de jamais pos- I
(t) Nous nous som.iies servi pour le relevé des citations des Tractatus super psalmos
de l'édition de Zingerle. qui est la dernière et la meilleure. Mais outre qu'elle manque
d'index l)iblique (l'index de l'édition de Vérone est incomplet et souvent fautif), on n'y
trouve que les références de l'édition bénédictine. Or <[uel iju'ait été le soin de l'éditeur
bénédictin, plusieurs citations, dont quelques-unes assez importantes, ont échappé à son
attention. Nous en avons retrouvé quelques-unes dans les psaumes. Il est regrettable que
le dernier éditeur, qui voulait faireœuvre durable, n'ait pas été plus vigilant.
REVL'E BIBLIQUE 1916. — N. S., T. XIII. 5
or,
REVUE BIBLIQUE.
ture qui est arrivée à Haricl dans l'édition des Teslimonia de saint
Cypri(;n du même Corpus ào, Vienne. Égaré par un manuscrit (ju'il
crovait de grande valeur, il a totalement défiguré le texte de saint
Cvpricn en mettant à la place des leçons les plus caractéristiques le
Mais, comme nous l'avons déjA dit, il s'est peut-être attaché trop servi-
lement à ces deux manuscrits et il a fait tioj» peu de cas des autres.
Sans doute, il faut se mettre en garde, eu matière de crilicpie
textuelle, contre l'éclectisme, qui n'est souvent que de l'aibitrairc.
Mais d'iui antiM! c6té, il est absolument cci-tain que <r<'\ccllentes
leçons peuvent être conservées dans des miiiiusciils lardifs cl même
",
1 I iigtlunensis 4.j2 (381) rontienl le cominenlairc ilii l'x. i.i nu l's. r.wwi. Cf !»(•-
Ii>]c, .\('lirrs ri extraits des manuscrits, l.XXIX. .!' l'.nl., pp. :t(ii-3GH. g(ic|i|tirs («'iiillels
Ps. cxMir, (), Zingcrle, d'accord avoc les meilleurs manuscrits L'VK.
retient la confundar cum respicio in mandata tua. Et
leçon no/i
pourtant il que la véritable leçon soit non confundar
semble bi<'n
cum respicio In oninia inandata tua. C'est en eil'et celle que le com-
mentaire exige impérieusement (1 Or cette leçon a été conservée .
sont conformes au manuscrit qu'il avait entre les mains. En ellet, s'il
pris et les remplace pai- d'autres |>lus modcines, moins barbares. |>lus
clairs. Nous ne faisons d'ailleurs aucune dillicMllé de reconnaître (|uc
I //( /'<. t wiii. al<'i'h, 13. ZitiRerli' a (railleurs adopU' la it'i on omniu à rcl endroit.
\£ TEXTK or PS.VUTIRR DE SAINT IIII.ATKK DE POITIERS. 69
(4^ In eo tamen quam non illius Dauid, sed illi Dauid praescribitur... In Ps. lxvui, 1.
(5) Absoluta res esset, si dictum esset; super manum dexteram iiiam. At uero cuin
ila dicitur : super manum dexterae tuae... In Ps. cxx, H.
70 HE\1:K niBLlQUE.
le mot qu'il e\[)li(pie (jui lui rappelle el lui suggère le texte ou les
textes ((uil cite. Toutefois ses citations ne sont cerlainrmml pas tontes
faites de mémoire, il y en a qui sont trlb-mcnt développées qu'il est
dilticib' d<' ri'oifc qu'elles out été laites nni(|iiemrnt de mémoire. La
I Propriclaleiii in-rlii siiu- lieltrairi siue ^.'rarci lalinila-.. ul in imillis. non elociila est.
In ps. LIV, U. V(tir daiilrt-s rpiiiar(|iii's du im^iiie nnirc : //* t's. r.xviii. larned. '.!, 14;
transibunt : clraco iste quem formasti ad inludendum ei [In Ps. li, 13];
la seconde fois, sous cette forme Hoc mare magnum et spatiosum; :
ibi reqiiiescet draco quem figurastl ad inludendum ei [In Ps. lxiv, 10).
(1) In Ps. cxxxi, 19. Dans le De Trialtate. il y a trois citations de / Cor. de neuf ver-
sets : Trin., m, 24; / Cor., i. 17-25; Trin., ii, 34: / Cor., xii, 3-11 : Trin., xi, 22; / Cor.,
XV, 20-28.
2 Sicut in eo psalino <[ui prirnus pro his qui inmutabuntur est scriptus, et il ajoute
après sa citation : et rursum in eodem... In Ps. lix, 2.
72 RKViK hiiu.inri-:.
le texte est partout identi(|ue. Los 100 autres, ou VO %, ont des variantes.
La |)ropoilion de ces dernièi'cs parait à première \ ne consid<'r;ible.
Mais il faut letranclicr une dizaine de citations (jni n'etaicnf dans la
'7.) Comparer un cas analoniie «linlervcrsion des sli(|iios, Ps. \xi, '.!'.!, libéra nie de oie
leoni.% et de manu cnnis (nHiiiam meam. Ce verset est rilé ainsi trois fois : lu l's. i.vi. i;
rales.
exemples donneront une idée plus juste de la précision
Uui'ltjues
de saint dans ses citations. Il a cité quinze fois différents
llilaire
forme In Ps. cxxvii. 10. Ajoutons enfin un exemple qui nous parait
tout à fait remarquable. Il s'agit de Ps. lxxvh, 2, aperiam inpara-
bola os meum. Saint llilaire cite ce texte deux fois. In Ps. i, 3, et
In Ps. cxxxvi, 2 (à ce dernier endroit lire parabola avec R, et non
parabolani avec G suivi par Zingerle). On sait que ce verset est
aussi cité par saint Matthieu, Mt., xiii, 35, avec une légère variante,
aperiam in parabolis os meum. Saint llilaire ne l'ignore pas et quand
il cite ce passage de saint Matthieu, il cite toujours le texte avec
cette variante, In Ps. i, 3 et In Ps. cxviii, nun, 12. On remarquera
que dans le premier cas, il accole les deux textes différents sans se
préoccuper de les harmoniser et de les mettre d'accord. Voilà assu-
rément un bel exemple de sa précision.
Nous savions déjà que saint llilaire était consciencieux et qu'il
ne se permettait pas le moindre changement à son manuscrit, nous
pouvons affirmer maintenant qu'il n'était pas moins exact quand
il citait de mémoire. Ses citations sont habituellement textuelles et
(1) Cf. Ps. Lsxxviii, 93 cl filius iniquitatis non adiciel nocere eum, cilé trois fois :
In J's. cxxxi, 10, au milieu dune citation de 19 versets; In Ps. cwxviii, 1, et In Ps.
cxxxix, 11.
RKVLK lilRLIQUE.
variantes ont été citées en note aiin que le lecteur soit averti de
rincpi'Hlude du texte et puisse se faire une opinion personnelle sur
la leçon adoptée. Si Tcnsemble représente bien le texte de saint
Hilaii'o, il plane nécessairement sur les détails un certain doute et
on ne devra s'en servir qu'avec réserve.
Résumons nos conclusions, l^es nombreuses citations que saint
llilaire a faites du psautier, surtout dans ses Ti'acfalus super psalmos,
ner, pour avoir sous les yenx une partie considérable dn texte du
psautier en usage en (iaule au milieu du quatrième siècle.
Nous avons essayé de le faire et nous avons l'espoir de mettre
sous les yeux du lecteur, qui voudra bien tenir compte des nuances
((ue supposent les leçons alternatives du bas des })ages, la physio-
nomie d'un texte ({ui ne s'écarte guère de celui du <|uatrième siècle.
que nous lui connaissons chez saint Cyprien. Lorsqu'il est question
du proprement parler du texte de saint Cyprien
texte africain, c'est à
qu'il s'auit. Chez lui le texte présente une unité et une fixité
en ell'et
qui mettent hors de doute l'existence d'une version latine des psaumes
en Afrique au milieu du ni' siècle, version qui n'avait peut-être pas
de caractère officiel, mais qui n'en était pas moins communément
reçue et adoptée par tous. Cette version suivit nécessairement les
évolutions de la laniiue et le progrès des études exég-étiques et théo-
logiques, les corrections se faisant insensiblement de manuscrit à
manuscrit, sans l'iiitervenlion de l'autorité ecclésiastique. On peut
assez bien distinguer chez les écrivains africains postérieurs à saint
Cyprien les traces de cette lente transformation à côté de la persis-
du w" siècle, ou bien est-ce celui de la lin du iV" siècle, celui que
nous révèlent les citations de saint Augustin et le manuscrit de
Vérone? Kt si c'est un texte dilférent, quelle est la nature de cette
différence? S'agit-il d'une version nouvelle ou d'une simple recen-
sion? A quel type de textes faut-il le rattacher? Voilà autant de
questions qui se posent naturellement et auxquelles nous allons
essayer de répondre.
C'est par l'étude de leurs traits particuliers ou de leurs diver-
gences avec un texte donné, que nous parvicndions à saisir leurs
I) (»n ne peut nu"'rc s'explir|uer I insistance (lu'oii a mise ;i nier Icxislonre d'uni' lati-
nité africaine. Il ne s'a^jit pas d'un dialecte latin. I.c latin de rAfrii|ue était celui <|u'on
jiarlait cl «ju'on écrivait dans tout le monde latin. .Mais ce nesl pas dans ce sens, à notre
a\is. (|u'il faut parler «le latinité africaine, (est dans le sens de provincialisme. L anglais
qu'on parle aux Klats-t framais qu'on jiarle au Canada, ne sont pas des dialectes
nis, le
menl, on connaît ces mots, ces expressions, mais on ne s'en .sert plus.
LE TEXTl-: W PSAUTIER DK S.VIM UILAIIii: 1>K POITIERS. 77
'.v. Gai.
XXVI,
REVUE BIBLIQUE.
/
l.K TKXTI- 1)1 l'SAiriliR 1)1^ SAINT llIl.AlKi: DK POITIEUS.
L\x\iii. ''.
dilecla amabiiia diieclissimae dilectissima ainabilia
lal>ernacula sunt sunt sunt sunt
domine habitationes
concupistil deus
déficit concui'iuil desiderat
in atria properal
domini ad atria
dei
PS. LXIY, 10
r.ix, 1 dixit dicit
a deXtris ad dexteram
meis ineam
donec quoadusque
scabellum subpedaneum scamillum
:î genui gênera ui
5 et cm. et
poenitebit poenitebitur
cxv, 15 pretiosa pretiosa est
sanctorum iustorum
cxvui. 1 iieati felices qui
imiïiaculati immaculali sunt
qui et qui
lege uia
2 beali lelices
scrutantur perscrutantur scrutantes
leslimonia martyria
103 eloquia (ief. uerba
inel mel et fauum
oii meo mel et fauum in ore meo
120 confige conlige clauis confige clauis'
infise de de
timoré metu
139 tabescere def. tabefecit
fecit
zelusmeus z 6 1 us d mus zelus tuus
tuae
uerba uerborum uerborum
cxix, 5 heu inihi heu me def. heu me heu me
quia quod quod
prolongatus longinquus
est factus est
7 oderunt oderant def. oderant
impugna- debellabant
bant
cxxiii, 7 erepta est def. eruta est
laqueo muscipula
uenantium uenatorurn
cxxYi, 6 euntesibant ambulantes
ambulabant
80 RKVL'E BIBLIOLK.
/'.N
i.K Ti'Xri': DU l'SAiTiEi; m: saint iiii.miu-: dk I'Oitikiis. si
avec lui que onze fois sur 100 leçons. Les trois ou quatre variantes
communes aux seuls textes de saint llilaire et de saint Augustin sont
absolument insignifiantes in infcnium pour in inferno au Ps. xv, 10
:
même aucune parcutr autre ([ue relie que peuvent avoir tous les an-
ciens textes latins, s'ils proviennent d'un aneèti-e couiniun.
Une seconde conclusion non moins intéressante, c'est que le texte
de saint llilaire contient une proportion [)lutùt considérable de leçons
africaines ou cyprianiijues, soit 11 leçons sur 109 examinées, dont la
Anima tio. Ps. lxviii, ^ô; cxxim, 'i- (animus) (^ii, .">, indignatio),
O'jyir. un mot cyprianiqne. Cyj>r., Orat., xix. Cf.
\^o\iv furo)', ira, est
Cogitatio, Ps. liv, 23, '^.ipv^.^x, Vic/g., cura. Nous n'avons pas le
texte de saint Cyprien, mais le mot est africain d'après von Soden,
/>as hilcinische Neue Testanienl in Afrika, Lei})zig, 190i>, p. ;}3G, Cf.
également chez Cypr., Ps. wxvi. 2(), <l / Tini., v, 11, iiiniorrs
n'est pas celui des Africains ses contemporains, et qu'il s'écarte en-
core plus de l'ancien texte africain, dont il a conservé çà et là quel-
(]ueséléments qu'on ne retrouve pas ailleurs. Quelle est l'explication
qui rend le mieux raison de ces faits? S'il n'est pas nécessaire de re-
courir à un ancêtre commun, il semble qu'il faille au moins admet-
tre une influence ancienne du texte africain sur celui qui devint,
après une longue évolution indépendante, le texte de TÉglise de Poi-
tiers, et sans cloute aussi de toute la Gaule.
/jositiis emendaram,
juxla Septuaginta interprètes,
et licet ciirsim,
18 S ï (\ 1 2 1
25 9 8(10 -2 — 2
Les points de rencontre avec le texte de saint llilaire sont un peu
nidins nombreux qu'entre saint Augustin et saint llilaire, 8 ou 10
contre 11. Mais les concordances exclusives sont plus nombreuses et
surtout plus significatives et il n'y a pas de doute que saint llilaire
est ti'op considérable pour que nous ne soyons pas invites à recon-
naître deux types de texte ditt'érents.
Nous savions déjà que le texte du psautier de saint llilaire n'est pas le
texte africain, nous venons de voir qu'il est aussi distinct du texte ita-
lien. La division en textes africains, européens et italiens, proposée
})arWestcott et llort, paraît donc devoir être appliqnéeaussià FAncien
Testament ou du moins au Psautier. Toutefois, en raison de l'affinité
des deux derniers i^i'oupes, on rendrait mieux compte des fails en ap-
pelant européens tous les textes qui ne sont pas africains. On pourrait
ensuite les diviser en textes italiens et gaulois. Le texte de saint llilaire
est en etlet gaulois par définition, et il a une physionomie assez distincte
et assez accusée pour que nous en fassions un type à part et un terme
(1) Une étude étendue de toutes les parties de la Bible de saint Hilaire nous a permis
de constater que son texte oflre à peu près partout les mêmes caractères, à l'exception
pourtant des Actes et des Epitres où l'accord avec le texte cyprianique, surtout dans les
citations du De Trinitate, est assez considérable.
i2) Voir par exemple In l*s. i, 13. 10, 17, où les deux variantes drcidet, Sang., Rom.,
et (le/luei. \'er., Vulg.. servent également a inspirer le commentaire.
3; Par exemple, casealos. Ver., et cnngiitalos, Vulg., l's. lxvii, 17; « utrumque id
fdniiabun-
lur (•>) (irmahuntiir rorinabiindir forinabunliii
cnalninl
cxi.vi, 09 oin. ol horbani
seiuiliililio-
minuin
aul. innn.
ad. et her-
bam... (3) ad. ad. ad.
cieux qu'ils sont, ne sont pas suffisants pour en tirer des conclusions
générales. Le fait ([uil signale si peu de divergences nous laisse
entendre (|ue les manuscrits avaient un texte à peu près identique, et
que les diilerences ne dépassaient pas celles que nous devons nous
attendre à rencontrer dans des manuscrits dun même type et d'une
même époque, alors que le texte n'avait pas la li\ité (|u"il a aujourd'hui.
A s'en tenir tout d'abord aux trois indications précises que nous
possédons, on distingue un second groupe de manuscrits se rappio-
cliant du Ver., du psautier Homain et de la Vulgalc, tandis f)ue saint
Uilaire est d'accord avec le Saiigrrmanen.^ifi. En réalité, nous n'avons
que deux exemples. (>ar il tant écarter le cas de P.v. cxxxviii. h».
Sans doute, roplehniilnr de ////., ai rrrahitnl de IVv., peuvent n'éti-e
il. lu aliquiliiis (((tliribiis ila s<ripluiii (lr'|iri'ben<iiiiui-. : inaniis luao fcccuml nu- cl liiivr
(2; In ipiiliii.sdam codicibus ila If^iiniis die roriiiabuntur. hi l's. i \x\mii. :!7.
Enfin, pour en avoir le cœur net. nous avons fait une comparaison
(1) Elle est très faible ou le texte était bien peu africain.
(2) Il faut [leul-ètre ajouter : ne corrumpas vel disperdas, /'s. r,vi, 1. Ne corrumpas
que semlile préférer saint Hilaire dans son commentaire est la leçon du Ver., ne disper-
das, celle du .S'fl??^.
88 RKVUE BIBLIQUE.
assez étendue des deux textes. Voici les résultats de cette enquête. Sur
environ 1.000 leçons examinées, nous n'avons trouve que 500 leçons
communes contre 1.100 leçons divergentes. Et encore la moitié de
ces 500 leçons se lisent-elles également dans le Te?-., et ne sauraient
par conséquent être comptées au même titre comme démontrant
la parenté intime du texte du Sang, avec celui de saint llilaire. ////.
et Sang, n'ont donc en réalité que 250 variantes exclusivement com-
munes contre l.j 00 leçons divergentes. C'est, semble-t-il, trop peu
pour conclure que les deux textes sont très étroitement liés.
Il faut d'ailleurs attendre l'édition du Sang, quo piojette la Com-
mission Jlrnédicti/ie pour la licrisio/i de /a Vulgalc et (juelîe a con-
fiéeaux doctes soins de dom de Bruyne, et nous nous abstiendrons de
préciser davantage le caractère de ce texte.
.
{Fin) (1)
Il est très vrai de dire avec M. .lundt (2) que Luther avait la passion de
l'absolu. Mais quand il ajoute que, « comme 1 apôtre, il était un esprit
tout d'une pircc, dont le premier besoin était la logique », il confond
d un esprit formé par la discipline gréco-latine et ce don
les besoins
des Allemands d'unir les contradictoires dans le concept de l'absolu
que Luther a installé dans Tordre religieux, longtemps avant qu'il
eut paru dans la philosophie de Hegel et de Schelling. Non que cette
recherche de l'absolu exclue une certaine logique emportée qui va
au bout d'elle-même, mais <dle lui permet, arrivée à cette extrémité,
de s'y concilier avec des notions contraires sinon contradictoires. La
théologie; qui s'était assimilé peu à peu la philosophie d'Aristote s'é-
fl Voir In llrriic «If juillcl <'l u< loliif l'.Ur. |'. i.")<i.
l.K CO.M.'SIKNTAIIU: DE Ll TllEK SL U L'Kl'lTUK AUX HUMAINS. 'M
très bien cette note, déjà rationaliste, qui voudrait seulement s'ins-
pirer du réel.
Le problème religieux ne sera point résolu en disputait des appé-
tits contraires ou des formes qui se succèdent dans les puissances :
l'homme est un, et c'est lui qui est malade. Le texte ne manque pas
de saveur Ex isiis palet metaphijsicorum theologorum frivolum et
:
A) F. 180.
(2) F. 183.
«»2 REVUE niBLIQLE.
pas.
Un esprit latin poui'rait épronvei' les mêmes tendances à la simpli-
fication; mais il resterait lixé dans la négation; il n'essaierait pas,
ayant détruit le surnaturel, de le reprendre en associant les contra-
dictoires. C'est à quoi Luther était tout disposé. Il est inutile de lui
objecter que, dans son système, Dieu veut et ne veut pas le mal, que
l'homme est à la fois juste et pécheur. Il en triomphe. C'est la doc-
trine profonde inaccessible aux sots. Il se grise positivement danti-
tlièscs (ju'il prétend résoudre à l'unité. Voici quelques exemples,
empruntés A sa doctrine reliiiieuse, mais qui témoignent des disposi-
tions de son esprit. Ce n'est pas son système qui l'a conduit malgré
lui à des contradictions; son penchant pour l'absolu, unissant les con-
tradictoires, le prédisposait au système, puisqu'il les accueille avec
joie : adluic nidiores sunt, qui voluntatem maU ideo removenl a DeOy
ne peccarc eum cogantur concedere (1)... Vcra csl isia : Dciis vull
maluni et peccata,siciit et illa : Deus intelln/il malum seu pcccata...
hec surit vcra: Deus ruU maJum, Dcum rull bonum; l>cus non vuit
nialinn, iJcus non rult bonum. Évidemment, quand il s'agit de Dieu,
notre pauvre petite intelligence est fort embarrassée. Elle ne se fait
pas d'illusions, si elle est sage, sur ce que ses alfirmations ont d'insuf-
mais enfin elle s'exerce de son mieux, non pour définir Dieu,
fisant,
h^rgo sibi ipsis cl in veritatc iniusli sunt, iJco autcni proplcr hanc con-
fcssioncm peccali co^ rejjutanti iusli;7'c vera porca tores, scil reput a-
lione miscrentis hri iasti: ignuranlcr iusli cl sric/t/cr iniusli : pccca-
lorrs in rc, lusti aulrm in site \'.\ . Le plus f<trl est (pi il appuie ses
contradictions sur Aristole < bien compris >. il lui parut sans doute
j)laisant d'accommoder sa théorie de la Jn•^tilic.•ltion à celle de la puis-
s.ince et l'acte. Seulement, clic/, lui. c'est l;i mènie (pialilé <|ni est en
(I I". -n.
\1j Kn 1518, Demili;-I'\ui iiii. II. im,. m. le 2.
'J F. 10.").
Li: COMMEMAIUI:: DE l.LTIlKll SIR LlilMllU-: AL\ r.UMAl.NS. '.)3
Le libre examen est le résultat le plus net d'une réforme qui, à ses
débuts, exagéra notablement le domaine et le caractère de Tobéis-
sance. Cette surprise est assurément la plus piquante de celles que
réservait la découverte du Commentaire. Excessif en tout, Luther a
commencé par exiger l'obéissance envers tous les prélats, envers
tout le monde, et à donner à cette obéissance le caractère de la foi
théologique. Il faut voir cela de ses yeux pour y croire. La théologie
refuse la foi aux hérétiques parce qu'ils choisissent ce qu'il faut
croire. Eh bien, il en est de même des orgueilleux : Ita et siiperbus
quisque in suo seiuu semper opponit se vel precepto vel consilio recte
monentis ad saliUem. Cui cum non crédit, similiter niJiil crédit et
periit tota fuies propter unius sensus pertinaciata (2). Voilà donc
la foi perdue pour un refus d'obéissance, même à un conseil, et Luther
allait bâtir tout l'édifice de la Réforme sur la foi seule! Ce n'est
point une exagération qui lui a échappé; il insiste, et précisément
pour montrer qu'on ne peut être sauvé que par la foi. Les hérétiques
prétendent croire en le Christ, mais ils ne croient pas en ce qui est
de lui. Que sunt illa? c'est-à-dire, quel est l'objet de la foi? Ecclesia,
se. et omne verbum, quod ex ore [jrelati Ecclesie procedit vel boni et
sancti viri Christ i verbum est, qui dicit : « Qui vos audit, me audit ».
Qui ergo a prelatis se subtrahunt, verbum eorum nolunt audire, suutn
autem sensum sequuntur, quero, quomodo in Christian credant (3).
(1)F. 266 S.
^2) F. 86.
(3; F. 83.
<»'t
HKviK r.iiu.ioi 1-:.
du su})érieui' » (1 i !
(lui peut être certain d'avoir la foi? Il faut se jeter éperdument dans
riiumilité (Jnc ciim ila si/if, in immensum nos oporlcl humilitiri.
:
Oiiia (Uni no)i [lossimus scire, an in ont ni verho Ik'i viiuunns nul nuJ-
oporif'l f ufjero bona cl assumcro main et lior ipsiun non voce lanlum
et ticlo corde, sed pleno afjeclu con/ileri el oplare, nos pterdi et datn-
nari i'v\... Ce n'est ({u'imiter le Cluist, Luther blasphème déj;"i à un
moment où il se croit encore le lils le plus soumis de l'Kglise : Oui,
il dit du Clirist :' r/nod realUer et vere se in eterna^n thunnutionern
obtulit Dco pniri pro nobis ,5). C'en est fait, il a hasardé le saut péril-
(1) F. «8.
!•. HÎJ.
,ï)
(4) F. 220.
(5) F. '^1H.
(6) F. 21 H.
l.K CnMMtMAlKK DE LL THt:i5 SI |{ I/KPITRE Al \ liOMALNS. 9o
lum (11.
vocabuhim l'stnd « mstilia » tanta est mihi nausea audïre, ut non tam
dolerem, si qnis rapiitcun mihi faceret. Et tamen sonat iuristis seniper
in ore. Naturellement; c'est l'office des juristes! Mais aussi quelle
race! Non est gens in mundo in hac re indoctior quant iuriste et
boneintentionarii seu sublimale rationis... Universalis ergo institia
est humilitas (3)... Puisque tout le monde a tort devant Dieu, on ne
cipiatur homo diligere se, sed ostendatur vitiosus amor, quo diligit se
(1) F. 28S.
2} F. 288. Sed liabent mmc iurisle pnlcram glosam, quia orationes liorarias orare
lion est prcceplum, sed « légère » seu «diccre ». Sic enim pondérant canonem in ver-
bis ac sic sccuri strrtunt. Certaines plaisanteries ont la vie dure. Celle-ci rappelle le pro-
pos d'un doyen pendant un orage « Ce n'esl plus le moment de dire l'office, mais de
:
prier Dieu ».
(3) F. 273.
('ii F. 273.
.10 IU-:VIE BIBLIQUE.
(le facio, II. (l. c/n'vt(s ts loi un iii te cl versas in lui umore?n, u ijuo non
reclificaberis, nisi penilus cesses le diligere et oblitus lui solum pro.i i-
nium (liligas (1). Exagération, siil)tilité, conti'oseiis... Que pouvait-on
attendre d'un esprit dél)ridc, qui se Jouait dans le paradoxe coninic
dans son élément?
11 n'avait que du mépris en passant pour les simples, rudiores, in-
régulière.
Nous avons déjà rencontré des preuves de sou hostilité contre les
Aristotc, ce n'est pas (ju'il lui préfère iMaton, comme certains huma-
nistes, et il ne Soupçonne pas du tout qu'il renxerse l'édilice de la
Les choses, dans saint Paul llom. viii, 1!)\ iiémissent en atten-
dant l.i liln-i'té (les enfants <lc Dieu. I.ntiiri' l'ait {\i' cette \ni\ uiu^
(I, F. 3:<7.
^2) F. lîn».
I.E r.OM.MENTAIlîl-: Dl- I.ITIII'R SIU I/KPITHI-: AIX ROMAINS. '.t7
Huius autem erroris tota substantia est Pelagiana opinio. Nam etsi
nunc nulli sunt Pelagiani professione et titulo, plurimi tamen sunt
re vera et opinione, licet ignoranter [k)... Et encore : Ideo absurdis-
sima est et Pfdagiani errori vehementer patrona sententia usitata,
qua dicitur : « Facienti quod in se est infallibiliter Deus infundit
(2) F. 199.
(3) F. 305.
(4) F. 322.
r.lîVUE BIBLIOl c 1916. — N. s., T. xiir. 7
<J8 RLVLE BIBLIQUE.
vcl passe. Inde enim tota Ecclesia pêne subversa est, videlicet Imius
vei'bi fidiicia (1).
Sur le célèbre axiome : « A celui qui fait ce qu'il peut, Dieu donne
inlailliblenieut sa grâce », le P. Dcnifle a dit le nécessaire. Il a rap-
pelé que, dans son sens vrai, suppose l'action de la grAce dite il
topicjuc.
Luther, formé par la théologie nominaliste, n'éprouvait le besoin
de s'en détacher que lors([u"elle paraissait accorder trop ù, la nature.
Qu'on puisse aimer Dieu par-dessus tout avec les seules forces de la
nature, c'est un blasphème pour le néophyte de l'augustinisme, pour
celui qui a mesuré — et exagéré — le danger de la concupiscence.
1 F. :{23.
(2) Dkmi i.i;-P\<.»uiKR, II, W'. citant édition <if Wciinar. IV. M.J. i.
peut encore refuser d'accepter vos dispositions! Et s'il lui plaît, il les
acceptera quoique vous soyez dépourvu de tout don surnaturel ! Ainsi
tout dépend uniquement de sa libre volonté. Pour un esprit épris
d'absolu comme était Luther, ce qui était possible absolument ne
deviendrait-il pas le fait? La grâce infuse n'ayant plus sa raison
d't'tre, fallait-il la conserver?
Arrêtons-nous, nous entrerions déjà dans la discussion de son sys-
tème, et nous ne cherchons que les dispositions qui devaient y con-
(1, Or.CAM, sur I Se7it., dist. 17. qu. 1, M, cité par DENiFLF.-PAoïir.u, I!I, 198 : Et ilaista
opinio maxime recedit ab errore Pelagii, que ponit Deum
non posse necessitari
sic et
vérité tic loi. Très souvent, avec un tact merveilleux, Ancustin adoucit
lui-raènie par une nuance ou une distinction ce qu'une expression a
de trop dur. Peine perdue pour les esprits absolus qui font profes-
sion, comme Luther, de mépriser les distinctions. Après Luther, .lan-
sénius, Baïus et tant de jansénistes ont mal compris la pensée augus-
tiiiienne. parce qu'ils se sont butés à des expressions, sans tenir
compte du sens général. Le P. Denifle reconnaît très nettement que
Luther s'est ai>puyé sur une exéùèse inexacte de saint Autrustin, et
qu'il s'y est cramponné comme si saint Aui^ustin était l'Kiilise, et
<•
2, Simili (iiiK rilule aginihn Thomislr, Scnlixlr cl alic série, i/ui srripta et vcrhn
suoruiti aulhorum iln drfenfliinl, ul spiriluiii n<in snlnm rohlevinanf (/urrrrc, srd cliniii
nimio vciieralioiiis zrlo crlitKjutnil, satis firbilifiH. \i vciIki ttiiilnni Irnituil, >iifnii sine
spirilii. F. IG.").
vide Taulerum, qui pre ceteris hanc maieriam preclare ad lucem dédit
in lingua teutonica (5).
C'est bien la théologie allemande qui entrait en scène.
(1) F. g. 83.
(4) F. 203.
(5) F. 205.
102 REVUE BIBLIQUE.
pas d'un système arrêté, à retrouver bon gré mal gré dans saint
F*aul. Mais il n'hésite pas de nn-me manière sur tous los points.
la
non sans tenir compte des exceptions, c'est pour mettre dans une
opposition plus complète les temps anciens et l'Évangile, la tolérance
patiente de Dieu et sa justice accordée. A prendre la situation an-
cienne sous son aspect le plus favorable, le judaïsme, elle était encore
profondément triste. Le péché d'Adam s'était répandu dans toute
l'humanité; loin que la Loi ait été un remède, elle n'avait fait qu'aug-
menter le nombre des transgressions en multipliant les commande-
ments. La volonté n'y trouvait aucune ressource, se révoltant plutôt
contre le précepte, de sorte qu'elle se laissait aller au mal. Mais avec
transformé. A cause de son sang versé pour nous.
le Christ, tout est
Dieu pardonne à ceux qui croient en lui. Par la foi, par le baptême
qui en est la démarche extérieure, on est uni au Christ. Si par la
faute d'Adam les hommes ont été constitués pécheurs, par la grâce
du Christ ils sont constitués justes. Le changement qui s'opère dans
l'âme est si profond comparé
mort suivie de la vie. Il y a
qu'il est à la
donc chez un réef principe de vie, qui est la charité que
les chrétiens
Dieu a pour nous, répandue en nous par l'Esprit-Saint qui nous est
donné. Assurément Paul ne se sert pas des termes d'Aristote; il ne
distingue pas Tàme de ses puissances, ni la charité, vertu infuse dans
la volonté, de la grâce sanctitîante qui se greiîe sur l'âme. Mais il
aftirme que le chrétien est désormais mort au péché, et par suite affran-
chi de la Loi de Moïse. Et par la Loi. Paul n'entend pas seulement la
loi cérémonielle; non, il s'agit bien de toute la loi, même morale, en
tant quelle constituait un régime distinct. Bossuet l'avait très bien
compris : « C'est donc donnée à Moïse, cette loi si
cette loi sainte du
Décalogue, que l'Apôtre appelle ministère de mort, et par conséquent
104 REVLE BIBLIQUE.
la lettre qui tue (1). - .M;iis r.Vpr)tro n'avait pas, pour autant, renoncé
à la morale éternelle. Il l'envisageait désormais comme une loi nou-
velle, la loi (le la nouvelle alliance, la loi de la charité. Ses exii;ences
ne pouvaient que dépasser celles de la loi ancienne, mais désormais
le chrétien savait y satisfaire en obéissant à l'Ksprit dont il était
animé, (alertes le péché n'avait point renoncé à la lutte. Il semble
même, à lire J*aul, qu'il avait encore cpielque point d'appui dans la
chair luttant contre l'esprit; mais il n'était plus le maître, il ne domi-
nait pas. (hi était en somme délivré du péché, pour passer au ser-
vice de la justice (Kom. vi, 18).
Comment Luther a-t-il pu aboutir, en se servant de saint Paul, à
un résultat diamétralement opposé?
Le vice radical de son argumentation est le défaut de sens histo-
ri({ue. 11 n'a pas tenu compte de la situation concrète dans laquelle
l'Apùtre s'était placé. Toutes ses paroles s'adressent à lui, Luther,
moine augustin, profondément pénétré du danger et de la puissance
de la chair. Tout ce que Paul dit de l'impuissance des «euvres pour
parvenir à la justice, le moine le sent intimement; il n'est (pie trop
convaincu par son expérience personnelle. Cette lutte tragique de la
volonté avec le péché qui habite dans la chair, combien de fois ne
l'a-t-il pas éprouvée? C'est donc bien le péché (|ui liabite en nous.
(1) Premier sermon pom \o jour ilr l.i PenledMc, d .i|iri'^ Il (or. m. T.
'•'
F. l'>r, s.
LE COM.MENTAlKi: lit: Ll TIIKR Sl'll I.IilMTIŒ AUX ROMAINS. \0o
nant (3 Mais un sens littéral qui n'est qu'un sens humain ne saurait
i.
(1) F. 19, 75, lli; cf. 184. 11 a même avec raison rejeté comme violenta l'explication
de saint Augustin qui entend le naturalitcr de ii. 14, des gentils convertis, F. 41 s.
;2) F. 169.
(3) F. 171.
(4) Nous avons vu plus haut qu'elle se Iieurte au texte grec.
lOG lŒVUE BIBLIQUt:.
teni iam non rgo operor illitd, set/ t/uod habitat in me peccalnm
,Mi, 17). Voilà qui est clair. Et les théologiens ne s'y seraient pas
Nihil ergo nunc damnationis Hcel non nihil ppccati, ut dictnm est,
fjiiia " carne serriunt legi peccati », ce (|ui maintient la doctrine nou-
V(dle, en évitant une opposition trop ci'iante.
Nous avons tenu à placer dans son contexte le texte qui a l'ait une
si grande impression sur Luther. Peut-être, selon son expérience, était-il
(1) V. 17?
(2) r. I-
LE CO.MMENTAIRi: DE LLTIIEU SLR L'EIUTRE AUX ROM\L\S. 107
il l'aut avouer que le texte qui a tant fra[)pé Luther était emliar-
(1) Opus imperf. contra Julian. (429-430^, II, C, 226. cité dans Demile-Paquier. III, 30.
pensée d'Augustin; 2-; qu'il connaissait parfaitement le vrai texte qu'il a commenté comme
tout le monde dans ses gloses de Pierre Lombard (1510-1511); .3"; qu'il s'est obstiné en
citant désormais toujours à faux; 4°) que Mélanchton a complété la falsification. Mais
Denifle, citant d'après le ms. du Vatican, n'a pas écrit concupiscentiam que ce ms. n'a-
vait pas. le copiste ayant omis de transcrire ce mot ajouté en marge. Ficker (I, p. xli) a
osé dire que ce petit mot fait tomber en pièces l'attaque passionnée de Denifle. M. Pa-
quier a très bien répondu qu'il ne change rien (III, p. 17!. Je pense que la correction de
Luther prouve qu'il a relu Augustin. Un ne peut donc pas l'excuser sur une erreur de mé-
moire. La falsitication demeure et parait ainsi plus volontaire. S il laisse les deux mots,
c'est que peccatum =
concupiscentia. Aurait-il donc cité Augustin contre son propre
svstème .'
lOS REVUR lilHl.lnl E.
le péché n'a pas été enlevé, c'est dans l'ànie que le cliangement doit
avec insistance, que ce n'est point le péché quiest remis c'est l'homme ;
avait raison.
Avec son bon' sens latinisé, le P. Denille a fait remarquer ([u'en
réalité lAme ne meurt pas dans la justification, et que c'est précisé-
ment dans le système de Luther qu'elle n'est point réellement chan-
gée (2;. Qu'importerait à Luther? Il se moquait des contradictions,
nous le savons; il y voyait le sceau divin de sa doctrine (3). Et, sur le
point qui nous occupe, il eut sûrement conscience d'avoir trouvé un
principe nouveau, celui que les protestants opposent aujourd'hui
encore aux cathoLuiues, la réforme morale de la volonté, substituée
1 r. l'.'i.
(Il F. 164
(2; F. 167.
;3; F. 155.
110 KEVUE niBLlOLE.
non régénéré. Il y aurait grand intérêt, pour une exégèse tout à fait
exacte, à ne pas préciser ce que l'Apùtre a laissé dans un certain
vague.
Le péché, d'après lui, est quelquefois le péché originel, d'autres
fois le péché actuel ; mais, quand il est question comme ici de régner,
de dominer, de commander, il est personnifié comme un être qui
aurait son existence propre; c'est presque un principe du mal, un
démon qui chercherait à établir sur nous son empire, en se servant
naturellement de ce qui reste encore de charnel, mais non de pecca-
mineux en nous. Le péché est toujours présent, et menaçant, mais du
dehors.
Tandis que pour Luther, c'est bien le péché originel qui demeure,
et il a conscience de s'écarter sur ce point de l'opinion des théologiens :
(lue ciim lia siiit, ant erjo nwitpiam inlelle i i^ aut non benc sntis de
peccato et rfratia thcologi scolastic? sufi/ loculi, qui originale talion
auferri somniani sicnt et actuale, quasi sint quedani aniovibilia in
iclu oculi, siciil ténèbre per luceni, cuni, antiqui sancti patres Aurju-
stiniis, Anibrosius mullum aliter sint locuti ad moduni Scripture, illi
gnage de la conscience. Cela est dit dès le dehut i'Jsi ims nulluin :
(1) F. ION.
LE COMMIlMAIUE de LUTHER SUR LÉPITRE AUX RO.NLVINS. lit
pas tenu pour péché, il n'était pas imputé : Ita mecum piignavi,
nesciens, quod re?7îissio quideni vera sit, sedlamen non sit ablatio pec-
cati, nisi in spe, i. e. auferenda et data gratta, que aiiferre incipit, ut
non imputetur ammodo pro peccato. Le péché n'est pas imputé! For-
mule importante, car elle est biblique Beatus vir oui non imputavit :
Illorum vo.r et doctrina est : iustus est, qui hec et hec fecerit ; istoruni
(c'est de lui qu'il s'agit) auteni hoc : iustus est, « cui Dominus non
imputât peCcatmn La conséquence avait de quoi faire frémir le
» (2).
plus intrépide il fallait donc que Dieu tint pour justes ceux qui ne
:
hors des règles du bon sens. Rien de pénible comme de voir Luther
s'embrouiller dans ces notions d'intrinsèque et d'extrinsèque. Intrin-
(1) F. 69.
(2) F. 104.
(3) F. 104.
il2 HEVUE iJlBLIQUE.
puisque tous ont eu eux le péché? alors le mol est pris dans un dou-
ble sens; il signifie 1° en réalité, 2° à nos propres yeux Intrinsece dico :
iustitiarii — sout justes à leurs propres yeux, donc intrinsece [!) iusti,
tamen gratiam non merito nostro accipimus, sed est donum (2). Tou-
tefois c'est bien à la fin du chap. m
et au courant du chap. iv qu'il
établit sa doctrine de la justice réputée. Si le terme parait aupara-
vant c'est que déjà sa conviction s'était formée d'après un pre-
mier aperçu. Et lorsqu'il continue à parler comme la théologie
catholique, il faut souvent l'entendre dans son sens à lui. Je ne
crois pas qu'il rende témoignage à la vérité par une contradiction (3),
quand il dit à la fin du chap. iv Mors Christi et mors peccati et
:
mors eius non solum significat, sed etiam facit remissionem peccati
tanquam satisfactio sufficientissima Et resurrectio eius non tantum .
(1) F. 14.
(2) F. 149.
nnn gralic 1). On voit qu'il n'a pas perdu de vue ses adversaires, et
il n'a pas voulu étaler pour ainsi dire sous leurs yeux une contradic-
tion aussi grossière. Ou bien il a ainsi fixé par une note la pensée des
scolastiques, opposée à la sienne, ou, comme je le crois plutôt, il faut
supposer son système à lui, qui n'exclut ni la rémission des péchés, ni
le don véritable de la justice, mais qui les diffère jusqu'au moment de
la mort. Dans le passage que nous avons cité, Luther ne renvoie pas à
une comme le pense M. Ficker (2), mais à une
citation d'Augustin,
théorie où il explique qu'on ne
fort étudiée (3), meurt au péché
qu'une fois, parce qu'on meurt ainsi au seuil de la vie éternelle [k).
sa doctrine.
nous ne pouvons savoir à quel moment précis il
Si est arrivé à la
justice imputée, du moins nous pouvons apprécier les arguments
scripturaires qui l'ont décidé.
Us ne manquent pas d'habileté, et la façon dont il a commenté
saint Paul fait encore loi pour un grand nombre d'exéuètes pro-
testants.
Au lieu d'entendre justifier dans le sens de rendre juste, il le
(4) F. 157 s.
(5) F. 55.
LE COMMENTAIRE DE LUTHER SUR L'ÉPITRE AUX ROMAfNS. lir,
sit apud Deum. Et ita non est operantis, sed Dei acceptantis fidem
eius ad iustitiam. Et encore qui i\ist\^OQ.t per gratiain. Impium,
:
i. e. qui ex se non nisi i?7ipius est, coram Deo reputatur se. a Deo
(1) F. 65.
(2) F. 85.
(3) F. g. 37. Nous n'insistons pas ici sur l'exégèse du ch. iv dont nous avons parlé dans un
article précédent de la Revue, 191i, p. 494 ss.
Iir, REVUE BIBLIQUE.
omne honwn nostnim, quod est Christm. Sicut apostolus dicit : Qui
nobis faclus est a Deo sapientia et iustitia et sanciificatio et redem-
ptio ». Que oninia in nobis su/tt non nisi per fidem et spetn in
ipsum (1).
Peut-être Luther a-t-il cru de bonne foi ù cette époque qu'il rem-
plaçait un prédicament d'Aristote par la présence vivante et agis-
sante du Christ (2). Oiiclle émotion dans cette expression intime :
habiter le Christ dans une âme souillée par le péché, cette innovation
est loin de rehausser le Christ comme il le prétend. Sans parler des
raisons de convenance, lEsprit du Christ est vraiment agissant dans
l'Ame fidèle, sa grâce est un don qui la constitue juste : Sicut etiimper
inobedienliam unius hominis peccatores constituti sunt multi, ita et
per unius obedientiam iusti conslituenlur multi (v, 17). Luther trans-
crit ce verset sans l'honorer d'un mot, même d'une glose. Son siège
est fait. Il est t;n possession d'une doctrine : péché non imputé, justice
réputée.
Mais pourquoi la justice est-elle réputée â quelques-uns? A s'en
tenir â ses préoccupations antérieures, la réponse était fournir par
la mysti(|ue. Dieu justifie, c'cst-A-dire répute justes, ceux (jui se re-
connaissent pécheurs. Cette solution vient souvent, et nous en avons
rencontré l'expression très nette. De même Dieu sauve ceux qui s'a-
(1) F. \Vi.
(2) lienide lui a reprot lu- un peu lourdfiinonl tic faire du ^hri^l unr i/ii(ilili\ ce «jui
charité (I Cor. xiii). Mais entendre la foi comme Paul, c'était la pren-
dre avec la charité, ce que Luther ne voulait pas. L'entendre avec
la précision théologique, ce n'était pas distinguer les chrétiens jus-
tifiés etceux qui ne le sont pas.
Cependant il y a toujours de la ressource quand on prend les con-
cepts dans un sens vague et mal défini. Nous avons vu que Luther
confondait la foi et l'obéissance, étendant le domaine de la foi même
lux conseils d'un supérieur. Et si l'on devait tenir par la foi qu'on
3st pécheur, pourquoi ne tiendrait-on pas par la foi qu'on est jus-
(1) F. 138 : Igitur « Charitas Dei » que est purissima affectio in Veum, que sola
facit rectos corde, sola aufert iniquitatem, sola extinguit fruitionem proprie iustitie.
Elle en faisait tropl il a fallu la réduire.
118 REVUE BIBLIQUE.
texte de saint Paul. Après la glose interlinéaire (vni, 16) : Ipse enim
spiritus sanctus, datas nobis testimonium reddit confortando
fiduciam in Deum..., Luther note en glose marginale Quia qui con- :
fidil forti fide et spe se esse filimn Dei, ipse est filius Dei, quod sine
spiritu nemo potest. Unde b. liernardus ser. i de anniinciatione Domi-
nica (1). Le text^ de saint Bernard est reproduit tout au long dans
les scholies, pour montrer comment le témoignage de l'esprit est
bien la confiance du cœur. Cependant saint Hernard parle d'un triple
témoignage de la foi : tu dois croire que tu ne peux tenir la rémis-
sion des péchés que de l'indulgence de Dieu que tu ne peux avoir ;
mentiim fîdei, de la foi qui sera la sienne, qui n'est complète que
lorsqu'elle est en même temps confiance personnelle, partiiipant à
la nature de la foi necesse est ut spiritus facial te hoc credere, quia
:
est, quod ad eam divino munere sis perventurus. Il faut avoir foi
(1) F. g. 73.
(2) Necesse est enim primo omnium credere, i/itod remissionem pccratorum hnbere
non possis nisi per imlulgcnlinm Dei. Deinde, quod nihil prorsus hahere queas boni
opi'.ris, 7n.si et
| hor dedr.rit
| ipse. Posiremo, quod ctcrnam vilam )iuttis potes operibus
promereri, nisi gratis detur et ilta.
F.E COMMENTAIRE DE LUTHER SUR L'ÉPITRE AUX ROMAINS. 119
omnes anhelant miro furore. Sic eni?n per timorem gratia invenitur
et per gratiam voluntarius homo efficitur ad opéra bona. sine qua
(1) F. 197 s.
(3) F. 324.
1-20 REVUE BIBLIQUE.
{Fin) (1)
Chypre.
delà duquel subsiste un morceau du fond qui s'y rattache par une
gorge, extérieurement par un filet suivi d'un cordon de longues
perles et de doubles petites perles alternant.
Sac7'i/ice d'Abraham.
derrière son dos, la f^auclie i)endant ni avanl. Le texte cependant iMdi<|ue justement (p. 7)
(Il Ici encore, l'aulei formé dun l»loc. l)rul du dessin donné dans mes Kcbords de tables
byzantins était inexact.
croix, "Opa to -pcoaTov wç k-l tcU sTa'jpoy Toy ç'jtoj •/,p£;jLX[j.£Vov (2) », et
(5) « 11 ne faut pas non plus négliger la raison de symétrie, évidemment cherchée par
le sculpteur, qui lui a fait placer aux deux extrémités de son marbre un édicule sem-
blable, l'autre étant l'édicule de Lazare » [Ibid., 1. c).
(6) Gen., XXII. 4-6.
(7) Étude sur les sarcophages chrétiens d Arles, Introduction, p. x. Le Dictionnaire
type resté sans explication satisfaisante, Abraham est accompagné de deux assistants ».
(8) Ibid., pi. III et p. 5.
(9) Ibid., pi. V et p. 10.
Les sarcophages chrétiens de la Gaule, pi. XXVII, 1
(10) el p. 100-102. Voy. aussi
Garrucci, Storia dell' arte cristiana, t. V, pl. CCCLXVII, l et p. 100.
124 REVUE Rim.loLL:.
les (rois autres qui tiennent un volumcn n'ont leur présence en rien
justifiée par le texte des livres saints; et, en outre, devant Abraham,
entre Abraham et le bélier, sont encore un homme et une femme (1),
le premier, visible seulement en buste, peut-être encore simple assis-
tant (2), mais la femme, dont le geste de la main gauche, sur laquelle
elle appuie son visag'e, est celui qui sur les monuments anciens, païens
ou clirétiens, exprime l'aftliction. sans doute la mère d'isaac, « figure
introduite abusivement, comme l'ont souvent fait les sculpteurs, dans
une scène où elle n'aurait pas dû paraître (3) ».
Trouvé en 1909 par des habitants du village de Karava à Lampousa
près de Lapethos, province de Kerynia, sur la côte nord de Chypre (4).
Jadis au château de Kerynia. Musée de Chypre à Nicosie.
Fig. 1". —
nebord orné de reliefs pro- au premier abord, paraît ditlérente.
venant de Lampousa. Musée de Chypre trouvé
Daniel en elfet se .serait à
à Nicosie.
droite (0) et le lion qu'on voit sur
la partie conservée, assis sur le train de derrière, la patte droite
de devant levée, est assis à gauche. Le lion retourne toutefois
(4) Voy. entre autres Garrucci, Storia dell arte cristiana, t. V, pi. CCCXVIII. 3;
CCCXLVIII, 1 ; CCCLXVI, 2 et 3 ; CCCLXVII, t 2 et 3; CCCLXVIII, 2 ; CCCLXXXIV, 3 et 5 ;
CCCXCVIII, 4.
(1) Voy. Le Bi.ant, Les commentaires des livres saiyils et les artistes chrétiens des
premiers siècles, Mémoires de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, t. XXXVI,
2" partie, 190t, p. 15-16, VI, Habacuc et Daniel.
(2) Van Rouais, Notice sur une en bois recouverte de cuivre repoussé
petite seille
trouvée dans le de Miannay, Bulletin de la Société des
cimetière mérovingien
Antiquaires de Picardie, t. XI, p. 139-147 et planche, et t. XII, p. 279-288; Le Blant,
Note sur quelques représentations antiques de Daniel dans la fosse au.r lions, Mé-
moires de la Société des Antiquaires, t. XXXV, 1874, p. 77-78 e( pi. III, et Nouveau
recueil des inscriptions chrétiennes de la Gaule (Documents inf'-dils sur l'histoire de
France), p. Gi-dC, n- /|5.
(3) Rebords de tables byzantins, 8-9. Lapethos don vit-nnonl les deux fragments
p.
genterie trouvé à Chypre, dans Le Musée, t. lil. 1900, p. 121-129 et pi. XIX-XXI, et
l. IV, 1907, p. 156-160 et pi. Byzantine art and archacolngy, p. 572-576
XXIV; Dai-ton,
et fig. 57-62, 3."»!, 355, 357-361). il y a encore an Louvre, provenant de Lapethos, du
village de Karava, donnée en 190| par M. Hoysset, ancien consul de France a Larnaca,
une curieuse inscription chrétienne, que j'ai jadis fait connaître, qui, destinée à <^lre
placée au-dessus de la porte d'une maison à titre de protection et de sauvegarde, repro-
duit le texte du Psaume xv « K(ûpi£) tî; napoixT^aei <v tm
: <Txr,vii)|AaT( oou f,
Tt; xa-anaûaei év ôp(ei) àYto) «rou u (liullrtin de la Société des Antiquaires, 1901.
p. 18:)-l!i2, cl tirage à part, Communications de t'.iDl, \\. 0-13).
(4) D'après une photographie fournie par M. .Markides, conservateur du ( >|iru.s .Mu-
séum À Nicosie.
.MKfANGES. 127
comme d'ordinaire, mais, comme sur les rebords |8l, [21 et [34],
de perles mii formes (1).
Sacrifice d Abraham.
Le fragment dans le Catalogue du Musrn de Chypre :
est ainsi décrit
manteau, tenant
,
le couteau dans la
,
, ...
mam
droite
mine. Musée de Chvpre
à Nicosie.
(3) Il semble bien que ce doive être ce rebord, plutôt qu'un des précédents, que dans ma
communication à la Société des Antiquaires du 4 avril 1900 [Bulletin de la Société des
Antiquaires, 1900, p. 15!» et tirage à part. Communications de 1900. p. 17), j'indiquais,
d'après des renseignements d'ailleurs très vagues, comme recueilli à Salamine de Chypre.
(4) Les clichés des figures 19, 25, 31, 33 et 34 nous ont été prêtés par la Société natio-
un listel, <au
lonç. 0"'ll. Les reliefs sout limités intérieurement par
delà duquel subsiste fragment du fond uni qui s'y rattache
un étroit
par une gorge, extérieurement par un filet suivi d'un cordon de
perles (1).
David et Goliath.
un arbre limitant le tableau (5). Les restes visibles, pour peu qu'ils
le paraissent à première vue, pourraient donc à la rigueur s'accom-
moder à un(! de ces scènes de combat.
(ly La 1res pclile t'-lendiK' suli.sislantc ilr la ranK''C nt- iicrrnci pas de ((tiislaler si les perles
(:<) Ibid., I. c.
lig. 57-58.
iMh'LANCKS. 120
f'ronte (5) », —
mais, ces deux moments, Ton ne s'étonnera pas que
la représentation les montre plus ou moins combinés.
se voit sur l'un des plats du trésor de Lapclhos (2) et que, (juoi(jue
nous n'ayons [)as d'indication sur le lieu exact où fut mis au jour A
Chypre notre fragment, il n'y aurait rien que de naturel à ce qu'il
eût été trouvé, comme le fragment |21J, à Lapethos, à la rigueur
même qu'il eût appartenu au même monument.
llti/pt'f (.3). Kappoité en 19()() par M. Couchaud, boursier de voyage
(4) IIkiion dk Vii.t.i'KossK cl MrciioN. Mitsi-r ilu Laurrr. ni-itnrlrmrul des {iiilufiiilcs
rjreci/iirs et romniiifs, Ar(/iiisilioiis ilr Innnrc f.Kir,. w t.\.
f.'.j Inventaire M.M). 7'«:{.
(*>; .M. NVuinr. llrsrltnihniKj ticr (ilfrlirt.sHirfirn /{ildwrrl.r. p. 11. ilil :« zirei ziisam-
mrnprissrnile llnirtisliirl.rn mais un
», la plniirlie pi. III) miinlrr rarronl <lan moins
nn leiiliiiit'lre dans la j.tinlic ijii personna;;o.
Ij Dessin de M'- E. M. dnpres un croquis pri- imi l'in'i .m Mns.r .1.' IU'iImi .! la |i|io-
lo>ya\urr dr la pi. II! du ralalonue du .Musée.
MEI.ANCKS. iru
tient dans la main a été expliqué comme une corde (2), par laquelle il
tirerait une panthère, ou du moins un félin, dont les pattes antérieu-
res subsistent dans l'angle en bas ; l'aspect pourtant ressemble peu à
une corde. De main gauche, appuyée elle aussi sur la cuisse, il
la
porte debout, appuyé contre son épaule, un gros bâton recourbé (3).
A droite, haut du corps dune femme dansant, la tête inclinée entou-
rée de ses bras ramenés, les mains jointes,
au-dessus d'elle (i) : son buste est entière-
(2) Wli-kf, Besclireibung der altchristlicheii Bildwerke, p. 12, avec un point d'inter-
rogation.
(3) M. Wulff (1. c.) dit une massue.
(4) Les cymbales qu'indique dans le texte M. Wulff (1. c.) ne sont pas reconnaissables
sur la photographie.
(5) Besritreibutuj der altchristlidien Bildwerlie. n" 22 (Inv. 4140) [Strzygowski. 794]
et pi. III.
(6) Dessin de M""= E. M. d'après un eroquis pris en iyo9 au Musée de Berlin et la pho-
togravure de la |il. III du catalogue du Musée.
13-2 UEVUE BlBLlQri:.
ti) I>(;s.sin d<; .M"" K. M. d après la n-piodiK lion donmi' dans STii/.M.n\N>hi. I\i>idische
h inisl, p. 10().
h Du bord uriKinal, <•( ril M. SlrzynoxNski Jlud., p. 10(ij, il lU" rrsle qui- la baiulf
MipHrifiire mutilée. » Il faiil adineiln*, dans notre hypothèse, «jue de ce rûlé se prolongeait,
non pîis le relmrd lui imMne, mais le fitrid du bassin.
MELANGES. 133
(1) Les termes dont se sert M. Strzygowski (1. c), « eln kronendes Profil », ne sont peut-
être pas aussi clairs qu'on pourrait le désirer.
(2) Il n'est désigné au catalogue (p. 105) que sous ce titre : « relief avec la représentation
du sacrifice d'Abraham )>, sans aucune indication sur le genre de monument d'où il pour-
rait provenir.
(3) Le fait que, comme dans tous les exemplaires, la face i|ui porte les reliefs est polie,
tandis que la face inférieure est simplement dressée, corrobore cette opinion.
(4) M. Strzygowski ^p. 106) le déclare nu et remarque que la nudité à'Isaac caractérise les
représentations de ce qu'il appelle « le groupe syro-égyptien )^, en opposition avec les repré-
sentations romaines, et en conclut que, si le marbre doit être du marbre importé, la sculp-
ture du moins a été exécutée en Egypte. La nudité d'Isaac, d'après la photographie, ne me
parait pas certaine.
(5) « L'objet visible à droite derrière Isaac, écrit M. Strzygowski (1. c), pourrait bien re-
présenter l'autel, non genou de l'enfant. »
le
(6) Étude sur les sarcophages chrétiens d'Arles, pi. III et p. 5, pi. VI cl j). 10, p. 54;
Les sarcophages chrétiens de la Gaule, pi. XVII, 1 et p. G3, pi. XXVII, 1 et p. 101.
Marbre blanc. Haut. 0"'2(i2; long. 0"'335. Les reliefs sont limités inté-
rieurement par un listel, au delà duquel subsiste une étroite bande du
fond, extérieurement par un
cordon de perles allongées et
de doubles petites perles al-
ternant . Le fond a reçu une
ins(i'i[)tion copte, dont on re-
connaît le début de douze li-
(I; I.a «lin-rlioii du visant". iVAlirn/i(ini luc |ii\r,iil s (.\|ili(|uiT loiil iiMluii'ili'iiinit par ce
srnliincnl. M. Slrzyf-ONNski |>ourlant insisir à deux reprises (l.r.) sur If lait seul qu'il
rcK^rilf' a nauclir, « ( esl-à-diri' dans la dire» liou o|i|k)S(^(' h la grande main île l>ieu n, « il
esl exceplionnel ((u Aliraliam Icturnc la Iclc vers la i;aui lie laiidis ([uc la iii.iin se luonlre
à droite ».
relicid 35 .
MKI.ANfiES. 135
suspendu un petit sac, qui doit être la peva pastoraiis de David dont
parle iKcriture ^1). 11 s'agit, comme sur les rebords (4], |23] et sur-
tout 38 arec lequel la similitude est grande (-i), de David s'apprêtant
à attaquer Goliath : « E/ lidil bnculum suum, quem seniper habebat
in manibits (3 . »
Musée du Louvre.
garnit le menton. A droite, tronc d'arbre vo-
lumineux, portant l'amorce d'une grosse branche coupée et une se-
conde tige couronnée d'un triple bouquet de feuillage. Entre la tête
et l'arbre, objet indistinct, semblant une sorte de coupe pro-
fonde ou de corbeille. Traces d'une représentation à droite de
l'arbre.
au del;\ duquel subsiste Tamorce du fond qui s'y rattache par une
gorg-e profonde, extérieurement par un filet suivi d'un cordon de
perles allongées et de doubles petites perles alternant. Le revers,
sinqdement dressé, montre net-
tement le fond du bassinet le
profil du rebord allant s'amincis-
saut suivant la courbe.
Quadrupède, dont la croupe
manque, terrassant un Ane. Le
fauve, que ses formes trapues, sa
tète aux joues portant un collier
de poil, ses oreilles épaisses sem-
blent caractériser comme un
— ours, fortement appuyé sur ses
Kig. 20. Rebord orné de reliefs provenant
d'Egypte.Musée du Louvre. pattes de derrière et tourné à
droite, enfonce ses gritfes, l'une
Sur son dos, au niveau des épaules, une sorte de bosse, où sont mar-
qués trois trous, difficilement explicable serait-ce une indication de :
A((|uis à la v(mte des 9-10 mai 1912 (0). .Musée du Louvre ").
{').) HÉRON IIE VlM.KKOSSK cl MlCIlUN, MUSCC dll /.OIH'IC, Dc/Xirli liiriil ili\ iniliijiiHeS
(6) lliitoN iiK Vit.iKKOssK cl Mir.iKtN, Muséc dll Louvre, pr/iarlrinrnl drs anfii/uilés
grecquis ri romaines, Arquisilions de l année lUI'J, n° 15.
l-ig. '27. - f'ragiuents d'un rebord orné de reliefs provenant d'Égyple. Institut archéolosiMuo
de l'Université de Tubingue. ('Eïr.^tefU àf/aw/.oYr/:/., 1!H4, p. "U, l'ig. 1^2.)
lion, à droite, la tête de face, dévorant un âne tombé sur les genoux,
le museau touchant terre, semblable à l'une des figures des rebords
deux autres étant seulement voisins. Fig. 28 et 29(4.). Marbre grec (5).
Les reliefs sont limités intérieurement par un listel , au delà du-
quel, sur le premier
quatrième fragments, subsistent des
et le
(2) M. Xyngopoulo 1. c.) dit, ici encore, une 8opy.â;, mais ici l'animal, avec ses cornes,
est nettement reconnaissable sur la ligure.
lig. d». — Fragments d'iiii rebord orné de reliefs proveiiaiil d'Ésypte. Musée des anlic|uilés
nationales à Stuttgart. (*Est,;ji:'/i; àfyta.v.oY.xr,, lOU, p. 7(i-77, fig. 13.)
dun collier, de profil à droite (1). Devant elle, un arbre, puis lion
tourné t\ gauche, saisissant dans sa eueule un animal fuvaut.
Kig. Ht. — i'iUn'inciit.s d'un rflmid orne de irlicls |ir(iM-Manl «IKgyiiic. Musée des anlii|uil('s
nalionaies à Stuttgart. CV-r'/MiU ifn^t'-Vovi,,, HiM. p. 7(J-7-, fig. l».i
II. I.inii, ;i gauchi', l.i Iric de face, d<''\<traiil un aiiiiii.il couchr siu-
t; Ihiil.. p. 2(11.
MELANGES. 139
*^
(1) Ibid., 1. c. Les têtes de Minerve et d'Àpolloti, d'après M. Xyngopoulo (p. 79, n. 1),
Provenance inconnue.
(1} IIkiion itK Viu.KPossF. cl MiiiiioN, Mnséc du Lnuvrr, héparlcmcxi des tnili'piUés
grecques et romaines, Arquisilions de iannrc l'.KI'.i, n° 7. I.c Louvre a acquis en im^ine
temps par les Sfdns de M. Seyinour de Hicri un fraurnenl de rebord de forme sensililemenl
analo|{ue (fhid., n" 8), mais qui ne saurait |>rendre pla( e dans la série i|ui nous o(( ii|ie. Il
est rouvert de earactércs arabes el d'autres earaet»>res ocrupeni encore ïr |)eu <|ui subsiste
du b)nd. L'époque est donc tout autre, il n'y a en outre |>as trace de reliefs, ni listel
a l'intérieur, ni cordon de perles à l'extérieur, il sapit, h vrai dire, d un fragment d'une
de CCS stèles funéraires arabes d'un type parti< ulier dont il sera question plus loin.
(;>j inventaire .MNU. Ht\>..
CCCLXVI, 1.
(5j L'expression « trouvé à Paris >, quoique précédée des mots « provenance inconnue »,
induire en erreur. Le fragment aurait été, croit M. le D' ('a|>ilan, rapporté d'Italie.
MKI.ANGES. 141
représentant Daniel et que l'est celui de notre rebord [21], mais les
pattes antérieures en avant, les pattes de derrière ramassées et la
croupe haute, comme sur le point de bondir, la queue ballante
passant sur la colonne, tourne vers lui sa gueule grande ouverte. A
droite, personnage vêtu d'une tunique courte et, seinble-t-il, de
pantalons, encore en marche, le corps penché en avant, la tête de
profil à gauche, apporte au prophète une corbeille oblongue sur
laquelle sont posés quatre pains ronds, qu'il tend de la main
(1) HÉRON DE ViLLEFOssE et MiciioN, Muséc (lu Louvre. Département des antiquités
grecques et romaines. Acquisitions de l'année 1903, n" 10; Rebords de tables byzan-
tins, p. 13-14, n" 5.
droite. La pose du l)i'as î^auchc est confuse ainsi que l'objet qu'il
paraît tenir.
Il pourrait aussi, au premier abord, y avoir doute sur ce que re-
présente le relief visible sur le fond derrière le personnajïe. L'appa-
rence vaguement triangulaire sinmlerait assez bien celle d'une grande
aile attachée à son épaule. Les anges, toutefois, rappclons-lc, s'ils
('>.) GAiiuir.ci. Slnria ilcii urir crisliana. l. V, pi. (('( Wlll, '
cl |(. 'l'i. Vo\. aussi la
seilln inérovinnionnf «le Miuminn, |irfs Al)l>e\illi', Lk Hi snt, Mémoirrs <lr la Sucii-lë na-
tionale des 4iili(/unircs de France, I. XXXV, lH7i. |)l. III el p. ('•".» cl Nonrcau licrueil
dex inscri/ilions clirétiennt's dr In Caulc, p. Gl -<>(;, ii" 1."».
f:{) llmoN i)K Vii.i.KH)ssE cl MiciioN, Musie du /.nurrr, hiparlnninl dis aiiliiiuHis
fjrrri/iics ri rnmnitirs, Acqiiisilious dr l'aiiiirr lUI'i. ii" t.. Il se poiirr.iit. d .iprts des
iiidicalions intcrtainrs, i|ue li- rcliil \iiit d llalir.
(4) Inventaire MND. loll.
MlilANGES. d43
au Musée du Louvre sur une plaque de la collection Pavent qui fut rapportée de Crimée,
en 1856. Une plaque analogue bordée d'oves et de perles montre Jouas vomi par la ba-
leine. »
(1) Le niel extérieur ne seinl)lc pas al)SolMinenl rcdili^nc, mais il ne pciil saf^ir il Un
reltonl eirculaire. Voy. les rebords 29 el 38', el aussi le rebord |2 .
mais la pliolo«raphie donne l'iniiiression d'un rebord, sinon absoluinenl. bien peu s'en
faut, reetilinne el il faudrait, pour adrnetlre un nionuinenl rirculaire. su|>p(tser un diamè-
tre lU'tnesuri' (voy. de infime le fra^nienl firérédml .
[4] et [23], mais je ne suis pas sur ([ue le coude levé à la hauteur de l'épaule ne soit pas
dû surtout à une maladresse du sculpteur et l'on ne peut vraiment dire avec M. Ebersolt
(Revue archéologique, 1913, 1, p. 336) « On est saisi par cette attitude si naturelle [il
:
du Musée de Constantinople.
lures grecques, romaines et byzantines
d'après une note d'une étude de M. Pantchenko insérée dans le
lUdlctin de l'Institut impérial archrolorjir/ue russe de Constantinople (2 ,
m
Il ressort du corpus ainsi établi des tahles ou l.tassins à rebords
ornés de reliefs qu'il y a lieu, d'après la nature même des sujets
auxquels ces reliefs sont empruntés, d'en distinguer trois groupes V).
Il est d'abord quelques exemplaires, en très petit nombre, dont les
reliefs sont « païens ». Le plus caractéristique k ce point de vue est
sans doute l'exemplaire du Musée de Vienne [7j, où, — négligeant
même la tète tourelée placée dans l'angle et le personnage nu tenant
nn peduni i\o lune dos faces, (pii peuvent n'avoir pas au point de vue
que nous signalons pour l'instant de signilication drlinie, il n'i'U —
reste pas moins que le sculpteur a donné la place principale à une
divinité, porteuse du sceptre, assise dans un char que traînent deux
Centaures. Le rebord du Musée de Herlin 24 y sera joint, sur lequel
se voient un Sati/re et une llucchante ou Ménade (5). Viennent en-
suite le rebord du Musée d'Athènes provenant de Xauplir 10 orné ,
(1) A>i(if,e und Oi/zantiiiisc/ic h'icin/iinist (uis auslihidisc/icm mid Miindioirr l'rirnt-
hexilz, (lias, Kcramili, /{ronzen, Arbrileii in Slein. ncfjyplisc/ic hliufinule. Au/Uion ht
Miinrfieit in (1er daleric JfeUiing von •JS-.'iO orlahcr 191.:, n' 58. La description, en ell<"-
môine insiidisanlc pour classer le fragiiiont dans la si'rie <|ui nous ocnipe, fait suilc à cflle
du rebord [19 aver. l'indicalion » Desi/fcirlicn <>. F,e D' P. ArndI, dans le court avis dont
il a fait prect-der le catalogue, indiquant en outre (\i\>' les olijets |)ro\iennent pour la |du-
parl de la collection d'un élraniicr de distinction, «pii par des vo\a;;es eti Asie Mineure a
eu l'occasion de les ac<|U(Tii' sur place, il est vraisemldaltle ipie le rehord, s'il ne vient pas
lui-im^Mic, comme ce dernier, de Tiirse, doit du moins provenir d Asie Mineure.
(2) Trois reliefs trouvés dinis la hasilif/ue <lc stondios ii ('(ntsitinlinople, /liillchn
(Izvjeslija), XVI (p. 1-:{5λ et pi. I-III), p. .\^,
I. n. t.
(i) Voy. le.s reinar«|ues r|ue fait dcjà ;\ ce sujet .M. Xynuopoulo et le parallélisme (pi'il
étaldit sur ce [loint avec certaines autres cal(*}j;ories de sculptures on dohjets. c(Mnme
notamment les sarco|ihnnes dits d'Asie Mimure "i; ;pr, |iepi ; àp-/at'<) o y' >^ r. l!M4,
p. 2Gt-2r,.!;.
{Uj '<
Fragment païen i- , dit M. Mendel (Cnlnlnijur du Musrv dr (iinslanlinuplr. t. II,
p. '127).
MÉLANGES. 147
do Centaures marins et d'une tète qu'on a cru être celle d'un Nep-
tune, et celui du Musée de (lonstanf inople 14 ontiôrement occupé par ,
des AVmV/^.s- chevauchant des monstres marins, sous cette réserve ce-
pendant ([uc, |)liis encore que les motifs du cycle bachique dont quel-
ques-uns même ont pu se g-lisser dans les représentations de l'ait
chrétien primitif, les motifs du cycle marin n'y sont pas rares ri),
La Néréide, en particulier, rappelle avec raison M. Mendel (2), « ap-
paraît très semblable au type qu'elle y revêt sur le célèbre bénitier
de plomb de Cartilage », Il faut ajouter encore le rebord de Stuttgart
[32 en ce qui concerne les tètes de Minerve et éC Apollon qui y figu-
i,
logie de Kaufinann.
(4) Sur le rebord [32 sont encore des enfants portant un sanglier suspendu à une
perche et une femme agenouillée donnant à boire à une panthère.
(5) Exemplaires Q\ [H], ^12 26). 11 faut ajouter
, le fragment )40j avec une lèfe
seule et le fragment du Louvre 29), où il ne reste qu'une tête et un arbre.
6) Il est faux de dire, avec M. .Xyngopoulo )'Eçr,(X£pl; àp-/aio),oY'.7.r,, 1914, p. 77), que
ces têtes ne se rencontrent que sur les bas-reliefs représentant des poursuites d'animaux,
— nous avons mentionné, outre la prétendue tête de Neptune du rebord [10], la tète tou-
rclée de celui du Musée de Vienne 7), où les animaux n'interviennent pas. et jamais sur —
aucun de ceux inspirés par des scènes bibliques sur le marbre du Musée d'Agram [5], entre
:
le Jonas de la face antérieure et les Apôtres du pourtour, une tête. Saison ou Vent, est,
(8j II est abusif, nous l'avons noté, de qualifier, comme le fait M. Sticolti (Die romi-
scfie Stadt Doclea, représentation du rebord de Doclea [6] par exemple, au(|uel
p. 152), la il
admises et sur les objets servant aux (idrlcset dans les édifices coiisa-
ci'és. Les cudiers faisant partie du trésor de Chypre dont nous avons
parlé, par exemple, portent nombreuses, dans leur cavité, soit des
bêtes féroces, soit d'autres animaux au galop (1) et il suffira de citer,
(lu Louvre [18 et à plus forte raison des scènes pastorales, comme
j
celle du rebord ;34i, dont en passant nous avons indiqué des analo-
gues sur des sarcophages chrétiens (5).
Le troisième groupe, enfin, puise sa décoration dans les récits des
livres saints et c'est la majorité, puisque, de quarante exem})laires
énumérés, à eux seuls les sujets bibliques ne se rencontreiil pas sur
(1) Dai.ton, Calalof/iic of cfirli/ chrisUnn (inliiiuUies, n"> 414-424 c\ \\\. \\\
(2) E. Renan. Mission de l'Iirnicie, pi. XLIX et |». fi(t7-02r), SiO, 86y-870.
(1) Voy. Mendei., Catalofjue du Musée de Conslanlinople, t. II, p. 429 « Ces frag- :
menls proviennent, soit de tables, qui devaient servir à quelque cérémonie du culte,
soit de bassins circulaires, plats et sans [irofondeur. qui devaieni avoir aussi un rôle
dans la lilurjiie. »
['1) Beschreibuiig der aUchristllchen Bildner/œ, p. 11 : >< Uie )i. 22 und 23 beveist,
enslamtnrn dièse Gerdte ursprunglich deni profanen debrauch. »
« II w ; £ V i 7_ cô (1 a T t ôj v ~ o y. î à v w v è p w v 9; a r, o i y.
•. •/ v v |a â - w v
'. li. t: a v t o ô a tî wî <;> •/; .
^
Ç w o) V è v.( 3 a { V V T a t v r: o y. a à v 6 p w t: w v î v 5 â À u. a t a
i t ,t (3 v
t à / 6 r, o î 'j 6 v- oj v tw , ij. , v
5 à t: po T = -j
y_ tj. £ V wV , y. a •
o £ v ô p to v s • y. 6 v £ : . /.ai ; t £ p a a ). ). a [Ji y p ; a . «
loO HKVUli: BIBLini K.
avec tous ses disciples et chacun de ses miracles, tel qu'il est rap-
porté (1) », les noces de Cana, le paralytique enq)ortant son grabat,
l'aveugle guéri, l'hémorrhoïsse, la femme adultère, Lazare. Et
S. Asterins un tel étalage sans valeur morale la véritable
oppose à
mise en pratique des enseignements di\ ins.
L habitude existait donc, à supposer que le prédicateur ne force
l)as la note pour mieux agir sur ses auditeurs, de faire reprc'senter
les plus connues des scènes de TÉvangile jusque sur des vêtements
p. 1G5, 168) "Otav o'j V èvS-jaâ |xevo'. çavôxriv lô; Toï/_ot if£Yf,a|i|i.£vo: îtapàTo. v
: " ,
(jjvT-^Y/avô/Twv opûvxai... l'.y.iï Éovxe; xat TtapSàXcii;" àox To;y. ai TaOfo;, ' /.
xai x-jve;" -j'/.x'., xa: TrÉTpai xal àv5pï; OrjpoxTÔvot, xal 7tâ<7a t?,; y.r, , r, t( ç, t. ^^ i i;
£«'. Tr,oeui7'. ç (Al ii.o'j|X£VTi TTiv yûiTiv. "K5e yàp toù; Toîyou; a-JTtûv (X(5vov, cl); |jlt,
£ 1 X£V , Xa l T a; '.
X t a ; X ij (X i T rj af à ) > à r, ôn xa i toy ; / 1 t ôi v a; xa i tà é v è xe { v o t ;
'.(AaTta. '0(30'. Ô£ xai oay.: -ôtt r/ outo-J vc wv [iv -Jixîvj eO) a^iatepoi, àva-
>. £ $ â |j. £V 1 T T, V e V «YY £ '/
'.
X r, •/ l oTop ta •; t o î ; -j
^avta î ; ;î ap é 5 wx«v aùt ov ), é y o) tov
XptijTov r, |i(ôv lAîtà -zG)'! |iaOr, T'ôv à7;avTwv' xaî tû v Oau(x.aiTi wv ExaTTov, on
r, 5 1 r,
Y Tj <j i ; i/t:. ••
''ij La inalijrre <rl les (liin(;nsioris, à linviTsc, soni prtM iscnifiit !<;> raismis i|ni ('iii|>(( liPiil
lie croire destinée à «les usages iiUirf;i<Hies une «oniie de |il(iml), • piriola coppa di pioinbo ><.
acbeléc par M. Dressel a Home el (|iii, |iiirliinl an ri'titre un niédailloii avee le Socri/icc
d'Aliialiiiin, sur le |ioiirl()ui, enlre deux rangs de i>erles. Jonas, ixniiel. des dauphins,
poissons el aulres animaux, sérail A ces litres à rn|i|>r(i(lier de nos rehords Menoi:!., Crtta-
lorjiir ilit Miisvr (le Coiislfinfinnplr, I. II, p. i'.l'.t, : fondue sans aucun «loule à plusieurs
exemplaires, une telle coupe de vil métal • probnbUincnlc servi conie ustensile délia
iiieiisn uelle pnreli doniestiche n iielle aijnpi erislinne » Ihilleltino di (irehenlogin
MELANGES. 151
cristiana, 1879, p. 133-134 et pi. XI, 4). Il n'y a pas, en revanche, je crois, à tenir compte
du rapprochement indiqué aussi, mais dubitativement, par M. Mrndel {\). 488) avec une
petite frise en terre cuite du Musée de Constantine (Doup.i.et et Galckler, Musée de Cons-
tantine. Musées et collections archéologiques de l'Algérie et de la Tunisie, pi. XII, 7 et 8,
voy. aussi p. 111 « Ce sont, écrivent MM. Doublet et Gauckler, en en parlant (p. 64), des
:
appliques portant en relief des sujets moulés et (luelciuet'ois retouchés ensuite à l'ébau-
choir, d"un travail assez délicat. Les [fragments] les plus importants, composés d'une série
de morceaux maladroitement rejoints avec de la colle forte, semblent représenter un cer-
tain nombre d'épisodes de l'éducation d'Achille au milieu des Centaures. »
nncli den bacchischen Darstcllungen und Formen derselben zu schliessen,... den Zwec-
hen des Mali les. »
(2) Tbid., I. c. : « sei es als TiscJiplatlen, sei es als Scliiisseln ».
(1; Ibid., I. c. : « Dieinnen pnlicrle Wolbunfj erhcbt sich iiber dm {liorizonlaly) ab-
stehenden Handstiicken in cinen nach ausseu abgeschragten Stffj. »
(2) Ibid. : « Geffissrand..., RandslUdi eines flac/if/ewolblcn Bec.ens. »
(6) AnlUie und byzantin ische h'iein/iunst. Auhliou in Miinchcn in der Gairrie llel-
bing von 2S-:iO oclober [>. 4 « Fragment ran Itande eines grossen Mnrmor-
/.'//.',', :
beclien.^. »
(9) 'E5r,|X£pîç àp/aio/.oy.y.Ti, I9l'i. p. 70 : " IDàE TpaTi^sTiÇ /ot tt t avix r,î. «
([ui a été conservé du fond. Mais telle n'a pas dû être sa destination
primitive et l'épitaphe y aura été g'ravée après coup (8j. La coupe, en
effet, paraît tout à fait celle de nos rebords, assez différente, par la
mince plaque qui les constitue, de celle des encadrements des stèles
dos Musées du Caire et d'Alexandrie et de plus, sur ces encadre-
ments en saillie de stèles, dont tout le décor est une guirlande de
tige de vigne au trait plus ou moins stylisée, jamais n'apparaît comme
sur le marbre de l'Ermitage de scène figurée en bas-relief.
Les Arabes mêmes ont gardé la tradition et aux stèles coptes peu-
llulleltiiio ili urrlicolorjin r sloria dulmahi, I. WIN, I'.mh, |). fij cl pi. IV. i,
(1) et '..'
:j.Voy. aussi deux slék's de Damas, M. V. Bi:Rciir:M. Insi /iiifleu nus Sijririi, Mesopoln-
mien uiid hlrinasipti goaninmcll. im Jalirr ISs:> von M. von Oppciilieiin, I. Arabisc/ie
Inschriffeu Deut^cii cl P. IIaipt, Dcitrdgc ziir Assyiiologie inid seinitisclie Sprarh-
wissensr/iaft, VII, t, lîiOO;, p. ir)0-l.">l, fifj. 25-2(;, rilt'cs jiar M. Mendel, Catalogur du
Musée de Cotislantinnplc, l. II, p. 428. Le fra^;iiicnl ra|i|iorh' ati Louvre par M. Seyinnur
de Hicci (IIkik» de Vii.lrkossk et .Mi<;iio\, Dépnrlrnienf drs nnlir/tiités r/rrci/iics et
romiiiiics, Arf/uisilinns dr iinniér i'KtO. n' S), iiieiitionné inridcinininl plus liaul. ap|iai-
Uenl k une sli-io de ce \f,enrc.
(2; VjesnUi, t. .\, 1908 9, p. 213.
(3) Ihid., p. 214.
riae de ce genre, que dans la suite on élevait aussi sur les tombes
des simples mortels disposées dans la muraille horizontalement,
:
(1) Environ^ d'Antinoë, stèle datée de fan 406 de l'ère des Martyrs ou 750 ap. J.-C.
{Biilletlino cli arcfieologia e sloria dalinala. t. WIV, 1901, p. 62).
(2 Ibid., p. 63-64.
(3 M. Briinsmid, nous venons de le dire, d'après le même point de départ, en fait un
monument funéraire.
(4) BuUetlino di archeologia e storia dalmata. t. XXIV, 1901, p. 6i.
(5) Ibid., p. 63.
(6) Dessin de M'"" E. M. d après lafig., p. 63, du Bullellinodi archeologia e storia dalmata.
loG HI'VLK HIBLIOIE.
tout cas, tombe pour tous les autres exemplaires, dès (juc, précisé-
meut, l'on constate que par cette forme rcxemplairc de Salone est
isolé.Sans vouloir d'ailleurs nier les relations de Salone avec l'Egypte,
(jui servent de titre à l'article de M. Strzygowski, et même en faisant
(1) Bulletin archéologique du Comilr, is'.».".. y. .Tl'.i: (ri hmom-Canmiai , Hmieil din-
c/iéologii- orirntnlc, I. II, |>. 1H(I-I81.
'?.} M. Slrzy;'()\v>ki lui-mèiiif (cri>nil en Icnniii.inl [liuUedino ili iirr/H'uloi/in e storia
dfihiHtln. I. ,\XIV, 1901, p. G.î) « Oni fv <iurstn foi nui dclle tniolc dnllorr in uso
:
nnr/ir in ftrcidentc f la la cono.sco, corne ho drlln fin oia sollanio in h'yiflo: almeno
neli Oriinfc non ho iiicontralo niciitc di consiinilv. »
(:i) /iriichf iiher Aiisornbiingrn ni (irndo, Jaincshcfic dcr ristcircichischen archdolo-
sont bien constitués par une table entourée d'un rebord formant
légèrement saillie, les autels en question montrent une disposition
toute ditlcrente de ce rebord, qui fait corps avec la niasse et dont les
sujets se présentent au regard non borizontalement comme sur nos
rebords, mais verticalement (3 .
»
p. 5.34 : <
Les oblations n'étaient point flé()Osées iininédiatenient entre les mains des jirélres,
tionarium. C'étaient des espèces d'armoires, probablement mobiles, jilacées prés du dia-
conicum où se recevait d'abord tout le pain et le vin offerts par le.s hommes entre les
mains du diacre, par les femmes entre les mains de la diaconesse. Les indications don-
nées au mol " Oblntionarium » par Kriej; dans la Heal-hnrtjclopiidie der c/instlic/icn
Alterlliiimer de Kraus (I. Il, p. 510-017) sont un peu difTérenles . Oblalionariuin, :
dans l'éjilise d'Occident, lable, aulel portatif ou armoire dans le voisinage de l'autfl ou «lu
diaconirum, ou les oblala étaient apportés et les éléments du pain et du vin pnur l'Eu-
cliarislic étaient pris |)armi eux el préparés. Le nnm d Oldalionarium, côié duipiel int( r i\
vient au>si celui de paralorium fcrédencc ou dressoir,, a la ihême si^nilicalion que lappel-
lalinn grecipH- piolliesis, qui a également passé dans le langage liturgique de l'neciilent
(Oriln roin. II. 9 : dcinde arrhidinmiius suscipit (dylnlas diins de oblalionario el dnl
liDutiftci. >• Voy. aussi Ihid.. t. Il, p. (tC,\-G(V.i, s. v. « J'nd/iesis n (helleslieimi ;
•
Prollic-
sis T.yj'iti'.;, Par prolhesis on entend dans l'F-iilise orientale d'abord la place
credenlia .
attenante au trône de l'cvéque ou se fait la ri'<eplion des oblalions du (leuple. mais aussi
la pelile laide dis|iosée rfiiilre l'aulel sur b' mur de li (oiiclia sur la |uelli' ••laient déposés
(5) La seub- donnée que nous ayons à ce point de vue est la plira«e relative à l'exem-
plaire de Wiildiii 7 ; rs stnnd inif riitrr Si'lulr
'I l ( rlirrfiirhl drr l;iinsl/ii\l<)risclirn
rallierait M. Mendel (1), qui, — reprenant une idée déjà émise par
M. SVuIll' : « l'adoption du décor séi)ulcral chrétien indique peut-
être leur emploi dans les agapes ii) énoncée d'une manière moins » et
nette par M. Ebcrsolt « ils sont très pro])ablement les bords d'un
:
(1) La description des différents exemplaires, pourtant, est dans son Catalogue précédée
des mots « bord de bassin ou de table » et l'en-téte des pages y correspondant porte « bord
de bassin ».
par les sculpteurs et les prières pour les morts ne pourrait-elle pas
être cherchée dans une autre voie?
Les anciens explorateurs des catacombes, et de Rossi après eux',
déclarent y avoir rencontré plus d'une fois « des fragments de grandes
tasses de marbre, minces, diaphanes, à fond plat, de forme circulaire
et à rel>ord assez bas (-2) ». « Des fragments considérables d'une tasse
de ce genre, dit de Rossi, ont été retrouvés dans la basilique de Saint-
Alexandre sur la voie .\omentane; et moi-même je les ai vus de mes
veux au moment de l'excavation posés à terre à côté du tombeau
et de l'autel des SS. Alexandre et Evcntius. Enfin, dans l'insigne
penser à de l'eau bénite. C'étaient des fontaines d'eau vive, non des
vases d'eau stagnante qui aux premiers siècles de la paix ornaient
les atria des basili(|ues; et les fidèles s'y purifiaient les mains avant
d'entrer dans le temple. Que de cette eau sacrée on mît des récipients
près des tombeaux nul témoignage, nul indice n'apparaît dans l'an-
ti({uité. Il est vrai (jue (iuillaume Durand dans son linlional {)V\ et
rcinaniui' aussi [Iteruv iirrlirnlogh/iir. V.)t:t, t. I. \>. :{;{S-:{3Î>), mais sans s'allachcr a la
raison, «juc " Uavid maniant la fronde, le péché d'Adam et d'Kvc. le sacrifiée dAhraliam,
riiisloire de Jonas » ont «'té .souvent sculptés sur les sarcoplianes du w' >ii'ilc <l constale
seulement (jue, en raison de la miiireur des reiiords, les sculptures n'onl pas le modelé
de celles (|ui deeoreni les marbres des lombes •.
plats diaplianes ([ue jai trouvés, dit de Rossi, parmi les matériaux
(I; /,« Homa soUenanca rrisliaufi. l. 1. |). 2SA-:>.s', . Voy. aussi l. III, |>. .^O-'i-iOfi «'1(117.
(3) tliu. ecclcsiast., VI, G (Mi^nc, l'atrol. yiarca, I. XLVII, |), 130j.
n'ayant rien à faire avec elles; sur le fond môme de ce qui touclie aux
noir (lu Miiséi^ Kircher, sur lequel sont figurés au-dessus do tiges
d'acanthe et le Christ accompagné
de masques de divinités marines
des Douze Apôtres et la Vierge avec l'Enfant visité par les Rois
(1) (iAniH(.';i. Shtnn drll tnir crislimui I. NI. |il. ( DWVII, ."i t, cl |>. 3.t.
(h) Diclionmiirc. U'arcliéolor/ic chrétienne cl île lilunjiv, l. Il, 1" partie, p. 7.58-771.
(r.) Vnd., p. 758-759.
MKLA.NtiKS. 16;J
a:jt-^:£;, çiâXa-. par les Grecs, [que' l'on avait coutume do mettre
devant les basiliques afin qu'ils servissent à se laver les mains aux:
fidèles qui entraient à l'église pour prier et communier en recevant
dans leur main le pain consacré (1) ». Mais c'est néanmoins sous cette
rubrique qu'il publie les rebords de Djemila |3| ("i), disant même que
« délie font! o siano cantari decorati di bassirilievi », il en connaît
trois, sans qu'on voie d'ailleurs quels sont au juste ces trois, la même
planche réunissant deux fragments algériens, le vase de Vérone,
les
celui de Murano, celui du Musée Kirclier et un marbre découvert aux
Tourettes, hameau dépendant de la ville d'Apt (3). Le monument des
Tourettes, quoique par bien des points différents, n'en mérite pas
moins, en effet, le rapprochement. C'est un marbre à moulures, dont
la face antérieure porte, coupée en deux par un monogramme flan-
qué de l'a et de l'co, l'inscription NIM'AMeNOC nPOCGYXOY, v'/!/â-
•j.vizz -pc7£J7Cj, et « dont le plan supérieur, écrit LeBlant, formant
(1, Gaiîkucci, Storia delV arte cristiana, t. VI, p. 32. Voy. aussi Dictionnaire d'ar-
chéologie chrétienne et de liturgie, s. v. >< Àblutioas » (t. I, p. 103-111), S. Petuides,
Ablutions dans l'Éulise grecque, p. 109 : x Dès le iv" siècle le peuple se lavait les
mains avant de pénétrer dans l'église à une fontaine placée dans latrium, xp^vat, yspvt-
oo-/, plus tard 5ià),Yi. Cet usage a disparu, sans doute d'assez bonne heure, même là où
la z,\ily\ subsiste encore. Il est probable que le clergé agissait comme le peuple. »
sont ici mieux campées, mieux drapées; le lion, surtout, nous parai!
d'une exécution supérieure aux animaux qui accompagnent Daniel
dans les représentations des catacombes, à ces animaux presque fan-
tastiques qui rappellent ceux (fui, plus tard, figurèrent sur les armoi-
ries: IViut-il attribuer celte supériorité du sculpteur d'une petite ville
de province au hasard (jui aura conduit là un artiste moins médio-
cre, ou admettre, avec (|uel(|ues personnes, que l'Kglise d'Afrique
fit exécuter des sujets religieux ])eiuts et sculptés anlérieurcmcul à
l'Église d'Occident, avant l'entière corruption du goût, et qu'ainsi
elle employa des artistes plus habiles? Ce deinier fait reçu, accepté,
on [)ourrait aussi admettre que les légères différences d'exécution
<l de manièi-e de traiter le même sujet, tiennent à ce que le bas-
rclid' de h'jemilah fut sculpté avant l'adoption générale des types
tinople avec l'histoire de Jouas [i6\, dont « le travail est soigné, [les]
formes et draperies antiques » et que M. Ebersolt aussi considère,
ainsi que le fragment avec Dau^V/ du même Musée [38], comme « d'in-
téressants spécimens de l'art du iv* siècle (5) » mais la date proposée ;
est assurément pour ce rebord [15] trop haute établir d'après le seul :
nant du Vatican (7) qui doit être compté parmi les plus anciens, il
ne s'ensuit pas forcément que les quelques-uns où il en est de même
soient antérieurs à Tapparition de la version de S. Jérôme mais, ;
antérieur à la fin du iv'' siècle. L'opinion est plus fondée qui attribue
au iv" siècle le marbre du Musée d'Athènes [10 aux têtes qui y 1 :
figurent son récent éditeur trouve des ressemblances dans les mon-
naies de cette époque (8), à l'une en particulier la coiflure d'un
buste de femme du Musée du Capitole (9), d'un buste de la Glypto-
(6) Voy. 0. MiTRS, Jonas aufden Denkmalern des christlichen Altertums, p. 47.
(9) SruART JOiNKs, The sculptures of the Museo Capitolino, Salone, n° 57, p. 304 et
168 REVUK BIliLiOyt:.
anciens :
fragment d'angle du Musée de
pour prendre un exemple, le
|)1. 75; DELitntECk. Romisclie Mitlheilunrjen, 1913, ji. :{28-;rjy, fig. 7 a-c. La tôle à conipa-
rer serait celle première scène, dont I,. v. Sybel décrivait la coifTure comme formant
de la
28J et [35^.
12y II subsiste toujours dans ce genre de conclusions une certaine latituiie et le marbre
de Satone [5] décoré d'arcades n'est placé M. lirunsmid Vjesni/i. uou\
par ,sér., .
I, \, 1908, 9, p. 214,1 qu'au iv->" siècle. Le rapprochement que fail M. NVuIfT, à propos
du lype de l'ange a>cc un collrel de Saint-Nazaire de .Milan {Monumenls l'iol, t. VII, l'.ioo,
pi. IX), conduirait même à de.sci'iidre jusiiu.i la fin de ce siècle, puisque le coflret aurait été
l'xécuté j)our recevoir les reliiiues des Apuires que le pape Damase avait adressées de
Horne a S. Ambroisc en 3«".! par l'archidiacre Simplicianus. envoyé par archc\é(pie auprès
I
du Ponlife pour aplanir les discussions qui selaieni élevées dans l'H^lise de Milan Ibid.,
p. 69 et 73-75,.
mrlam;|':s. i69
(4) Ibid., 1. c.
(5) Ibid., 1. c.
(6) Nouvelles archives des missions scientifiques et littéraires, nouv. série, fasc. 3,
p. 37.
(9)Koptische Kunst, p. 106 « es scheint also dass das Stuck erst in Aegypten in den
:
toute une classe de monuments (jui, faut pour les comparaisons qu'ils
sug^gèrenl que pour les problèmes qu'ils soulèvent, ne sont pas dénués
d'intérêt.
Etienne MiciioiN.
(3) Le fait i\ulsnac serail vôlu sur le rebord |26J indi<|UPi;iit rualenicnt, ira])rrs
M. Slrzygowski {hoptisclic hunsf, p. 106;. un type syro-égyplieii.
4j 'Eçr.iiEf,!; àf/a 10/ oy i x'ô . lîMi, p. "'.(.
'6) Catalogue du Mu.sre de Consliiiilinoph:, l. Il, p. \'.V.\. Il dil aus*i, nous l'avons noie,
" lorines rt drappri<'s*^nnt anli(|nes ».
MELANGES. 171
II
(,1) Dalla introiluzione ad una futura seconda edizione délie « Lellure scelle dal N. T. y
(1906^. Questa edizione è giàpronta; ansi a quesl' ora, se fosse dipeso da me solo, sarebbe
liell' e pubblicata. Più che una seconda edizione è un rifaciinento totale di un lavoro
intrapreso troppo alla leggera, senza i necessari sussidi, e troppo afl'rettato.
(2) Thlmb, Die griechische Sprache im Zeitalter des Hellenismus, 1901, p. 121
Cf. :
Nessuno naturalmente voira sostenere che la grecità biblica sia afl'atto immune da
ebraismi [von hebrinscher Àusdrucksform) ... Ma ciô .si mostra più nello stile e nella
mentalità, che nella lingua propriamenle detta ; non greco è il parallelismo délie frasi nei
Settanta e l'uso délie parabole nel Nuovo Testamento, non greco parjmenti lo stile e la
mentalità del bilingue Paolo; ma greco nell' insieme [im grossen und ganzen) il lessico
e anche la grammatica di quel testi ». Che se a pag. 181 sembra rimangiarsi in parte
quanto ha detto dello stile, a p. 131 per contrario allarga alquanto, e giustanienle, la con-
fessione « Naturalmente non mi passa neppure per il capo di negare ogni influsso délia
:
(1) OssiTS i'irno hillavia che il (oiitraslu Ira ;:li aiitii lii c i iiiiovi liloliii^i non c cr^si raili-
rale, come si polrchhe crederc, e che in parle si ridnce ad una i|ucslion<' di parole. Si rive
per es. il TnuMit. /. c, p. 17.'» : n ("he i Giudei, servendosi del greco come di iina lin^na
nalurale;ma non è quesla una ragione jirr
slraniera, facessero setilire d'csserc- slranieri,è
ereare on ramo spéciale délia Koiv^, come nessuno ha mai pensalo, perche il ledesr o e pin
o meno stro|ipialo da i-rancesi o Inglesi, di stahilire due spécial! dialelli ledesihi. il frnn-
crse-tedesco e \'inglesc-fe(/f:ir(i » K per «[uello che ri;;narda i (iiudei dell" Kuitto, inleramen-
to elieni/./ali, si contenta d'afTermare che l'csisten/a d'un dialetto nindeo-^reco non é prn-
ratfi. E l'alTerma/iime e prudente. L'analogia infalti dei Giudei vivcnti in altri paesi (si
ricordi per esem(iio il rjUrlln di fioma e il suo (çergo cosi caralteristico, e si trattava di Hiu-
dei ch' erano ilaliani ormai da secoli!) fa apparire non improbahile rhe anche la plein*
legge ne' Papiri d'Egitto e nelle iscrizioni delF Asia Minore rispecchi
il puro nso ellenico. E' un
che vaste colonie giu-
fatto incontestabile
daiclie fiorirono in Egitto, sin dagli antichi tempi, e il fatto mérita
una qualche considerazione. Il Thumb osserva assennatamente,
contro chi fosse tentato descludere ogni influsso grammatico délie
lingue semitiche nello sviluppo délia Kcivr, : « Cio sarebbe senza
dubbio eccessivo per l'Âsia e per FEgitto. La Ki-.vy; volgare di quelle
regioni non resté certo immune da infiltrazioni straniere c[uanto
al colorito sintattico : solo è assai malagevole sin c[ui constatarle e
metterle in luce nei testi a noi giunti. E ciô in gran parte, perché
non è punto facile, salvo in casi speciali, sceverare nettamente cio
elle spontcineo sviluppoda ciô ch'è in/lusso straniero (3) ».
Queste ultime parole m'aprono la via ad una terza e importantis-
sima osservazione, con la quale vorrei togliere di mezzo una con-
fusione didee, che mi sembra comune a molti dei recenti filologi.
Il dire cioè che in una data costruzione, la quale uscendo più o
'1) The Apocalypse of St. John, 3 eJiz., London, 1909, p. cxxv, n. 1. Ho parlato di una
certa accuratezza, perché ii terzo vangelo, ad esempio, ci raostra cbe non sarebbe pru-
denlesupporre negli scrittori delX. T. massima accuratezza di cui erano capaci. L'uorao
la —
osscFva giuslamente il Xorden — che ha scriUo il proemio del terzo vangelo, pofeva scrivere
il resto del vangelo coa la stessa classicità di forma se non 1 ha fatto, vuol dire che non
:
ha voluto, perché non lo riteneva opporluno. Ma inlanto basta confronlare i passi paralleli
dei Sinottici, per constatare corne Sfjesso Luca non rifugga dal ritoccare e rilinire, dal
punto di vista délia forma, le fonti che trascrive.
(2) Cbe roaravigiia quindi che molti semitismi, corae osserva il Deissmann [Expositor,
lan. 1908), siano in realtà « international vulgarisms »?
(3) Op. cit., p. 132 sq. L'Autore aggiunge : >< Non si sarà mai abbastanza prudenti nel-
l'ammeltere che una data espressione è di provenienza straniera >. E corne principio géné-
rale, siamo perfettamente d'accordo.
174 REVUE BIBLIQUE.
suii caso, soDo (lue cose ben diverse. iNè basta pertanto scovarc in
qualche iscrizione o in qualche papiro (che si ritenga estraneo a taie
influsso), anche in qualche antico scrittore greco, una costruzione
casualmente identica o sempliceinente analoga (1), per potor negarf
scnz' aitro, negii scritlori biblici, ogni traccia di seniitismo. Ilo
buon senso vuole che non .si dimentichi tutto questo, quando si parla
di ebraismi nci LX\ c nel N. T.
Ho accennato più sopra ail' abuso del /.t. nel .N. T. l'n' o.sservazione
simile pu6 ripetersi a proposito di molti fatti. É évidente, ad csempio,
corne l'uso di certe costruzioni /j/'c/josiziona/l, in luogo del som-
plice genitivo o dativo, furoiio suggcritc in molti casi allô scrittoir
biblico da analoghe costruzioni dcU' originale scmitico, da cui di-
|)i'nde, dcll.i sua lin^ua iialiv.i. h'allra parle, non nicno évidente
I»
(\} Non sara forsi; iniilile avverlin- f|uanla prudcnza sia nccessaria iicl inancgK'a'C l'argo-
mento deir analogia. Se >(rivo iiiio padre e mia rnadre rni vo^liono liene ", losprcs-iioni'
«i
" preUarnonlc italiana; non cosl, se scrivo » iniei |.;cnilori mi voRliono bcne », e chi ha
tradollo il lilolo d'un ronianzu francise « }fon oncle et mon curé » per o Mio zio e mio
curato » ha coininesso un brulto sUipido francesismo. Similmcnte si possono. italiana-
<*
inente, risciacquare i cenci in Arno. ma non in Tt-verc; si possono visitare le ciUà di Fran-
cia. d Ej^itto vr.c, ma non di Beinio o di Hrasilo ccv..
MKLANGES. 175
anzi, la versione dei LXX era Vunlco libro greco che avessero letto,
tanto eran lungi dalF aver fatto del greco uqo studio assiduo e pro-
fondo, corne ad esempio Giuseppe Flavio. Più ancora, questi Giudei
che scrivevano in greco in tali condizioni (3), per buona parte
del N. T., si bene per mostrare come, anche quando lo .scrittore bi-
blico subisce l'inthisso délia lingua naliva e di fonti seniiticlie, non
si sottrae intieramente ail' inllusso delgreco che sente parlare intorno
onde assai di rado i suoi semitismi son
a se e parla egli stesso, tali da
non avère alcun addentellato col greco comune (i2).
G. BONACCORSI.
liano, e lc}î;iano del conlinuo libri italiani, e scrivano per i loro afl'ari in ilaliano. Per farsi
un' idea poi ilel grandissiiiio inllusso che dovetlero avère i LXX sugli scrittori del N. T.,
si reciirdi ad esempio l'italiano infranciosato ûe<,i\\ autori noslri del sec. xviii. ^;ran letlori
di opère francesi. Ed erano italiani !
(1) K supcrlluo ricordare ijuel che sono, dal punio di visla linguistico, tante e tante tra-
duzioni dal francese, che infeslano il rnercato liltrario. — Un caso lipico ci è olFerto dai-
l'iscrizione di Silko'Nubia) ricordala |iiù sopra : lo scrittore. un Coplo, si aflanna a tradurre
alla meglio il suo pensiero con parole greche, e non dubita tra altio « di fabbricare, con-
forme al suo imper/cclmn fiiluri, un è-yi).ovixr,-jou(n = rixaturi erant, e cainbia i tenipi
dopo il -/ai corne in copto, ovvero usa prorniscuamenle el (xr, e àÀXâ perché in copto esisle
un solo corrispondenle per enlrambi » (TiitMn, op. cit.. p. 124). Leggi anche l'accurato stu-
dio di P. ViERECR, Sernio graecus f/uo senalus popuhisque Hoinanus magislraliisqne
pupuli Homani vxf/iti' ad Tib. Cacs. oelatem in scriptis pul)licis uni sinif. (loltingen,
188«.
(2) Di qui il « passible but nnidioiiintic Greeh » cui accenna spesso il .Moulton e I' « v.i
III
OHACILA HELLENICA
// /^r«/^ aprhs avoir été initié dans les mystèrfs, les tenir secrets ;
^2) M. ScHAN/, Crsrli. iler rom. I.ilt. l. III l'Jn.. . |i. 1''.;. Nii:(.i.i;tii.i. hr (nriulm
l.nhcDiir (UtdS). penso avoir prouve que Lalii-o un disciple romain de l'orpliyre.
est
-espondit :
Ces oracles de l'Apollon de Claros ont été pris par Lactance dans
e traité (perdu i
de Porphyre Ilsp- tï;; è/. Xcvuov çiacjosîxç. Les frag-
nents conservés de ce traité ont été réunis par G. WolfF, qui inven-
torie à ce propos les recueils d'oracles connus de Porphyre, ou signa-
lés ailleurs dans l'histoire littéraire (2).
(1) Ibid. (p. J"). Rapprochez deux oracles de l'Apollon de Milet, cités par Lactance
[d'après Porphyre), Bir. inst. iv, 13 (p. 319), et vu. 13 (p. (>25-()2rO.
(2) G. Wolff, l'orpliyrii de philosoplua ex oraculis Iiaiiriemla librorum reliquiae
(Berlin 1856).
sept livres Uzp\-?,; bpfif,; -^-im;, que suivaient quatre livres Ihsî t/Jç
témoigiiaîies sur Dieu des saines d'entre les Grecs, car celui qui rejette
ces témoienages rejette Dieu qui les a suggérés. Ces considérations
formaient apparemment le prologue de notre Hectcsîx anonyme, dont
sont tantôt des notices très brèves qui résument le texte lu, tantôt
des citations textuelles de morceaux en vers. Ces derniers constituent
ainsi une petite anthologie. Si nous laissons de côté les morceaux
pris aux Oi'acuhf sihyllina, aux Orphica, etc. (li,il nous reste une
série d'oracl«'S des dieux grecs, sur lesquels nous voudrions appeler
l'attention.
Parmi ces oracles, nous relèverons d'abord ceux qui affirment une
conception à laquelle nous avons naguère consacré une brève étude,
la conception d'un paganisme rallié à un Summus deus, souverain,
ineffable, inaccessible, dont les dieux ne seront plus que les subor-
donnés ;2j.
par l'oracle suivant, — celui-là même dont Lactance a cité les trois
derniers vers, en les disant pris à un oracle de vingt et un vers : il
manquerait donc cinq vers à la pièce que nous fait connaître notre
epitomator (3) :
(1) Aux SibyUiiia sont pris les oracles figurant aux paragraplies de Burescli. 80-83. Aux
Orphica, 8, 56, 61. Puis, des sentences de Pindare, Sociale, Platon, Heraclite, Simonide,
Antisthène, Aristobule, Diogéne, Timon de Pliliasos, etc.; des vers de poètes, Euripide,
Ménandre. Nous ne nous occuperons que des oracles proprement dits. Dans ses Mélanges —
d'histoire religieuse {\915), p. 120, le P. Lagrange observe que « les fragments de Ménan-
dre se sont enrichis, à l'époque romaine, de belles sentences où il est assez souvent ques-
tion de Dieu ». Il conviendrait d'en dire autant d'Eschyle, de Sophocle, d'autres encore.
Ces fragments pseudo-classiijues sont attribués de préférence à la littérature juive hellé-
nistique, cette littérature n'est peut-être pas la seule à mettre en ligne.
(2j Dans notre livre I.a paix cotistantinienne [l^lk], l'excursus « Summus deus, le mo-
nothéisme dans le paganisme «, p. 188-201.
(3) W OLFF, p. 232.
(4) Pour tous les oracles à citer, nous nous tenons au texte tel qu'il est donné par
Buresch, par qui il a été très soigneusement édité et non sans de judicieuses corrections
182 UKVLli lilBLIQLE.
N"oul)lions pas que ce discours est prêté à Apollon, (jui donne ainsi
aii\ dieux se^ congénères le prédicat d'anges et de portion de Dieu (2 j :
<• Cst la subordination que nous signalions des dieux à un Dieu su-
[)rémc. L'oracle s'essaie à une définition de ce dieu suprême, inac-
cessilile, immuable, incompréhensible, résidant au-dessus du ciel.
jusliliécs dans ra|i|);ir<'il ( rilii|Ui' de Ifdilidn. N<iii> avons ris(|iic une traduclioii Iran-
< aise de <t'S oracles, nnivre i-pineiist» pour la iiielle noii^ ri'claiiioii^ 1 indul^'cncr «le nos
lecteurs.
(1) Ces deux vers sont |iarliculièreiiient diflirilos. Nous comprenons î-ti -• il ta, à
moins qu'il ne veuille les volontés, m; éa^rov £i<îi3£uOai = pour vire soi-même vu. Ce
sens est celui de Icpi/oinator : Kai [AïiSà tai; oùsaviat; ô-jva|i£Ti ÛïwpriTÔv, el |iTi
dixi-rim, daemonicolarum. in quilius et Lalteo est, eosdem ab aliis an;ielos diei. (|u<ts ipsi
daeiiiones nimnipanl... » Siir lelte doctrine de Lalti-o. Nikocf.tiict. p. .«i.
MKLVNCES. 18:^
répond par l'oracle suivant, que Ruresch estime avec raison faire
gît là, qui illumine le soleil, la lune, les astres. J'ai appris ces choses,
je les sais par {mon) entendement, tout le reste je le tais, [mo'i) Phoibos
que) je suis. Pour toi, cesse de question/ter sur ce qu'il n'est pas
permis (de dire), et cesse de chercher ce qui dépasse ta science phy-
sique. —
Apollon confesse qu'il doit se taire sur la nature du Dieu
suprême identifié au feu supercéleste ce Dieu suprême est donc :
flj AiGisTiN. Contra Academicos, m, 38 « (Zeno dicebat aniniam) esse inortalem, nec
:
quidquam esse praeter hune sensibilem muaduiii, nihilque in eo agi nisi corpore, nam et
Deuin ipsum igaern putabat ». Id. De vera religions, 96 « Alii Deum esse non posse :
(2] WoLiT, p. 23 4.
(3) WoLKF, p. 238.
'4} Nous laissons de côté les oracles 18. 19, 22, 24, de Buresch.
(5) WoLFF, p. 239-240.
If<4. REVLE BIBLlQLt:.
celui-là (le dieu ^vnwà l'entend, et certainement lui accorde (ce 'il
qu'il demande).
V (:= BuRKSCH, 27). L'oraclc que voici est cité d'après Porphyre, au
livre second de sa Philosophie des oracles, notre epitomator qui nous
l'apprend oublie de noter de quel dieu est l'oracle (2).
2) NNoïKK, |i. l'i'i-l'n;. \.r<. (r-dis df-rniiis mois ilii .Icrniri vers soiil parliculiiTemeiil
(litlifilos. J'ai maintenu dans le urec la lo<<in .le Murt-M-li qui est aussi celle de WolIT). i|iic
<r.ôs ni- vaudrait pas inieux. WolIT mentionne une rorrertion in;;i'nieuse de Hoissonade :
ùd StâyojTi ô' I; <l.za. M. Paul Gii.ird. i|ui a liien voulu examiner di- 1res près |>our moi
re vers et nninlue danlres). a\ait pensé à : ài: Stdtv'-'W'î' £ ^^ '•>2T'-
mela.m;i:s. i85
Vepitomator (2) ;
(1) Cf. A'rnob. h. 30 (éd. Reufersciieii), p. 70) : « Sed immortales perhibentur dii
esse. Non ergo nalura, sed volunlate dei palris ac inunere ». .\i«:. Civit. Dei, x, 3 éd.
Hoffmann, I. 419) : « ... si Platonici, vel quicumque alii ista senserunt, cognoscentes
Deum sicut Deum filorificarent,... nec populorum errorilms parlim auctorcs lièrent, par-
lim resislere non auderent, profecto conliterentur et illis immortalibus ac bealis et nobis
niortalibus ac miseris, ut immortales ac beali esse possimus, iinum Deum deoruni colen-
dum, qui et noster est et illorum. »
(2) WoLFF. p.li6-147.
186 UEVLi: BlHLlULt:.
a compris quo Dieu est pour nous pèi-e et juèie, et que Dieu se l'ait
ligence.
VIII (= BiRESCH, 32). Oracle d'Hermès encore :
Par Ir dieu f//// est /e puissant, il ne faut pas rjur les biodu'urru.i
le révidfiit parmi les mortels, à moins quf (jHch/nr (orps ;;./;
-<. z(W).y..
.1 /.eus apport irni Inutc ritr. Inutr miiiila(/nr. loiitf mer, parlmil il
Il AiiNOB. Il, 3 'p. 49) : « Miiiiiiiltu> su|i|'ii( arc diis lioiniiirs \cliiil. Dii i-iiim iiiiiiu-
Kous sommes des protecleurs alertes pour les hommes pieux, nous
dont la mission est d'habiter perpétuellement autour de ce monde
changeant : rapides nous allons vers les hommes qui souffrent, obéis-
sant aux volontés multiples de notre père. — Il s'agit \k des dieux
moindres considérés comme anges du dieu suprême : conception qui
se retrouve chez Celse 2i.
des bienheureux
XII [= BuRESCH, 36 . Autre oracle d'Apollon :
L'dme, tant ijuelle est soumise au corps périssable, auquel elle est
liée, subit les souffrances (de ce corps) tout en étant impassible Mais
.
sitôt ffu'elle est déliée de ce corps mortel et flétri, elle est portée dans
l'éther, imntortelle, et elle demeure pour toujours à l'abri (de la dou-
leur). La providence divine premii're-née en a ordonné ainsi (1),
XIV (=r: Bi HKsr.ii, 38). Oracle d'Apollon, à quelqu'un qui a demandé
si Dieu est inell'ahle :
I) Bi iiuscii, |i. 10*;, rapproche fort à |)ropos un oracle que Pliiloslrale allrilmc à Apol-
lonius (le Tyarie apros sa mort. Un do ses disciples doutait de iiiiinurlalitf de l'jiine, 1
Apollonius lui en révèle la vérité par l'oracle suivant ( Pim.osTit. ]'i/ii A/iof/onii. VIII. :{l,
immortelle: elle n'est pas à vous, elle ett a la l'rDvidciire. (jikiikI le eor/fi
L'iiiiie est
est i'jiiiisé. semhlnhle <i ini coursier rapide qui franchit In hurrii-re. l'ùme s élance ci
se précipite au milieu des espaces éthérés. pleine de mépris pour le triste et rude escla-
vage '/u'elle a souffert. Mais i/ue nous importent ces choses Vous les connaîtrez quand 'f
vous ne serez plus. Tant que vous êtes parmi les vivants, pourquoi chercher à percer
ces mi/sterrs ' Trad. ( ii\ss\m;.)
MÉLANGES. 18*>
/ n '/ans le monde entier est Dieu, qui a fixé des lois à l'orbe du
branle crlcsle, et qui a établi l'équilibre des heures et des saisons, en
imposant à leurs révolutions des liens iV harmonie et de connexion.
On l'appelle Xcus, par qui est le te7nps et la vie, (on l'appelle) Zén
père df tout, dispensateur du souffle vital : il est lui-même en lui-
inème et va de l'un à l'un.
XV {=z Bi'RESCH, 39). A quelqu'un qui a demandé à Apollon s'il
Ze ^è/'e ç-?// règne très haut a réparti les charges entre tous les
meut.
On pourra rapj)roch<'r de cet oracle un autre oracle (Birescii, 50)
que notre cpilomator dit être cité par Syrianos {'i-\ c ï!jp'.avbr 'vt -z\z
Trtii y.où uôwp /.ai Y«îa ^-^i «iQ-^c, vu; t£ xai v;u.3(s
/e/re f'/ l'élher, lu nuil >/ Ir piur, el /'' ((uiseil (jéiiéralioii première,
et r Amour délectable. Car tout cela est du us. le grand eorps de Zeu^,
seul il pense tout, il prévoit tout divinenwul . l'arlout sous le reganl
lie Zeus père et prince vivent les dieux imumrlrts et le^ hnmtnes uuir-
tels, lis liéles, les niseuur. tout re qui respire et se rueiil. \i à lui
1 Wiiin .
I».
2iO.
MKI. ANGES. 101
(1) Philostoiu;. ix, 12 (éd. Bidez, p. 120) : oti Malaxa -zh ^rptLTov ixaXîlTo Tj KaiTocpsta à-6
(2 .\vec Kroll, on ne croira pas l'œuvre du Trismégiste antérieure au iir siècle, art.
- Hermès Trismegistos », p. 821, t. VIII 19131. de la Reai-Enojclopaedie de Paul\-Wis-
sow \.
192 iu:\ii: liiiiLinii:.
gémissement.
par le dieu sur des cas particuliers qui hii ont été ])roposés, notam-
ment en vue d'obtenir des guèrisons Il ne semble donc pas (jue, .") .
(5, Oiui.EN. Contra Ccisum, viii, 'i.'. (éd. Km i>. mm i II y. •'.•.'.(.Mlii . Vuu-/ les oraelcs
à l'i'poque de Celse, soit eu 180 ou quelque peu plus tôt, sous Marc
Aurèle, on connut les oracles professeurs de théologie. en était Il
qui nous la fait connaître dans sa T/ieosophia, n'ait recueilli que les
oracles qui revenaient à sa thèse, à savoir que les païens avaient
connu le vrai Dieu. On ne peut douter cependant que cette littérature
d'oracles n'ait eu une pointe tournée contre le christianisme. Quand
loracle cité par Porphyre, déclare que seuls les Chaldéens et les
Hébreux ont connu la sagesse et adoré purement le Dieu souverain
et qui s'est engendré lui-même, il est ditficile de ne pas soupçonner
Forte magk poteris tu aqua impressis litteris scribere, aut adinflans levés pimias
per aéra avis volare, quam pollaUic revoces inpiae uxoris soisuin. Pergat quomodo
xult inanibus fallaciis mortiium deum rantans, quem iudicibus recta sentientibus
perditiim pessima in speciosis ferro vincta mors intcrfecit.
Deinde post hos versus AppoUiuis.... subiunxit adque ait i Porphyrlus) : a lu lus
quidem inremediabile sententiae eorum iiianifestavit Apollo) dicens. quoniain
ludaei susjipiuiu deum magis quaiii isti » (3i.
alicuius, qui acuminis perhibentur fuisse divin!, aut ex deum responsis sapientissimi
nuncupati. i>
(2i Alglstln. Civ. Bei, xix, 22 (p. 411) : « Postrenio ipse est Deus. quern doctissimus
|)hilosoplioruni, quainvis Cliristianorura acerrinius inimicus, cliam per ooruin oracula,
quos deos putat, deum magnum Porpliyrius confitetur. »
lon, Le soup(;on d'Augustin n'est pas fondé. .Mais, «lès là que cette
littérature d'oracle est capable d'une pareille offensive contre le
une autre série d'oracles mêlés aux premicMs par notre cpi-
Voici
tmiie, mais dont l'inspiration est très différente :
(1; Cf. Am.i>ii\. Civ. tJci. \i\. ':! |>. ii:{ . cilanl l'<ii|pliyri', an tlin- ilf <|ui li-s «nacles
ont (larli- en bons ItTiiiis du Clirisl •• riiristiiiii eniiii di piissiiniiin iiroiiiinliaveruiit <>t
iniiiDrlaleiii rurlurn cl riitn Iton.t iHacdirationf l'iiis incinineriinl, Chri.slianoN veio |>(»lliilos,
iur(iiit, cl coiitnininatos cl ciiorc inpiicalos csso diciiiil et iiiiillis laliltiis advcrsiig c<is
l>las|>hcmiis utiintiir. » Poridivrc < ilc à ra|ipui un oracle dllccalc ... Viri [liclalc prae-
Atantissimi e>\. illa anima iiam coliinl aliéna a se vcrilale. »
.\ii;la.n(.i:s. 19:;
tni.sscz, ti'cpiciU, Apul/un s'en ra! Il s'en va, car an homme ce leste
ardent lin fait violenre.
Apollon s'avoue vaincu, et prédit qu'il sera chassé de son tem-
ple (l .Si cette prédiction est une prédiction post cventiim, l'oracle
prétendu serait de fabrication chrétienne et pourrait dater de l'époque
de Constance II et des premières lois prohibitives du paganisme (2),
sinon de l'époque de Théodose.
II 1^=::= BuRESCu, 51 ,. Artémis dolente conhe à son prêtre l'oracle que
voici :
0'. oûo o' otO El; Eiai, Trotxrip xat xuoiao; utdç.
ceci : Quel est linefjahle qui, venant sur la terre divine, a enseigné
la sagesse au genre humain? —
De Fatriuin du père, des sommets céles-
tes, le fils a mis ordre à tout le genre humain lassé, et lui \e lilsi le
logos l'a fait, en engendrant un logos fils. Les deux sont un, le père
et le fils illustre. Et lui {le fils) une (mère) l'enfanta pure, sans expé-
rience de l'hyménée, virginale, sans l'aide dllglhie (la déesse qui
préside aux accmichemcnts).
VI (^ BiRKSCM, \~ . Oracle qui se lisait à « Élépliantine, ville
d'Egypte '• :
L^^s• hommes qui oui rtiidii' la sagesse ont dit de Dieu quil ne doit
son être qu'à lui-inême, qu'il est éternel, qiiil est logos pur, et que le
logos splendidc est fils du i:>cre auteur d'oracles. Dans les deux est
l'esprit, pur, divin. Ils sont une triade pure, en étant les uns dans
les autres.
£v UI.SV STTcovufj.tr,
Y£ oiccTTjXwç aîTO TraTpô;,
sic oà rs'Àwv (îùv TTaxpi xat 1^ Ivoç eî;* ixi'a qo':,'u.
Ces oracles forment un groupe que l'on peut dire homogène. Il n'est
d'abord plus question de dieux moindres, Apollon proclame lui-même
qu'il est vaincu et qu'il s'en va avec ses trépieds. Il n'est pas davan-
tage question de donner au dieu unique le nom de Zeus. Nous sommes
ici en plein monothéisme chrétien trinitaire. Dieu est qualifié de
h-.z-izizz 7£V£rf,p, de zav;;j,3aî:; 33:7'-'a£jç (allusion aux oracles de l'An-
cien Testament), de instamment de y^vôty^p,
cjpavij -Jsaw;;. plus
autant de vocables chrétiens. ajTcy^'vsOAcr, de à£''va:;,
Il est qualifié de
de i-M—z 'y-zyr^. vocables chrétiens encore. Notons au passage que
l'auteur des Constitutions apostoliques reproche à un de ses contem-
porains de qualifier Dieu de y.-j-z-;vnh'Kzz, comme si ce mot était
(1) Consiit. apostol. VI. x, 1 (éd. Flnk, ]>. 323) : ... -.'vi [ièv uxvTozpiTopa Ôebv '^IxGvr-
(x.£ïv, âyvwoTov ôoÇireiv.... a/extov, appYjtov, àzarovôjxacTov, aytOYÉvïfrÀov... Ibid. xi, 1
>{). 325) : Éva iiôvov hzvi 7.aTaYYé).>.0[i£v... oJx aOtaiTiov -/.ai a-JTOYÉve^Xov, to; Èxsïvot otovToi.
f'.is lŒVLiE HIHLini E.
Le fils est iimis ex uno et iinus ciun paire, \\ est cependant distinct
du j)ère Vf è-(.)vj'j.''y;, par l'appellation, le nom l'expression est faible :
Les «Idclrinain's (|iic vise IVcrivain ne sont («as aiiIrenuMil dcsinnr.s. ( omiiie le Icxlc lui
fst |>ro|ir<' il ne (li'|>end [)as de la Didascnlin du ni* sirrl(0, on pourra voir dans res doc-
trinaires des ^ens de son temps, c est-i'i-dire de la .secr)nde moitié du iV sieele.
(I) J. Lf.iihkton, l.ea origines du dogme de In Trimlé l'.UO), p. 87. J. Tixeiiont. His-
toire des dofjmes, l. I ,'lîlii.-,V p. •>3't-rM\. A. IIvi!Na<;k, not/inrnf/esrlnrhlr, I. I i)0(»!t.
p. y.ii.
MÉÎ.ANGES. 109
I.a génération du Fils est d'ailleurs éternelle {xh\ j'.i;', et par cette
expression nous écha]>pons à larianisme.
L'Esprit (-vi'y;, TTViiy.a) est image du Père comme le Fils est splen-
deur du Père. L'Esprit fait la cohésion de l'univers idée stoïcienne :
Le Père, le Fils, l'Esprit constituent une Tc-.iç âvvr,, une trinité pure.
Le Fils est 7Jv -x-pi. l'Esprit est dans le Père et le Fils, h x[j.zz-ipy.:::-/
Ils sont trois, mais ils sont en même temps [j.ix oùz'.:. \i.\y. cira, expres-
sions nettement nicéennes, et cette gloire n'a pas eu de commence-
ment ayant toujours été, r.àv Èsj^a.
Pierre B.^^tiffol.
vel Sibyllae et Orpheuset nescio quis IIeiiiie.s et si qui alii vates vel llieologi vel sapientes
vel plillosoptii genlium de lilio Dei aut de pâtre Deo vera praedixisse sen dixisse perhi-
bentur, valet quidein aliquid ad paganorum vanitatein revincendam, non tainen ad isto-
rum aucloritatem amplectendarn... » Ce disant. Augustin réfute le manichéen Faustus, qui
professait au contraire que les témoignages pris aux Sibylles, à Orphée, à Hermès Tris-
mégiste, sont plus capables de toucher un païen que les prophéties des prophètes hébreux.
Voici le texte de Faustus « Ita nihil, ut dix!, ecclesiae christianae Hebraeorum testirno-
:
nia conferunt, quae magis constet ex genlibus quam ex ludaeis. Sane si sunt aliqua. ut
lama est, Sibyllae de Christo praesagia. aut Hermelis quem dicunt Trisraegistum, aut Or-
phei aliorumque in genlilitate vatum, haec nos aliquanto ad fidem iuvare poterunt qui ex
gentibus efBcimur christiani... » Ibid. 1 'p. 378-379 .
ÎOO REVUE BIBLIQUE.
IV
1. — r.AIUC.TKHES r.KNKUAlX.
peine de recourir aux lumières des Pères grecs, il est aisé de se l'ima-
ijiner. Aussi bienlœuvre de Jérôme portera-t-elle remède à cette in-
curie, et nous pensons que ce n'est pas sans dessein quelle a revêtu
cette forme vivante et dégagée bien propre à soutenir l'attention d'un
lecteur exiueaut. Ne fallait-il pas émoustiller d'un grain de sénevé le
palais diflicile de ces Occidentaux auxquels il s'adressait derrière Kus-
tochiuui au désir de qui le saint avait accédé en composant ce volu-
mineux commentaire?
En dehors des diverses introductions qui émaillent son œuvre l'au-
teur ne parle qu'une seule fois directement à la fille de sainte Paule.
C'est à propos de lx, 6, qui amène Jérôme à parler du chameau pas-
sant par le chas d'une aiguille, et à faire l'éloge du désintéressement
de Paule et de Pammachiiis. Juste hommage rendu à des êtres chers
dont le nom devait se perpétuer avec commentaire puisque ce tra-
le
vail leur avait été promis. Outre la grâce du style, le rôle important
que l'interprète accorde aux Romains dans la réalisation des prophé-
ties isaïennes était de nature à piquer leur intérêt et à flatter leur
amour-propre. Il ne néglige pas davantage de rappeler à l'occasion
certains traits de la poésie profane et quelques allégations de philo-
sophes connues de son public. Il arrive aisément à égaler les plus
habiles en lart de manier la phrase. Le distingué orateur grec qu'il
cite à propos de la brièveté de la vie est bien froid à côté de cette
considération tirée des profondeurs de sa pensée : « Si Ion regarde
combien la chair est fragile, que nous croissons et décroissons sui-
vant le cours des heures, sans demeurer dans le même état, que le
moment où nous parlons, dictons et écrivons est déjà loin de nous, on
trouvera juste de comparer la chair à du foin et sa vigueur à la fleur
du foin ou de l'herbe des prés (xl, 6). A peine sortis des langes nous
voilà enfants, enfant l'on est tout à coup jeune homme et jusqu'à la
vieillesse l'on change selon des intervalles indéterminés; on se voit
vieux avant de constater avec stupeur qu'on n'est plus jeune. Une belle
femme qui trainait après elle des troupes d'enfants se ratatine et
prend un front sillonné de rides : faite naguère pour l'amour, elle
devient un objet de dégoût. » Saint Jérôme cependant se défend par-
fois de mettre en œuvre la rhétorique et la dialectique. La crainte de
passer pour pédant lui fait choisir des exemples à la portée du vul-
gaire, comme celui de la relation d'un père et de son fils, d'un cen-
turion et d'un tribun lx, 17). C'est pourquoi on lui pardonne de se
montrer si érudit. Nous lui savons gré de même d'avouer qu'il a fait
erreur dans certaines traductions. Ne vaut-il pas mieux, comme il dit
(xix, IG). revenir sur sa propre erreur que d'y persister, en rougis-
202 lŒVUE BIHLIQUE.
Ainsi en est-il pour xxi, 11. Mais il est nécessaire de dire que ces cas
d'extrême réserve sont de rares exceptions, .lérùine lui-même ne se
fait pas faute de reprendre « ceux qui ne suivent que le sens mys-
ti(jiie et (jui dans les endroits très difficiles fuient les «{uestions issues
ceux qui désirent savoir la Sainte Kcriture et non pour les dégoûtés,
j»our ceux qui font la grimace à eha([ue verset. Désirent-ils un fleuve
d'éloquence et d'élégantes déclamations? U» ils lisent Tullius. Callion,
(iabinianus, ou. pour parler des nôtres, Tertullicn. Cyprien. Minutius,
Arnobe, Lactanec, llilaire. Notre but à nous est de iaire comprendre
nemus, scd quod spiritnalis interpretalio sequi debeat ordinem liislorix, quod plerique
ignorantes, liimphnllco in srripturis vagnntur errore.
(2) Pia quidem oolmitas intei'prctantiuni, sed non servans historin: ordinem.
Ion vf)ie chafjue jourde tels faits se vérifier dans TKglise. ils recevront
eependant leur pleine réalisation lors de la consoniinalion du monde
et au second avènement du Sauveur. »
II) Quod (/uoliilir. riilriiiKs nplrii : Quand» idnlolntri.i crinir siililn<n, et pcrse-
rutionix rnbic, ad fidein cl tranf/uHlitnleiii Cfinsli. lunnani principes (ransennt.
MELANGES. 20o
histoire, qui cherchent dans 1 arbre non les fruits, mais les feuilles
seulement et lombre des mots qui sèche vite et dépérit... comment
le Carmel se changera en forêt et en verger, etc. (2i. » C'est alors
chapitres des Visions (de xiii à xxiii), il sépare les deux commentaires.
L'interprétation littérale historique comprend les livres IV et V;
elle avait été exécutée jadis à part sur la demande de l'évêque
Amabilis. Ajoutée à la précédente pour ne pas rompre l'unité de
méthode (car Jérôme a promis à Eustochium de suivre tout le long-
qui nous ont frappé au cours de la lectiue que nous avons laite de
cette o'uvre.
(Ij Hoc iuxld L\\ iitlerjjiclei dixiiiiii>> : (/nurtmi cditio loto orbe nihjala est...
(/uia loiigum est de oinnilms diccre. L\.\ interprètes (fiii leguntiir in ecclesiis lireviler
transcvrramus.
C-i) In \\\, 30 ; l'otirnnt iiirtii lleliraiciim qiiid mihi ridrrriur ciirrens leçiiitlilnis
1er les passages à retranclioi' des L\X cl à les iii<u(|uei' par conséquent
«kl sig-ne hcxaplairc, ol)èle ou broclie. Voici une addition propre aux
exemplaires alexandrins, absente de Fliébreu et rarme de l'édition
amendée des L.W (lviii, 11 A noter d'une obèle. l'n<lc obelo prxno-
:
hindum rst. Cette mesure n'est pas sans avoir une influence sur la
signilication de tout un passage, comme au chapitre lx « Or le nom :
ait simulé l'impéritie. ou bien ait été induit en erreur par une expli-
devait d'autant plus en user ici qu'il lui fouinissail un ap[>oint nota-
ble dans sa controverse avec les Juifs. Ceux-ci pouvaient-ils douter
de la réalisation de cette lugubre prédiction : " Sion est désorte; Jéru-
salem est désolée. Le temple de notre sanctification et de notre
gloire où nos pères avaient chanté vos louanges a été réduit en
cendres et tous nos bâtiments les plus .somptueux ne sont que
ruines », quand le solitaire do Bétliléom les ])riait de reliio le lUp-
i>.'.)7i(.)ç de Josèj)he, leur montrait le fameux Temple devenu la voi-
rie d'une ville nonxellc appelée .Klia e( le séjoui- des oiseaux noctur-
(1 In m, 'X, cl II S.
MÉLANGES. 211
nés, leur faisait constater enlln que Dieu restait sourd aux lamen-
tations dont retentissaient leurs synag-ogues (1)?
Controverse avec les Juifs. — Ce n'est pas seulement sur leur
châtiment et leur déchéance que Jérôme entreprend les fils d'Is-
qui permet la perte d'une nation pour assurer le salut des autres
(vi, 10). La façon dont ils interprètent les passages relatifs au Messie
Il A la fin du livre XVII supei'fluum est ea sermone disserere qux oculis pateant,
:
cmn omnia desiderabilia eorum versa sint in ruinas, et tcmplum toto orbe célébra-
tion, iii sterquiliiiium urbis novae, qux a conditore appellabatur Helia et in habita-
culum transierit noctuarum. frustraque quotidie dicunt in synagogis suis : Super
his omnibus, Domine, sustinebis et affliges nos, alque humiliabis vehemenfer.
[2, Il revient en trois circonstances sur cet anathème, au livre II : « ter per singulos
dies in omnibus synagogis sub nomine Nazarenorum anathemotizent vocabulum
C hristianum >>, aux livres XIIT et XIV^ :« Et sub nomine, ut sxpe dixi, Nazarenorum
llcbrui shiUa cou lent tonc iiiluntiir u.sMTci'f, us(/iir luI ciim lociiiii ubi leyifur :
1 I
pili... Ilebr.vi aiiUm ri rxteri explanatorcs sequuntur qxiod ntinr proposituri suinus.n
.MEI.ANGI-:S. 213
sous les Btibylonicus ([uand Temple fut détruit, ensuite sous Titus
le
nations disposées à vivre sous leur tutelle (liv. XV et XVIII). Ces nou-
veaux sujets, afin de réaliser lxvi, 23, viendr<»nt périodiquement à
Jérusalem, chaque semaine, tous les mois ou toutes les années une
fois, suivant leur éloignement plus ou moins grnnd de la ville sainte.
Ailleurs il relève contre eux les premiers mots du chap. xxvii : que
ceux qui prétendent que diable fera pénitence et obtiendra son par-
le
don interprètent donc ce qui est écrit il tuera le dragon qui est :
dans la mer.
Les païens auxquels .luifs et hérétiques empruntaient un certain
nombre de rites superstitieux ne sont pas moins malmenés. Le j)ro-
phète reproche (ii, 6) à la maison de Jacob de s'être attachée à des
enfants étrangers. Le commentateur en profite pour flétrir la pédé-
rastie chez les philosophes grecs et chez un souverain comme Hadrien
qui eut l'audace de diviniser Antinous. Il fait également chorus avec
Isaïe pour condamner bosquets qui favorisent la
les bois sacrés et les
luxure, pour stigmatiser l'usage, adopté même par Israël, de dormir
dans les temples des idoles et notamment d'Esculape, couché sur la
toison des victimes afin d'obtenir en songe la vision de l'avenir. De
même les Juifs auraient pris part à ces festins divinatoires dont les
Égyptiens étaient coutumiers au dernier jour de l'année pour y décou-
vrir le présage de l'abondance ou de la disette des saisons prochaines.
Chez eux encore avaient pénétré ces divinités domestiques, véritable
plaie des villes de beaucoup de provinces. Chaque quartier, chaque
maison de cette maîtresse de l'univers qu'est Rome possède un dieu
tutélaire devant lequel brûlent des cierges ou des lampes. Jérôme
n'ignore pas non plus que les rêveries des millénaristes ont des points
de contact avec l'âge d'or de Saturne chanté par les poètes, où l'on
verra couler des ruisseaux de lait et les feuilles des arbres distiller un
miel très pur. Ceux qui se créent de telles imaginations sont tout
prêts à admettre la fable des mille années et le règne terrestre du
Sauveur conformément à l'erreur judaïque, ne comprenant pas que
sous l'écorce de la lettre l'Apocalypse de Jean élabore la moelle des
(1) .Vu chap. II, Jérôme fait allusion aux Manichéens qui ne reçoivent pas l'Ancien Testa-
ment : ut recipiamus cetus instrumentuni et non secundum Manichxum aliam extra
domum Dei Jacob quxi-amus donuim. Au chap. lxv, il stigmatise l'erreur des Ariens qui
restreignent seulement à la personne du Père la partie d'un verset.
2\& REVUE BIBLIQUE.
de rois. Voici que bien avant cette époque les négociants et les arma-
teurs de Tyr sont appelés princes et illustres. » Le mensonge dans les
oracles païens est toujours tempéré de vérité. Les prédictions am-
phibologiques faites à Pyrrhus et à Crésus en sont une preuve (1).
quando Sobna pontifex inagaam partem prodidit civitalis, et lantum Sion, id est arx
218 REVUE BIBLIQUE.
'/t. Au <liap. M. .Icrôiiie (omlial les éruilits irinliti Ih lir.inruin qui |nrisciil (|iic li-
texte 'II' S. Mallliieu Quonimn \(iziir,riis voinhilnr esl tiré du ?'»;•</« de radier Jcssr.
en 8C plai anl au jioinl de vue lin;;ui>lique : >ird scitndiim (/uod liir "ly;. prr y litlernin
MKLANGES. 219
scrihalur : cums proprietatem et sonum inter z et s Latinus sermo non exprimit. Est
enim stridiilus, dentibus vix limjux impressione profertur, ex qua etiam
et strictis
Sion urbs scribitur. Porro Xazarm, quos LXX scuicii/icatos Symmac/ius separatos
transtulerunt, per 7 semper scribuntur elementum.
(1) Cf. RB., 1915, p. 492. Les Hébreux, note S. Jérôme au chap. i, prétendent que le
prophète Isaïe a été exécuté pour deux motifs, d'abord pour avoir traité les Juifs de
princes de Sodome et de peuple de Gomorrhe. ensuite pour avoir dit « J'ai vu le Seigneur :
assis surun trône élevé )\ en dépit de cette déclaration de l'Exode « Tu ne pourras voir :
ma face. » Une autre preuve que l'exégète consulte les Juifs est dans cette phrase sur le
chap. xxn « Referchat mihi HeOrœus prœsentem visionem non pertinere etc. »
:
1 Cunii/ite ni) crudiUs rjui reiem, quid hic serino sigiii/icarct, audiri aO .l.ijijjitns...
branches desséchées et vide. Pour peu que l'on ait vécu en Palestine,
on sentira toute la vérité de ce petit tableau ainsi que celle des
usages suivants. La rareté des prairies et du foin oblige les Pales-
tiniens et beaucoup d'Orientaux à préparer la paille pour en faire
l'aliment des animaux (1. Ils la brisent au moyen d'un traîneau
muni de roues chaume et l'émiettent. Le
dentelées qui broient le
fellah de nos jours use du même
procédé quoique l'instrument dont
il se sert soit souvent plus rudimentaire. Tandis que le gith et le cumin,
(1) Jn x\v, 10 : Hoc iiixta ritum loquitur Palestine, et multarum Orlentis provin-
ciarum, qux ob pratorum et fœni penuriam, paleas préparant esxti animantium.
(2) .Serf non pote rat scriptura dicere, quod Judica provincia non liabebat.
[Z] Et hodie quoque Arabix et Mesopotami.i operiuntur feminn...
2-22 REVLt: lîllîLlOLE.
les églises d'Occident jusqu'à son époque de donuer à boire aux nou-
veaux baptisés le vin et le lait qui symbolise l'innocence. Ailleurs
nous apprenons les diverses acceptions du mot /y.'^z-zily. dans le
monde ecclésiastique et l'usage de fléchir le genou devant le Christ.
Les notices géographiques de saint Jérôme ne sont pas toutes de
premièie main. Bien qu'il ait parcouru l'Lgyptc et une partie de
l'Orient, on ne saurait exiger de lui une connaissance directe de tous
Sans parler du tableau ethnologicjue esquissé
les lieux qu'il décrit.
au livre XVIII, on est en droit de douter qu'il ait visité l'Arménie
quand il raconte que l'Ararat est une plaine d'une incroyable fertilité,
arrosée par l'Araxes, au pied du Taurus. D'où il conclut que l'arche
s'est arrêtée non pas sur les monts de l'Arménie, mais sur les plus
hauts sommets du Taurus qui surplombent les campagnes d'Ararat (1).
iMais nous pouvons affirmer que .lérome a vu lorsqu'il nous dit que
(1) //) wvMi. ArarnI nutem rcgio in Armenin campeatris esl prr quam Ara.rrs
3« :
lenipora probant... Nemo rst i/ui dubitel. ncr latilas fiabcl opes ipsa urbs de terra
rerjiouis su.i qu.i vnlde augusta rst, et GalUe.i Damasci /inibus premitur. quantas
.
de sulivectione navium.
(3; la XI M, Jérôme Jonin' un aperçu de ()iioiii.i>li(|iie
I t'^^yiilicnne : yam et /ilerai/ue
Nous n'avons pas à revenir sur ce que nous avons marqué dans
l'historique du Saint-Sépulcre touchant la substitution de sepulchrum
à requies dans xi, 10. En vertu des droits de l'allégorie, saint Jérôme
ne craint pas de rapporter au tombeau du Sauveur la métaphore du
roc taillé et de la carrière du chapitre li. Mais on aurait tort de con-
fondre le sens mystique avec la crédulité. Les degrés de la maison
d'Ézéchias que les montreurs de lieux saints indiquaient dans l'en-
ceinte du Temple et dont pouvait s'émerveiller le Pèlerin de Bor-
rien est l'ouvrage de mes mains ». dans les légions de moiues vivant
\r livre par* cette [)hr.'ise : « ïtijj'n ilr, iiwt im/iossibilc rst plnrirr
(iinnibiis ; ticc huila rii/liiiini (jiumtfi st'nlciil\(iiiini ilivrrs'ild^ csl . » Kii
25 mars 1916.
F. -M. Abel.
plus possible.
Du côté du texte latin l'apparition d'une édition critique M) inau-
gure une phase nouvelle. A ne juger de cette édition <|ue par sa rela-
tion avec le texte grec, elle constitue une amélioration considérable.
Que l'on repasse les critiques du P. Gornely contre la Vulgate Clé-
mentine, on s'apercevra que, dans des cas très nombreux, elles ne
porteraient pas contre le texte de MM. Wordsworth et White, Est-ce
à dire que ce texte soit parfait?
La question peut être envisagée de deux façons. L'édition critique
peut encore être perfectionnée, soit en mettant en œuvre des manus-
crits plus nombreux, soit en les collationnant plus complètement et
plus judicieusement.
Les éditeurs anglais ont eu l'intention de ])ublier la revision qu'ils
croyaient être celle de saint Jérôme, d'après les manuscrits <{ui la
contenaient et qu'ils nomment donc hiéronymiens. La commission
bénédictine nommée par le Saint-Siège a eu plus libre accès auprès
de certaine.^ bii>liothèques: eUe a l'avantage de se servir d'un travail
déjà excellent; et c'est ici surtout (pic dirs dicni docc.l. Tout fait donc
Quel que soit l'intérêt des travaux^ critiques auxquels se livrent des
savants consciencieux sous la direction de Son Éminence le cardinal
Gasquet, il y a encore pour l'Eglise un intérêt supérieur, c'est que la
version officielle de l'Eglise latine soit aussi parfaite que le permet
l'humaine fragilité. Une retouche dans ce sens est-elle dans les pou-
voirs de la Commission créée par Pie X? Cela n'a point été dit encore.
Mais elle est certainement dans les attributions du Siège .\postolique.
Nous n'avons d'autre prétention ici que de marquer où en sont les
faits.
égard.
Nous ne noterons pas davantage les divergences dans l'orthogra-
phe praescivit, exivit {y^.-ÇXém.) ou praesciit, exiit (WW.); dimi-
:
mentinc; add. que tel mot est en plus dans WW. ou serait à ajouter
à la Vulgate. Le mot placé devant 1. iloco) est celui que WW.
mettent
i\ la place de celui qui suitl. Le mot de la Vulgate placé devant un
trait ( — )
pourrait être remplacé par celui qui suit ce signe; a., ante;
p., post. 1" pour primo loco, etc.
Première liste.
m, G om. Inmc.
— 8 om. la parenthèse et add. un point d'interrogation après
bona.
— 9 igitur 1. ergo.
— 22 om. in eum.
— 26 om. Christi.
— 30 iustificabit 1. iustificat.
IV, 5 om. secundum proiiositum gratiae Dei.
— 8 imputabit 1. imputavit.
— 9 om. tantum manet.
— 16 ut secundum gratiam, ut jirnia sit, 1. ut secundum gratiam
firma sit.
— 17 om. ea p. vocat.
— 18 om. ei.
— 'Ih C/iristum.
V, 1 ir/ilur 1. erfjo.
— 2 fuie 1. pcr fidem : om. f'ilioriuii
— 31 secta/is 1. sectando.
— 32 om. enim.
\, 7 e.r 1. a.
— 8 om. Scripiura.
10 iti salutem 1. ad salaient.
— 16 oboedieruni I. nhcHunl.
XI, \ om. a nie i\. l'uni I.
— 5 om. salrae.
2(» (ivertel 1. arertal : inpietates 1. i)npietatrm.
Ml. 1 placens [. benejilacrn.s.
— r» om. vos p. perseqnenlibus; le texte ,L;Tec est douteux.
XIII, 5 et 1. etiam.
— 7 om. erqo.
MKLANGKS. 231
Deuxième liste.
est mors?, ce (jui est moins bon que quod orgo honiim :
est, ynilii...
— 20 Même cas.
trange.
— 9 add. et a. inortnns.
— 17 om. enini.
XVI, 2r) rf 27 coqniln, solo, (jni nr pont s'aj>pli(jM('i' (|n ;i Ihcn, crée
un conti'csi'us.
— 28 om. f't (florin, tandis ijn'il l;ui(li;iit snppiiiiicr //'/;jo/* ^/.
Troisième listk.
constitutus et declaratus.
— lesu Christi Domini
i qui clairement pour lesu
nostri, est
Christo Domino nostro.
— 22 enim. del.
— desideria — in
2i. in desideriis.
— 29 repletos — repleti; àe\. fornicatione.
— 31 absque foedere.
del.
II,2 enim — autem, avec un certain doute..
— an — aut.
ï
— 8 non acquiescunt — non oboediunt, nuance; mais credunt
— oboediunt
— 19 add. et a. confidis.
— 2i per vos — propter vos.
— add. nam circutncisio
2.5 a. 1°.
m, illorum.
3 del.
— 7 suppose
ey<z;?z beaucoup moins probable que
--âp, ce.
— 9 del. eos.
— 22 Mettre une virgule non un point avant et iustitia.
— ±\ De même avant iustificati.
— 27 tua.
del.
— 29 an — aut.
IV, 3 reputatum est illi ad iustitiam est moins bon que deputa-
tum est eiiîi iustitiam de Tertullien [Monoy. vi).
— i imputalur — deputatur.
-2^'^ REVUK I51BLIOLE.
— J l gloriamur — gloriantes.
— 12 del. hune n.. nnmdum.
— 15 plures — multos ; cï.w IG.
— 17 del. et a. iustitiae, important; < le don de la justice ».
—
-
20 delictum — peccatuni. 2"
— An — aut:
;J Christo Jesu — Christ u/n Jesum; in morte
in in
— in morteni
— enim — igitur'
i. — suscitât as sitrrexit est
— ô simul — ita.
— 8 simul: cum
del. — cum VJiristo illo.
— dominabitur
1) — dominatur; resnrcjens ex morluis [CIrm.)
surgens a mortuis (WW) — suscitatus ex mortuis.
ov\
lege.
— 3 del. viri p. lege.
— 7 nesciebam est trop littéral — nescirem.
— 8 occasione antem accepta, pecralnm prr manda/um firra-
— 27 — super. pi'u
— 28 in aequitate quia verbum breviatwn.
del. :
XI, an — aut.
-2
m, li.
— del 1 1 SIC.
— 13 enim — autem; qnamdiu — quatenus; honorificabo —
honorifico.
— 15 amissio — abiectio.
— 10 delibatio — primiliae, selon l'usage ordinaire de Vg.
— 20 propter incredulitatem — incrcduUtate.
— 21 ne forte nec jjarcat — plus probablement nec
tibi tibt
diam.
— 32 omnia — omncs; in incrèdulitate [incredulitalem WW) —
in inoboedientiam.
— 33 add. et a. sapientiae.
— 30 m ipso — in ipsum.
XII, 1 ratioiiabile obsequium — ratio nabiiem cidtum.
— 2 del. vestri; bona, et beneplacens, et perfecta — plus pro-
bablement : Quod bonuni est, et placens et perfectum.
— 3 del. l't a. nnicuique
— 6 rationem — mensiirain.
— 17 del. non tantiim coram Deo sed etiam.
XIII, 2 acquirunt — acquirent.
— 3 boni operis, sed — bono operi sed malo.
tnali
— 5 necessitate subditi — necesse subditos
estote est esse.
— 6 servientes — persévérantes [Aiig.].
— 9 instauratur — rccapitidatur.
— 10 proximi — proximo.
— nos — vos plus probablement; propior
11 nostra sains — est
— î» — revixit.
resurrc.ril
— 12 reddet — du {Ct/pr).
bit
— IV confido — sum prr ipsum — per ipsum, important.
certtis ;
se
— U> nostrum — vestrtim.
— 19 secteynur — plutôt seclamur; del. custodiannis.
— 20 jicroffendinilum — cnm scandalo.
MKLAMiKS. 237
— 12 e.rurget — cxurgit.
— 13 del. et a. virtute.
— 18 uudeo — ausim.
— 19 per circuitum — hoc per circuitum. et
— 20 hoc
del. evangelium; aedi/icarem — aedificem.
p.
— 23 ex multis iam praecedentibus awi's — a multis annis.
— 2i add. enim p. spero. On comprend cependant qu'une tra-
duction évite une anacoluthe aussi embarrassée.
— — autem; proficiscar — proficiscor.
25 igitur
— — communicationem.
26 collationem
— 30 ergo [Clém.) ou igitur (WW) — autem.
— 31 obsequii mei oblatio — ministerium meum [Fiddensis) in ;
seuls manuscrits.
Appkndice.
fjKfnn diru}»
XIV, IV pcr ipsii//) [Clcm.) — .lôr. C. Joe, ii, 1(1 :/>«"/• se ipstim.
XVI, 7 Iifiiiam [Clém.) — .1er. VII, 703 : Iuliayn.
Sauf ce dernier cas, qui est un nom propre, le cas de xii, 3 que
nous n'avons pas reproduit, et vir, 6, les traductions de saint Jérôme
sont supérieures à celles de la Vulgate, le doute n'étant possible (jui*
VI
peler les ouvrages où il a consigné les études qu'ils lui ont suggé-
rées : The Cities and Bislioprics of PJirijgia, 1895-1897; St Patil the
Travellcr and the roman Citizen, 1895 ; The C.hurch in the Roman
Empire before A. D. I/O, 1893; A Commentani on St historical
Paid's Epistle ta the Galatiam, 1899; The Letters to the seven Chiir-
ches of Asia, 190i; Pauline and olher Studies in the lùstory of Reli-
gion, 1906; The Cities of St Paul, 1908; Luke, the phijsician and
other Studies, 1909; Was Christ born at Bethléem, 1898; Studies in
the History and Art of the eastern Roman Provinces, 1908; Pictures
aU) REVUE l^RLinLi:.
of (lie Àpostolic CImrch, lîMO; Thr firsl ChrUùan Cenlury, 19M ; The
Trachint/ of Paul in lenns of tlie présent dû)/, llM-2; Historical Coni-
menlani on the fwsl Epistle to Timothy dans The Exposifnr, 1909,
1910, 1911; Lukes Authoritiesin Ihe Acis, même revue, 1909; The
Ihought of Paul, même revue, 1911; Suggestions on the History and
Letters of St Paul, même revue, 1913.
Dans un nouvel ouvra.se sur rinfluenco des découvertes récentes
sur la valeur historique du Nouveau Testament, Sir W. Ramsay (1 )
résume ce qu'il avait déjà dit sur le sujet et présente de nouveaux
aperçus. Nous allons recueillir dans ce travail ce qui nous a paru
important, sans essayer de donner aux considérations de l'auteur
plus de cohésion qu'il n'en a établi lui-même
Uamsay étudie d'abord les Actes des .Vpotres. H rappelle le jug-e-
< Mais le peuple de la ville (Iconium) l'ut divisé; les uns étaient pour
les .luifs et les autres pour les ap6lres. Kt comme il se lit une émeute
des païens et des Juifs, avec leurs magistrats, })our les oulrai:er et les
dans cette ville étaient toutes grecques. C'est en 1910 seulement que
Kamsay découvrit à Konieh deux inscriptions en langue phrygienne.
La plus longue de celle-ci a été publiée par le professeur Calder (-2)
et est reproduite par Ramsay. Elle est écrite dans un mélange de pa-
tois de grec vulgaire. Dans un autre de ses ouvrages
phrygien et
grand prêtre, il répond qu'il ne savait pas qu'il fût grand prêtre.
Cette répon'=;e de l'apôtre a beaucoup exercé la sagacité des criti-
(1) Cawadias, Fouilles d'Epidauros, I, p. 68, n'' 206. Ciceron, AU., I, XIV, 5.
Kam^^ay est mieux dans le vrai quand il remarque que les accusa-
tions portées contre Paul ressortaient bien des circonstances et sont
caractéristiques de l'état de la société gréco-romaine en Orient. Dans
l'îlede Chypre, le magicien Elymas Barjesus craint que Paul ne
détruise son inthicncc sur le gouverneur romain; à Pliilippes, les
maîtres de la jeune esclave, possédée d'un esprit de Python et pré-
disant l'avenir, voient leur fortune ruinée par l'apùlre qui ordonne
à l'esprit de l'ython de sortir de la jeune fille; à Athènes, les profes-
Juifs sont furieux contre Paul, parce qu'il plaçait les païens sur le
même pied qu'eux au point de vue religieux et qu'il détournait d'eux
leurs prosélytes, cl çc5oj;j.cv:i O^iv, et de ce fait les privait de leurs
contributions, source de revenus pour la synagogue et d'influence
pour la nation des Juifs.
Ramsay nous parle ensuite des magiciens dans les Actes des
Apôtres. Ils étaient très noml^reux à cette époque; on leur attribuait
le pouvoir de changer l'ordre de la nature, de prévoir l'avenir et l'on
s'adressait à eux pour obtenir ce que les moyens naturels ne pou-
vaient donner. Il est probable que Paul, en disant aux Athéniens
qu'ils étaient plus religieux que d'autres, wç $E'.7t$ai;j.cv£s-:Épojç. a pu
vouloir faire aussi allusion à leur superstition; liiz'.zy.<.\j.i<r) signifie
lj.i';xKr,. titre que Ion trouve attribué au dieu des cieux dans une ins-
cri})tion lydienne (1) : Il est dieu dans les cieux, grand Mên le cé-
leste, lagrande puissance du dieu toujours vivant, '^.z-^xK-r, oûva;j.iç -rcj
àOavaTCj Szzu. Le terme cjyy.iv.: était un mot technique dans la langue
de la religion, de la superstition et do la magie et l'un des termes
les plus communs et les plus caractéristiques dans le langage de la
qui vous annoncent une voie de salut, ;;;v crtor^piaç. On peut se de-
mander par quelle inspiration elle prononi.ait ces paroles. Nous n'en
saurons jamais rien.
Ramsay remarquer en passant que l'on croit ordinairement que
fait
naux ne pouvait être exercée par une femme et il est à supposer que
nous avons allaire ici à une petite association qui avait mis de Tar-
g-ent en commun pour exploiter le don de la jeune esclave.
Ramsay nous parle encore du proconsul de Chypre, Sergius Paullus,
dont le nom, assure-t-il, doit être ainsi orthographié, comme il res-
iionio, à cette épo(|iic. on était très tnlii-.iiil sin- les croNanccs reli-
chrétienne du croyant baptisé, xxi, 25; xix, 18, etc. Les croyants de
cette troisième catégorie sont désignés par le parfait TrszwTEjyi-eç.
qui indique la permanence de l'état. Quelquefois cependant ce seul
terme désigne les chrétiens définitifs, xviii. 28. Il est possible cepen-
dant que celui qui a cru s'en soit tenu à une adhésion de l'esprit et
n'ait pas scellé cette croyance par le baptême. Or, Luc ne nous dit
pas que Sergius Paullus ait été baptisé et lui, qui est si attentif à si-
gnaler l'attitude des autorités romaines en face du christianisme,
l'aurait certainement consigné dans son récit si le fait s'était produit.
Sergius Paullus aurait donc cru à la doctrine du Seigneur qui l'avait
frappé d'admiration, ïv-'i.r,zz'z\j.v/zz. Il s'en serait tenu à cette adhésion
de de Ramsay nous savons que plusieurs
l'esprit. Telle est l'opinion ;
Tij 7oj0?;va'., dit d'une voix forte : Lève-toi. » On traduit souvent -ou
C7w0r,vai par « pour être guéri » ; ce quine répond pas au contexte. L'im-
potent écoutait Paul et celui-ci ayant arrêté les yeux sur lui vit, à
:70JTY;c(a, était très connue chez les païens; elle signifiait pour eux salut,
prospérité, santé. que pouvait désirer l'impotent.
(>'est là le salut
par les païens, pour leur assurer le bonheur, la prospérité, leur était
présenté par Paul sous une forme plus spirituelle et leur promettait
un bonheur qui ne devait pas consister en biens matériels mais dans
la connaissance et la jouissance de Dieu. Le salut chez les païens
devait être atteint par des rites et des cérémonies tout extérieurs, par
des prati(jues magiques, ce qui le différenciait profondément du salut
chrétien, fruit de la foi et produit par des actes moraux. Dans sa pré-
dication. Paul adopta les termes connus, car il devait parler dans le
langage de ses auditeurs s'il voulait être compris. Mais il donna à ces
termes un sens plus riche, plus spirituel, tout en les laissant com-
préhensibles à un certain deg-ré à ses auditeurs, mais non tout à fait,
car qui a parfaitement compris les doctrines de Tapotre? Quel païen
et même quel théologien chrétien a compris, dans tous ses dévelop-
pements, dans tous ses détails, l'Epltre aux Romains?
Nous n'avons pas à reproduire ici les inscriptions païennes où se
trouve terme zM-r^piT. et que cite Ramsay; elles sont déjà connues
le :
[\) La ifilcur liis(ori</iic des Acirs ilcs apùirrs, dans |;i Herue f>itili<iiir, juin liMJ.
MÉLANGES. 249
E. Jacquier.
RECENSIONS
Alfred Loisy. — f.'Kji'itre aux (ialales, in 12 de 201 pp., Paris. Nourrv, lOHi.
L'étude de M. Loisy sur l'Epître ;iux Galates « n'a pas la prétention d'être un
commentaire complet, mais comme une esquisse préliminaire de l'évangélisatioD
chrétienne en ses débuts, d'après sa source la plus authentique, en attendant que
l'on se risque à en entreprendre le tableau tant de l'ois déjà l'ait et toujours à refaire »
(p. -4).
Et c'est Lien en effet une esquisse qu'a tracée le Professeur du Collèu;e de France,
en traits fortement appuyés, selon sa manière, avec des contrastes énergiques. Cette
fois la lumière de l'histoire vient de l'Épître aux Galates, et cette lumière se projette
de la façon la plus défavorable sur les Actes des Apôtres, malmenés de
la façon que
l'on peut supposer, quand l'auteur est en train, fia personnede Paul n'y gagne rien;
c'est un visionnaire qui « a poussé jusqu'aux dernières limites possibles le génie du
contresens » (p. 4ô).
cette argumentation. Ils sont pourtant nombreux ceux (|ui se rendent compte (|ue
les hardiesses de l'aflirniation ne répondent pas toujmirs à la solidité des raisonne-
ments.
Mais d'abord (|ui sont les Calâtes.' Des drux lheori«'S (pii partagent les criliciues,
.M. Loisy a préféré celle que nous croyons la plus solide, celle (|ni tient \v> (ialates
piiur des (ialates et non pour des l'isidiens ou des i.ycaonicns. I.a thèse est établie
solidement, et ;i vrai dire ne saurait l'être (|ue \i:ir l'antorilé des Ic/c.s. admise
dans certains cas.
RECENSIONS. 251
Nous ne songeons pas à nier la pénétration de l'auteur dans bien des passages dif-
pas pour cela d'attribuer une grande importance à la lormatioa de son esprit. C'est
l'intérêt de cette nouvelle vie de saint Paul, dont la nouveauté n'est pas sans fan-
taisie.
Comme le veulent les Actes, Paul est né à Tarse en Cilicie, dans une ville hellé-
nisée. Cela n'a l'air de rien, mais cela explique comment Paul a pu être, plus ou
moins consciemment, imbu de la doctrine des mystères païens. Le nom de Paul,
prénom [sic" romain, aurait toujours été le sien, en rapport avec la condition de son
père, en même temps qye le nom hébreu de Saul p. 49).
rédacteur — des Actes a-t-il cru que Paul n'avait pu persécuter le christianisme
naissant qu'à Jérusalem, puisqu'il supposait l'existence d'une communauté à Damas,
communauté que Saul voulait détruire? Car cela se fit très vite : vc du jour au
lendemain, le » jeune garçon » devient un terrible persécuteur, investi de la con-
fiance du grand prêtre. Toutes ces indications sentent l'artifice et paraissent être de
pures inventions » (p. 69].
Sévère, mais peu justifié. Et comment l'auteur des Actes aurait-il osé charger
Saul d'une odieuse complicité dans le meurtre d'Etienne, s'il n'avait pas même
jusqu'alors mis les pieds à Jérusalem?
D'après M. Loisy, il était d'abord à Damas, et c'est là qu'il eut sa vision. Il faut la
tenir pour un fait certain, attesté par Paul lui-même. Et pourquoi ne pas admettre
ce fait? H Ce qu'il dit n'a rien de si incroyable : par la vision qui l'a converti, c'-est-
lui-même >
(p. 78;.
.lusqu'ici nous n'avons que le mécanisme bien connu de l'explication naturaliste.
Mais puisque la psychologie de Paul ne s'est pas développée après, il faut qu'elle ait
été préparée auparavant pour obtenir, par une seule vision, un résultat aussi
complet. M. Loisy se devait de remplacer la psychologie allemande reconnue inac-
Il lui" suffit que l'intuition du nouvel évangile ait été « préparée en quelque
ceptable.
manière dans son esprit; et elle aura été préparée si Paul a pu avoir la pensée,
.232 REVUE BinLIOCE.
quand même ce n'aurait été (|ue pour l'écarter, (|ue ce crucHié dont on faisait un
Seiiîneur divin, roi immortel des élus, aurait donc sauvé les hommes par sa nxirt,
comme on le racontait de certains dieux païens, et aurait été un médiateur de salut
éternel (p. 7î)). Tout coup vaille, et les idées qu'on entretient, et les idées qu'on écarte.
Et certes cette psychologie vaut celle du protestantisme. Une idée, même écartée,
peut se présenter avec plus de force dans une hallucination. IMais pourquoi l'halluci-
nation a-t-elle eu plus d'empire sur l'esprit de Paul que le sens rassis? Pourquoi,
après avoir « repris possession de son esprit », n'a-t-il pas écarté le fantôiue? C'est
l'énigme toujours nouvelle; n'admet d'autre solution que celle que Paul lui a
elle
donnée, celle d'une révélation du Seigneur .lésus. Quant aux dieux païens qui ont
sauvé les hommes par leur mort, nous attendons toujours la preuve de cette auda-
cieuse aflîrmation pour le V siècle de notre ère.
Et maintenant toutefois nous comprenons pourquoi il ne Tallait pas que 1\tuI ait
été trop imbu de rabbiuisme : « Une part d'expérience intime, un manque d'assu-
rance en la Loi, qui n'aurait pas été ressenti par un .luif d'éducation rabbinique.
mais qui s'explique chez un homme élevé dans un milieu hellénisé dont il a subi
compter dans les causes qui ont préparé la con-
l'influence sans s'en apercevoir, est à
version » (p. 79). Mais cette explication, empruntée à l'a histoire des relijiions ».
serait une gageure trop elfrontée comme commentaire du texte « vous avez :
entendu dire ce que fut ma conduite autrefois dans le judaïsme: (]ue je persécu-
tais, etc. et que je l'emportais dans le judaïsme sur la plupart de ceux de mon âge
dans ma extrêmement zélateur des traditions de mes pères » (Gai. 1,
nation, étant
1.3 s., trad. Loisy). Aussi M. Loisy se décide à entraîner saint Paul dans une sorte
de saut périlleux qui aboutirait à un total renversement des idées, non moins nettes,
non moins précises après qu'avant, mais en sens contraire La foi de Paul ne s'est :
pas formée dans des expériences attentives, mais dans des discussions passionnées; à
un moment donné, elle fait un bond qui n'est pas la conclusion logique d'observa-
tions faites par le principal intéressé, mais une révolution, un saut de la foi mysti-
que, occasionné par l'état cérébral du sujet et relevant de la psychiatrie non moins
que de la psychologie ralionnclle et morale » (p. 80). >'ous voilà donc, pour
échapper aux tisanes libérales, ramenés à la Salpètrière. Le texte dit : la révéla-
tion du Fils de Dieu.
Une illusion en amené une autre. Paul (|ui s'est imaginé avoir vu .h-sus, s'est
imaginé avoir reçu de lui sa mission d'Apôtre. C'est ce qu'il a surtout voulu mettre
en relief dans la partie historique de l'épître. Il tient sa mission de .Icsus-C.hrist. non
des hommes. C'est son premier mut, à la première li;ine : * i'aul, apôtre, non de la
part d'hommes, ni par homme, mais par .lésus Christ et Dieu le Père » (1, 1. trad.
r.,oisy). .Si l'épître a quelque valeur historique et on lui en accorde beaucoup —
quand il s'agit de l'opposer aux Actes —
et si par ailleurs une théorie quelconque
,
empêche d'admettre la réalité de la vision, il resterait que Paul, s'étant imaginé de-
voir sa mission au (Christ, n'a cru devoir demander l'investitiu'e à personne autre.
M. Loisy ne s'en tient pas là. .Si Paid a été si aflirmatif, « c'est que selon le point de
vue hiéro.solymitain et judaïsant qu'il combat, il était apôtre par mission de la
première communauté. Ce point de vue pouvait bien être en rapport avec les faits
réels et primitifs et avoir une portée générale. Paul expose à sa manière les faits qui
le concernent, et l'on dirait, à l'entendre, que ses adversaires ignoraient son histoire,
ainsi que la véritable notion de l'apostolat. Ils savaient mieux (jue lui comment
étaient nées la foi au Chris! et l,i prédication chrétienne » |). ;j3). VA l'auteur nous
expliijiie (|ii(lle Mil la véritable notion de l'apostolat. C'est une théorie bien étrange
RECENSIONS. 2\^
et encore plus Irauile; |>oiir tout dire c'est une série de conjectures qui s'appuient
sur un contresens.
La notion traditionnelle de l'apostolat est connue. Jésus a choisi des apôtres et les
a envoyés. D'après M. Loisy. a jamais Paul ne laisse entendre que les anciens
apôtres aient été appelés du vivant de Jésus au ministère qu'ils exercent, et eux-
mêmes ne se prévalaient |)oint sans doute d'une telle vocation, qui n'avait pas eu
lieu 1)
(p. ô-i). Il n'est pas le premier à nier la mission des apôtres, mais alors d'oîi
vient ce nom? M. llarnack a supposé que le nom d'apôtres vient d'une comparaison
des apôtres chrétiens avec les envoyés du patriarcat juif, chargés de porter les
lettres du patriarche et de recueillir les cotisations. Ce système n'est du moins pas
contraire à la notion essentielle de l'apôtre, qui est un envoyé. Il soulîre des dif-
ficultés, car rien ne prouve que ces envoyés juifs aient porté dès le i' siècle le nom
d'apôtres. AI. Loisy ajoute une objection de son cru : la qualité d'apôtre appartient
aussi bien et « semble même avoir appartenu originairement aux chefs de lacom-
munauté de Jérusalem, qui n'étaient point « envoyés » au dehors » (p. 51). Ce qui
revient à dire que le terme d'apôtre ne signifia point d'abord un envoyé. « Serait-ce
une conjecture trop hardie que de les faire qualifier < apôtres » en tant que délé-
gués à la recette et à l'administration des dons fournis par les fidèles hiéro-
solymitains? » une hypothèse commode, et qui dis-
(p. ôl). Ce serait en tout cas
penserait de se demander qui donc a envoyé les Apôtres car la communauté ne .?
pouvait guère les envoyer, n'ayant pas autorité sur eux, étant recrutée par eux,
mais bien les prier de tenir la caisse. « L'apôtre paraît bien avoir été qualifié ainsi
d'abord à raison d'une délégation de la communauté, et cette délégation ne concer-
nait pas directement, du moins pas exclusivement la prédication évangélique; mais
les délégués étant prédicateurs, et la prédication étant le principal de leur ministère,
au moins pour le plus grand nombre, l'idée de la délégation par le Christ pour la
prédication de l'Evangile se fit jour et prévalut » (p. 52).
Mais oui, toute cette conjecture est beaucoup trop hardie. Elle ne tient nul
compte du sens du mot x-ôn-oloç, que l'hypothèse de Harnack respectait du moins.
Je demande pardon à M. Loisy de mon pédantisme. Je cite du grec parce que,
jusqu'à présent, la seule manière de déterminer le sens d'un mot est de recourir à
l'usage de ce mot et à celui des mots de même racine. On savait très bien alors;
que à-67ToXo; signifiait « envoyé » et que la prédication supposait précisément
;
cet envoi : « Comment prêcheront-ils, s'ils n'ont été envoyés (1)? » là-oaTaÀwi-.v)
(Rom. 10, 15}. La prédication était nécessaire à la foi et supposait la mission. Si
donc, comme l'admet M. Loisy, les chefs de la communauté de Jérusalem se nom-
maient apôtres, c'est qu'ils avaient été envoyés. Et pour cela il n'était pas néces-
envoyés au dehors, pas plus qu'Isaie (Is. 6, 8) n'était envoyé
saire qu'ils aient été
hors de Jérusalem. Comment
veut-ou qu'un mot. détourné de son sens par la com-
munauté de Jérusalem, y soit si vite revenu dans les lettres de saint Paul? Il n'a
certes pas dissimulé qu'il ait été délégué à la recette pour la communauté de Jéru-
salem, mais cela n'avait rien de commun avec l'apostolat, et c'est pour cela qu'il a
pu dire si énergiquement qu'il n'était pas apôtre « par homme «.
Au surplus si les Apôtres prêchent ce que Jésus a enseigné, ils sont vraiment ses
envoyés, ils parlent en son nom. D'après M. Loisy. Paul ne s'en est pas douté.:
« Paul n'a pas l'idée d'un enseignement donné par Jésus vivant et qui se perpé-
tuerait dans la prédication de ses apôtres » (p. 57j. Voilà qui est net. On tourne
quelques pa^es, et on lit : « L'Apôtre alfirme solennellement que son Évangile n'est
point chose humaine, il ne Ta « reçu » d'aucun homme, et ne l'a point « appris »
comme on sinstruit à l'école des rabbins, en recueillant et répétant les dits des vieux
maîtres, —
méthode qui était celle des apôtres judaïsants par rapport à l'enseigne-
ment de Jésus, — (p. 02 La con-
mais par une révélation de Jésus-Christ », etc. .
Puisque Paul a exposé son évangile aux notables (Gai. 2, 2), il a dû s'informer du
leur! et si leur évangile consistait à répéter l'enseignement de Jésus, Paul avait donc
l'idée d'un enseignement donné par Jésus vivant. Ou bien les Apôtres de Jérusalem
enseignaient-ils autrement que les apôtres judaïsants?
Est-il même certain que les judaïsants présentaient Paul comme investi d'une
mission de la première communauté? C'eût été lui reconnaître une autorité
officielle. Il fallait ensuite prouver qu'il avait prévariqué. Le plus simple pour les
judaïsants était de nier qu'il fût un apôtre. ]Mais eux, les judaïsants. devaient se dire
apôtres ou envoyés de la communauté de Jérusalem. C'est pour cela que Paul met
son apostolat au-dessus du leur et qu'il tient tant à dire qu'il n'a reçu mission
d'aucun homme, pas même de Pierre, pas même de Jacques. xNJais si en revanche il
reconnaît que l'évangile de la circoncision conûé à Pierre n'est pas inférieur au
sien, c'estdonc qu'il lui attribue une origine divine et non la délégation de la com-
munauté pour remplir la caisse et la conserver, « car Celui qui a procuré (ti à
Pierre l'apostolat de la circoncision m'a procuré aussi les gentils . (Gai. 2. s, trad.
Loisy). Si Celui-là est le même, qui est-ce, sinon le Christ et Dieu le Père? Sans doute
Paul ne parle pas du Christ vivant, c'est-à-dire avant sa mort, mais les Apôtres ne
prétendaient-ils pas tenir leur dernier et capital ordre de mission du Christ res-
suscité ?
Voilà donc Paul apôtre : La vocation coïncide avec la vision, et Paul est entré
sans aucun délai dans l'exercice de sa vocation » (p. 75). Je ne me crois pas autorisé
par les textes à chercher chicane à M. Loisy sur ce point. L'idée d'un novicint de
saint Paul, encore proposée par M. Brassac, applique à saint Paul une méthode qui
ne fut pas toujours celle des convertis, même laïcs. Le P. Lemonnyer traduit : « Je
me retirai en Arabie » 1, 17i, comme si Paul avait fait une retraite, et ne voit rien
dans le texte qui indique que l'apôtre se soit consacré au ministère actif. Mais le
texte ne dit rien de plus à propos de la Syrie et de la Cilicie. Il faut traduire avec
M. Loisy :
' Je nl'eu allai (2j en Arabie», et conmie l'Arabie n'est pas partout
déserte comme aux environs du Sinaï, le caractère de Paul, l'intensité de son zèle,
indiquent assez ce qu'il se mit à faire. Il y a plus. Dieu lui avait révélé son Fils pour
qu'il le prêchât '1. in;, et la lumière était assez parfaite pour ne point nécessiter
de plus amples réflexions. Paul obéit donc et prêcha aussitôt, comme le dit assez
clairement le livre des .Vctes (9. 20). S'il avuit assez de lumières pour prêcher à
Ensuite Paul vint à Jérusalem pour voir Pierre. Excellente formule de M. Loisy :
" Toujours est-il que p.ir ses entreliens avec I*ierre et Jacques il avait lié de façon
quelconque sa conversion et son apostolat à la source de révangélisation chré-
tienne .
(p. 89).
Les trois ans de 1, is sont interprétés comme datant de la conversion de P.nd, et
de même les quatorze ans de 2, I. Cela est fort soutenable, non pas cependant
'I rr;i(lu(lioii laililo do tvïpvrj^a; lU-pco eî; à-OTTO/rjv, '/K' i^j><-ra(u.i rsl l'ilvi in ni-nutoln-
tum.
RECENSIONS. 2oo
d'après le amiif donne par Tauteiir, que Jean, lils de Zébédée, aurait péri victime
des Juifs comme sou frère Jacques au coumiencement de l'an -14 1). Peut-être, sans
adhérer à toutes les insinuations de M. Loisy sur le désir qu'avait Paul de se glori-
fier lui-même, doit-on accepter ce jugement : « Il ne tardera pas à mentionner
Barnabe; mais, s'il avait écrit un résumé historique de sa carrière et non un plaidoyer
contre les judaisants, il aurait dû le nommer plus tôt {'2) » (p. 9G Une exégèse .
catholique sagement large ne refuse pas d'admettre l'aspect spécial que revêtent les
faits selon la préoccupation de l'auteur. Le P. Lemonnyer en a fourni un exemple :
« Dans les Actes comme dans l'Épître aux Galates, :;ies faits) sont choisis et inter-
prétés en vue d'une impression à produire. Cela est surtout visible dans l'Kpître aux
Galates. La réalité fut sans doute plus complexe, et cette complexité même sauve-
garde pleinement la vérité des deux narrations ». Mais cette méthode, vraiment
historique, quand il s'agit dune source aussi sérieuse que les Actes, demanderait
une étude spéciale. M. Loisy immole ordinairement les Actes sauf à les exploiter
contre Paul. C'est un sujet en marge. Tenons-nous-en à la thèse principale de l'épître,
qui n'est guère jugée plus favorablement.
Notons d'abord un point d'une grande importance pour tout le système de
M. Loisy. Dans ses ouvrages précédents, nous l'avons souvent entendu attribuer à
saint Paul l'idée première du salut par la mort du Christ. Si Marc y fait allusion
christianisme. Nous nous en doutions, mais nous sommes heureux de l'entendre dire
à M. Loisy. Comme il n'y a aucune raison de transporter l'honneur à Barnabe, c'était
donc la foi de tout le monde, dès les origines. Était-ce la foi de Jacques? Il semble
que oui, car « personne, pas même Jacques, ne contestait que les païens pussent
arriver au salut par la seule foi au Christ » (p. 132), et « Jacques admettait, tout
comme Paul, que le païen était sauvé par la
foi sans la Loi » (p, 133). Et en effet
M Surcette « donnée île Pa|)ias ••, « confirmée en quelque façon par l'iivanyile n (cf. M.vnc,
X. ;«• Loisy. p. 99 on peut voir notre commentaire de saint Marc à cet endroit.
, < On peut —
soupçonner même que le martyre de Jean était mentionné avec celui de Jacques dans la source
qu'a utilisée le rédacteur des Actes » (xii, i-'2) (p. 99 . —
On peut toujours soupçonner, mais il
faut se garder des soupçons téméraires.
(2 C'est naturellement jiar les Actes qu'on peut s'en convaincre.
256 REVUE BIBLIQUE.
quoi portiiit la controverse eutre Paul et les judaïsauts? Pour les deux partis, la Loi
eût dû être à tout le uioins subordonnée au Christ. D'après Paul, elle n'était plus
obligatoire pour personne, ce qui, avéré dune loi. signifie qu'elle était abrogée.
D'après le Jacques de M. Loisy, « obligatoire pour le Juif, la Loi était, en quelque
manière, une condition de son salut, mais elle n'en était pas le principe. Quoi qu'en
dise Paul, le principe du salut pour le Juif, même non chrétien, n'était pas la
Loi, mais la grâce de Dieu, dont la Loi pouvait être comprise comme un moyen »
(p. 133). — Par parenthèses, je voudrais bien que M. Loisy prouvât son assertion,
en ce (jui regarde le Judaisme pharisaïque, qui était alors régulateur de la doctrine,
— mais, quoi qu'il en soit de ce point, n'oublions pas que pour tous les chrétiens,
même la foi au Christ était le principe du salut. Voici maintenant l'objec-
Jacques,
tion capitale de M. Loisy contre l'argumentation de Paul. Il aurait raisonné comme un
esprit absolu, incapable d'envisager une autre alternative que celle de tout ou rien.
Car la Loi, sans être principe de salut, pouvait être condition de salut pour le Juif
et servir à la perfection du gentil. A supposer qu'elle soit inutile, on était du moins
du une idée que Paul ne prend pas la peine de regarder » (p. 140).
salut, c'est
— Mais pardon, puisqu'il se permet lui-même d'observer à l'occasion cette Loi inutile,
comme il est dit dans la même page? Faut-il donc admettre qu'il a été emporté par
« sa logique imperturbable et capricieuse » ? —A ce degré d'oublier sa propre pra-
tique? une autre logique qui nest peut-être pas exempte de caprice. C'est celle
Il est
qui écrit (p. 132) « Personne, pas même Jacques, ne contestait que les païens pus-
:
sent arriver au salut par la seule foi au Christ », et qui écrit bientôt après (p. 148) :
« aussi bien sa propre thèse du salut par la foi seule n'a-t-elle dû être professée en
ce temps-là que par lui ».
C'est trop réduire le conflit que de l'établir entre la foi et la Loi, comme si on
n'eût pu observer la Loi avec un sentiment de foi. et comme si l'existence d'une loi
empêchait l'exercice de la foi. Dans ces termes, Paul eût soutenu une absurdité,
car nous-mêmes constatons très bien la coexistence de la foi et de la loi dans la vie
dait saint Paul, l'adhésion totale de l'homme au christianisme (1). .Mais il ne faut
pas oublier que Paul ne raisonne pas en philosophe, ni même en théologien spé-
culatiL Les idées se présentent à lui sous une forme concrète, pour ne pas dire
incarnées dans les personnes. Il n'est que juste d'essayer de pénétrer une pensée
dont la porlre fut si salutaire au christianisme, et (|ui fui du moins géniale comme
instinct, à supposer qu'il ne l'ait pas déduite selon les règles de la logi(|ue. Mais
je prétends que son r.iisonnement est excellent, s'adressant, comme c'était le cas.
a des chrétiens qui concédaient le principe. Quoi(jue, à certains moments, Paul ait
fixé son attentir)n sur l'opposition entre la foi et les œuvres, pour soutenir, ce qui
est parfaitement exact, (jue la loi uv. donne pas la grâce pour accuinplir les œuvres
qu'elle commande, (juand il s'en prend à la Loi de Moïse, il la prend pour ce (|u'elle
(1) Je lie erois pas que ee |)<ilnl suit contesté p;ir M. I,iii.s> <|iii ne parail .ilisolii ni p.is faM
ri«pi l-i II,,-... ii,tiii.ri.-ini"'-
RECENSIONS. 2:.7
Après avoir reçu le baptême, qui initiait à la religion du Christ, accepter d'être
circoncis c'était supposer qu'on n'était pas dans la voie du salut, c'éiait une sorte
de doute sur l'elTicacité du baptême. Et
il en était nalurellemenl de même des Juifs
baptisés. Pratiquer !a pour y trouver le salut, c'était revenir sur le baptême.
loi
<< Car si c'est par la Loi que vient la justice. Christ sera donc mort pour rien »
<Gal. 2, 21, trad. Loisy). Ce que ;\I. Loisy j^lose : « Et Paul dit toujours la même
chose, et ce qu'il dit n'est consistant que pour lui; si l'on nadmet pas siwi principe,
qui n'est qu'une assertion de sa loi, toute sa discussion n'est que mirage lantastique
et de mots ;>
(p. 14-2). Oui, mais le principe de Paul, l'assertion de sa loi, c'est
le principe et la foi des chrétiens, même de Jacques, nous le savons par M. Loisy.
Paul a' donc raisonné en toute rigueur. Si, comme paraît le supposer M. Loisy, les
adversaires de Paul ne cherchaient pas la justice dans la Loi, système religieux par-
faitement délimité, cela prouverait que tout comme lui. Son seul le monde raisonnait
torte ût été, dans TÉpître aux Calâtes, de se battre contre des moulifis à vent. Mais
qui oserait nier ce qu'il affirme si nettement de ses adversaires, et ce qui est d'ail-
leurs vraisemblable, que beaucoup ne comprenaient pas l'importance et l'efflcacité
si
De sorte que la vraie difficulté n'est pas de montrer le bien-fondé des déductions
de Paul, étant admis son principe de foi, mais de savoir quels étaient ses adversaires
et dans quelle mesure ils pouvaient s'appuyer sur l'autorité des anciens apôire.x.' Plus
clair que les exigences des judaïsauts ont été très pressantes et on s'étonne que Pierre
ait été mis dans la catégorie.
La difficulté est telle que d'après le P. Lemonnyer «:On peut même trouver que
saint Paul est trop dur pour saint Pierre et que ses remontrances, en ce qui coucerne
du moins les sentiments personnels de celui-ci, tombent à faux. >
ici hors de cause; la solution de ^L Loisy est fort juste, et je ne sais si elle a été
expliquée avec la même clarté par les exégètes catholiques : « L'apostrophe : « Si toi
-< qui es juif, tu vis en païen », parait viser Pierre personnellement... cependant... on
pourrait se demander si ce trait même
ne serait pas personnel qu'en apparence... Le
mieux peut-être serait d'admettre que l'Apôtre traite
la question de son point de vue
Mais il n>st pas autorisé à dire que Paul roisonue dans le vide, comnio s'il n'avait
pas su quelle signification ses adversaires attachaient aux observances. Lui donner un
démenti sur ce point de fait, c'est passer les bornes. Ce n'est pas la même chose que
la circoncision soit inutile ou bien qu'elle soit incompatible avec la foi salutaire et la
vie dans le Christ (p. 181), nous le voyons bien, mais si Paul dit qu'elle est inutile,
c'est que ses adversaires la jugeaient nécessaire et lui donnaient un sens incompatible
avec la loi chrétienne. M. Loisy croit savoir que les judaisants ne mettaient pas dans
la circoncision le principe du salut ^p. 184). et cependant il soutient aussi qu'il existe
dans judaïsme un principe de foi ;p. 190). Comment personne n'aurait-il songé à
le
unir ces deux principes de foi, le juif et le chrétien, et comment quelques-uns n'au-
raient-ils pas mis au-dessus de l'autre le principe de foi légal? Saint Paul s'attaque à
ceux qui prétendaient mettre en action les deux principes. Quelle raison a-t-ou d'affir-
mer qu'il s'est trompé aussi grossièrement, et que la controverse la plus importante
peut-être du christianisme ait roulé sur un pur malentendu ? C'est ainsi que Constan-
tin estimait larianisme une question de mots!
Très dur, et sans raison, pour la façon dont Paul établit sa thèse principale contre
des adversaires qu'il connaissait bien. M. I^oisy a donné libre cours à sa verve sati-
rique à propos des arguments que l'Apôtre tire de la Loi elle-même. Assurément ils
ne sont point toujours concluants selon les règles de notre logi(|ue. précisément
parce que Paul avait été imbu de cette éducation rabbinique développée que le savant
critique lui refuse. On sait que l'Epître aux Romains, oij le système est plus mûri et
établi d'une façon plus suivie, n'a point fait autant usage de l'allégorie. S'il y avait
dès lors des rabbins pour soutenir que " tous ceux qui se convertissent dans le
monde... sont de ceux qui ont été allaités du lait de Sara (1) », ils ne se seraient
pas étonnés qu'on comparât entre eux les enfants d'\gar et de Sara. Mais, lorg
même qu'on ferait très large la part d'une argumentation ad homincm. on ne sera
pas tenté de s'associer aux critiques acerbes de M. Loisy. Paul ne raisonne pas contre
des Juifs, mais contre des judaisants, et il suppose toujours ce qu'ils devraient con-
céder, ce que croient certainement les Calâtes, que les chrétiens attendent leur salut
du Christ. Paul ne prétend pas qu'il n'y avait dans l'ancienne économie aucune foi
qui justiflât; il prétend seulement que cette foi ne justifiait pas par les œuvres de
la Loi, et si la Loi donnait une liuuière utile, cette lumière n'était toujours pas le
pardon des péchés, pardon déjà acquis et assuré par cet Esprit nouveau que connais-
saient bien les Galates.
Mais nous n'avons pas à poursuivre dans le détail une recension déjà trop longue.
En présence d'un homme comme saint Paul, y avait autre chose à faire qu'un ré-
il
Fr M.-J. Lagb.4Xgi:.
I. Le texte publié par xM. Poebel, relatif à la création et au déluge, a déjà été signalé
dans la Revue (1915, p. 278). Le P. Dhorme l'a caractérisé très justement comme
n'ayant ni Tallure ni l'ampleur du poème babylonien de la création ou du récit du
déluge dans l'épopée de Gilgamès. Cependant tout ce qui regarde les légendes sur les
temps primitifs est si important, que nous croyons devoir en donner ici une analyse.
Le texte est, d'après M. Poebel, en sumérien déjà corrompu; il en fixe la date
approximativement à la dernière moitié de la grande première dynastie de Babylone.
C'était, avant la découverte de M. Langdou, le seul texte sumérien relatif au
déluge. _\'ayant pas la compétence nécessaire pour traiter question philologique, la
monde sémitique! Et qu'il est étrange, après cela, qu'il y ait si peu de preuves de
leur existence! Si l'existence d'une langue sumérienne est établie, qu'on cesse du
moins de nous parler des Sumériens: nous dirons simplement que les Sémites
ont chanté leurs propres traditions dans une langue morte comme les anciens Scan-
dinaves ont écrit l'Edda en latin '2).
(1; Il ue serait sùremonl |)as de hou goût de renvoyer i)Our quelques-uns de ces points à mon
comnienlaire de l'Épitre auv Roiiiains. mais il ne sera pas hors de propos de dire ([ue ce com-
mentaire. —
et je le regrette, —
était en plein tirage quand j'ai eu connaissance du commentaire
de l'Épitre aux Galates L.;.
(2) M. Poebel note une ressemblance assez particulière avec la poésie hébraïque; la
liaison :
Enlil ne forment qu'un sujet pour un verbe au sin;îulier (col. vi, 8. 9). C'est la pre-
mière fois qu'Anou et Enlil sont nommés cré.iteurs de l'humanité. Après la création
de l'homme vient Cf-Ue des animaux, comme dans un des récits de la Genèse (1).
Col. 11. Un dieu qui doit être Anou Eulil se propose d'établir la monarchie et cela
est en effet exécuté. Cinij villes .sont fou lées Kriilou, donnée à Noudimmout, le même :
qu'Enki; une seconde ville dont le nom et le patron demeurent inconnus; Larak,
dont le dieu Pabilhirsai,' est inconnu: c'est iVapay/a, de la Chronique d'Eusèbc; Sip-
par, qui a pour dieu Chamach. le Soleil; .Sourouppak, qui a pour patron Sourroup-
pak c'est la ville du déluge dans l'épopée de Gilg miès.
:
Col. III. Il est question de la pluie, à ce qu'il semble, dans un conseil des dieux.
Aussitôt jS'mtoii pousse des cris. Iclitar se lamenie sur son peuple. M. Poebel note
(jue dans Gilgamès, \i (la tablette du déluge), 117 s., l'ordre est inverse : la dame des
dieux est |)l.icée après Ichtar. Cet ordre lui [)arait meilleur. Dans le nouveau texte,
Tordre aurait été changé par erreur, puisijue c'est Nuitou qui, étant la créatrice.
de\rait dire « mon peuple ". M.iis il semble bien (]ue dans (îilgauies il n'y ait qu'iuie
personne :
I (.1-11. Dieu roiist.ilc <|iii- l'Iioiiiiiic <'si s<miI, il \ii lui ilniiiirr une aide. Il crée lesani-
M. t!t.
maux, mais ne surii^eiit |>as. un sait <|iic les i'rilii|u<-.s (','itli<>lii|ucs ne refUM'iil |iar« <lc milcr
ils
la dillcr i.'ni'.c des (iriiiUs de vue <l;iiis les dtMix premiers elia|iitrrs de la liciK'sc. (iiiancs de deux
sourres diirercnrus. Dans le raccord drliniiif riin|iai'lalt ennsccutil ^jf^T pouvait passer pour
un plns-(|Ui'-parrait. La Vulgate s'en est liree par un participe aliS'du : formath.
i Dii'ii.Mi. Cliiiix de le. ries religieux ttssyrohabtiloniftn. |). 111.
RECENSIONS. 201
Aux oriiiifies, soit, mais dans un texte où Anoii et Eulil, si distincts, sont presque
confondus!
Il faut d'ailleurs reconnaître la supériorité littéraire du poème de Gilgamès lors-
qu'il ne met en scène la le commencement du déluge.
déesse et ses fureurs qu'après
De plus il lui prête un discours. Le nouveau texte serait-il une esquisse, ou serait-il
un résumé? D'après ce seul trait il serait milaisé de se prononcer. Mais lorsqu'il dit
en un vers qu'Enki conçut un plan, sans dire lequel « Enki dans son cœur tint con- :
seil », le lecteur ne pouvait comprendre que s'il savait déjà le rôle sauveur d'Enki.
roi, comme Xisnuthros de Bérose, et pieux comme Noé (Gen. 6, 10; 7, 1). Son nom.
que M. Landgon lit Ziudsuddu, renferme en tout cas des éléments qui indiquent le
ragan et l'averse, comme dans Gilgamès, et comme dans la Genèse (7, 4 et 12; J ;
dans la Genèse, la pluie tombe quarante jours et quarante nuits, les textes cunéi-
formes se ressemblent beaucoup plus; dans celui de Nippour, la pluie dure sept
jours et sept nuits, tandis que dans Gilgamès elle cesse le septième jour au matin.
On sait que la Genèse y ajoute les sources du grand abîme et les cataractes descieux
Gen. 7, 12; P).
L'apparition de Charaach, le soleil, marque la fin du cataclysme. Le héros aperçoit
le dieu par une ouverture qu'il avait faite au bateau. Il se prosterne devant Cha
mach et lui offre en sacrifice un bœuf, une brebis. M. Poebel pense que ce sacrifice
a eu lieu sur (,2). avant le débar(juement. Le texte est si c^airt qu'il prête
le bateau
à cette perspective, mais déjà nous l'avons trouvé trop concis. Je pense (jne cette
fois encore il faut suppléer à ce qu'il ne dit pas par la tradition bien connue. Noé et
Outa napichtim ont offert le sacrifice sur le sol, en action de grâces de leur salut que
le débarquement constatait (3). Le récit biblique et le poème babylonien ont d'ail--
leurs en plus l'envoi des oiseaux, omis par le texte de iNippour, décidément très suc-
cinct.
d'après xi. 193 s., il lui aurait envoyé un songe; d'après xi, 19--2-2, il aurait parlé à un mur. Malheu-
reusement l'état de la tablette de Nippour ne permet pas de dire comment se fit la révélation-
A la Gn de la col. m, il est question de songes, et dans la col. iv, il est question d'un mur.
(-2) En plus de l'apparence du texte, M. Poebel croit retrouver un indice d'une tradition sem-
blable sous-jacente dans Gilgamès. Les signes Y^K-ki^-su-vb-lim qui signifient littéralement . bai-
ser le sol répondent au sémitique uk-tam-mi-is, employé de Ula-napichtim dans le bateau
».
être . je m'affalai comme a traduit Dliorme, l. /., p. II3. Poebel insiste sur ce que dans Gil. xi,
...
198 ss. Enlil entre dans le bateau, ce qui n'a plus de raison d'être après le sacrilice; il y a donc
,
là une autre tradition. Mais on comprend que le sacrifice ayant été opéré par le
héros seul,
Enlil entre dans le bateau pour associer sa femme à son immortalité.
(3) Dans Bérose TCprj^xuvïiTavTa Tr,v yr|V. Le geste est très naturel. Ceux qui échappent à un
:
Col. M. Quelqivim dit ;iux surviviints d'invoiiiier Anou Eiilii par l'àme du ciel et
une vie éternelle comme aux dieux. Il n'est question de personne autre. Ziui/iddu est
pla( é dans un lieu qui paraît être Dilmoun. Cependant M. Poebel constate que le
nom de ce lieu est incertain -, ce qui est bien à noter, car M. Langdon semble re-
garder ce point comme acquis.
Comment le salut d'un seul iiomme. tr;insportc dans un séjour plus ou moins
divin, peut-il assurer la conservation de riuuiianité? C'est ce qu'on ne nous dit pas
Cependant c'était bien le but de préservation du héros, puisque le bateau reçoit
la
île ou rivage, est toujours recherchée; il est du moins certain qu'il se trouvait sur
M. Langdon a de nouveau lixé l'état des docimients sur ce point. Le nom de Para-
dis qu'il lui donne, en souvenir de la Genèse, est justifié par la description enthou-
siaste que fait le poète de ce lieu :
Ce dernier trdit n'est-il pas ravissant:' On était avant le moment ou, d'après notre
fabuliste : « les tourterelles se fuyaient ».
:!-i On ne disait pas : • oh! mkiI des >cu\. tu es l'uil mkiImiIi' >:
fi On ne disait pas ; • oh mal de Icte, tu es le mnl
1 i\f ti'lr •.
C'était donc le Paradis si Ion veut, mais m .somme, si l'on cherche une analogie
(1 Dans le fraKiinnl llilpnchl, /;/;.. Iftio, p. tiiH, la IIkup " est traduite maintenant par l'oebel :
dans les traditions anciennes, elle est plus complète dans les ShIudiùi rc;/)vt, carie
propre du Paradis des Hébreux, c'est (|ue l'iioninie y est placé seul avec la femme,
dès la création, et qu'il n'y demeura qu'un temps très court, tandis que, dans le texte
de M. Laniidon, il s'agit d'iuie cité. Il seuible cependant, d'après la lin de la pre-
mière colonne, qu'à cette cité il manquait un canal. C'est probablement ce que la
Puis aussitôt, sans aucune lacune, sans explication, sans qu'il y ait eu faute de
personne, au moment où tout est pour le mieux, Enki se décide à faire périr les
hommes :
•Xi à Nintoud
2i révéla son dessein dans le temple.
On est d'autant plus surpris de cette mesure. qu'Enki. dans tous les autres récits
du déluge, est au contraire le dieu sauveur. Mais puisque M. Langdon ne peut douter
un seul instant du sens relativement à Enki, il est étrange qu'il refuse d'accepter
la traduction : « Niuharsag dévaste les champs » (1. 32), sous prétexte que la déesse
n'est nulle part hostile. Elle a pu changer d'idée, ou de dispositions selon les per-
sonnes. Pourquoi le dieu a-t-il résolu le déluge dont la déesse se fait complice? Rien
ne l'indique. Serait-ce simplement que la demande des eaux était indiscrète? Proba-
blement l'eau ne manquait pas tout à fait d'abord à Dilmoun-, mais on a voulu da-
vantage, et changer les eaux amères en eaux douces. — Vous voulez un miracle,
vous voidez de l'eau? vous en aurez plus que vous n'en voulez! — Cette péripétie
serait peut-être assez dans le goût des légendes semblables.
Quoi qu'il en nous nous trouvons, quant à la composition littéraire, en
soit,
présence d'un phénomène étrange, qui ne parait pas avoir frappé suffisamment le
traducteur : le déluge est raconté trois fois. Une première fois se trouve à la fin de
la colonne ii. Il se produit non plus par la pluie, mais :
croyait que la récitation de traditions relatives aux événements des temps les plus
anciens donnait à l'exorciste un pouvoir surnatiu'el (1) ».
Les iiiiues répétées mettent en scène Ninioud. Elle s'adresse à Enki pour reven-
diquer certaines personnes. Elle u'('tait pas irritée contre les gens pieux... (elle pou-
vait donc l'avoir été contre d'autres... il y avait donc des gens sans piété à Dil-
moun?). Le héros sauvé parait enfin. Le poète le nomme « mon roi ». :
1. '.) mon roi, qui étail rempli de crainte, oui, <|ui élait rempli ilc crainle,
10 mit son pied seul sur le bateau, et plaça deux hommes de garde pour garder.
Nous sommes au point détisif que M. Langdon a bien nommé : « la Chute . Mon
roi, échappé au déluge, et par conséquent seul espoir de l'hiunaiiité future, s'est vu
intimer la défense de manger du fruit d"un arbre. Il a transgressé le précepte; il
est aussitôt maudit et puni. Le châtiment, c'est, d'après Langdon. (|u'il ne sera pltis
désormais à l'abri des maladies. La mort élait déji dans le monde. Ouoi(|ue ccl;i
n'ait pas été dit de I époque heureuse de Diimoun, le déluge en tout cas le prouvait
assez. Mais jus(]u'à ce moment les hotnmcs n'avaient pas été atteints par la mala-
die, pas même par les infirmités de la vieillesse. Ce que le poète — ou l'incantateur
— a en vue. c'est l'origini', des maladies. A-t-il pensé (|ue la maladie élait purement
et sim,ilement la peine de la désobéissance, comme pense M. f/uiglon, ou bien
le
l'arbre y hil-il poiw qticlque cho.se? il est malaisf* de tr.mclier l;i question. L'auteur
n'imagin.iil certainement p.is que la cassia avait naturellement le pouvoir d'engen-
drer des maladies, et c'est la force de l'opinion de M. Langdon. Mais ce pouvoir
a pu lui être donné par un charme, et c'est peut être ce qu'insinuait la ligne 3(5,
malheureusement lacuneusc.
Le mal est d'ailleurs irréparable. Les Anounnaki s'assirent dans la poussière,
sûrement pour pleurer sur le mallieur des hommes, comme ils font dans le déluge
La déesse s'irrite contre Enlil. Mais que vient faire Enlil en cette affaire, à moias
que ce ne soit lui qui a mis « mon roi » à une épreuve trop sévère?
La colonne se termine par trois li::?nes fort obscures. On dirait que la déesse sert
de modèle à ces deux créatures qu'Kniil lui promet de l'aire.
signifier }. 38) qu'il sera malade et non seulement exposé à la maladie jusqu'à sa
mort. C'est pour cela que Ninharsag se désole; il ne lui sert à rien d'avoir créé les
hommes qu'elle a donnés à Enlil comme ses enfants. Enlil, pour la consoler, crée
deux autres créatures, qui seront probablement un couple dotiné à renouveler
l'humanité(comme les pierres de Deucalion), d'autant que « mon roi » était seul, sans
épouse, avec ses deux gardes devenus probablement ses jardiniers. La nouvelle hu-
manité sera naturellement exposée aux maladies; mais si leur origine est fixée à la
peu plausible que toutes les maladies aient accablé dès ce moment l'homuîe, ses
pâturages et ses troupeaux. Il semble bien plutôt que le poète tire une morale
générale de cette histoire. L'humanité étant exposée à ces maux, la déesse lui a
donné des auxiliaires. Elle s'adresse à un homme quelconque, qu'elle nom;ne mon
frère; le poème aurait une sorte d'épilogue adressé au public olutôt qu'une con-
clusion historique
^S « .l'ai créé iiour toi la reine <|u! remplit la bouche « Ja déesse du vin...
Il y a huit sortes d'afflictions, auxquelles il est remédié par huit dieux, qui sont
ensuite créés par huit décrets nominatifs. Le dernier est :
SI Louange.
maiuten.mt cette position, qui a toujours été la nôtre, que le mythe d'Adapa (init par
la glorification du héros (1).
Les quatre documents qui contiennent le mythe sont transcrits et traduits dans
l'ouvrage du 1>. Dhorme(2;. Il y a, comme on sait, des laciuies. Le premier fragment
dit comment Ivi Knki sumérien) donna à Adapa la sagesse, mais non lininiortalité.
Le héros montait sur son bateau pour aller à la pèche, lorsque (Fragment II) le vent
du sud le fit chavirer. Irrité, Adapa lui brisa les ailes par une véritable malédiction (3)
qui suppose un pouvoir magique. Oa le dénonce à Anou, le dieu suprême, qui mande
le coupable à son tribunal. Ea, inquiet pour son protégé, lui donne des instructions
qui portent sur deux points prendre des babils de deuil, pmir se concilier deux pro-
:
I l.ttiihs sur lis rrlifiKins \ii/) itujurs, -J' 6il.. |i. :\'.>i.
•J I iKiix lie tcrles reli(jii<u.i .... \i. liK-ltil. M. I.:ii)f{diiii en iMili<|ii<' un (-inc|iiirnii-. : |>la<'Cr tout
:iu ili-liut, i|ui ne change rien au Uienic.
(;») Allazar, reconnu par le I'. Dlmmic i|i. l.'»-'>) cl accepté par l.auKdon.
KECENSIONS. :Î67
venu tlii [).)ys de Canaan à el-Aniarna. Nous n'insistons pas sur les diverj^ences. inté-
ressantes, mais en somme le quatrième fragment contient
sans grande portée. Mais
certainement la (in de une histoire qui finit hien, comme toutes
l'histoire, et c'est
dans d'autres conditions. Il est impossible qu'Adapa soit puni pour avoir ubci à son
dieu, au dieu Ka. Seigneiu" d'Eridou, d'où sortent plus ou moins directement tous ces
poèmes. D'ailleurs Éa. comme l'a reconnu le P. Dhorme, était certainement de bonne
foi. Je suppose simplement qu'Adapa, renvoyé chez lui absous mais non immortel, a
été trouver Éa, qui lui a donné cette fois la bonne recette. D'abord il l'avait fait échap-
per à la condamnation. Désormais, par la faveur d'Annu et surtout grâce à la sagesse
d'Ea, le succès sera complet. Ce qui ressort de la traduction de .M. Langdon, plus
encore que de celle du P. Dhorme, c'est que cette fois Anou est stupéfait du procédé
d'Éa. Il fait monter Adapa jusqu'au Zénith du ciel, et institue des droits sacerdo-
taux pour lui dans qu'on institue un sacerdoce en son
la cité d'Ea. ]\'est-ce pas dire
honneur (1)? ^I. Langdon rencontre un mot intraduisible. Son système lui suggère
de lire h la mort ». comme si la faute dAdapa avait amené la mort pour les hommes-
et il ne met rien. Mais enfin voici la conclusion
Sa conscience scientifique l'emporte, :
« Au temps où Adapa, semence de l'humanité, avec son... brisa en tyran les ailes du
vent du Sud et monta au ciel, ce fut ce qui arriva » (p. 47). C'est-à-dire ainsi flnit :
l'histoire d'Adapa. C'est un homme, mais il unit par monter au ciel. Il serait plus
que M. Langdon a vu dans cette suite les résultats funestes pour l'humanité de la
faute d'Adapa?
Il traduit : « Et toutes les sortes de maux que cet homme a amenés sur les
hommes, et les maladies qu'il a amenées sur le corps des hommes, la déesse >'inkar-
rak le soulagera. Que la soulfrance s'en aille; que la maladie s'en aille. Que son hor-
reur tombe sur cet homme!... il ne goUtera pas le doux sommeil. »
Mais de qui parle-t-on? Faui-il qu'Adapa, outre qu'il a manqué l'immortalité, soit
la cause de tous les maux? Comment cela decoule-t-il du poème? quelle est cette
énigme? —
C'est beaucoup plus simple. Cette fois j'ose proposer une traduction, car
ne s'agit plus de « sumérien », mais de babylonien « Et quiconque opère mécham-
il :
ment sur les hommes et amène la maladie dans le corps des liommes », et l'on de-
mande à la déesse de guérir le malade en reportant la maladie sur le méchant
sorcier.
L'histoire d'Adapa n'a pas. il est vrai, un rapport direct avec cette conclusion,
mais cela n'est pas exigé dans notre système, puisqu'il y a solution de continuité,
non conclusion; elle devait agir comme un charme, selon la remarque citée plus haut
de y\. Poebel.
(1) M. Langdon ne paraît pas faire état des textes ( ités par Sclioil où Adapa a le prédicat divin
<SCHEIL, Recueil de travaux..., XX, p. 1:24 ss.).
(2) Op. laud., p. 159.
(3) Éludes sur les religions sémitiques, -2" éd., p. 344.
•26K RKVUK HIRLIOUE.
M. IxTiigdon. toujours désireux de nipprocher Adapa d'Adani, n'a pas moins forcé
le sens des ternies lorsqu'il qualifie la connaissance acquise par Adapa de connais-
sauce du bien et du mai (p. 44). Anou ne se préoccupe nullement de savoir si Adapa
possède a the consciousncss of indecency » (p. 44), mais il trouve mauvais qu'il
exerce un pouvoir iiia:;ique au détriment des éléments naturels. Il dirait volontiers
comme le saiut Jean de Victor Hui;o :
Paris, a janvier.
Fr. M.-J. Lagranoe.
The "Wilderness
of Zin (Archaeologieal Report) by C. Léonard VVooli.ky and
1". Lawhknck. With a Chapterontlie Greek Inscriptions by M. N. Ton. Volume
K.
double, comprenant VAnnual du Palestine Exploration Fiiml pour I9I4-191.>.
Publié par ordre du Comité, en vente à l'office dn Fund, 2, Hinde Street. Manches-
ter Stiuare. London W. — In-4'' de xvi-1.54 pages, avec .38 planches, 2 cartes, et de
nombreuses figures dans le texte. Prix 45 sh.
Ce beau volume présente les résultats d'un voyage entrepris pir MM. >N oolley et
Lawrence surtout dans la région située au nord de la péninsule sinaïti(|ue, et que
l'Kcriture désigne comme le désert de Sin. Les deux explor.iteiirs ont été absorbés à
la tin de 1!)14 par leurs devoirs milit;iires. si bien que la publication a été confiée à
M. Ilogarth.
Le point de départ du voyage était Gaza, d'où les voyageurs sont partis le 7 jan-
vier 1014. Ils ont visité successivement Bersabée. Khalasa. Sbaïta. Aoudjeh, et sont
arrivés ensemble à 'Ain K.edeis. Après plusieiu's jours passés dans cette intéressante
région, ils se sr-parèrent le x février, M. Lawren(;e se dirigeant sur A(|aba, et
M. Woolley vers le nord, pour visiter Abdeh et Qouriioul). Les lieux que nous avons
nommés sont les points principaux de l'exploration.
Qu'il nous
soit permis de reproduire ici une appréciation trop ll.itteuse pour cpie
nous n'en soyons pas reconnaissants. Parlant de leurs devanciers, les auteurs s'expri-
ment ainsi : « Kn somme. l'iruvre des Pères français r2\ dans ce pays et [)ubliée par
eux de temps à autre dans la Rrrw biblique nous semble à l;i fois très saine, très
intéressante et très exacte. Leurs notes sur Ai)da, aussi loin qu'elles vont, sont admi-
rables. Leur discription de la course de Nakbel a Kedeis, et par le wady Djerafeh à
F'étra n'a pu être prise ru défaut, et sur des [)(»ints plus particuliers, comme dans
1) l'.-S. On lit dans les Ih-lmis sous la rnlirlipic Arudrinic des liitcri/itioDsi-i ficUes-
<lii ti {«'vrier,
l.etlrrs, séance «lu '» Scheil conniuninuc à l'Acadcmic une (Ickouverlc faite par
Ir-vrior ; l.c P.
M. l.aiigiloii, (inilesseur à l'iniversilé d'Oxford. Il s'agit d'nne rédaction sumérienne du pufme de
la Dc^i'efUc d Islar aux Knicis •.
'î> Autre rcmarriuo .-liiii.-ilile, p. 'i'» (no4e), sur les lii'nrilirihis frnnçaix de la lU'vnr hihliijue.
Nou» nr pouv()n<< ipTelrc llatle-,, puis(|uc heni'ili'iin est ilevcnu synonyme de travailleur acharné
et consi icncieux. D'ailleurs la direction du Fuml sait Ires l>i«'n <|ue l'tcole l)ildii|uc de Jt'rusa
lem est dominicaine. puWipie deux de ses membres <>nl l'honneur de faire partie du comité.
RECENSIONS. 2(.',>
(p. XIII).
L'hommage rendu à Ed. Palmer, notre prédécesseur à tous, est bien mérité. Les
restrictions des auteurs anglais sont même plus expresses. Il est certain que Palmer
H trop directement cherché la trace des Israélites chez les Bédouins de nos jours.
D.ins la partie nord de la péninsule, ce qui frappe surtout, ce sont les ruines byzan-
tines, auxquelles Palmer ne s'intéressait pas. Il faut féliciter MM. Woolley et
Lawrence de leur avoir donné l'attention qu'elles méritent. C'est certainement par
les Byzantins qu'il faut passer pour siuvre la tradition; mais ils ont pu aussi l'altérer.
Et nous-mêmes avons prouvé, par un exemple irrécusable, qu'un nom de lieu parti-
culier peut se conserver jusqu'à nos jours chez les Arabes; je fais allusion à la grotte
del-Madras à Pétra {CIS., II, 443). Nos auteurs pourraient hien avoir exagéré le
sceptiL'isme. Assurément nous pensons comme eux que l'immuable Orient « est un
cliché des plus trompeurs, mais les noms de lieux sont précisément un des points sur
lesiiuelslOrient est immuable. Que les tribus de Bédouins se transportent d'un lieu à
un autre, ce n'est point une raison suffisante pour empêcher la continuité des noms.
Et ces changements sont-ils aussi comm;in5, puisque les Arabes de la Péninsule savent
encore distinguer les tribus qui ont été mélangées d'éléments non sémitiques? On
nous dit « les recherches de nomenclature locale sont aujourd'hui très difficiles
:
parmi les tribus; et il n'est pas vraisemblable que Moïse ait été plus patient et plus
appliqué qu'un explorateur moderne. Probablement, dans la moitié environ des cas.
les Israélites ont nommé eux-mêmes leurs propres camps, ou confondu inconsciemment
un nom ancien dans leur insouciance » (p. 69 . Et en effet la guerre à laquelle nous
assistons prouve que l'imag'inalion des soldats n'est jamais à court pour donner un
nom à un ouvrage militaire. D'autres fois, le nom original est singulièrement déformé,
comme pour le cas si bizarre du Vieil-Armand {Hai timinnsiviller). Qu'on tienne
compte de ces possibilités. La Bible elle-même mentionne des cas où les Israélites
ont créé des noms, comme Tabeéra ,j\um. 11, 3), Qiljroth-hattaiva (Xum. 11, 34),
noms entièrement nouveaux, ou Khorma, nom qui aurait remplacé Sephat (Jud. 1,
17). Mais il est fort hasardé de dire « attendre une continuité de noms comme dans
:
les districts cultivés de Syrie, c'est vanité » (p. 69). Nous avons toujours trouvé chez
les Bédouins beaucoup plus d'attention pour le monde extérieur que chez les fellahin,
absorbés dans les travaux du sol. Demandez à un fellah le nom d'une plante, il vous
répondra que c'est une plante. Les Bédouins du Sinaï savaient le nom arabe de
chaque herbe. Quand nous revenions d'Aqaba à Gaza, un homme des Alawin était
chargé de me dire le nom de tous les lieux; il eut stimulé ma curiosité plutôt que
refusé de répondre aux questions. Il serait fort étrange que le guide des Israélites
dans le désert ne se soit pas informé du nom des lieux où ils campaient. Puisque
nous avons retrouvé le site de Fenân, on a chance d'en trouver d'autres.
MM. WooUev et Lawrence se demandent si les Israélites étaient de vrais nomades,
dispersés dans tous les coins du désert par groupes de deux ou trois tentes. Cette
conception, à vrai dire, ferait disparaître le problème. Mais elle fait trop peu de
cas de la tradition des Hébreux. Dans l'autre hypothèse que nous tenons pour la —
réalité — d'un groupement plus compact se transportant d'un district à un autre, nos
:>7,) UliVlK BlULIglK.
auteurs reconnaissent que le désert de Sin et par conséquent Cades doit être oherclié
aux environs de 'Ain Kedeis. Ils posent le problème exactement comme nous l'avons
l'ait, flierciiant le principal argument moins dans la ressemblance des noms (|ue dans
la situation unique de cette partie du déscrl. au moment où il n'est plus tout à fait
le désert. « Dans cette seconde vue {tribal ///oHp), c'est délinitivement notre opinion
(|u*on ne peut trouver que dans le district de Kossaima assez d'eau et de pâturages
pour maintenir aussi longtemps une tribu aussi considérable, et que par conséquent
le désert de Sin et Cadès-Barné doit être le pays de 'Ain (aiderai. Kossaima,
Muweilleb cl 'Ain Kadeis J) » (p. 70 .
Mais cela pose, on ne voit pas bien pourquoi les ruines de Sbaïla ne représente-
raient pas Khormal), l'ancienne Sepbat, puisque c'est précisément le point par lequel
distinguer Khormah de Xum. 14, 4.5 et Kbormah de IVum. 21, 3. Eu tout cas le
Khormali de Nura. 21, 3, à proximité de 'Arad, est le même que Kborma de
.lud. 1, 17, aussi en connexion avec 'Arad. Or, ce dernier endniii, où Kbormali
remplace l'ancien Srji/i'il, n'est point, comme le veulent nos auteurs, plus loin que
Sbaïla vers le nord. Les Juges notent que Juda est venu avec Siméon, c'est-à-dire
pour aider Siméon dans son domaine, qui était au point le plus méridional de la
'Jerre promise. Nous reconnaissons cependant volontiers que l'identification de Sba'ila
et de Sepbat n'est point absolument certaine. MM. AVoolley et Lawrence ont décrit
avec soin les ruines byzantines de Sbaïla. C'est une excellente monograpbie. Ils
n'ont rien vu que de byzantin dans ce lieu et à Michral'a; mais est-ce une raison
suffisante pour affirmer que ni l'une ni l'autre cité n'ont existé avant l'ère cbré-
tienne p. 1)1 ?
On voit d'ailleurs qu'ils ont été préoccupés de trouver dans les débris byzantins
des traces plus anciennes. C'est ce qui a réussi pour 'Abdeb à M. >N oolley, demeuré
seul. Il déplore de n'avoir point connu auparavant le compte rendu publié par le
gnac (2). En effet, il n'a reconnu ni le camp romain, ni le haut-lieu. jN'ous aurions
attaché le plus grand prix à ce qu'il contrôlât sur place les intéressantes découvertes
de nos amis. En revanche, il a déctjuvert sous les ruines du monastère les restes d'un
grand temple nabaléen, au(juel il ne donne pas moins de ciiHpiaute mètres de lar-
"eur sur le front, avec un portique de vingt-trois mètres de largeur. Ce temple gran-
diose lui a paru certainement antérieur à (:>l. Les maisons la domination romaine
situées aux environs s(Mit du ii" ou m" siècle av. .L-C. A
datées par de la poterie
cette épo(|ue, Abdeh devait appartenir aux Nabatéeus de Pétra, mais les Grecs
l'avaient occupé auparavant. Détruit à l'époqtu' romaine, ce poste avancé aurait été
reconstruit de limles pièces au temps de Justinien. Les llomains n'auraient donc pas
occupé Abdeb. M. ^\oolley est obligé d'en conclure que le camp romain est d'épo(iue
tardive.
C'était bien l'avis du !'. Mncent, puis(|u'il l'a compris dans sa description de la
(I) Cf. //>.. IWi. 1». '<''' Kedeis est encon! le «lésert, niiiis elle csl arrosée.
: ' l-a ré;<i"in île —
r:iU intiui (bns Ui l'i^iiinsiile. dans un rayon d'une pclile journe<'
- p.ir <|ii;ilre sinircis l'ouest : .i
.Mn Moiielleli cl Ain-Keseimeli, a l'csl VuiKodeirat el Ain kedeis .. Doue e\aileinenl le même
radre pour le séjour des l.sraelilcs • Cacln-s dans les replis du Dj. .Mai|rali. ils pouvaient atten-
:
dre l'oecasion favorahle pour s'emparer des contrées plus riches on les Chananéens s'ittaient for-
l.inent établi» • [l. c.].
»-i llncoie ne cite-t-il p. '*!> <|ue Kit.. 1iK)j, pi». iO.t-lii.Ce premier article, ipil ni' portait point:
ft siiirrr, a été suivi cependant d<; dcu\ autres eiudi-s.
llli. lîx»:. p. "ï 8!»; p. JCi-iiT.
w't l.es rcsles anti<|ue8 doivent être amorces au l>as (ouesl) du plan du P. Vincent, planche
iv-v, après la p. ili, comnicncatU à la petite l'Klise marquée N. sur ce plan [liù.. Itiot).
KKCENSIO.NS. 271
ville byzantine d}; mais ce uest certainement pas à la légère que. en dépit de sa
première impression, il a constaté des l'ondements de murs régulièrement bâtis, et a
conclu à une destruction systématique du camp dont lesmatériaux ont été employés
ailleurs. Toutelois, depuis que M. ^^ oolley a découvert un temple ant('rieur à
répoque romaine, on peut se demander si les l'ondements du camp ap|);u'tienQent
bien à un camp et à l'époque romaine, ou s'ils n'appartiendraient pas aux temps
i^recsou nabatéeus.
'Abdeh qui a Fourni la plus intéressante des inscriptions grecques inédites
C'est
de l'ouvrage. Les auteurs voudront bien nous permettre de la re|)roduire en entier :
4" 'Av3::âr, 6 |xa/.âpio; Zayap:x; 'Epajivoj £v uiïîv't nxvÉaoj ôcxaTr,, îvôf './.t'.ôjvo;) to', r^aépx
Kjciazr;, lopav Tpi':ïi(v) t^; vuxtôg, /.XTîTsOr] ôè ivradOx tt) toîtit, tou ii^i.6x-o; wpav (!iyo6r\v
Ilavétito BtoozjcxTï], îvÔ(i-/.TtGvo;) tô', È'to-j; -ax-ol 'U]Xo'ja(io'j:) -joa'. K('Joi)c <Ca>> ivà-a'jaov
TTjv yviyr,'/ auTO'j aSTz twv iyif-)'/ aov). 'A;j.r[v.
Voilà donc pour la première fois l'ère d'Élousa mentionnée expressément. M. ïod
veut bien rappeler que pour des textes de Khaiasa-Elousa, la licme avait proposé
l'ère d'Arabie. En l'employant ici, il obtient pour son inscription la date des 29 juin et
1" juillet ôS], qui coïncide bien avec la 14' indiction, commencée le sept. 580. 1'^^'"
Mais iM. Woolley n'accorde t-il pas trop peu de temps à la^ville byzantine d'Eboda
en plaçant sa construction au temps de Justinien (p. 104) ? Alors nous ne sommes guère
éloignés de l'invasion arabe après laquelle toute prospérité s'éteignit.
Les ruines de Khalasa ont fourni une inscription fort curieuse, et l'on peut dire
unique dans son genre, car c'est une inscription araméenne consacrée à un roi naba-
téen. L'écriture est araméenne, avant le moment de prendre les formes spécifiques
nabatéenues, la langue est purement araméenne. M. Cowley lit : Ti'j "i? Kinx njT
TC2j ~pi2 nn[1jn n Heu {de mile) que fit Noutairou pour
'^r\'\'^r[ Si? TM^:. Ceci est le
le salut d'Arétas, roi des Nabatéens. Il fait remarquer que les Nabatéens écrivaient
*~ et 'n 'Tî. Cependant on trouve ^' dans une inscription de Pétra
N*:~ et découverte
par M. Dalman ri), et dont le Père Savignac a donné un fac-similé soigné ^.3). Or
précisément cette inscription se rapproche pour l'écriture de l'inscription de Khalasa,
quoique plus spécifiquement nabatéenue. Elle date, d'après le P. Savignac, de l'an 90
av. J.-C; ^L Dalman la croyait plus jeune d'une trentaine d'années. D'après
M. Cowley, l'inscription de Khalasa se rapporterait à Arétas 11, vers 96 av. J.-C. En
présence de l'évolution constatée maintenant de l'alphabet nabatéen, on se demande
s'il ne vaudrait pas mieux remonter plus haut. Toutefois Arétas !'', vers l'an
la faire
169 environ, est qualifié de xjpxwoç des Arabes (II Macch. 5, 8); il n'avait donc pas
le titre de roi (Cowley). Le tout s'arrange plus probablement mieux si l'on date Kha-
lasa d'environ 96 et Pétra d'environ 60 av. J.-C. Seulement on dira avec M. Cowley
que les particularités de la nouvelle inscription s'expliquent par l'éloignement des
centres nabatéens; à Khalasa ou écrivait et l'on parlait araméen.
L'exploration de M.M. Woolley et Lawrence nous fait encore pénétrer dans le
désert de Sin par de très belles vues. Leurs photographies ont été admirablement
reproduites. Des lieux longtemps si mystérieux sont, grâce à eux, accessibles à tout
le monde.
D'ailleurs ils sont entrés dans le domaine des questions actuelle En parcourant
des ruines aussi abandonnées, il était de style de déplorer la chute des empires et
(1) Cf. RB., loo:;, p. 214 . Mais : c'est seulement a l'cpociuc byzantine, après la cliristianisation
de l'Empire, qu'Éboda deviiit une ville ».
tains souvenirs. Mais ces ruines sont au moment d'être occupées de nouveau. Les États-
Majors s'inquiètent des sources pour tracer des itinéraires. Des voies ferrées prépa-
rent la ruce de l'Asie sur l'Kpypte. Cela n'aura qu'un temps, et les voies construites
pour la destruction contribueront sans doute plus tard à rendre la vie à un pays qui
fut prospère. Nous souhaitons que MM. AVoolley et La\\ renée soient les premiers à
faire cette route :dans le même sens que les Hébreux !
Paris.
Vr. M.-J. Laokanoe.
BULLETIN
Job, Jonas, Judith. Le premier, par ^i. labbé Chauvin, ne ressemble guère anx
deux autres. Il n'est pas écrit dans le même esprit, ce souci, louable chez un
apologiste, de ne point imposer aux tidèles des opinions qui ne sont point certaines.
M. Chauvin cite le doute de Renan — partagé par tant d'autres — sur lunité
littéraire, à propos du discours dElihou. « Aux exégètes de répondre ». déclare-t-il.
Passe pour ce point. M. Chauvin sait que l'auteur ne fut pas Job en personne, ni aucun
de ses amis. * Line seule chose paraît démontrée, c'est que l'auteur — Israélite —
vivait à l'époque la plus florissante de la littérature hébraïque. » La démonstration
engendre la certitude ; une chose est démontrée ou ne lest pas. Mais comment
démontrer que Job appartient à une époque aussi indéterminée que l'apogée de la
littérature des Hébreux? M. Chauvin aflirme que Job a réellement existé. Soit!
mais les preuves qu'il en donne ne paraîtraient pas décisives au P. Condamin.
Ézéchiel (xiv, 14, 20) et saint Jacques (v, 11) ont pu se référer à l'idéal d'un juste
tel qu'il existait dans la Bible. Eufln l'auteur donne sou avis sur Vhistoi'lcilc du
L'apologie de notre religion serait peut-être plus solide si l'on insistait sur la
splendide lumière de l'enseignement biblique au milieu des ténèbres de la pensée
religieuse antique, plutôt que de tenir mordicus à des points qu'on n'ose même pas
proposer comme certains.
Autrement décisif est l'article Jonas du R. P. Condamin, puisqu'il n'avait pas tant
à révéler sa propre pensée quà marquer les lignes dans lesquelles peut se mouvoir
la liberté d'appréciation d'un catholique. L'histoire de Jonas est connue, et, plus
encore (jue le texte de cette histoire, les difficultés auxquelles elle a donné lieu. Le
P. Condamin les expose et place en regard les réponses de l'exégèse dite traditionnelle.
Mais il existe une autre solution que les « réponses » péniblement échalaudées sur
des récits de marins trop souvent coiitrouvés. C'est celle que l'auteur nomme « hy-
pothèse d'un écrit didactique ». Il était visiblement satisfait de s'appuyer sur l'au-
torité de M. van Hoonackcr. dans son commentaire si distingué des douze petits
Prophètes.
D'ailleurs l'argumentation du savant jésuite est plus approfondie et nouvelle sur
certains points. Par exemple il a cité Théophylacte : « il ne faut pas l'ignorer, plu-
sieurs ont admis que la désobéissance de Jonas, sa fuite, et le reste ne sont pas his-
tori(iues » {P. G.\. CXXVl, col. 9G0-9G4). Mais quand bien même l'exégèse an-
cienne serait unanime, le P. Condamin n'a garde de la confondre avec la tradition
dogmatique. Sans doute « i! ne faut pas abandonner sans de fortes raisons une inter-
prétation commune dans l'Église catholique. Mais on peut considérer que dans les
siècles passés les questions historiques et littéraires relatives aux Livres saints n'ont
pas été étudiéescomme de nos jours. On ne connaissait pas Ninive, les Assyriens, les
rois d'Assyrie, comme d'abondantes inscriptions nous les représentent. On n'avait
donc pas les même difficultés, les mêmes problèmes à résoudre » (vol. 15.58).
Nos lecteurs .seront heureux de lire ces idées qui leur sont familières dans le
dictionnaire du R. P. d'Alès.
Le même critérium est appliqué à l'histoire de Judith. Ou regrette cependant que
l'auteur n'ait pas discuté l'hypothèse d'un écrit parénétique au temps des Maccha-
bées, que reflète un texte hébreu de Judith qu'il connaît certainement. Son opinion
parait êlre que le fond de l'histoire est authentiiiue, du moins il déclare ' l'histo-
c'est autre chose » {col. 1564). — Mais il ne s'agit pas ici de détails. Le nom de
Nabuchodonosor et tant d'autres points que le R. P. ne croit pas historiques ne sont
point des détails. De l'histoire écrite de cette façon n'est plus de l'histoire. H serait
moins contraire à une saine doctrine de l'inspiration d'admettre qu'im auteur sacré a
librement mis en scène des personnes de convention pour enseigner ce qu'il avait à
cœur, que d'imaginer qu'il a entendu faire de l'histoire en habillant un fond histo-
rique vrai de traits ramassés au hasard dans des histoires étrangères à son sujet. Au
surplus Condamin, comme apologiste, conclut « Si l'on apportait des preuves
le P. :
15G3 .
po^rr luie œuvre entièrement personnelle, mais il s't-tait all(dé à l'adaptation ita-
il !.. Sai.\atoiuili cd K. UiiiN. Lu liibbiu. lianniu/iiUK' :ill' Antiro e :il Niinvo Tcslamcnto, iii-H'
lienne d'im ouvrage allemand, le Uilfsbwh zum Vcrslandnis iler Uibi-l. de E. Hulin
(1904-190."1), et il s'est contenté de développer à sa faron ce qui regarde le Penta-
teuque. les Kvangiles et les Actes. Le reste est traduit, non sans de nombreuses et
siguilicatives additions.
Nous regrettons cette demi-mesure, car M. Salvatorelli est aussi capable que
Hùhn de traiter son thème, et il semble moins possédé que lui de cette conscience
de sa supériorité qui empêche le plus souvent un professeur allemand de regarder
en dehors de son pays, je veux dire d'abaisser son regard sur un autre horizon. Mais
il faut reconnaître que la critique du savant italien n'est pas moins hardie ni moius
(I Sur la question d'antériorité entre Esdras et Néliémie, ni HiJIin ni Salvatorelli n'ont nommé
M. Nan Hoonacker qui le premier a proposé ex professa l'antériorité de Néliémie.
276 IIEVLI-: lilMI.lOl'K.
législatifs. Pourquoi ceux que les Hébreux nous ont transmis ne seraient-ils pas la
reproduction de ces textes antiques, en tout cas de textes antérieurs à la conquête? Les
ressemblances formelles du Code de llammourabi et du Code de l'Alliance ne sont-
elles pas très frappantes? Et pour répondre à la position extrême de M. Salvatorelii
par un argumentiez homiiiem. (juand aucune des lois du Pentateuque n'aurait reçu sa
Formule de Moïse, — d'autant (|ue nous ignorons (juel était alors l'état précis de la
langue, — on pourrait encore faire remonter jusqu'à lui une législation vraie et pro-
prement dite.
Tenons cependant compte à l'auteur de la légère et timide restriction qui tempère
son admiration pour la théorie Graf-Wellhausen. Mais il est à regretter que, lorsqu'il
s'agit des Évangiles, il ait fait siennes les conclusions les plus hasardées sur leur com-
position littéraire. Ce qu'il dit par exemple des diverses stratifications de s. Marc, de
trois à cinq dans le ch. 13, est vraiment excessif, et sans discussion sérieuse des
opinions dilï'érentes.
Ce n'est que justice de reconnaître les qualités de M. Salvatorelii. Il connaît parfai-
tement les syslènit^s qu'il expose et les expose clairement, en entrant dans le détail (1).
dit, de sorte que la critique allemande pénètre grâce à lui en Italie sous une forme
déjà dépassée.
Quoi qu'il en soit, on ne saurait méconnaître l'importance d'un fait aussi considé-
rable que cette pénétration. Jusqu'à présent c'était chez nos voisins un article étran-
ger. La voila désormais proposée à tout le monde. Nos amis auront à coeur de
répondre sur ce terrain de la critique qu'on chercherait en vain à éviter. Les âmes
très dociles seront toujours à l'abri en ne lisant pas. Mais ne faut-il |)as se préoccu-
per aussi des autres?
|)Oque hellénistique jusqu'auxtemps byzantins. Mais il n'en renferme |)as moins des
choses bien curieuses. La lillératine grecque s'enrichit surtout d'une sorte d'air de
bravoure du Sophiste Antiphon qui oppose vigoureusement la loi de nature à la loi
civile. Des fragments moins longs sont d'Hésiode, d'Alcée, de l$acchylide, de Calli-
maqne... Le Bible n'est représentée (|ue par de très petits débris du Léviti(pic 27
(iv'' sièclej, d(! la I
'
l'clri 5 (i\' s. , de it-pitie aux INtmains 1 \i' ou \ii' s.)
1 La révision usl A la paKC a-i), l.i IcUre an\ llcinalns est ilalrc (rcininin laii i>(>.
iiisulli>:iiik-,
III. lis. d'aprcs la p. arrivé à JiTiisalcm en mai .'>:..
•4-i7, Paul i-si
i riii: O.iyrhynihus l''ij)i/)i, l'art XI, cdiUîd willi lraii>laUi)iis aud notes, liy 11. I'. (.ui.nh;i,i,
l>. l.iii. eir.. aii<l A. S. IIUM, l>. I.jlt. Ole, wilh scv(mi PlaU's, in '•' dr; \n -JTH pp., Miiii-nanl Ir-; i
M •
n.l lidi. I.ondun, 1915.
RUIJ.KTI.N. 277
et 8 (iir' s.\ flune feuille mieux conservep contenant des morceaux tk- Psaumes 82,
«i-14 et 83, 1-J IV s.).
ne s'accorde guère que par les conjectures des éditeurs dans les lacunes.
Philon ligure dans le recueil pour une page inédite. Il y tient compte de l'inspi-
Crésus qui passait pour l'homme le plus heureux de son temps qu'il fallait voir la
fin d'une longue vie ».
rences de théologie hihlitpie, données aux théologiens du Grand Collège du Jésus, à Tor-
tosa. C'est la contribution de l'auteur à la fête commémorative du rétablissement de la
Compagnie de Jésus (1814-1914). Et vraiment il faut féliciter les jeunes théologiens qui
ont entendu ce solide enseignement pour leur.* vacances de Pâques. Le nom de
conférences pourrait être mal compris en France. Si l'auteur a évité un déploiement
d'érudition qui n'eût pas été ici à sa place, il n'y a dans ces leçons sévères et nour-
ries de doctrine aucune concession à la littérature, et les auditeurs y sont moins
fréquemment interpellés que ceux que saint Paul a en vue ou qu'il imagine lui fai-
sant des objections. Une introduction donne l'idée générale de l'ascétisme chrétien.
Viennent ensuite cinq chapitres : Le péché et la grâce; Essence de la perfection
morale selon saint Paul; La foi, l'espérance et la charité; La vie morale en exercice;
Doctrine ascétique de l'Épitre aux Hébreux. En appendices, deux articles de Revue
réimprimés : La foi selon l'Epitre aux Hébreux; La charité selon saint Paul.
Le R. P. Bover nous explique pourquoi il a traité séparément de l'Épitre aux
Hébreux : « Saint Paul, s'il en est en définitive l'auteur, n'en fut pas cependant le
(p. 126). Si l'auteur a cru devoir insérer ce passage dans un livre daté du 26 février
1915. c'est qu'il ne lui a pas paru en opposition avec la décision de la Commission
biblique. Mais il ne s'accorde pas très bien avec une note de l'article publié dans la
Eeseùa eclesiastioi. où saint Paul n'est toujjurs pas le rédacteur, mais oîi « il a déter-
miné non seulement la matière, mais encore la rédaction » (p. 143, note 1). Déter-
miner la rédaction, cela ressemble bien à dicter une lettre, et alors on ne voit plus
guère de dilTérence entre l'Epitre aux Hébreux et l'Épitre aux Romains, écrite maté-
riellement par Tertius.
Le R. P, Bover déplore que l'Espagne ne lui ait fourni aucun travail sur l'ascèse
paulinienne. Il a eu recours surtout, semble-t-il, à la remarquable Th<'ologie de
(1) p. José M. Bover, S. J.. La ascética de san Pablo, in-lG de âOO pp., ïipografia Calôlica. calle
del Pino, o, Barcelona, lOls.
278 REVUl- HIIJLIÔLi:.
saint Paul, par le R. ï\ VrM. saus oublier Cornely, ni surtout saint Thomas. I.cs
Même il utilise l'édition de von Soden. Par exemple ou se demande comment les
lecteurs s'y reconnaîtront quand ils liront, à propos du codex Vaticmnis, et entre
parenthèses (B, H o l). B, c'est le sigle traditionnel; o 1, c'est la notation de Sodcn.
Mais que vient l'aire 11, sinon comme la notation d'un des trois grands groupes de
Soden, qui déborde naturellement le ms. du Vatican?
Les textes de saint Paul sont cités en latin (sauf quelques textes grecs dans les
traduction (en espagnol) : [Dieu] fait tourner toutes choses à |leur| bien i^Rbiu. 8,
28) suppose une correction de la Vulgate d'après une intelligence du grec qu'on ne
peut qu'approuver. Mais on ne sait comment il fonde lui-même sa traduction de
Rom. y ejecuiando varones con varones lorpezas infâmes, recihieron mios de
1, 27 :
olros elpago debido de su estravio (p. 40). Rien, ni dans la Vulgate, ni dans le grec,
n'autorise l'insertion de de otros, car àvTia-.aOîx marciue le châtiment de la première
erreur. L'auteur ne paraît pas non plus avoir été bien inspiré en entendant la Cnrifai'
Dei (Rom. 5,5) directement (p. 158) de l'amour des hommes pour Dieu. Evidemment
la charité de Dieu pour nous fait naître en nous la charité envers lui, comme sa jus-
tice tious rend justes, mais dans les deux cas saint Paul envisage d'abord la source qui
Combien d'entre nous n'aiment pas se mettre en route sans leur Nouveau Tes-
tament! Et il peut arriver à plus d'un de regretter l'absence d'un dictionnaire. On
n'aura désormais qu'à se procurer le dictionuairr de /tochc du grec du X T. (grec-
des mots. La référence nest indiquée que si le mut a un sens spécial dans un
cas donne, par exemple irÉx">, dans Me. 14, pour lequel ^L Souter propose 11, :
« il est payé, il a touché », en parlant de Judas, ce (|ui est d'ailleurs peu vraisem
blable. Pour les prépositions, même pratique; par exemple le sens consécutif de
ïva est prouvé comme ('•chantillon par Rom. 11, 11. M. Souter est au courant des
plus récentes découvertes touchant la langue grecque li'>i)ir dans les papyrus, ins-
(•ri|ttious, etc. Il n'est nullement rivé à telle interprétation qu'on pourrait dire
qu'on lr<tuve les sens de w.xwm rangés dans l'ordre suivant « : .le rends o;/atoç
I) Cependant il n'.i pas cilc Heu/, hic lUhik d''s Aposlrls P-iulus. dans les lUhlisrlic Sludieu
Il .illiiiliqucs) di; lîMi.
i, l,a intfTprclacion «jup pudriamos llamar Iradicinnal, p. Ii>7.
(;» .1 jifickrt Lrxicon In Ihn (irceli Scw Tvslauirnt, li> Alexander Soi:tk.ii, M. A., in tci de
\iii-2X!t pp.. oxiord. lit Uii-(.laiciid«in l'rcss, HHii.
BULLETIN. 270
doit être reudu « juste i» puisque nous n'avous |)as comme les Anglais just et
ritjhtrous. M. Souter suggère modestement qu'il a scuieuient voulu faire un livre
bon marché. Mais ce n'est pas pour autant un abrégé anonyme; c'est une œuvre
personnelle qui tire sa valeur propre de la compétence reconnue de son auteur.
Ou voudrait n'avoir qu'à le suivre aveuglement quand il attribue sans hésiter deux
recensements à Quirinius, l'un en 8, 7, ou C av. J.-C. (et c'est celui de Luc, 2, 2),
comme plénipotentiaire de l'empereur, l'autre comme legotus pro -pi^ietore en
Tan 7 ap. J.-C. t^et c'est celui de Act. 5, 37). Le petit volume a cet aspect de netteté
élégante dont les presses des Universités anglaises ont le secret.
curiosité des critiques. Renan trouvait très amusant de rencontrer dans la Bibleun
petit traité qui lui rappelait Voltaire. M. Humbert serait plutôt attristé de la « mélan-
colique apparition » de « cet Ecclésiaste qui. élevé dans la bonne Chokma ortho-
doxe, perdit la foi et renia la vie! » p. 26). Les hellénistes sont plutôt attentifs à
cette première action de l'esprit grec sur les Sémites, de cette intrusion de Japhet
dans les tentes de Sem. Les philologues font leurs délices de cette langue en déca-
dence et en progrès, qui renonce aux images pour s'essayer aux abstractions. Et un
critique catholique, comme M. Podechard, a vu là une bonne occasion de mettre les
choses au point.
Après M. Gautier, M. Paul Humbert a rendu hommage aux analyses pénétrantes
de notre docte collaborateur : « L'hypothèse de l'exégète catholique, plus simple et
limpide que d'autres », nous dit-il, » me semble rendre très bien compte des diverses
diflicultés du problème '
(p. -5, note 2;.
Revue se souviennent que M. Podechard distingue quatre mains dans le livre :.le
Qohéleth lui-même, qui a écrit le livre de la vanité; sou disciple qui a publié ce livre
en ;;ijoutaiit l'épilogue; un sententiaire ou hakam auteur de nombreuses sentences,
enfin un hasid ou pieux correcteur qui aurait adouci ou plutôt retouché ce que
l'Ecclésiaste disait du défaut de sanction dans le monde, en maintenant au contraire
la rétribution divine temporelle (2, 26='''; 3. 17; 7, 26''; 8, 5-8. 12-13; 11,0';
12, 1«; 13 s. .
C'est donc à cette analyse — sauf quelques détails — que se rattache M. Humbert.
Mais tout en faisant grand cas aussi de la discussion philosophique et ihéologique
de M. Podechard. il est plus disposé à reconnaître l'influence des Grecs sur Qohéleth,
déserteur de Son point de vue n'a rien d'étroit et de judaïque, c'est
la foi juive. «
parle des tendances générales de l'esprit grec, elles sont aux antipodes. Sans une
certaine connaissance des Grecs, dit-on. Qohéleth n'aurait pas écrit son livre. Sans
doute, parce qu'il n'aurait pas éprouvé le besoin de protester. Le mouvement grec a
déterminé simplemeut chez lui une réaction du tempérament oriental beaucoup plus
passif, en même temps que de l'instinct religieux qui sent dans le monde et dans
l'action divine un mystère que l'homme ne peut sonder. Le Grec dit action éner-
gique, recherclie scientifique passionnée, spéculation que rien n'arrête, essor de
l'esprit humain, et, si la vaillance échoue, à défaut du succès, il reste la gloire-
L'Ecclésiaste répond à tout cela : « Vanité des vanités! » On s'est perdu en conjec-
tures pour souder à la foi de son peuple, à son milieu, à sa race une pensée qu'on
croyait hardie, novatrice, étrangère. Le Qohéleth serait une sorte de Titan dépaysé,
avec l'auréole du libre-penseur. C'est beaucoup naoins scandaleux, et c'est beaucoup
plus simple.
Osera-t-on dire ici que .M. Podechard lui-même a peut-être exagéré la portée
logique des constatations du Qohéleth quand il y a vu des arguments tendant à une
conclusion? D'après le savant maître : « s'il est une doctrine formulée par Qohéleth
etune conclusion répétée, c'est que l'homme doit cueillir ici-bas les joies que Dieu
met à sa disposition, précisément parce qu'il n'existe apparemment aucune dilTérence
entre le sort des bons et celui des méchants. Qohéleth allirme à plusieurs reprises
que la sanction morale ne se réalise point en ce munde, et c'est là le principal motif
pour lequel il déclare que la vie est vaine et ne mérite pas d'être vécue » p. 101).
Mais où Qohéleth déclare-t-il que ne mérite pas d'être vécue? Il a constaté que
la vie
la sanction divine ne s'exerce pas dans cette vie: mais ce n'est qu'une des raisons
pour lesquelles il ne faut pas trop s'appliquer à sonder ce qui est insondable, ni
s'agiter en vain. S'il a emprunté une pensée à la Grèce, c'est le « rien de trop qui
est l'âme de son livre, mais sous une forme religieuse, commune aux Sémites -
depuis l'épopée de Gilgamès —aux auteurs grecs pénétrés de religion, relevée ici
et
par la foi au Dieu uniqije : l'homme est très peu de chose, et ne doit pas empiéter sur
le 'domaine de Dieu. La quintessence de sa modération un peu bourgeoise, c'est :
rendrais-tu stupide? Ne sois pas méchant à l'extrême et ne sois pas insensé; pour-
quoi mourrais-tu avant ton temps? » (7, Ki s. trad. Podechard , .
J.a vie vaut donc d'être vécue, mais il faut y prendre ce qu'elle oUVe et qui est un
don de Dieu, les jouissances normales qu'apprécient tous les hommes et qui sont
compatibles avec le bien moral, dont Qohéleth se montre soucieux. C'est la morale
que le B. .lacnpone di Todi renfermait, dit-on, en deux points : sine res vaderr prout
rolnntvu'trn\ et : (t;/iiin ri's nicas ttllfcr 'inalilrr. C'est anuivint et paradoxal; mais
ce n'est point dépourvu de sagesse, et compatible, si on l'entend bien, avec un réel
sentiment religieux.
Q'ion reprenne l'analyse du livre, on se rendra compte aist'ment du thème loiida-
luental posé dès le début ne pas prendre trop de peine 1.
:
Le reste exprime la :} .
même idée avec les variations qu'exige la considération des choses. Il ne faut point
s't'puiser a chercher du nouveau 1. !» ss.). ne pas trop cherciier la sagesse qui serait
étude scienti(i(pie 1, 12 ss.j, ne pas non plus s'adonner aux plaisirs 2, I ss.), non
|)lus d'ailleurs à un travail excessif ''2, 18 ss. Il faut plutôt prendre.
les choses
comme elles sont (3, 9 ss, . Comment l'esprit humain serait-il qualifié pour tout
sonder, (piaïul il est incapable de déterminer en quoi il se distiuiiue de la bête?
Hll.l.ETlN. IHl
de travail est lui-même un défaut (4, -i-7\ Que de sottises dans l'ordre social
(4, 13-16), ou politique 5, 7-8)! Quelle vanité que les richesses (5, î)-16), surtout
quand on songe au vieillard riche (jui n'a pas joui de la vie (6, 1-7) !
c'est que le mal est une erreur, une sottise, et spécialement rincouduitc où l'homme
se laisse entraîner par la femme [7, 23-29). Une des causes de ce mal moral, c'est la
prospérité des méchants (8, 9-14), où il est sous-entendu que l'homme ne se scanda-
liserait pas, s'il ne prétendait tout soumettre à son arbitrage, au lieu de prendre la
vie comme elle est 8, 15), car Dieu s'est réservé son secret. Il est impossible d'ex-
pliquer le train du monde comme un tissu de peines et de récompenses (8, 16-9, 2):
le malheur est que les hommes s'en scandalisent [8, 3-6). Mieux vaut ne pas y
songer, et prendre la vie comme elle est avec ses jouissances permises (9, 7-10).
D'ailleurs si le bonheur n'est pas toujours la récompense de la vertu, il n'est pas
non plus toujours le lot des vaillants, ni des sages, ni des doctes..., la mort vient tout
interrompre '9, 11-12), et même le salut d'une ville peut n'être pas récompensé
9, 13-16).Tout va de travers, les précautions les mieux prises échouent 10, 5 8);
et en effet on ne peut prévoir l'avenir (10. 14'^), ni scruter à fond l'œuvre de Dieu
(11, 5). Il faut donc prendre la vie comme elle est, joyeuse dans la jeunesse, sans
omettre la crainte de Dieu (11, 7-12, 8 et 12, 12-14).
Dans cette analyse, nous avons omis les sentences qui interrompent le 01 du
discours du Qohéleth. L'analyse de M. Podechard nous paraît définitive sur ce point,
et nous ne faisons que l'enregistrer en attribuant à son Sage : 4,9-12; 17-5,6:
7, 1-12. 18-22; 8, 1-8; 9, 17-10, 4. lO-U''. 15-11, 4; 11, 6.
Mais peut-être pourrait-on douter de la personnalité distincte du hasid. D'après
M. Humbert. ce re viseur avait à corriger à fond le Qohéleth qui s'était écarté nette-
ment de la foi d'Israël. Mais en accusant dans ce sens les retouches discrètes
qu'admettait M. Podechard, M. Humbert tombe, selon nous, dans l'invraisemblance.
Il écrit : » Le passage 8. 11-13 est une glose renfermant la protestation indignée
d'un chasid contre l'affirmation scandaleuse de Qohéleth aux versets 10 et 14 : aux
faits troublants invoqués par Qohéleth il ajoute l'interprétation orthodoxe de ces.
faits. C'est la réponse de la foi à la solution du négateur " p. 17, note 2. Ce sont là
8,11 Parce que la sentence concernant l'œuvre du mal ne s'exécute pas promptenient, pour ce
motif le cœur des Tils de lliomme s'emplit en eux (du désir) de faire le mal, 1-2 parce que le
pécheur fait le mal cent fois; et prolonge ses (jours), bien que Je sache que le bonheur sera pour
ceux qui craignent Dieu, parce qu'ils le craignent, 13 et le bonheur ne sera pas pour le niécliant.
et pareil à l'ombre il ne prolongera pas ses jours [larce qu'il ne craint pas Dieu.
leth dans 11 et 12», la glose commençant assez nettement à « bien que je sache » etc. ? :
Dans ce cas. en effet, la glose n'est guère conforme à l'affirmation du texte. Mais il
semble que ce soit le seul cas où la rétribution temporelle soit maintenue à rencon-
tre des constatations du Qohéleth. En effet, dans les autres passages attribués au
hasid, ou bien il n"afûrme pas nettement rétribution 2. 26: 7, 26), ou bien cette
l;i
•282 HEVLF. BIBLIQUE.
rétribution est renvoyée à l'avenir (3, 17-, 11.9; 12, I4i. Dans le premier de ces
deux cas on n'a plus de base sufQsante pour enlever le texte au Qohéleth. Reste le
second. M. Podecliard entend la rétribution future d'une rétribution temporelle
parce que le Ijasid doit avoir une doctrine uniforme; mais si 8, I2''-13 est une
simple glose de copiste.^ L'individualité du Jjasid n'apparaît que si Qobéleth niait
explicitement ou implicitement toute rétribution future. Or ce n'est pas le cas,
puisqu'il admet la crainte de Dieu. Très justement, quoique M. Ilurabert
lui en
sont des pamles autlientiques de Qolu'letli. Mais alors ou ne voit pas pourquoi il
n'aurait pas écrit 12, 13 : « crains Dieu et garde ses commandements », ni 11, 9,
appel à la joie de vivre, tempérée par la perspective du jugement. La crainte de
Dieu ne suppose-t-elïe pas que Dieu interviendra pour punir? L'Ecclésiaite constate
que ce n'est point le cas normal dans le monde; il ne parie pas du moment où s'exer-
cera ce jugement, mais sa foi lui enseigne qu'il aura lieu malgré tout. Ce qu'il dil de
l'existence qu'on mène au scbéol n'est point contraire, car il ne dit nulle part que le
schéol est éternel. Dire que les jours de ténèbres seront nombreux (11, 8, c'est
Nous avons noté celles des appréciations de M. Ilumbert qui sont trop inspirées
par l'étude des critiques radicaux. Nous devons relever aussi un jugement plus sain,
et qui d'ailleurs ne concorde peui-cire pas très bien avec les autres. « Qoliéletb ne
prétend pas que nos appréciations embrassent tous les éléments du prohlème. A trois
reprises il affirme que r« œuvre de Dieu » dépasse notre intelligence » (3, 11:
8, 17; 11, 5).., Et, après la critique de l'opinion de M. Podechard : « Cependant il
réserve tout au moins la possibilité que l'imperfection s'évanouisse si l'on se place au
point de vue de Dieu )> (p. 1!)). On ajouterait seulement que l'Ecclésiaste suggère
que cette (ciivre s'exercera par un jugement. Quand on songe à l'inunense portée
de l'idée du jugement dans toute l'bistoire d'Israël, au développement de cette idée
avant même la persécution d'Anliochus dans les parties les plus anciennes du livre
dliénocli, et puis(ju'on la rencontre dans le livre de Qoliéletb associée à la crainte
de Dieu, on ne sera pas porté à la lui En tout cas des raisons décisives font
refuser.
défaut. Les divagations sur le Qnliélelb semblent d(mc désormais faire place à des
appréciations plus inodérées. L "étude si consciencieuse, si précise, si pénétrante de
M. Podechard sera pour beaucoup dans ce bon résultat.
textuel et exégétique. Les pages de son in-quarto sont partagées en (piatre cobnines.
pusarlvi-nial, quo mrtximus iitilo.r meriinrum fucint ejrnmcn Jh- iliv. Jns(. vu, i\ .
(il PsnUTtinn Inlinum cum ffrurro et hehrueo com/inritlum, c*\|)lanavit, annoi:ilionil)us gram-
malicis inslrii\it.losi'[i|ius »oNA(;«;oiisi, M. s. Premier rnsiiculc. <'.. in i<lc 11-2 |)|i.. (Ml.; Ilenxi^nie
fasc, de lia à 57-2. ims. Klorf^nre, l.ibrcrin cdllrirc liorenlinn.
BULLETIN. 283
Dans la première, le texte s;rec de Swete, avec quelques variantes en notes. Dans la
seconde, le texte du ins. lalin de Vérone, représentant l'ancienne latine, soit le texte
Cette simple confrontation des textes a déjà son éloquence pour qui connaît les
questions soulevées. Lorsqu'on a récité bien souvent, non peut-être sans un peu
d'humeur, certains textes qu'on n'est jamais parvenu à comprendre, avec cette con-
solation fournie par les commentateurs, qu'ils sont inintelligibles ou ne répondent
pas au texte inspiré, on jette un regard d'envie sur cette quatrième colonne qui n'est
pas moins supérieure à l'ancienne latine, même corrigée, que le reste de la traduc-
tion de s. Jérôme. L'usage a prévalu. Mais il ne s'impose pas à l'Eglise romaine.
Quelle belle pensée au Ps. 15. 2 Dominus meus es tu, bene mihi non est sine te, et
:
combien plus claire que celle-ci Deus meus es tu, quoniam bononim meorum non
:
eges. Ou encore Deus deus meus, quare dereliquisti me? longe a sainte mêaverba
: .
rugitus met {21, 2), s'expliquent sans trop de peine, mais que faire de longe a sainte
mea vcrba delictorum meorum? Par quelle voie : nec est silcntium mihi (v. 3) est-il
devenu : et non ad insipientiam mihi? Comment ne pas préférer, même sans savoir
l'hébreu : Levate, po)-tae,caplta vestra. et elevamini etc..' h Atlollite portai, jirincipes,
vestras et elevamini (23, 7)?
En pareil cas on pourrait se croire autorisé à renoncer au commentaire de textes
qu'on ne peut regarder que comme des contresens. Aucun cathoUque n'hésite à
préférer le i-este de la Vulgate aux Septante et à qualiûer leurs contresens pour ce-
qu'ils sont. Le fait que l'ancien psautier a mieux résisté à cause des habitudes prises
inintelligible.Cependant son but principal est bien d'expliquer quel est le sens de la
Vulgate latine. C'est donc le thème traditionnel de l'exégèse latine, mais il l'aborde
avec toutes les ressources de l'érudition moderne. La Renaissance, éprise des clas-
siques, fronçait les sourcils devant certaines expressions, sans se soucier de savoir
comment elles avaient été chose vivante. On risquait ainsi de passer devant le vrai
Le P. Bouaccorsi est parfaitement au courant des sources où il faudra cher-
sens.
cher l'intelligence d'un latin qui a vécu. Naturellement il s'informe aussi auprès du
texte grec, qui est l'original pour les textes latins, et auprès des Pères anciens qui
étaient familiers avec cette langue. Mais fallait-il, avec une tâche déjà si compliquée,
charger pages de passages des Pères pour faire remarquer qu'ils ont manqué le
les
sens? Cela a son intérêt historique et philologique, mais il y en a trop qui n'ap-
portent aucune lumière à l'interprétation. Et quelle interprétation? Quelquefois
celle d'un non-sens. Eu pareil cas, les Pères font les derniers efforts pour trouver uu
28i IŒVLF: I{I|{LI0UK.
sens, ce qui ne peut aboutir qu'à force de subtilités. Sur non ad insipientiinn mihi
(21, 3 . ex qui//us verbis vix probabilis endtur senientia. Et il nous Faut
l'auteur note :
entendre Sa, puis Genebrard, puis s. Augustin, puis s. Jérôme, pour arriver à celte
conclusion : hebraka vcro plana simf. Ce qui nous intéresserait beaucoup |)lus, ce
serait de savoir comment et pourcjuoi les Septante se sont trompés. C'est aussi ce
qu'on nous dit lors(iue cela est possible et sui"(isamment établi. Mais ce n'est pas
toujours le cas, et alors le P. Bonaccorsi évite des discussions trop ardues.
Il ne s'est pas non plus engagé à expliquer à fond le texte hébreu. Il connaît les
commentaires et il a peut-être sa conviction dans chaque cas, mais il ne se soucie
pas de la faire prévaloir. Il se contente d'expliquer la traduction de s. Jérôme.
Or, quoique beaucoup mieux arme que le traducteur grec, Jérôme s'est trouvé
parfois, comme lui, et peut-être plus que lui, en présence d'un texte altéré. Il fau-
drait, pour aboutir à un sens, recourir à des conjectures. Le P. Bonaccorsi le sait,
utilité est permanente, puisque personne ne peut songer à rayer des siècles d'his-
toire, et que toute histoire a sa portée. C'est peut-être aussi une utilité de circons-
tances pour faire comprendre à tous quel serait l'intérêt d'une revision qui rendrait
une partie de la parole de Dieu, devemie la principale prière des prêtres, plus chiire.
et surtout plus exactement ce qu'elle est. la parole de Dieu.
On lit en marge du premier fascicule que l'édition ne sera continuée que si l'on
Ce sont naturellement les places de guerre les plus fortes qui sont assiégées le plus
souvent. On entre dans les autres sans les prendre. Jérusalem, avec ses vingt sièges
datés jusqu'à Saladin — sans compter les autres — olfre peut-être ce qu'on nomme
aujourd'hui un record. Ce sujet a tenté le P. Beilly. qui a résolu de les passer en
revue 1). Il a eu l'idée plus heureuse etjcore de rattachera ces sièges tel ou tel
monument de la littérature des prophètes ou des psaumes. C'est ainsi qu'il met le
|)saume 110 (\'g. 109; dans une certaine relation avec la prise de Jébus et l'in-
\<t. 2, :M; I Cor. 15, 2.5: Kph. 1, 20-22: ilel). 1. 3; 5, (i etc. . Mais ce sens
messianique est-il un sens direct ou un sens lypi(|ue:' Kn général un sens typi(|ue
n'en est pas moins très réellement messianique. I*ar exemple le ps. 89, 27 ss. doit
certainement s'entendre de David, et cependant celui qui dit à Dieu : « Tu es mon
père •', est plus naturellement le Messie (|ue le roi de Juda.
Cependant, à propos du ps. 1 10, ••ette^solution se heurte à une difficulté insur-
montable. Le sens nalmel des termes est [)()nr un messianisme direct, et c'est aussi
I Sierics of .Irrusnlem. Tlir ftrsl hm, il.nis Thr rrrlfsiastiral Rcvirw. I" j;invicr ini.'i.
BULl.KTIN. 283
psaume, David dans lopinion des scribes, nomme « Mon Seigneur > Me. 12, 35 ss.
et parallèles^
Cela n'a pas empêché l'exégète catholique Rickell, professeur à l'Université de
Vienne, de soutenir que le psaume avait été composé lors de l'intronisation de
Simon, comme grand-prétre chef de la nation, et eu son honneur. Rickell préten-
dait même retrouver le nom de Simon en acrostiche aux demi-vers du début, et
nous ne sachons pas qu'il ait été censuré.
Le V. Reilly est beaucoup plus traditionnel et conservateur. Pour tout dire ce-
pendant, les termes qu'il emploie ne sont pas tout à fait clairs. Au premier abord
on dirait que comme certaines personnes il n'admet que deux hypotiièses ou un :
sait que les promesses de gloire temporelle qui abondent dans les passages messia-
niques ont été entendues par les Pères au sens spirituel. Dernièrement encore, un
nouveau millénarisme qui attendait leur réalisation littérale a été condamné. Il v a
donc toujours un certain élément typique ou spirituel même dans les oracles mes-
sianiques directs, et c'est certainement le cas de la fm du psaume, lorsqu'il dit du
Messie «Il exerce son jugement parmi les nations; tout est rempli de cadavres;
:
avec ses modalités historiques; il y entrait nécessairement pour une part son imagina-
tion propre dont l'inspiration ne le dépouillait pas. De sorte ([u'on pourrait très bien
supposer le cas d'un psaume décrivant directement le règne du Messie, mais le con-
cevant à la lumière de faits récents qui seraient encore reconuaissables quoique
projetés dans un avenir plus
glorieux. Ces sortes d'oracles n'en demeureraient pas
moins de descriptions qui auraient pour objets directs des faits accomplis
distincts
ou des personnages historiques ayant déjà vécu, types des faits et des personnes
messianiques.
Ces principes posés, il est malaisé d'abord de discerner à quoi s'est arrêté le
David. David qui nomme l'élu de Dieu < mon Seigneur » ne peut être lui-même ce
Seigneur. Mais il se pourrait que les faits réalisés en sa personne lui aient fourni les
traits dont il a peint le Messie prophète, roi et prêtre selon l'ordre de Melchisédec.
C'est la démonstration que le P. Reilly a tentée très licitement, — puisque David,
d'après les Pères, est la figure du Messie, — qu'il a poursuivie ingénieusement,
mais où il ne nous semble pas avoir réussi.
On dirait bien que ce qui l'a orienté tout d'abord vers la recherche de circons-
tances historiques qui auraient donné leur couleur au messianisme de l'avenir, ce sont
les derniers versets eux-mêmes. Si David avait décrit directement la mission de Jésus,
vue directement en Esprit, il ne lui aurait pas donné le caractère sanglant de la der-
nière strophe. Reilly note qu'au temps de David, c'était l'idéal d'un roi oint par
Jahvé, comme le prouvent certains événements de son règne, et que ses contempo-
rains auraient regardé la mansuétude des Béatitudes comme un excès de scrupules.
Mais ce trait est fré(|uent dans l'Ancien Testament, et n'a rien qui caractérise une
expédition particulière comme la prise de Jébus-Jérusalem. Quand lahvé dit à son
élu : « Asseyez-vous à ma droite », ce serait une allusion à la situation du palais roya^
à la droite (en regardant l'Orient) du lieu déjà choisi par David pour être plus tard la
286 REVUE BIBLIQUE.
place du Temple. — Donc eu tout cas Dieu n'y était pas encore, et l'expression s'en-
tend beaucoup plus naturellement de deux sièges placés à côté l'un de l'autre. David
fut reconnu roi à Hébron. dans la région des montagnes, et le souvenir de la pompe
amener sur ses lèvres le trait du verset 3,
royale alors déployée a pu qui attribuerait
au Messie une pompe triomphale du même ordre. Mais, outre que la mention des
montagnes (1) n'est pas suffisamment certaine, ce trait encore n'aurait rien de très
caractéristique.
La démonstration nous paraît donc manquée. Si nous y avons insisté, c'est que
l'occasion nous a paru bonne de distinguer ce que l'auteur a laissé dans un certain
vague, quoique sa pensée ne paraisse pas douteuse. Autre chose est de décrire direc-
tement un événement dans un poème où les contemporains peuvent très bien ne pas
soupçonner qu'il est, dans la pensée de Dieu, le type d'un événement messianique;
autre chose de chanter d'avance le messianisme tel qu'un grand événement provi-
dentiel, politique mais aussi religieux, inclinait à le concevoir. Est-il possible en
pareil cas de nommer cet événement? C'est ce que le P. Reilly n'a pas prouvé à
propos du psaume 110 et du second siège de Jérusalem.
Le livre de M. Vandervorst sur Isrinl et r.incien Orient [2) est le fruit de lectures
attentives et de voyages soigneusement préparés, entrepris avec
une résolution plus
qu'ordinaire. Il était le compagnon du R. P. Ubach. de l'ordre de S. Benoît, dans
cette hardie exploration du sud de la Terre Sainte sans parler du Sina'i — —
dont le P. Ubach a tiré un si bon parti pour son ouvrage écrit en catalan. El
Sinai (3).
M. Vandervorst, lui, a préféré somme foute l'étude des documents fécondée par
la visite des lieux. Son ambition, très haute, a été de présenter un tableau de
l'histoire d'Israël dans le cadre nouveau de l'histoire orientale. Ou plutôt l'ouvrage
pourrait s'intituler d'abord : le cadre oriental de l'histoire d'Israël, et ensuite,
depuis la période hellénistique. Israël et le monde gréco-romain. Cette remarque
n'est pas encore une critique, car le changement d'horizon était en somme justiOé.
L'histoire ancienne de l'Orient est aujourd'hui complètement transformée ; elle est
même encore en passe d'être fixée. C'est surtout sur elle que l'étudiant désire
être informé; la part d'Israël, il la connaît par la Bible. L'époque hellénistique
au contraire est presque au même point qu'autrefois, et précisément la Bible n'olTre
plus alors la même suite, étant muette sur les événements entre Ksdras et les
Macchabées, entre les premiers Macchabées et l'I^vangile. De sorte que, dans le
livre de M. Vandervorst, s'il est plus souvent question d'Israël dans la seconde
moitié de l'ouvrage, on peut dire que la Bible est toujours sinon à l'arrière-plan,
du moins supposée connue. Il s'agit de l'éclairer par l'ambi.mce des documents
nouveaux, plutôt que d'en faire un commentaire détaillé. Par exemple les Ih'breux
ne paraissent, en la personne d'Abraham, (pi'à propos de ILuiunourabi ; l'Kxode.
d'après l'echo probable (juil a laissé sur la stèle de Ménéphtah.
L'auteur est d'ailleurs si cordialement sympathique à toutes les études publiées
par l'Kcole biblique et iirché(»logi(|ue de Jérusalem, qu'on éprouve ici quel(|ue
fiTcnrc. Ces! une ^.'lriallto iiarinilciiient admissilile. I):iiis la liihir <l<- <:niiiipiin la Uailiiclion
ilu v..'l csl fallc aussi «rapri-is le lixlc massoréliquo, le stii.s de la VuIk^Ic «lant rejeté i-ii iiolo.
.i) Israël cl l'Ancien Orient, par M. VAM»KnvoiisT, doi leur tlu-oloKic, ancien élève de l'Éeole m
bililique de Jérusalem, prole^seiir au grand 8('niinairc de Malines. avec une |iréface de S. V.m.
le Cardiii.-il Mercier. 8» de xiv-i-i'» pp., avec des illuslraliuns et neuf planches. I. "ouvrage est
acconip;iHii(^ d'une carie de l'Ancien <»rient. Druxellcs. Aibcrl Dcwlt, \'.H'i.
I • ' ' ' i''i:<. pp. <i3t s.
1îLI.I.1:TIN. 287
embarras à dire tout le bien qu'on pense de son œuvre. Cependant c'est bien lui
qu'il faut louer du tact avec lequel les faits et les personnages sont groupés, de la
critique avisée des sources, de cette qualité maîtresse de l'historien qui consiste
à mettre en lumière les points importants, au lieu de se perdre dans un détail inlini.
Sur de nouveaux sentiers, l'érudit éprouve un vif plaisir à s'éloigner des chemins
battus, sûr de les retrouver quand il voudra; l'étudiant s'y perdrait, ou, meurtri
aux épines des buissons, il retournerait en arrière. M. Vandervorst, qui est un
professeur, a su comme écrivain se priver des excursions en pays inconnu, pour
guider ses élèves sur la grande route. Ils lui en seront reconnaissants. Pour nous,
le traitant comme un des nôtres, nous regrettons qu'il ait peut-être trop retranché
de ce qui éveille puissamment de nos jours lu curiosité des jeunes intelligences.
si
(p. asS"). Le lecteur, même prévenu aux addenda et corrigendu, ne saura peut-être
pas comment concilier ce temple unique avec le papyrus d'Éléphantine cité en
appendice, où il est question du sanctuaire de lalivé. Et à propos de cette pièce,
citée d'après la traduction du P. Lagrange [Revue biblique, 1908, pp. 326-327),
je dois faire une rétractation. Lorsque eût paru la grande publication de M. Sachau,
j'indiquai (RB., 1912, pp. 127 ss.) quelques points sur lesquels la première traduction
devait être modifiée ou pouvait être contestée. Le principal est aux lignes 27-28,
dont le vrai sens a été trouvé par M. Bruston « et ce sera un mérite pour toi :
devant lahvé, le dieu du ciel, plus grand que celui d'un homme qui lui ollrirait
un holocauste et des sacrilices équivalant à la valeur en argent de mille talents ».
De plus on sait aujourd'hui que la vraie prononciation du chef ou Fartarac (et non
Parthadac' des Perses (1. -5) était Widarnag plutôt que Widrang.
A propos du recensement de Quirinius (p. 29G), l'autorité de Cassiodore et de
Suidas est toujours bonne à citer; mais combien plus suggestif est le fait des'
ànoyox-jat périodiques que les papyrus d'Egypte font maintenant connaître dans
le détail. La copie incomplète de Pococke conserve un grand intérêt pour le cas
de Lysanias (p. 320); mais cet intérêt n'a-t-il pas été renouvelé par la description
des lieux où a été trouvée la nouvelle inscription, commentée par le P. Savignac {'2)?
Nous n'avons pas à entrer ici dans une discussion des faits. L'auteur a exclu
systématiquement toute allusion au développement des idées religieuses d'Israël.
Pour ce sujet il renvoie (p. 123) à la monographie si distinguée de M. Touzard,
dans « Oit en est l'histoire des l'eligions ». Aujourd'hui il renverrait sans doute
à la remarquable étude du même maître dans le Dictioimaire apoloyétiqxe du
11. P. d'Alès sur le peuple juif. Cependant les prophètes apportent leurs renseigne-
ments à l'histoire. M. V. a pensé que l'oracle d'Isaïe 14, 4-21 devait s'entendre
de Sargon (p. 80). Or nous le trouvons encadré dans une prophétie relative à
Bahvlone, et si Sar;;on fut en ellVt roi de IJahvlone, pour Isaïe (20, i) il est le rcii
et l'expression de 1' « ange de Jabvé « est habituelle pour signilier des causes
secondaires ([ui. surtout miraculeusement, amènent un désastre » (p. 94).
M. Vandervorst s'éciirte ici de M. van Hoonacker, partisan d'une seule expédition,
mais il rend hommage à sa brillante découverte de l'antériorité de INéliémie |)ar
plus de dix ans déjà, le marquis de Vogiié qui eut le premier, paraît-il. l'idée d'une
école biblique à Jérusalem « Il est temps que le grand public soit saisi de l'évo-
:
« lution qui se fait dans la critique des sources religieuses que, pour ma part, je con-
Critique des sources, mais en vue du maintien de la foi, c'est bien le programme
que M. Vandervorst a voulu remplir.
Nous indiquerons quelques-unes de ces solutions qui paraîtront les plus intéres-
•' D'Akkaron, Sennachérib suit la roule i\c l'Ouest pour monter contre Jérusalem
(Is., X, '2H-.\2 imagine un itinéraire du Nord au Sud pour symboliser la rapidité
de l'invasion I » (p. H4,.
En fait, Babvlone ne sera pas dévastée, ni ses dieux profanés, ainsi que le
voulaient Jérémie et Isaïe ». Et après avoir cité le l'ère Condamin S. J. dans son
connnenlaire tl'lsaïe, p. 281 s. « Quant au mode, à la façon dont lempiro chal-
:
déen prendra fin, le jjrophète semble laissé à ses propres conjectures, et il s'en
tient aux vraisemblances « (p. Hi2 .
Sur le livre de la Loi découvert (1 la di\ huitième année de Josias len r.i»l av.
ili 11 cliiil al)s<iluiiieiii certains crilique?. (luc ceUe «Jecoiivcrle diiit irmaisi-m-
reçu |iarnii
liUtlilc et (lissinmlail or voici ce qu*'iii pouvait lire dans les Ui'lmis du IJ Itvrier
une Im tion.
l'ilfi. sur une oinmunicalioii de M. oniont. au nom de M. r.iii«ue, anliivisle du lllione. à j'Aca-
<
des ili.ipclles de la <atli<drali' de l.yon, des «luvricis oui mis au jour. ra<lifs avic <les ditiiis
«le liiule sorle. ipiatre caisses ri'iilrrm.'uil de iiomliiruses liasses de
paielii-niins ci papiers pr<i-
venant des arrhivrs de laucien rliapiire inélropolitain. l'arti" i''^ .l.,.inni nis :uiisi .i,, .imrK
nil.LKTIN. 289
« traiter exactement chaque chose » (ii. 29). Tout ce qu'il se proposait, c'était de
résumer fidèlement une chronique plus étendue dont il ne garantit pas autrement
l'exactitude » (p. 228, note 1\
L'illustration de l'ouvrage montre les rapides progrès réalisés par le Musée
biblique de Louvain. Hélas! mais qui pourrait dompter l'activité scientifique du
clergé belge, que l'œuvre de M. Vandervorst, menée à terme dans de telles cir-
constances, manifeste si vivace.'
cette thèse ».
Cela est dit 1) dans une étude intitulée : Shiaï contre Kadès, les grands sanc-
tuaires de l'exode israélite et les routes du désert, étude archéologique et géogra-
phique (2). Ce titre suggère déjà qu'une bataille est engagée entre le Sinaï et Kadès.
On a prétendu transporter à Kadès le lieu où les Israéhtes se sont groupés autour
de Moïse près de la montagne de Dieu, pour autant qu'on admet cette tradition.
M. R. Weill s'est fait en Francs le représentant de ces vues nouvelles (^3 . C'est à
lui surtout que s'en prend M. Vernes, qui soutient avec fermeté la tradition
ancienne désignant le Djebel Mouça pour la montagne de Dieu. Horeb ou Sinaï.
Et assurément l'appui donné à la tradition par un professeur de l'École pratique
des hautes études serait le très bien venu, si l'argumentation n'était de nature à
compromettre une thèse juste, mais qu'il faut prouver autrement. M. AVeiU qui est
il faut signaler le grand carlulaire de 13.">0 que l'on considérait comme perdu, etc. Le plus
ancien de ces documents est un diplôme original, le seul connu, avec un sceau, admirablement
conservé, du roi de Provence Charles, fils de l'empereur Lotliaire I" » (861 .
1) P. G<J.
Annuaire 1913-1910 de l'École prati((ue dos hautes études, Section des sciences religieuses,
;2^
allé dans la péninsule sinaïtique n'ignorait pas que d'autres y étaient allés avant
lui et le disait. M. Vernes qui n'est pas sorti de chez lui aurait pu du moins con-
sulter les études qui apportaient des faits nouveaux, ne lut-ce que celui de Pliou-
non, retrouvé au Kh. Fcwiti. Il s'est contenté en somme de la table de Peutinj^er.
^ oyons comment il en use.
l/opinion nouvelle conduit les Israélites d'un point quelconque au delà du canal
actuel de Suez jusqu'à Kadès directement, c'est-à-dire en trois ou quatre jours,
au lieu de faire le contour vers le sud jusqu'au Dj. iMouça. La bonne réponse à
cette conjecture, c'est qu'elle est contraire à la tradition hébraïque. M. Vernes vou-
drait couper au plus court. Il prétend qu'il n'y avait pas là de route dans l'anti-
quité et que, la route de Philistie étant écartée, la seule route d'Kgypte en Pales-
tine, indi(|uée par la carte de Peutinger, passait précisément par l'oasis de Feiràn
et le Sinaï traditionnel. Or on ne peut refuser la possibilité en soi de l'itinéraire
direct, et c'est —
comme M. Weill l'avait noté précisément celui de la carte de —
Peutinger. Pour le nier, M. Vernes est oblige d'abord de supposer (|ue les chid'res
ont éié altérés par les copistes, et ensuite de placer l'bara ou Pharan à l'on. Feiràn.
Mais la situation du désert de Pharan dans la Bible est certainement plus au nord,
comme M. Vernes d'ailleurs le reconnaît expressément en disant que c'est le Tih
actuel des Arabes (p. 83). Si les chilH-es de la carte de Peutinger pour la route
qui passe par Pharan correspondent à peu de choses prés à un itinéraire moderne
par Nakliel de Suez à Aqaba, quelle raison a-t-on de les déclarer suspects?
Et M. Vernes se permet bien d'autres opérations philologiques! Dans le texte
de Ptolémée, au lieu de —apax/ivr] il lit i]ojx/.r,vr;, qu'il retrouve dans Soucis (Suez)!
La Mojv'j/ làTtç est l'arabe Makoudn; PJhoda, si évidemment identique à 'Abdeh, est
el-Aowljeh... On nous dispensera de discuter le reste de ces élucubrations. Ce
même fascicule contient de nobles revendications de la science française. Kst-clle
donc représentée de cette façon.' Et (juclles raisons de mettre en train pour cela
notre Imprimerie nationale?
titre de roi des quatre points du monde. Le roi raconte comment il a construit un
mur à Sippar. Un index des noms propres et un index des noms de dieux sont uue
.lulre concession aux lecteurs qui ne sont point spécialistes.
Noter dans le W'^ tome des Oxi/rliynchus papi/ri un texte fort inieressanl pour
l'histoire des religions. Le n" 1380, relativement loni:, puisqu'il coiUient i>!»s lignes,
plus ou moins bien conservées, date du commencement du second siècle. Il «ontienl
une invocation a la déesse Isis, qui vraisemblablement a ele composée au |)lus tard
au r"" siècle. L'auteur connaissait bien rEi;\|)te et était naturellement iullueucé par
• ertaines façons égyptiennes, mais était sûrement un Grec, initié aux mystères. Il
manque probableiiKMU peu de choses à l;i (io du papyrus, mais le début était peut-
être beaucoup plus long, racontant — si Von s"en rapporte à l'analogie avec un autre
papvrus (1381) — comment le fidèle a été amené îi composer ou à traduire son
(vuvre. Les premières lignes jusqu'à la ligne 119 indiquent les noms que portç
Isis dans les divers lieux où elle est adorée -, le reste est consacré à ses louanges,
c'est-à-dire à la mention de ses hauts faits, qui sont sm-toul des hieul'aits
pour le
genre humain. Le catalogue de ses vocables est très intéressant, mais on ne saurait
V voir une énumération de lieux consacrés au culte d'isis. Car l'auteur était per-
suadé que sa déesse est la seule et unique déesse, adorée partout quoique sous
d'autres noms. Il est donc bien évident qu'on ne peut conclure de son texte à l'exis-
tence très répandue des mystères d'isis, qui, d'après lui, serait honorée sous le nom
dliéra, Dictvnnis Ces identifications syncrétistes étaient déjà connues, mais
etc.
n'avaient pas été poussées aussi loin. Les éditeurs citent comme nouvelle la fusion
avec Artémis, Hélène, llestia, Leto, Maia, Praxidice et Thémis. A ces équivalents
on en ajouterait volontiers d'autres dissimulés sous la traduction grecque d'un mot
sémitique. Isis en Arabie se nomme grande, déesse iv t?; 'Apx6;a [xsyâXrjv, Oeûv :
(1. 76 s.). C'est dire quisis se nomme là Babbat, Allath, noms de la déesse sémi-
tique, qui n'étaient point hellénisés comme Atargatis (1). Les éditeurs rapprochent
l'Inscription de los (1.5-16) âyoî siat Osoç xaÀouuLÉvr], mais dans ce cas G^ciç
t) napà -^-yja'Xi-
ligne 107. et c'est encore eu pays sémitique h «l'o'v./.i S-jp^fa; dsôç, donc encore :
Allât II, ou plutôt Eldt qui était bien une divinité phénicienne (2). Ce n'est pas par
hasard que 630c se trouve deux fois en pays sémitique et pas ailleurs. D'ailleurs l'au-
teur était parfaitement au courant des centres de culte. Citons seulement pour les pays
sémitiques à partir de la côte d'Egypte 1. 93-101) : èv TstvoxopoûXoiç -avT6-[-iv ou
ravTo-opov ? ), donc : « à Rhlnocorure, Voyant tout » ;
h/ Awpot; çtXfav, « à Dor amitié» » ;
(Il Cf. une inscription néopunique (phén. 149) 011 les deux noms sont réunis ; D'IN'!? 713*1(1^
Éludes sii.7- les religions sémitiques, 2» éd., p. 73;. La même association eût pu se trouver en
Arabie, c'est-à-dire chez les Nabatéens.
'2; CI. note précédente.
;;{ Cependant il figure déjà i. 3!>.
292 REVLK IMBLIOIK.
mêmes personnes [biodore, i. 25). Malheureusement les textes (|ui regardent Osiris
sont assez lacuneux. De toute façon le deuil d'Isis ne devait pas être mentionné. On
lit qu'elle seule ayant bien tenu le gouvernail a ramené son frère Osiris, et
qu'elle lui a fait des funérailles convenables : au tÔv iZilzôv ao[j i-oi]'n,\'y]7.^E; aôvr;
/.j'ôiç/rl'jX'jT. -/.aÀfo; zai £Jap!j.ôjTw; Oâ!/aaa (II. 18G-1S9), et ensuite qu'elle lui a donné
l'immortalité (I. 242 s.) en assurant sa succession à Ilorus. L'action bieulaisante de
la déesse sexerce dans le domaine de la nature et dans celui des institutions; la
première elle a interprété « les quinze commandements ». qu'on voudrait bien con-
naître autrement que par cette allusion énigmatique. Bref elle est pour les hommes
la bienfaitrice par excellence, mais il n'est pas fnit allusion ;uix avantages de son
culte pour une autre vie. Peut-être ce point était-il réservé aux initiés.
Le papyrus 1381, aussi du ii<^ siècle, est consacre à la gloire du dieu éj^yptien
Imhotep assimilé à Asklépios- Le thème est plus foncièrement égyptien que le pré-
cédent. L'auteur racontait d'abord longuement par quelles séries de prodiges il
avait été amené un ouvrage égyptien trouvé dans un temple; le texte
à traduire
s'arrête au moment où commençait l'histoire des bienfaits du dieu et de son
culte.
il est entendu que le grand public ne s'intéresse qu'aux synthèses et aux décou-
vertes sensationnelles. Mais quelle satisfaction pour les hommes d'étude (juand ils
peuvent assister, pour ainsi dire, aux recherches et aux découvertes qui l'onl la
science au jour le jour! C'est l'intérêt qu'ils trouveront à la très belle publication
contenant tout ce qu'a laissé Paul Gauckler sur ses fouilles dans
la grande nécro-
pole punique de Carthage Rien n'a été épargné pour placer sous les yeux du
(1).
détails qui n'étaient pas relatifs au sujet. P. (iaucklor tenait son journal avec beau-
coup de précision, au jour le jour, sur des feuilles quadrillées, inscrivant à l'angle
droit le temps qu'il faisait, le surveillant, la paye des ouvriers, mais surtout notant
tout ce qui sortait de terre, avec des esquisses bien venues des monuments et des
objets qu'ils renfermaient. Plus d'un chercheur s'informera dans ces carnets de la
bonne méthode, moins fréquenle que ne se l'imaginent les non initiés à ces sortes
de travaux. Comme nous l'avons dit, tout ce matériel est relatif à la grande ni-cro-
pole de Carthage avec ses chantiers de Derinech. où les fouilles counneiicèrent en
189!i, de rodeon et de Dhar-Morali. Les planches 1 et I'"" fournissent deux plans
a^t•( une A>/ivm: Deuxième parlio. i-liides iliNeise.s, l'ari.s, l'iciird. HH.'i. I,es
iiilrodiirtion |>ar 0.
d«.'U\ paitie.t sont reparties en dun^i miIiiiiich aNec une seule nuiiiiTiitalimi des paKos (XLiii-<i03)
et des plaiH'Ilcs (CCCM. Sur une piililn atioii anl<'re<leiile des lra\au\ de P. Cauekier au Jani-
.
fouilles le seeret de leur interprétation. Aussi les articles reproduits sont-ils relatifs
à d';uitres découvertes, et notomnient aux objets conservés dans les Musées de Cons-
tantine et de Cliercholl.
D'après tous ces travaux il avait esquissé l'histoire de la nécropole punique, sim-
ple plan que la main amie de M. D. Anziani a développé dans une introduction
magistrale. On y suit toute l'histoire des abris préparés pour les morts à Carthage,
depuis le vtii'" siècle jusqu'à la ruine de la ville.
Ce ne sont d'abord que des fosses sans murs et sans dalles, sans puits d'accès. J^e
mobilier consiste en poteries locales. Point de mobilier rituel, dit M. Anziani. « Les
seules amulettes sont des masques grimaçants en terre cuite, destinés apparemment
à épouvanter les violateurs » (p. wiii . Mais pourquoi violer des tombes qu'on ne
songeait pas à dissimuler parce qu'elles ne contenaient rien de précieux? Ne fallait-il
pas plutôt mettre en fuite les démons qui auraient essayé de troubler le repos du
mort.^ C'est vers la lin du vii'^' siècle que la tombe |)unique prend son type classique :
la chambre funéraire est pourvue d'un puits d'accès à section rectanguUiire, parfois
assez profond. Pourquoi ce changement? M. Anziani ne se pose pas la question. Ne
serait-ce pas la preuve à Carthage d'une recrudescence d'esprit sémitique? car on
sait que ces puits sont la caractéristique de l'ancienne tombe phénicienne. Quelle
déception pour tel des explorateurs de la nécropole sidonienne que nous avons vu
arriver au fond d'un puits de plus de trente mètres sans rien trouver ! Désormais,
ajoute M. Anziani, « le mobilier rituel est fixé : il comprend la lampe sur sa patère,
deux jarres ou amphores, deux œnochoés » (p. xxi). En quoi ce mobilier est-il plus
rituel que le précédent, c'est ce qu'on ne s'explique guère. Non plus que cette
réflexion sur les fosses du iv siècle, qu' « elles ne contiennent plus de mobilier
rituel » (p. XXXI Au iir' siècle commence l'incinération, les tombes deviennent
.
P.ien n'est plus célèbre que la prodigieuse richesse de Carthage, et Flaubert préten-
dait que les trésors éblouissants d'Hamilcar avaient été décrits d'après les sources
les plus dignes de foi. Voici maintenant ce qui ressort de l'examen, par centaines,
des tombes les plus riches Cette exagération n'est pas seulement imputable à la
: «
fantaisie des auieurs anciens. Elle s'explique dans une bonne mesure par l'isolement
dans lequel le monde punique s'est enfermé. Avant l'époque hellénique, l'importa-
tion grecque à Carthage est presque nulle; et même dans les derniers temps, elle se
limite à des produits de second ordre... Les objets d'origine grecque qu'on a trouvés
dans leurs tombeaux n'ont aucun caractère artistique... Cette ignorance de l'hellé-
nisme n'était pas compensée par de larges emprunts aux civilisations orientales. Les
artistes de Carthage — si tant est qu'il y eût à Carthage autre chose que des arti-
sans — se sont contentés de reproduire sans cesse les mêmes modèles de bagues,
de pendants d'oreille, de scarabées, d'amulettes empruntées à
mythologie égyp- la
tienne ou syrienne. Presque tous ces modèles étaient connus dès les premiers temps
de Carthage, et c'est bien un des traits caractéristiques du génie punique, que de
n'avoir jamais senti le besoin de la nouveauté » (p. xl s.).
Par ce traitdominant, par beaucoup de détails, Carthage resta fidèle au génie sémi-
tique; c'est l'intérêt de la nécropole punique pour ceux qui étudient l'Orient ancien.
(• Il n'a donc pas résulté de la transformation des types primitifs. Peut-être même
existait-il en même temps que l'Koanthrope et le Pithécanthrope. En tout cas, il ne
sort pas de ces types inférieurs et brutaux, et il se présente constitué de toutes pièces
à l'époque où existaient ces types (jui, du reste, ont disparu, ont été éliminés.
L'homme moderne européen n'a nullement ces formes pour ancêtres.
« A quelle époque cette espèce Ot-elle son apparition? ^'ous la connaissons au Pléis-
tocène •
mais peut-être la connaîtrons-nous aussi à une époque plus reculée. De
nouvelles recherches nous renseigneront. Ce qu'il faut retenir, c'est le changement
d'orientation considérable qui s'est produit dans la façon d'envisager les rapports
entre races humaines et pseudo-humaines.
« M. Iveith résume graphiijuement dans un tableau géologique ou d'une souche
les
cène, le type Ileidelberg Néanderthal qui sid)siste pendant une partie de celte
période, et enfinla souche commune d'où sortent l'Européen, le Mongolien. l'Aus-
tralien et Le Pithécanthrope, lui, sortirait d'une souche hmnanoïde
l'Africain.
Les .luifs Yéménites, étrangers à toute culture moderne, isolés même des Arabes
dans une contrée séparée du monde, n'ayant pour aliment religieux et intellectuel
que la Bible hébraïque, sont demeurés plus fidèles que d'autres à ce qu'on a nommé
les deux pôles de la religion juive, le légalisme se tournant en casiùslique. les espé-
rances messianiques les plus déconcertantes. Leiu' situation est dépeinte d'une façon
qui paraît impartiale, malgré l'ardente sympathie de l'auteur pour ses frères, d;ius le
récit dime mission de IMiiance israélite universelle au léraen. par M. "^ oml«»b
Sémacli (1,.
Le but d(; cette en(|uete était de préparer l'installation d'écoles Israélites destinées
.1 améliorer h; sort de cette populatiou, 1res misérable, mais qui se maintient obsti-
l\i In H <lc 1-22 pp.. Pari», Sicifc de la société, i!», nie de l.i ltru>tTe. l.v vovukc a en liiMi dans
l'IliVtT de l!t|0.
I5LLLET1N. 29-)
nément par l'attachement à sa Loi reliiïieuse. Ces pauvres j^ens. miséreux, méprisés,
maltraités, insoucieux de tout ce qui intéresse l'homme moderne, et même leurs
voisins, se passionnent pour des <'as de pureté ou d'impureté lé^nle avec autant de
subtilité que les disciples de lliilel ou de Schammaï. Voici un exemple cité par
-M. Sémacii. On est un samedi dans la synagogue, où la commencé dès
lecture a
deux heures du matin : « une question à poser;
INIoré. j'ai ma lemme en cuisinant
hier a mis par mégarde la marmite à soupe dans une
cuiller qu'elle retirait de la
terrine de maign' et, s'en apercevant, elle replongea machinalement la cuiller dans
la soupe; que fallait-il faire? » Tous ceux qui sommeillaient se redressent, les
contenait est toujours kascher, la deuxième marmite ne peut servir ni pour le gras
ni pour ie mrngre, on peut y garder des légumes secs » (p. 60). Béni soit ce maître
tolérant, qui épargne la vaisselle, mais béni soit surtout l'apôtre saint Paul!
Voici maintenant pour le messianisme, qu'on est bien un peu surpris de trouver si
vivant dans ces ghettos formalistes : < Il est impossi!)le de dresser la liste, même
approximative, de tous ceux qui se sont fait passer pour les envoyés de Dieu, depuis
ce rabbin qui, au xii® siècle, demandait à ses ouailles de se convertir à l'islamisme
sous prétexte que la Bible prédisait Mahomet, jusqu'à Joseph Abdallah, mort il y a
quelques années à Chibam et qui avait adopté comme cri de ralliement de ses parti-
sans le braiment de l'âne. Cependant Chukri Cohaif, qui a révolutionné le Yémen il
y a seulement quarante-trois ans. est une ligure curieuse. C'était un ouvrier cor-
royeur; il connaissait bien la Loi et portait le titre de More; on l'aimait pour son
honnêteté, sa piété. Zohar et s'occupait de cabbale. Un matin,
Il lisait assidûment le
(1) Fifty years' IVorA- in Ihe Holy Land, a rccrd and a summary, 186;>-l!>i:i. 8" de 100 pp.
avec une caite. Pul)lié par le comité, -2, Hinde SIreet. I.ondon W., lOl.i.
29G REVUE BIULIQL'E.
connaissance des travaux au jour le jour. Nous rappelons une lois de plus avec
quelle bonne grâce et quelle ouverture sympathique M.M. lîliss, iMacalister, .Macken-
zie ont reçu dans leurs chantiers les professeurs et les élèves de l'école biblique.
La dernière campagne de fouilles lut celle de Ain Chems. Avec elle la société inau-
P.E. Fioid, Quart. >'^y/.. juillet 1910. — Notes et nouvelles. — liéunion annuelle
plus importante que d'ordinaire à cause du jubilé de la société. — Éfji/pte et Pales-
tine, par le Colonel Watson. L'auteur dégage de toute l'histoire ce lait si important à
considérer aujourd'hui que le désert qui sépare l'Egypte de la Palestine n'a jamais
:
été un sérieux obstacle pour une année bien équipée et bien conduite, dans l'une ou
l'autre direction. —
/.es Piipi/ru-< d'Elrpluintinc, comme illustration de IW. T., par
M. J. Ollord. L'auteur pense, comme M. van Hoonacker, qu'un bon nombre des
colons d'Eléphantioe étaient Samaritains. Dans le fait que le Pentateuque ne date
jamais d'après les mois babyloniens, il voit une preuve qu'il était écrit avant la
captivité. — INouvelle note de Î\L Trumper sur la route de l'Exode.
Octobre 1915. — Notes et nouvelles. — Suite de l'Orient immuable, de
M. Philippe Haldensperger : habits et modes. — Notes de circonstance sur habi- les
le «icle du sanctuaire était le double, soit un stater d'Egine. Note sur — les graffites
de la citerne du ouady el-Djoz (suite), par 1\L Max van Berchem. Le très docte
épigraphiste n'ose rien affirmer sur la date de ces graffites. Peut-être dès les pre-
miers temps de la conquête musulmane (c'est bien haut!), peut-être durant les
croisades. Les inscriptions ontun caractère religieux populaire qui se rattache sûre-
ment à l'Islam, mais sans aucune influence érudite du Coran. Dieu y est considéré
comme un ami puissant, auquel on désire plaire. Notes àrchi'ologi'jucs, par —
J. OlTord. Une nouvelle tombe à inscriptions a été découverte près de Beit-Djebria
Est-ce parce que la section orientale de l'Université de Columbia publie des his-
toires, comme l'histoire de Sidon, de Gaza et de Tyr 1).que les recherches de
(1 Cf.. RB., HI15 p. 5!»S.
-298 REVUE BIBLIQUE.
nom de Kaphat Dor qui se trouve dans l'Ecriture dos. 11, 2; 1 Reg. 4, 11). 11 fau-
drait l'appliquer à une hauteur voisine de la ville, probablement transformée en for-
teresse. Quant à rénigmati(iue PZ:~ T^'ù'-'XL' de Jos. 17, 11. M. Dabi y voit une
glose qui aurait pénétré dans le texte. Sa ionne première était np: nnuSïJ, et le
glossateur voulait dire, en marge du texte, que la Iroiaicmc ville de la liste, qui était
Dor, devait être entendue de Naphat Dor. Ëzéchiel (21, 19) fournirait un cas tout à
aurait mérité plus d'égards; n'ayant point dissimulé léchée des tribus, elle n'est
pas suspecte de partialité quand elle avance un fait précis pour le règne de Salo-
mon(I Reg. 4, 11).
(l> The Maleriiils for Ihc llislory of Dor, hy George Uaiii.. Pli. D. Assistant Professor of old
Testament Liierature, School of lleligion, Vale University, in-8" de 131 pp., New Haven, Connec-
ticut, l'Ji:;.
[i] .M. Dalil ignorc-til que le rapport de Macri<ly-I'.ey a eié pul)lio dans la RcMue hiblique"
abolir la Loi ou les prophètes je ne suis pas venu abolir, mais accom-
;
Li;S IMHirMEXTS.
noutre qu'on lisait avec soin ce que l'on possédait d'Amos, d'Osée,
i'isaïe, de Michée, d'autres encore. Que s'il faut se borner dans le
cer et qui de fait ont exercé sur rame juive l'action la plus efficace.
1° Jêrêmie (1).
'1) Noire l)ut n'est |tas dt'ludier cliacun de cns livres ni de disciilor les questions qui sy
riiUaciienl. Il s'a^iit plulol ilc voir (juel usage on en |teul faire, vu l'elal actuel des (fucs-
(1) Les procédés en question avaient été déjà employés aux époques précédentes; mais
ils allaient devenir une méthode dun usage constant et régulier.
(2) Cf. II Reg., xvii, 6.
(3) Cf. II Reg., XVII, 24.
(4) Bien qu'il s'agisse d'une tout autre époque, les dénonciations dont furent victimes les
Juifs qui voulaient rebâtir leur temple et leur capitale après l'exil sont instructives à cet
égard: cf. Esdr., iv, 4-5, 6-24; v, 3-17; ^'eh., vi, 5-7.
304 REVUE BIBLIQUE.
qu'il s't'tait choisi, (jue, sans ('gard pour ses privilèges, il le châtie-
rait avec la même
rigueur que les autres Dations pour les infractions
aux lois fondameutales de la morale, lorsqu'enfin il laissait entre-
voir la ruine d'Israël, Amos n'établissait aucune distinction entre
groupe et groupe des enfants de Jacob. Le jour par consé(iuent où
les prophètes de Juda, héritiers de ces enseignements, constateraient
autour d'eux la présence dos mômes désordres que dans la nation
sœur, le jour surtout où ils auraient à proclamer .lérnsalcm plu?
coupable que Samarie, toute hésitation devrait disparaître, celle-l;t
ment tie la menace de l'exil pour reculer jusque vers 580, sinon
au delà, les documents dans lesquels elle s'exprime avec clarté.
Lors de la ruine de Ninive, le royaume de Juda était, nominale-
que traiter avec égards un petit peuple qui s'était tenu à Tccart de
toutes les machinations dirigées contre leur autorité. Et puis il serait
toujours temps de savoir quel accueil taire à leurs exig-ences si, un
jour ou lantre, ne savaient gré de la réserve observée. Les pro-
ils
phètes fout nirent toujours à ce parti son appui le plus précieux. Non
qu'ils prissent directement intérêt aux choses de la politique. Mais
c'était la position qui répondait le mieux à leurs convictions religieu-
ses. A leurs yeux, en eti'et, se mêler aux intrigues des cours, c'était
témoigner de la défiance à Yahweh dont la seule protection suffisait
t\préserver son peuple 1 C'était en outre mettre en péril la pureté
'
).
rendre quelque hommage à leurs dieux (2;? Les idées du temps ne suppo-
saient-elles pas que tout ce qui se passait sur la terre, alliances, rup-
tures, guerres, avait sa contrepartie ou son prototype dans les cieux,
entre les divinités protectrices des diverses nations? Et ces idées n'en-
I raînaient-elles pas des conséquences pratiques incompatibles avec les
exigences d'un monothéisme nécessairement intransigeant? Aussi le
imposa silence à ces derniers. Il put suivre dès lors, sans entendre la
moin(h'e protestation, les vues de ses politiciens. D'ordinaire elles
furent on ne peut plus favorables aux Assyriens. Tne fois pourtant un
mouvement contraire semble avoir prévalu. C'est sans doute, en effet,
aune révolte contre Assarhaddon ou au moins à un refus de payer le
tribut que se rattache celte captivité dont le livre des Chroniques est
d'ailleurs seul à parler (2).
Quoi qu'il en soit, les monarques de Ninive ne manquaient pas de
maintenir leurs prétentions à la suzeraineté sur l'Asie antérieure et la
(1) Is., I, 1-17; X, 5-34; xiv. 24-27: x\ii, 1-14: xxxvi-xxxvii (cf. II Reg., xvin-xix;
II Chron., xxxii, 1-23).
(2) II Chron., xxxiii, 11-13.
^ {3) Nah., i-iii.
considérant comme
indépendant, avait soumis à son autorité une part
au moins de cet ancien royaume du Nord sur lequel personne n'était
en mesure de l'aire valoir des droits? L'Assyrie avait laissé faire, cou-
vrant peut-être son impuissance du voile de la bienveillance. Dès lors
n'est-il pas à penser que, voyant arriver l'Égyptien, le roi ait voulu
défendre une autonomie qu'il prétendait garder pour lui et pour ses
successeurs? En tout cas, nous n'avons aucune indication touchant les
sentiments des pro[)hètes au sujet de cette démarche.
pu aboutir que par un miracle. Le miracle ne se
Elle n'aurait
produisit pas. Josias fut défait; grièvement l)lessé, il succomba à
Jérusalem au milieu des lamentations unanimes (1), A partir de sa
mort, les événements se préci[)itèront. Tout d'abord, le « peuple
du pays », c'est-à-dire probablement de la campagne, donna un
successeur au défunt. Le fils aîné n'offrait pas les garanties voulues
au parti national et prophétique; comme la suite le montrera, il
était porté à prêter l'oreille à l'Egypte et aux étrangers. On lui pré-
féra le cadet, Sallum-Joachaz.(2), D'après le livre des Kois, on eut à
regretter la faveur témoignée à ce dernier (3) peut-être se crut-il ;
''
Il Re«., \xiii, 32.
L'AME JUIVE AU TEMPS DES PERSES. 309
(3) II Reg., xxjii, 37; xxiv, 3, 4; II Cliron., \xxvi, 5''; Jer., \v, 't.
lia avec des chaînes dairain pour le faire aller à Babylone'». On a généralement com-
révolta de nouveau ^^ ("i ici" 211* il), dit le texte des Rois (2), qui pour-
tant n'a pas mentionné la première révolte. Il ne semble pas qu'il
ait attendu l'occasion favorable d'un soulèvement général. Lorsqu'on
effet Nabuchodonosor, sans doute occupé par ailleurs, se borna
d'abord à envoyer contre Jérusalem des bandes de Chaldéens,
celles-ci trouvèrent un appui précieux chez les Syriens, les Moabites,
les Ammonites (3), c'est-à-dire chpz les voisins de Juda, On ne sait
au juste à quel résultat précis ce premier acte de répression put
aboutir. Bientôt le monarque chaldéen partit lui-môme pour l'Oc-
cident. Lors de son arrivée en Palestine, .loakim était mort, en des
circonstances qui ne sont pas autrement connues, mais qui n'eurent
rien de glorieux (ii. Depuis trois mois, son fils Joacliin, dont le nom
est plus connu sous la forme de Jéchonias, était roi de .Jérusalem (5).
On ne sait pas au juste quelle fut la durée du siège de la capitale.
Il ne pouvait manquer d'aboutir au triomphe de Nabuchodonosor :
'A) Il Hcf;., wiv, lij-' : « Et Joacliiin lui (a Nabuchodonosor) fui serviteur (esclave?
'éb^'itd}') trois ans. » On place celle soumission iiiiintMlialement avant la révolle dont il
est [lariô inunédialeinent après. Klainrolh (o/j. cil.) idcnlilicrait volonliers les trois ans
dtirant lesfpiels .loacbiin fui "^^V. esclave, du roi de Babylone avec la durée de l'exil
('i, Sur celte inlerprélalion «le .1er., \\i\, l, :;. r{, Er'uU ki.AMiiorii. op. cit., p. 12-18.
Ce «rilique, il cA vrai, jilace wlle déporlalien en .V.»."ï-.'»94. Il in\nqiie à ee sujet des
données <lironolo^i<[ues du livre <l Kzécliiel sur leM|ii<'|les nou> aurons à revenir.
(4, Kz.. wii. 7, K.
(0) Cf. au sujet de Tyr, Ez., wvi-wvm et \\i\, 17-21; au sujet «lAinnion, Ez.. \\i,
33-:J7.
LAME JUIVE AU TEMPS DES PERSES. 3i:i
sur Hibla : tous ceux qui la composaient furent mis à mort (1).
Jérusalem s'était montrée aussi obstinée dans ses insubordinations
que l'avait été jadis Samarie, Mais Nabuchodonosor ignorait les pro-
cédés brutaux de Sargon. Sans doute il se montrait impitoyable
envers les chefs de la révolte quand ceux-ci avaient poussé à bout sa
patience. Sans doute encore il usait du procédé des déportations. Mais
il n'allait pas jusqu'à épuiser le pays. Après que tant de groupes de
prisonniers avaient été tirés de .luda, il restait encore assez d'habi-
tants pour qu'on ne jugeât pas utile d'introduire des colons étrangers,
])Our qu'une nouvelle déportation fût possible cinq ans plus tard en des
circonstances que nous dirons plus loin (2). Il en restait assez pour
que le roi de Babylone songeât à leur abandonner la culture du pays
sous la conduite d'un chef de leur race, Godolias, fils d'Aliicam (3).
(1) Il IW-A-. xw. fS-21 cf. M Cliroii., xwM, I7.i1); .)er., \\xi\, 3, S. '.»
; m, V.>.-.>.:>, 17-27.
(3; Il Rog.. XXV, 12, 22: Jer.. \\\\x, lO; m., 5; mi, Kl.
(4) II Reg., XXV, 22-24; Jer., xr,, 7-12.
(1) Jer., I, 1.
dans la suite (1). Il lui fallut reparaître sur la scène dès le commence-
ment de la période tragique qui devait aboutir à la grande catastro-
phe. Combien il eût préféré demeurer tranquille en son humble
demeure! Combien il lui en coûtait de braver les injures, les sobri-
quets, les attentats mêmes auxquels il allait se voir en butte (2) ! Mais
quand il voulait se taire, il y avait comme un feu dévorant en ses os ;
il
(2) Jer., XI, 18-XlI, (i; .wiii, 18-23; XX, 1-3, 10; XWI, 7-11 ; XXXVII, 10-20; XXXVIII, 1-13, 28.
(3) Jer., XX, 7-9.
(4) La plus grande |iarlic des oracles de Jérémie se rai>porlent À ces deux rè;;nes, sans
qu'à propos d'un cerlain iiuinbro d'entre eux, on puisse indii|iier la date avec précision.
(5) Jer., XXI, xxxii-wxiii (|ieul-élrc xxx-xxm, au moins en partie); xxxiv, xxx\ii-xi,.
(«) Jer., XLi-xLiv.
(7J Jer., XXIX; u, 59-G4.
i;.VME JUIVE AU TEMPS DES PERSES. 317
•
se trouvait maintenant.
Ce livre ne contenait, à ce qu'il semble, que des discours, suscep-
tibles à la vérité d'être accompagnés de quelques indications tou-
chant les circonstances dans lesquelles ils avaient été proférés. Sous
sa forme propre, il n'eut qu'une existence des plus éphémères.
Pendant que Baruch le lisait au temple, Michéc, lils de Ccmariah,
informa les chefs qui désirèrent en avoir connaissance; Baruch alla
le leur lire. A leur tour ils en parlèrent au roi qui, lui aussi, voulut
se le faire ai)porter. l/inq)ression fut mauvaise. Joachim saisit le
rouleau, le déchira et en jeta les morceaux au feu. Il ordonna ensuite
qu'on mît la main sur Jérémie et son secrétaire; mais Yahweh les
cacha (k). Bientôt après même (au cours de 602), il ordonna au pro-
l»hcte de prendre un nouveau volume et « d'y écrire tuulcs les prc-
mièrcs paroles qui étaient dans le premier volume, que Joachim, roi
de Juda, a brûlé « (1). Ce qui fut fait. Obscrvons-le toutefois. Sur le
premier rouleau, Jcrémie avait déjà reçu l'ordre d'écrire toutes les
paroles qu'il avait entendues depuis Josias; sur le deuxième rouleau,
le prophète devait écrire toutes les premières paroles. Il semble donc
que le deuxième volume dût être d'abord de tout point semblable
au premier. Or il n'en est rien, et c'est l'auteur sacré qui nous en
informe Jérémie prit donc un autre volume et le donna à Baruch,
: ((
Jérémie, toutes les paroles du livre que Joachim, roi de Juda, avait
brûlé, et beaucoup d'autres paroles pareilles à celles-là y furent
ajoutées » que cette indication peut s'appliquer
(2). Il est évident
aux oracles postérieurs à 602 et qui vinrent dans la suite grossir
le recueil prophétique. Mais elles ont une autre portée qui est pri-
mitive : elles veulent dire que la seconde édition des discours pro-
noncés avant la quatrième année de Joachim fut plus développée que
la première. D'où il appert que, dès l'origine, le contenu du livre
prophétique apparaît comme
dilatable. Et cela se comprend sans
peine dès qu'il non d'une reproduction littérale des oracles,
s'agit,
même les ait contrôlées; rien n'empêche en soi que, même après la
mort du prophète, ces éditions reçoivent des compléments faits de
matériaux provenant du voyant et jusque-là négligés. Il suffira,
pour que l'une de ces éditions ou même toutes les deux prennent
place au canon, que le concours de l'inspiration ait assuré cette
exactitude et cette intégrité générales qui n'excluent pas les diver-
gences de détail. Nous verrons bientôt toute l'opportunité de cette
considération.
La plupart des critiques sont d'avis que le contenu du second rou-
leau constitue le noyau de notre livre actuel. Malheureusement les
fl) Lclirhuc/i dcr Einlcilnng in fins Altr TrstniiiciU mil eincin Atiliang nher dir Apti-
hrijplien und l'scudepigraphcn, Altschnitl II, hie Pvophclen, Kapile! ii, Ihis lluch. Jc-
rcmifi, surtout p. U'iO-Ui'l, .%(l'i 507.
(2) Il est A propos de noifr (|u'.'i ret éHard l'acrord n'est pas conslan! entre le texte
massor<^liquc et les Septante et (|ue, pour dresser des listes complètes, étude critique des
1
qui figurait sur le premier rouleau. Pour être encore délicate, Topé-
ration est néanmoins plus facile. Voici la liste de iM. Steucrnagel Jer., :
i; II, m, 1-13, 10-25; iv, 1-ix, 21; x, 17-22 ; xi; xii, 1-13; xiii, 1-17,
20-27; xiv; xv, 1-6, 10-21; xvii, 12-18; xviii; xix, 1, 2% 10, 11%
12" (?); XX, 7-18; xxi, U-U; xxii, 1-23; xxv; xlm, 1-12; peut-être
XVI, 1-13, 16-17; xvn, 9-10; xxiii, 9-VO; xxxi, 2-9, 15-22; xLvn;
XLVin*i XLix, 1-22*, 28-33 (1). La liste de Driver (2) est un peu plus
courte : Jer., i, 1-2, '^-19; ii-vi; vu, 1-ix, 26; x, 17-25; xi, 1-8; xi,
9-xii, 6; XXI, 11-xxii, 19; xxv; xlvi, 1-xlix, 33; peut-être xiv-xvii,
xviii-xx. Il est possible néanmoins de parler d'un accord général (3).
Comme le livre de Jérémie demeurait ouvert et susceptible de
recevoir de nouveaux accroissements, on put y ajouter, et môme sous
la dictée du prophète, les oracles que celui-ci prononça depuis l'an-
59-64".
Nous sommes loin d'avoir signalé toutes les particularités du livre
de Jérémie. C'en est encore une très saillante que la présence de
récits historiques plus nombreux qu'en tout aptre écrit prophétique.
Plusieurs voyants nous ont conservé l'histoire de leur vocation, ainsi
que l'a fait Jérémie lui-même; tels Osée, Isaïe, Ézéchiel (5). Plusieurs
de leurs livres consacrent par une narration plus détaillée les épisodes
les plus saillants de leur ministère (6). Mais nulle part on ne trouve
autant de textes historiques que dans l'ouvrage qui nous occupe. Le
plus souvent sans doute les récits servent de cadre à uq oracle du
(5) Cf. Jer., i; Os., I-, Is., vi; Ez., i, 1-ni, 11.
voyant (1); mais le discours est loin parfois d'occuper la part la plus
étendue de la péricope. Il arrive même, comme dans le chapitic
final, que le nom de Jérémie soit absent de la section; il s'agit seu-
(1^ .Irr., I; xiri, 1-h; \\i, l-l"; \\i\, 1-i; \\\, l-2'.t; xx\il, 1-lC; elc.
ver est plus réserve, sans donner des raisons qui forcent à le suivre.
11 met tout à fait à part les récits qui concernent la période posté-
rieure à 586 : xxxix,3, 14; xl-xliv. Leur insertion
xxxviii, 28'';
sion des Septante. Elles sont plus nombreuses sans doute, sinon plus
importantes, que pour n'importe quel autre livre. On peut négliger
les quelque cent mots que le grec atteste et que le texte massoré-
tique ignore; ce sont des éléments sans portée au point de vue
critique. Il en va tout autrement des parties qui ne fig-urent que dans
le texte massorétique. 11 ne s'agit plus seulement de mots, mais de
parties de versets, de versets entiers, de passages plus ou moins éten-
dus; en les additionnant on n'aboutirait pas à "moins de deux mille
sept cents mots, soit en^^ron à la huitième partie du texte. Signalons
un peu au hasard: viii, 10*"-12; x, 6-8, 10; xi, 7, 8*; xvii, 1-5"";
xxiii, 7, 8; XXIX, 16-20; xxxiii, lV-26; xxxix, 4-13; li, ii^-iO^; etc.
Il peut se faire qu'un certain nombre de ces divergences soient à
expliquer par des omissions dues à l'incurie du traducteur. Mais, pour
la plupart, elles remontent à l'original qu'il avait sous la main à
Alexandrie nous en avons pour garant ce que nous pouvons consta-
;
même (1).
H existe entre les deux textes une autre difFérence; elle ne concerne
que D'abord l'ordre des prophéties
les oracles contre les nations.
dans elle-même est variable. Dans le texte massorétique,
la collection
il est successivement question de l'Egypte, de la Philistie, de Moab,
bre admet, avecKuenen(3), que les oracles contre los nations venaient
d'abord après le chap. xxv tout entier, inutile d'énumérer les raisons
que l'on peut faire valoir en un sens et en l'autre. Remarquons même
que, d'après M. Steuernagel, l'opinion inverse pourrait invoquer des
motifs tout aussi solides. A ses yeux, il est probable que les oracles
contre les nations constituaient une collection priiuitivoment indé-
pendante ; des considérations diverses lui auront fait attribuer une
place diirérente lorsqu'elle a été insérée dans les deux recensions du
livre de Jérémie.
Les différences que nous avons constatées entre le texte massoré-
tique et le grec dépassent, en efTet, l'ensemble des variations que
peut comporter la transmission textuelle d'un même éciit. Il faut ici
(1) Cf. V. g. Jcr., VI, 22-2i et i., 41-43; x, 12-10 et i,i, 1.5-1!»; \xiii. H», 20 cl xx\, 23,
2i; ctr,.
(2) Kedcn des Ruches Jrremia gegcn die llriden (xxv, xi.vi-ii), dans Zeilschrifl
Die.
même, les chap. xxxv et xxxvi, datés du temps de Joachim, sont placés
entre deux chapitres concernant le règne de Sédécias. Un tel chaos ne
saurait exister dans un ouvrage rédigé tout d'un trait, et il ne saurait
être mis au compte de Baruch. L'explication est à chercher ailleurs.
Le livre de Jérémie édité par Baruch a été fréquemment copié, soit
pendant l'exil, soit au cours de la période qui a suivi la captivité. Il
a été copié à la façon des livres antiques, c'est-à-dire avec une assez
grande liberté.Souvent aussi on n'en a reproduit qu'une partie, en
se laissant guider par un but particulier, et il est arrivé que des
recueils partiels renfermaient, à côté des sections qui leur étaient pro-
pres, des péricopes communes. La juxtaposition de ces petits livrets
explique à la fois les doublets et les anomalies de l'ordre adopté. La
liberté avec laquelle on copiait explique les surcharges que peut
renfermer un texte comparé à l'autre. Peu à peu l'uniformité a été
établie entre les diverses recensions. Le texte qui est à la base des
Septante marque une étape dans ce sens Adopté à Alexan-
(m*' siècle).
1, 10-14, 29, 30, 38-40; xlvi, 27, 28 = xxx, 10, 11); compléments
ayant un intérêt cultuel (xvii, 19-27; xxxviii, 18-22; cf. xxxi, 14);
compléments au caractère liturgique (xx, 13 xxxiii, 2, 3, 11"?; cf. x, ;
2° Les Lamentations.
[)leurant; il rem-
proféra cette lamentation sur Jérusalem et, l'/ime
plied'amertume, soupirant et gémissant, il dit... » Môme la version
hiéroiiymienne n'est pas la première à s'cxprimor en ce sens. La petite
préface se retrouve en termes identiques ou simplement équivalents
fl) II fonviiMidrail jiarlicuIiiTPincnt <h' faire «les rési'rves sur li^ jujçeincn! porté an sujet
des passages inc.ssiani<iucs 'HH' lOn Irailo < omino compléiiu-nlnires.
L'AME;JUIVE au temps des PEIiSES. 32-
petit volume suit le livre de Jércmie, tout comme dans notre Vul-
gate. Il ne faut donc pas être surpris si les Pères de TEglise, toutes
les fois qu'ils ont Toccasion de s'exprimer à ce sujet, attribuent les
Lamentations au fils d'IIelcias. Le ïalmud témoig^ne dans le même
sens, puisqu'on lit au traité Baba BatJira, 15' « Jérémie écrivit son :
(1) En réalité, cette introduction ne paraît pas primitive dans la Vulgate hiéronymienne.
Elle ne figure pas dans les anciens témoins et c'est de la Vieille Vulgate que, selon toute
probabilité, elle a été introduite dans la nôtre. Le grec porte : Kal i^hzio [istà tô al^fia-
Xw-icfô^vat Tov 'lorpariX y.at 'l£po'j(ja),r,!x £pYi[jiw6rivai ÈxdtÔt'Jcv 'Uçt\s.ia:, xAaiwv, xai £6pvîvy)(7£v
Tov ôpfivov ToùTov £7ti 'l£pou(>a),f|(ji xal £Î7i£v. — Lc Targum porte une indication plus simple :
Dit Jérémie le prophète et grand prêtre. Le syriaque n'a aucune noie de ce genre.
(2) Gprjvot B*A, Opîjvoi 'Icpe^i'ou B'' KQT (Ispe^..), d'après Swetë. — Le Targum n'a pas
de litre distinct de la petite introduction. Dans le syriaque on a pJu tXio'»)i oik-o;:o/
cf. II, ir, 18b; iii_ 48, 49) et Jer., ix, 1, 18''; xni, 17'"; xiv, 17; — Lam., ii, 11 (la brèche
de la fille de mon peuple; cf. m, 48; iv, 10 et aussi ii, 13; ni, 47) et Jer., vi, 14; viii. II,
21, etc.; — Lam., n, 14; iv, 13 (fautes des prophètes et des prêtres) et Jer., ii, 8; v, 31 ;
xiv. 13 sv., etc.; — Lam., ii, 20 (femmes mangeant la chair de leurs enfants; cf. iv, 10)
et Jer., xix, 9; — Lam., ii, 22 (terreurs tout autour) et Jer., vi, 25; xx, 4; — Lam., m, 14
(je suis devenu une dérision) et Jer., xx, 7; — Lam., m, 15, 19 (absinthe et fiel) et Jer., ix, 15;
sxiii, 15; —
Lam., m, 47 (crainte et piège) et Jer., xlviii, 43; — m, 52 (ils m'ont chassé) et
Jer., XVI, le*"; —IV, 21'' (la coupe) et Jer., xxv, 15;xlix, 12; — Lain., v, 16 et Jer., xin, IS"*
8 ; V, 31 xiv, 13, etc. Confiance dans les alliés, Lam., i, 2, 19; iv, 17 et Jer.,
;
ii, 18, 36;
eflet, le livre des Lamentations tient une grande place dans la litur-
(1) Cf. toutefois los liilrodnctinns des aulcurs catlioli<|iies, notninincnt Uud. CoitNKr.>,S. J..
tlislorica cl crilica Introdiiclio in /'. 7'. I.ibros Sacros. II, 2, Jnlroducliu spicialis in
didacticos cl prophelicos \clcris Tcstamcnli Libros, \k 402-411.
simple : nulle part, en ell'et, dans nos Lamentations il n'est fait men-
tion de Josias. Kaut-il, dès lors, regaider les deu.\ recueils comme
absolument étrangers l'un à absolument indépendants l'un de
l'autre,
l'autre? On a peine à s'imaginer qu'un livre revêtu d'un caractère
officiel vers l'an 300 ait disparu sans laisser de traces. Aussi est-on
une preuve que la plus ancienne tradition juive ignorait que ces élé-
gies proviennent de Jérémie? Une autre observation produit une im-
pression analogue. Tandis que le grand livre du fils d'Helcias figure
parmi les « Prophètes », le petit recueil est rejeté dans la section des
i^iriD: la chose est d'autant plus frappante que le grand livre groupe
des éléments très disparates et que, de ce chef, il était plus apte que
beaucoup d'autres à recevoir ces poèmes, au moins à titre de supplé-
ment et d'appendice, sien les avait tenus comme émanant de Jérémie.
On ne saurait donc être surpris de voir les critiques chercher dans
le texte même les bases de leurs conclusions. Ils se demandent par
330 REVUE BIBLIQUE.
exemple si un auteur dont le style, autant qu'on peut juger par les
oracles les plus universellement tenus pour authentiques, suit les
impulsions d'une nature très priniesautière, aurait pu s'astreindre à
des règles poétiques aussi artilicielles que celles de l'alphabétisme.
Us relèvent comme plus caractéristiques que les ressemblances géné-
rales, les dilTércnces de phraséologie que découvrent l'examen atten-
tif et la comparaison de la Prophétie et des Lamentations (1). Ils
(1) Les Lamentations renferment un très graïul nombre de mots que l'on ne retrouve
pas dans le volume prophétique. On reconnaît sans que l'absence de plusieurs de
dillicullé
ces termes ne lire pas à conséquence l't s'explique, par exemple, par la diversité m<^mc des
sujets; mais quand il s'agit de termes exprimant des idées communes aux deux ouvrages,
les critiques en question estiment que la remarque a beaucoup plus île poids.
(2) On signale des diflérences de points de vue. Jérémie revient fréquemment, dans ses
oracles, sur cette pensée cpie les Chaldéens sont les exécuteurs des desseins de Dieu sur
Juda : comment invoqiicrail-il contre eux la vengeance de Vahweb (Larn., i, 21-22; m, .^a-
fj6)r D'autre part, un voyanl tel que Jérémie |)ourrait-il dire que « ses fdc Jérusalem) pro-
phètes ne reçoivent plus de visions de y.iln\eh (Lam., ii, 'J')? Après avoir déclaré
(Jer., xxvvii, 5-yj que l'on ne pouvait attendre h' salul «le l'intervention du Pharaon, Jéré-
mie aurait-il écrit : « Du haut de nos tours, nous regardions vers une nation (|ui ne pou-
vait noxj sauver n (Lam., iv, 17)? (voir Driver, An Introduction...).
i;ame JunK au temps des perses. :}3i
phabet actuel [D; dans les chap. ii-iv au contraire, £ précède:;; (2).
Nous savons que, pendant l'exil, on perpétua le souvenir des événe-
ments les plus néfastes de 588-586 par des jours de pénitence et de
deuil (3). M. Steuernagel estime qu'en ces circonstances on devait
chanter des lamentations et il n'est pas loin de croire que nos élégies
furent composées pour cette destination d'ordre liturgique. Le chap. ii
nités avec divers Psaumes de date récente (4), tout inviterait à consi-
dérer le chap. m comme postérieur à l'exil et à en reporter la com-
position vers 325, sinon un peu plus tard. De la sorte, il ne faut
(4) On a remarqué, il'ailleurs, que les cinq poèmes présentent de nombreuses affinités
avec lesPsaumes, notamment avec les psaumes de complainte: il n'y a pas à en être sur-
pris. On a pareillement relevé des ressemblances entre Lam., ii fet, à un moindre degré, iv)
et Ézéchiel.
table dranie et les sentiments qu'elles éveillèrent dans les âmes. Nous
avons donc à nouveau des documents de premier ordre pour le sujet
qui" nous occupe, et nul doute qu'il ne faille rapproclier le chap. m
des ciiap. i et v. — Il est juste de souligner une conséquence des dif-
3° Bar t( fil.
<|ui étaient venus pour entendre, ce lixre j)ro(luil une grande iMq)res-
sion. Le premier résultat est une eollccte «pie l"<»n envoie à Jérusa-
I.A.MK .11 l\l-: AU TKMPS DES PKUSKS. 333
loin pi)iu' qu'on achète des victimes et que Ton prie pour Nabu-
chodonosor et Baltass(U', à l'ombre desquels les exiles doivent vivre
de long"S jours; que Ton intercède aussi pour les captifs, parce
([u'ils ont péché contre le Seigneur
pas encore trouvé grâce
et n'ont
à ses yeux. Entre temps Baruch a recouvré pour les renvover au
pays de Juda les ustensiles en argent que Sédécias, fils de Josias,
avait faire pour le
fait temple. Kn plus de la collecte, l'ambassade
emporte aussi le livre de Barucli pour qu'on en fasse la lecture
à la maison du Seig-neur les jours dé fête et d'assemblée (i, 3-14).
On s'en rend facilement compte ce récit en prose n'est autre chose
:
c'est à cause des fautes de la nation que se sont abattus sur elle
les maux terribles que Dieu avait pris soin d'annoncer par Moïse;
valoir que c'est pour les péchés de leurs pères que soutirent les
captifs. —
La seconde partie (m, 9-v, 9) renferme aussi deux sec-
tions. On y lit d'abord (iii, 9-iv, 4) une exhortation qu'Israël, cons- :
(1) Cf. Agg., II, 17; Zach., i, 4; vu, 7-11, 13, 14.
(2) Cf. Bar., iv, 30-32 cl Jer., xxv, 20; Zach., ii, 12, 13 i Vulg., 8, 9; ;
— Bar., iv, 33-3:i el
Is., xLvii; — Bar., IV, 35 cl Is., XIII, 21 ; xxxiv, l'i: — Bar., iv, 36 et Is., xliii, 6; i.ix. H»;
— Bar., V, 1 el Is., lu, 1, 2; — Bar., v, 4 ri Is., \xxii, 17; Liv, 10, 13. 14; lx. 17. 18: —
Bar., V, 5 cl Is., lx, 4,.-); —Bar., v, Gel Is., xlix, 22, 23;— Bar., v, 7 Pt Is., xi., 3-.^. — elc.
On [lourrail inulli[)lipr les rapprocliPincnls et relever ries analogies non seiilcinent (pianl
.lUX iJécs, mais quant aux expressions elles-inAines.
3) Cf. Bar., IV, 36, 37 et Ps. Sal. xi, 3,4,7; — Bar., >, 1-3 el Ps. Sa!. \i, «;— Bar., v, 4
et Ps. Sal. XI, 8, 9; — Bar., v, 5 et Ps. Sal. xi, 3, 4; — Bar., n, C el Ps. ShI. xi, 7; —
Bar., \, 7 el Ps. Sal. xi, .'>, c, 7; — Bar., v, 8, el Ps. Sal. xi, r>, 7; — Itar., v, 9 el Ps.
Sal. XI. 8.
|;A.MI£ juive au temps des perses. •
335
(1; On sait, on ffl'et. fjiie. pour le {{ranil nornlirc tl(»s criliques étrangers à l'KRlise, Daniel
a été roiii|i<ivi. nu ii< l.nl des leinps ninrriiabôens.
L'A.Mt: JLIVE M TK.MPS DKS PERSKS. 33-
nit-elle pas ainsi un cadre auquel les redites de notre opuscule sadap-
teraient sans trop de difficulté? Et puis M. Steuernagel ne semble pas
tenir compte d'une autre objection qui vient spontanément à l'esprit
et que d'ailleurs on pourrait formuler en d'autres cas analogues si :
(1) Steuernajiel, il n'est pas douteux que la prière île Baruch soit une iniilation
Pour M.
lie de Daniel. Cette dernière n'est pourtant pas d'une oriiiinalilé telle quon ne puisse
celle
entrevoir une autre hypothèse l'utilisation dans les deux documents d'une source com-
:
1) ('(iinmc A|). Bar., xwii, :! iinîiilioniu- l.i ilrslnirtion du Tciii|il»' par Tilus, force est «le
façon très nette la rf^surrerlion des morts, et «|ue. il'aulre |)art. Har., i, l.'i-iii. 8 serait un
pastiche de Dan., ix, il*.». On semble rt-pondre à celle ditlirullé en parlant île « in Dan., i\. i-
Ci) Les l'eres des cinq premiers siècles cilcnl assez souvent Kuntcli ; mais en dehors des
cas «il ils produisent des textes de Inpuscule comme autorité srripluraire sans en préciser
l'auteur, ils en mettent ilaulres tantôt au (ompte du secrétaire de .lérémie. tantôt au
compte de ce dernier prophète lui-même.
|;AME juive au temps des perses. 339
peut t ton ver ailleurs sous une forme plus originale. Il nous demeu-
rera toutefois comme un témoin précieux de données traditionnelles
relatives à l'exil.
ments que pouvaient revêtir les thèmes plus généraux fournis par les
oracles de Jérémic ou dis., xl-xlvi.
[A suivre.)
.1. TOUZARU.
DE L'INTERPRÉTA rrON HISTORIQUE
DES ÉVÉNEMENTS DE \A VIE FAMILIALE DU PROPHÈTE OSÉE
(I-III)
I " Quis fiiiin non .'-l.ilim in Ironie liliri scandalizcliir, «'1 «lical : (tscc |)riintis
ornniuin prophclarntn incrclriccin accipprc julinlnr lixorem, pI non roni radie il.' Non
sallciii nolli- ^.- simulai, ul rem turpein fncerc videalur inviluA; .scd exse(|uilur laîlus
INTERPRÉTATION IlISTORIQUK D'OSÉE, I-IIl. 343
Il prôteucl même
que racle de reprendre son épouse, qui était
devenue une véritable courtisane, aurait rendu Osée coupal)le de
luxure ce jugement, il le fonde sur le texte de saint Paul
: qui enim : ^<
Sed respondebis, Deo jubente, nihil turpe est et nos dicimus, nihil:
Deus prsecipit nisi quod honestum est, nec jubendo turpia, facit
imperium, quasi optaverit, quasi multo lempore euin pudicitice vacasse pœniteat cum :
honestiora et absque peccalo sanctos viros renuisse. Domino jubente, legerimus. Moyses
mittitur ad Pharaonem, et dux Israelitici populi constituitur et tamen non imbellici-
:
tate, sed huinilitate respondet Provide aliuni quem mittas [Ex. iv, 13). Jeremias
:
puerum esse se dicit, ne peccanlem arguât Jérusalem [Jerem. i). Ezechiel de omni génère
leguminis ac sementis unum subcinerlum panein facere et coquere illura in huraano
stercore jubetur, et ait :Nequaquam, Domine, quia iiunquam immundum introirit in
os meum [EzecJi. iv, 14). Et Osée audiens a Domino Accipe tuorcm fornicariam
:
(Osée, I, 2), non frontem rugat, non mn-rorem pallore testatur, non verecundiam, mutato
genarum rubore, demonstrat sed pergit ad lupanar, et scortura ducit ad lectulum. Et non
initiât illam pudiciliœ matronaii; sed se luxuriosum ac nepotem probat. Qui enim
adhccret meretrici, unum cum ea corpus efficitur. H;cc igitur audientes quid possumus
respondere nisi illud propheticum Quis sapiens et, intelliget isla, intelligens et cogno-
:
scet ea (Osée, \i\, 10). Unde et nobis dicendum est cum David Rerela oculos meos, et
:
puie saint Jérôme, pour affirmer l'existence ici d'un ordre fictif repose sur une fausse
identification. Il semble évident en effet qu'il n'est nullement question de l'Euphrate.
mais simplement de louady Para actuel. En dehors de la similitude de nom, le voisinage
d'.\nathoth. la nature absolument rocheuse de la vallée, et la présence perpétuelle d'eau
à la source de ce torrent rendent cette identification à peu près certaine. Tel est le sen-
timent admis à l'École biblique de Jérusalem.
:i44 KEVUE BIBLIQUE.
honesta quiv turpia siiiit. Sed quia scimus nihil Deum velle nisi
lefond de notre pensée sur ce sujet est qu'une telle opinion s'impose
presque nécessairement.
Tout d'abord le fondement sur lequel saint Jérôme a basé son
argumentation est tout à fait ruineux. Nous ne eom|)renons pas que
ce Père, qui a très justement remarqué l'impuissance de lin jonction
divine à transformer la nature d'un acte intrinsèquement mauvais,
.lit recouru à la fiction pour opérer un tel changement. N'est-il pas
Sailli IfL'rn'e dil : " Osi-c prophcla a<:fpj)it uvorcm forniralionis, |>pr oprralinnpin i>ro-
Pr.>(.K(l;f, quain si non rri'dfn't oinnia prrrala impudic;o dimiasa rsse in inclius cominu-
talji l.iv. .\XII,<>ip. i.wx. M., XLII. p. i".4.
(|ui s'impose à tout interprète, quel que soit le système adopté par
lui. Et cette tâche, on peut la remplir aisément par une bonne
exégèse du texte sacré.
De plus l'admission du sens historique [>ossède deux avantages
incontesta])les. Elle est plus conforme aux rèi;les d'une herméneu-
tique exacte. Elle confère à la prophétie une signification 1 >eaucoui)
plus prenante.
Nous placerons en tête de la présente étude le résumé des argu-
iiients que van Hoonacker fait valoir en faveur de l'interprétation
Gomer. —
Ces noms sont imposés pour donner lieu aux explications.
Or celles-ci ne reposent pas sur des faits, ni sur des considérations
historiques, mais « sur des avertissements donnés pour la première
fois et d'une manière directe à Israël, au moment même où Osée
compose son discours ». La chose paraît particulièrement évidente
pour le nom du 3" enfant. « Pas-mon-peuple », v. î). « Sans aucune
transition, le discours, qui était censé s'adresser à Osée, se retourne
brusquement, à propos du nom de l'enfant, contre le peuple d'Is-
raël... Les enfants de Gomer s'identifient avec les enfants de la
nation. »
a) C'est pour cela que nous concluons que Gomer se conduit mal
et qu'elle a des enfants adultérins, bien que le texte ne dise pas
qu'Osée n'est pas le père de ceux-ci.
^) Les noms des trois enfants s'enchaînent dans un ordre logique
tel que le second semblait attendu après le premier et le troisième
après le second.
v) « Osée no se donne pas la peine de raconter comment et dans
quelles conditions la séparation se serait produite entre lui et la
femme; il nous laisse le soin de deviner qu'au ch. m il s'agitde la
même personne qu'au ch. i; et pour établir cette identité, nous avons,
comme argument principal, à faire valoir l'exigence du rôle symbo-
femme dans la composition du discours. »
lique de la
Et van Hoonacker conclut : « Pour ces raisons, nous avouons, car
c'est un aveu à faire, vu l'état actuel des opinions, que l'interprétation
allégoriste a nos préférences,La question de savoir si l'allégorie fut
pour une part suggérée à Osée par son expérience personnelle ne
nous paraît susceptible d'aucune solution. »
foule aux pieds les sentiments les plus délicats et les plus légitimes.
Commençons par répondre que le système de la liction ne saurait
nullement dissiper l'objection de l'impossibilité morale. Le devoir de
disculper Dieu de tout ordre immoral incombe aussi bien aux partisans
de l'interprétation allégorique qu à ceux de l'exégèse historique. Il est
absolument impossible que Dieu donne un précepte même fictif rela-
tivement k l'accomplissement d'un acte illicite. De ce fait la sainteté
infinie de lahvé serait lésée soit dans son essence, soit dans ses effets.
Par ces derniers nous entendons les mauvaises pensées et les désirs
désordonnés que tout ordre illicite, même fictif, provoque naturel-
lement. Aussi tous les exégètes modernes, catholiques ou indépen-
dants, abandonnent l'échappatoire suggérée par saint Jérôme et dé-
montrent que l'ordre divin n'implique aucune immoralité. Nous
nous efforcerons nous-même, à notre tour, de nous acquitter de
cette tAche.
Sans doute la fiction est apte à dépouiller un ordre de tout carac-
tère de dureté et à supprimer toutes les atteintes à la délicatesse
des sentiments, l'n précepte, qui ne doit pas être exécuté, n'est pas
un |)récepte; ce n'est plus (pi'unc apparence de précepte. Et du
même coup ses aspects durs et répugnants perdent toute réalité. De
ce l'ait la Hibhi nous fournit un excellent exemple dans le sacrifice
d'Abraham iden. xxii).
Mais 1.1 dureté d'un ordre ne saurait constituer par elle-mêmo une
impossibilité morale Quand il se propose une lin supérieure et
(juand il fournit les secours nécessaires, le Seigneur jxnit très bien
ordonner et intimer d'exécuter une chose pénible. Dans ce cas, sa
INTRUPRKTATION HISTORIQUE D'OSÉE, I-IH. 349
httéral qu'au peuple d'Israël. Bien au contraire les faits des ch. i et m
ne peuvent concerner, pour la plupart, que l'épouse d'Osée. Évidem-
ment le ch. II enjambe pour ainsi dire sur le ch. dès le v. 16 de m :
ment plus grande, soit pour attirer les attentions, soit pour toucher
les cœurs, soit pour mettre en activité les volontés. Aussi lahvé a-t-il
(1) « Propheta autem hoc suo matrimonio et liberis in eo susceptis hebetes popularium
mentes ad divina consilia perpendenda elïicaciter provocare debuit; verum quœnara effica-
cia ad soporem illum excutiendum adfuisse censebitur, si propheta hsec a se visa esse
solum verbis proponeret? » Knabenbauer, Commentarius in Prophelas Minores, p. 23.
(2) Nowack, Kleine Propfieten, p. 30, 2.
354 REVUE BIBLIQUE.
discours.
Isaïe présente tout clairement lahvé comme l'époux de son
à fait
sur les sentiments les plus sacrés du cœur humain poussés jusqu'à
leur paroxysme. Dans ces circonstances, nous ne voyons vraiment pas
pourquoi Osée n'aurait pas recouru au simple discours, ainsi que
devait le faire plus tard Ézéchiel.
Tout change si l'on admet la réalité de l'action symbolique. Des
débordements véritables et des poursuites authentiques étaient émi-
nemment de nature à exciter vivement les attentions et à émouvoir
profondément les cœurs. Si vraiment les contemporains d'Osée ont
été témoins des désordres multipliés de (iomer, ils ont dû être outrés
et remplis de dégoût. S'ils ont pu se rendre compte qu'effectivement
le prophète, foulant aux pieds toutes les amertumes et toutes les
hontes de l'amour trahi, usait de tous les moyens pour ramener sa
femme adultère, ces hommes ont dû être violemment frappés d'éton-
nement et d'admiration. Certainement les concitoyens de l'homme
de Dieu se sont demandé pourquoi celui-ci tenait une conduite, peut-
être si .supérieure, mais en tout cas si contraire aux lois de leur pays
et à celles de tous les peuples voisins. Kt l'on s'explique que cette
surprise ait disparu pour faire place (2) à une émotion extrême, quand
M) Voyez surtout les versets : 8, nii il est f|iinsti(>n (riiiic alliance, évidemment inatri-
rnonialf; \1-'H\, qui décrivent les itroslitutions de Jt-rusalcin; ;t9. oii il est dit expressément
qup. cette ville a été rtdu//è/r , SH-S'i, |iro!>li tu lions d Une uravilc extraordinaire; 38-42, de
fait on a|)i)lif(uera à Jérusalem la loi contre les mlulUrcs, la lapidation (l)eut. \xii. 211)
et la /oi (II- jalousie (yomh. \. li-3n); 4.'», nouvelle accusation d'adultère: .V.»-f>,J, l'alliance
(matrimoniale) sira rétablie entre Jérusalem et lahvé. et désormais elle sera élerncllc.
[2] On sail ([iir la loi deutéronomiquc punissait de mort les adullms, wn. :<.:>.. (juand le
INTERPRÉTATION HISTORIQUE D'OSÉE, l-lll. 355
crime avait été commis avec une fiancée, on lapidait les auteurs, lorsque tous deux étaient
coupables, 23-24, et l'on tuait l'iiorame seul, quand la fiancée était innocente, 25-27. Pour le
40, 38, 42. C'est aussi de mort que devait être puni le prétendu adultère de Suzanne,
Dan. XI, 28, 46-48.
(2) Nowack, Kleine Propheten, pp. 29-31 et Marti, Das Dodekapropheton, pp. 14, 15.
3o6 REVUE BIBLIQUE.
ont été sensibles aux considérations que nous-même avons fait valoir.
pas immoral, indigne de Dieu, cela ne peut être, parce que lahvé
lui-même a accompli une telle chose dans son mariage avec Israël »
(Kur^z, p. 68) (1). Cette citation est excellente, et volontiers nous en
faisons nôtres toutes les pensées. Ce n'est donc pas pour un motif
d'impossibilité morale, que nos exégètes allemands nient l'objectivité
jugt^ c'est l'impossibililt'^ «In miracle, «|ue Wrede prend ouverlem<nl pour rrili'rium de ce
qui peut èlre historique... M. Loi.sy est i)lus soucieux que persimne de mettre en avant
les raisons littéraires : au fond il ne peut pas échapper plus que les autres k l'étreinte de
la iojjique ». p. xi.ix.
fidèle (1). »
(1) Ibid.
(2) Marli, Dodckaprophplnn, p. l."i.
Autant que nos études nous ont permis de le constater, la conct'ption d'une divinité époux
de son peuple n'est guère fréquente chez les sémites. C est bien plutôt celle de paternité,
que Ion rencontre chez ces peuples. Ainsi dan* le code de Ilammourabi, aucune des nom-
breuses divinités que ce monaii|ue mentionne comme ses protectrices ou qu'il convie à
châtier les contempteurs di- son code, n'est jirésentée comme l'époux du pays. Toutes les
fois oij le mot lid est répété dans ce code, il a le sens de Seinneui et Mailre ; i, !. :t7
II, '.», 37; \xiv», -n, 25; xxv», :,h, .'•/; xxvi», 53; \xvip-, 'it.
Dans .ses i.liules sur les Hclùjions sémitU/uex, le P. La^^ranae rcconnail (|u<' le .sens pre-
mier de Ha'al est Sritjneur, mnilrr. Sa sinnitication d'époux (malin- de la leinine) n est
que secondaire. Kt le P. Lagrange ne cite pas d'cxem|de où la divinité est envisagée comme
l'époux du pa)s. Cf. p|i. 83-9y.
INTERPRÉTATION HISTORIQUE D'OSÉE, Mil. 359
la destinée de sa vie?
La réponse de notre exégète est la suivante
» :
<( La relation est bien plutôt inverse. Ce n'est pas son malheur qui Ta
.fait prophète; mais c'est parce qu'il était prophète, qu'il a appris à
tion paraît excellente. Mais change si, sans se fier au sens tout
habituel et catholique du terme essentiel de cette explication, on
cherche la valeur exacte qui lui est. attachée dans cette phrase. Car
(1) Ibid.
(2) Voici ces explications : « Il est déjà projilii'tc, lorsque lui est né son i)remipr (ils,
vocation prophétique/ est-ce bientôt après la naissance de Jesreel ou après que ses trois
enfants furent nés? on ne peut le décider sûrement. Mais ]iuisque les noms Lo-Uuchama
et Lo-'ammi n'expriment que la même idée que Jesreel, il est vraiseinlilaltle que cette
intelligence lui vint aussilùt a()r('S la naissance des trois enfants, w Marti, ihid., p. 15.
Ayant eu occasion d étudier un t)pus(ulc d'un des principaux collaborateurs du llmid-
(.3)
fondateur de religion, mais pour cela il faut toujours un événement intérieur, un saisis-
sement intensif par la divinité, une heure sainte d'un contact très intime avec un monde
INTERPRÉTATION HISTORIQUE D'OSKE, Mil. 301
P. Cruveilhier.
LE PREMIER CHAPITRE DES
PARALIPOMÈNES
d'Édom.
Son contenu se ramène aux chefs suivants 1. Descendance d'Adam, :
Non seulement, en effet, la matière est identique dans les deux livres,
mais elle est présentée, de part et d'autre, dans le même ordre (1) et
(1) La seule exception à cette règle dans le i" chapitre des Chroniques est celle des
vv. 32-33, qui sont assez suspects, comme on verra. La liste des fils de Jacob, empruntée
à Gen. xxxv, 23-26, devait naturellement tigurer en tête des généalogies des douze tribus et,
pour ce motif, être reportée au chapitre ii (vv. 1-2), à la suite de la liste des (ils d'Ésaii et
autres documents tirés de Gen. xxxvi.
REVUE BIBLIQUE 1916. — N. S., T. XIII. 24
36i * REVUE BIBLIQUE.
d'après le même plan. C'est ainsi, par exemple, qu'à chaque échelon,
ladescendance des collatéraux, quand elle a été conservée, est énu-
mcrée, dans les Chroniques comme dans la Genèse, avant celle de la
souche principale. Les Chroniques n'ont cependant pas copié simple-
ment la Genèse. Le texte de celle-ci est d'abord abrégé. Des chapi-
tres V et XI, qui donnent la descendance directe d'Adam à Abraham,
il n'est entré dans les Chroniques qu'une liste de noms; pour les
autres chapitres, qui concernent les branches collatérales, les for-
mules généalogiques de la source sont reproduites, mais les données
et notices historiques qui surchargent sont laissées de côté, ou
les
encore, comme dans la généalogie des fils d'Ksaïi, les noms des fenmies
sont omis. D'autre part, la matière généalogique de la Genèse n'a pas
passé tout entière dans les Chroniques : la généalogie des Caïnites(iv).
celles d'Aran et de Nachor (xi, 27-29; xix, 37-38; xxii. 20-2i), les
noms des fils de Dadan (xxv, 3) ont été négligés. Par ailleurs, il est
assez naturel que Gen. xxxvi, 15-19, 29-30 n'aient pas été reproduits,
puisque ce sont des doublets des vv. 10-1 et 20-28 qui précèdent. 'i-
(1) Lehrbuck (1er EinlciUnuj in fias Altc Testament, Tùbin^fn. l'.M:'. |>. :v.r.>..
I,E PRE.MIK15 CHAPITRE DES PARAI. IPOMENES. 365
les avait donc pas à l'origine. D'autre part, les vv. 18-23 ne seraient
pas dans la manière du Chroniqueur ; ils reproduisent le style de la
table généalogique des descendants de Sem dans Genèse, xi. Il en se-
rait de même
des vv. 11-16, qui correspondent à une section de la
table des peuples de Genèse, x. En conséquence, M. Klostermann
estime que le texte original du livre hébreu des Chroniques ne don-
nait, comme introduction aux tables généalogiques des douze tribus,
qu'une simple liste des ancêtres directs d'Israël. L'auteur aurait seu-
lement ajouté, aux vv. 4, 17, 28 et 34, les noms des autres fils de Noé,
de Sem, d'Abraham et d'Isaac. Ces noms, posés là comme des pierres
d'attente, fournirent l'occasion d'intercaler dans le texte les généalo-
gies des branches collatérales, telles qu'on était habitué à les lire dans
la Genèse.
La voie était ouverte. I. Benzinger (2) s'est empressé d'y entrer.
Partant du même
de critique textuelle, l'absence des vv. 11-23
fait
(1) Realencyclopàdie filr protestantische Théologie und Kircfie, IV, p. 92 s.; Leipzig,
1898.
(2) Die Bilcher der Chronik, dans Kurzer Handkommentar, Tiibingen und Leipzig,
1901.
366 REVUE BIBLIQUE.
sertion, entre les fils d'Ismaël et ceux d'Isaac, des enfants que Cétura
donna à Abraham est inacceptable, surtout après le v. 28 qui, voulant
énumérer les fils du grand patriarche, nomme seulement Isaac et
Ismaël; par suite, le v. Ska est un doublet de 28 et s'explique seule-
ment par la nécessité où l'interpolateur s'est vu, après Fénumération
des de Cétura, de ramener l'attention sur la descendance d'A-
fils
R. Kittel(l) est moins radical. Il réduit les interpolations aux vv. 11-
23, auxquels on doit cependant joindre le v. 10. Les motifs qui le
décident sont, pour une part, ceux que M. Benzinger a invoqués la :
faudrait lire avec les Septante : « Fils de Sem »), 28,32,33, etc., la
formule est toujours : « Fils de... »; dans 10, 11, 13, etc., elle est au
contraire : « Et Chus engendra... et Mesraïm engendra... et Chanaan
engendra... ». .\ l'origine par conséquent, le v. 24 ne devait pas être
séparé du v. 9. Une première main a introduit dans le texte le v. 10,
une autre les vv. 11-23, tous empruntés au chapitre x de la Genèse.
A une variante près, M. Steuernagel (2) adopte l'opinion de M. Ben-
zinger il ne laisse au Chroniqueur (|ue les vv. 1-4, 17 a. 24 6-28,
:
34 b.
(1) Die Bilchcr der Chrouih, dans Handlionimnntat zum Allen Testament, (lollin-
gen, VJ02.
{•>.) Loc. cit.
(3) .1 criticnl nnri e.rnjrhcnl Cotmiienfary ou t/ir /loolis of CliKinn h s. dans The
Inlcrnalional Crilical Commcnlary, Edinburj^li, r.Mo.
LE PREMIEU CHAPITRE DES PARALIPOMÈNES. 361
peut nier qu'une méthode particulière soit appliquée dans les vv. 1-4-,
24-27. Le mode d'exposition dilTère donc, et notablement, suivant
qu'il s'agit de la ligne directe ou des branches collatérales: simple
II
qui concerne romission des vv. l1-'-2o du 7 chapUrc^ est-il le témoin "
d'un état du texte plus ancien que celui qui se reflète dans la Massorc
et dans k-s autres manuscrits grecs? En d'autres termes, et c'est la
vraie question, la présence des versets 11-23 dans la Bible hébraiqu«^
est-elledue à une interpolation, ou bien, au contraire, Fabsence des
mêmes B ne serait-elle pas le résultat d'une mutilation
versets dans
accidentelle, que celle-ci ait été infligée aux Septante eux-mêmes ou
encore que l'auteui'. <|Mi annonce les fils de Sem, après avoir nommé
les trois piemiers ^ iMam et Assur et .VrphaxîKl », laisse de côté les
:
deux derniers Lud et Aram (cf. Gen. x, 22) et tout aussitôt éimmère
:
celles qui lui manquent sont les plus naturelles et ont dû, de tout
temps, paraître les plus urgentes. Mais ce sont là des considérations
secondaires. Les faits qui priment tout sont la teneur anormale du
v. 24 (ou plus exactement 17 dans B, et l'absence, inexpli-
«, 24 b)
même formule ; u Fils de... » (Gen. x, 2-7, 22; xxv, 13-15, V, etc.),
r\N : si l'on excepte encore le v. 32, dont il sera question plus loin,
l'identité est parfaite, à cet égard, entre les deux textes. On dira que
les interpolateurs ont pu observer la même méthode. Il serait cepen-
dant plus surprenant de voir plusieurs hommes étroitement fidèles à
une méthode identique que de voir un auteur unique la maintenir
au cours d'un même chapitre.
Les répétitions qu'on peut constater dans le texte du Chroniqueur
s'expli(|ucnt de même par le fait qu'elles existaient dans sa source.
C'est le cas pour la descendance de Seni les vv. 17-23 reproduisent
:
Gen. X, 22-21), et les vv. 24-27 résument Gen. xi, 10 ss. La répéti-
tion n'est d'ailleurs pas inutile, comme on verra tout à l'heure, ni
absolue, puisque les premiers versets concernent une branche colla-
térale et les .seconds, la ligne directe. Le cas du v. 3'* (i se rattache à
la question des lils de Cétura, qui veut être traitée k part.
La dillércnce de méthcjde constatée entre les vv. 1-i, 2'*-27 et le
résumer la r.enèse hors des cas où, dans celle-ci, la ligne directe se
les méthode
interpolateurs n'aient pas poursuivi leur tâche avec une
riiioureuse et que quelques documents leur aient échappé. Mais, au
fait, ne pourrait-on en dire autant du Chroniqueur? il a voulu incor-
III
(1) La teneur du v. :>M ne permet d'ailleurs pasde soutenir que la liste des lils de
Cétura ail jamais fait partie de son contenu. Tout au plus pourrait-on prétendre qu'à
l'origine cette liste venait immédiatement à la suite du v. 27; omise par mé^arde et rc-
eueiilie en marge par un copiste, elle aurait été insi-rée là où elle est aujourd'hui par un
autre scribe, lequel aurait ajoutéle v. 34 a. Mais une pareille hypothèse ne senilde guère
probable. Dans Genèse '\x\]. la liste des fils de Cétura (vv. 1 ss.) n'occupe pas le c«»n-
la
lexte immédiat «le la descendance d'Ismaël (vv. 13 ss.) et d'fsaac (vv. 1!» ss.); pour ce
molil' et jiour d'autres le Cbronii|ueur l'aura laissée de cote.
I.K PREMIER CHAPITRE DES PARALIPOMÈNES. 3T:i
que, précède chacun des noms des iîlsde Cétura, ne subsiste plus,
dans les Chroniques, que devant le premier; la formule u fils de... »
est substituée une fois au verbe « engendrer » ;
enfin Cétura reçoit
la qualification de Genèse ne lui inflige jamais.
« concubine », que la
aucune preuve n'établit le fait. Ce verset peut aussi bien avoir été
emprunté par le Chroniqueur lui-même à la Genèse puisque, dans le
texte de celle-ci, il se rattache immédiatement à la généalogie des
filsde Cham. La présence de la brève notice relative à Nemrod n'est
pas un indice suffisant d'interpolation. S'il est vrai que le Chroni-
queur allège ordinairement ses généalogies des surcharges de ce
genre, il ne le fait cependant pas toujours : n'a-t-il pas gardé, au
V. 19, la notice étymologique qui explique le nom de Phaleg?
TEXTK (1).
les Anamim et les Laobim et les Nephthuim '-et les Phétrusim et les
Cliasluim, d'où sont sortis les Philistins, et les Caphthorim; et Cha- ^'-^
1''
et l'Aradien et le Samaréen et l'Hamathéen.
(1) Les formes usuelles, dérivées de la Vulgate. ont été inainlenues pour les noms
propres.
374 REVUE BIBLIQUE.
l'un était Phaleg, parce que de son temps la terre fut partagée, et le
nom de son frère était Jeetan; -'^etJectan engendra Elmodad etSalepli
et Asàrmoth et Jaré 2' et Adoram et Huzal et Décla - et Hébal et Abi-
maël et Saba '' et Ophir et Hévila et Jobab tous ceux-là sont lils de :
Jeetan.
24 Sem, Arphaxad, Salé, 25 Héber, Phaleg, Réu, ^tiSérug, Nachor,
Tharé, '^Abram c[uiest x\braham.
^^ Fils d'Abraham : Isaac et Ismaël. 29 Voici leur descendance : pre-
mier-né d'Ismaël, Nebaioth, puis Cédar et Abdéel et Mabsam, '^^
Masma
et Duma, Massa, Hadad etThéma, ^^ Jéthur, Naphis et Cedma : ceux-là
sont fils d'Ismaël; '^-et /ils de Cêtura, concubine d'Abraham : elle
d'Eliphaz : Théman
et Omar, Sépho' et Gathan, Cenez et Thamna et
Amalec; de Rahuel Nabath, Zara, Samna et Mésa.
^' fils :
Onam et fils de Sébéon Aïa et Ana; ^' lils d'Ana Dison; et fils de
; : :
Dison : Hamdan'
Eséban et Jéthran et Charan; ^2|ils d'Ezer Balan
et :
^^Et voici les rois qui ont régné dans le pays dÉdom avant que ré-
gnât un roi des fils d'Israël Balé, fils de Béor, et le nom de sa ville :
était Denaba; ^''et Balé mourut et Jobab, fils de Zaré, de Bosra, régna
à sa place; et Jobab mourut et llusam, du pays des Thémanites,
''''
1. Les noms énumérés dans les vv. i-4 sont extraits de Gen. v, 1-.32 dans l'ordre
de la source.
2. Ici, comme dans Gen. (v, 9-10, 12-14), 7Jip; mais G Kaivâv V Cainan, cf. P
^L^. La prononciation ancienne, qui faisait entendre la diphtongue, s'était donc
maintenue à l'époque et dans le milieu des traducteurs grecs. Voir dans Kittel
'SBOT et Com.) des notes détaillées sur ce cas.
Ici encore, comme dans Gen. (v, 12-13, 15-17), SxSSrîD, cf. P ^^^Siopô V (Gen.)
Malalehel (Chron.) Malaleel; mais G (Gen. Chron. et Luc, m, 37)MaX£X£rjX V (Luc)
Maalclehel. Sur la foi de G et de V (Luc), Kittel (.SBOT et BH) se prononce en
faveur de Sx^Sna: il ajoute dans Com. que cette foi'me dérive du participe iri'el
ne pas deviner sou étymologie réelle. La question est surtout de savoir lequel
laisser
des deu.v témoins, M
ou G, représente la tradition la plus ancienne et la plus sûre.
Le fait que G ramène le premier élément du nom à un participe, interprétation la
plus facile, n'est pas pour le recommander; néanmoins il est, surtout pour Gen.,
plus ancien que M, et pour ce motif la conclusion de Kittel semble plus probable.
4. Après Nof', G (à l'exception de L, qui s'est conformé à l'hébreu) intercale uîol
î\w£. Aucun commentateur ne pose la question de savoir si dans ce cas G ne repré-
376 REVUE BIBLIQUE.
dance mais de fraternité. Mais le Chroniqueur est toujours fidèle par la suite, et
pour des personnages tout aussi connus, à spécifier les rapports (cf. vv. 28 et 3-1'. et
explicite sur ce point (Gen. v, :i2:
sa source, qu'il suit d'habitude exactement, était
\., 1
- d'autre part, l'omission s'explique aisément de la part d'un copiste. Il sem-
ble donc que INI a commis ici la même faute qu'au v. 17 (voir ci-dessous) et n*l3 iJl
serait à restituer dans son texte. Il n'est pourtant pas impossible que le Chroniqueur,
uniquement préoccupé de relever les noms propres de Ccn. v. ait continué selon
la même méthode jusqu'à la fin de la
généalogie.
D'après Benzinger, le contenu des vv. 1-4 était du domaine public et le Chr. n'a
pas eu à l'emprunter à la Genèse. Il est certainement des noms que le Chr. n'avait
pas besoin de lire dans un texte pour les écrire. Mais il suit si constamment l'ordre
de la Genèse et ses formules sont si régulièrement empruntées à cette source qu'il
n'y a pas de doute qu'il en ait utilisé le texte là même où il aurait pu s'en passer.
D'ailleurs la tradition orale qui lui transmettait ces noms, bien qu'elle fût anté-
traducteur grec et surtout des copistes à conformer le texte des Chroniques à celui
de la Genèse des Septante est constante. Mais il est vrai que dans la Genèse le mot
a été pris de \, 4.
Au lieu de ~U7î2, GVP vocalisent Môio/ Mo.sor// ;Joo, ici et dans Gen. (x, 2),
d'accord avec Peniateuque samaritain (nombreux mss.) "tria; dans Éz. xxxviii,
le
2-3 et xxxTX. 1 le même mot devient dans G (B) Méao/ et dans G (A) Mdooy^ ,
M Samar. T n£"'m. En fait, on a, dans les Chroniques, G (B) "EpsiçiO (A) Ttifas
Les vv. ll-i>3 manquent dans G (B 127 158). et sont sons astérisque dans (1 '«M).
Kiltcl (BH) préfère le krtliih '"'llS au qcrr et à Gen. (\. 13) D'^~^^, ens'appuyant
sur G (A) Aioou;',jL (L) Aojô'.ïfa. La transcription grecque donnerait en effet à penser
que le bonne leçon. Mais G (A) transcrit de même les noms du
kellnb représente la
V. 12, dont aucun n'a deux iod, et le pluriel indiqué supposerait un singulier '^l'h
dont il n'y a de trace nulle part (cf. Is. lx.vi, 19; Ez. xwn, 10; xxx, 5).
12. dTi'^D^ est devenu en grec dans Clir. G (AN) XaaXwv.^frj. (L) XaaXojEfii, et :
MV répètent ici ~t,'"Cl du v. 5 par méprise; G répète aussi Môcjoy qu'il a d'ailleurs
déjà dans Gen. (x, 23). Mais lire avec Chr. 6 mss. hébreux (de Rossi) P et Gen.
M Samar. (xr*2l) VPT 'Cni (Benzinger, Kittel. Curtis) : -^itd plus connu et plus
familier aux copistes aura été substitué dans plusieurs exemplaires de la Genèse,
notamment dans celui que les Septante ont traduit et dans celui que le Chr. aura
copié (cf. Curtis). Pour ce qui est des témoins, P dans les Chr. a été souvent con-
formé aux sources : sa teneur ne serait donc guère probante à elle seule en faveur
d'un original w*^2". Il peut en être de même des mss. hébreux de Chr.
18.Après 'Âpçaçàô, G (ANL et la plupart des minuscules) ajoute tôv Kaivâv za't
Ka'.vàv lyÉvvrjcrîv. Le traducteur a puisé dans les Septante, Gen. x, 24 (cf. xi, 12 ss.
et Luc III, 36), qui comporte la même addition. Voir ci-dessous, au v. 24.
que le Chr. ait retenue dans le premier chapitre, sans doute parce qu'elle était plus
étroitement liée au cadre même de la généalogie. Mais ce détail indique qu'il ne faut
prêter à l'auteur ni un plan trop strict, ni une méthode trop rigoureuse.
20. rn^TNl manque dans G (A), mais se trouve dans G (L) xaî tôv 'laps et dans
Gen. (x. 26) G (A) x.a\ 'lapaô. — maisn G (A) 'A?a;j.i&6 (L) 'Ac73p;j.oi8, et dans Gen.
(X, 26) : G (A) 'AoapuLwO (L) 'Aaapa[xoj0.
21. St'N g (L) OùZiX P N^jàj V Huzal, mais G (A) A;?4v et dans Gen. (x, 27)
Samar. '^"In G (AL) AitrjX. Certains manuscrits de la Genèse à une date ancienne,
et en particulier ceux dont dépendent les Septante et le Pentateuque samaritain,
écrivaient donc un iod à la place du ivair, et la leçon de Chr. G (A), si elle ne dé-
pend pas de la Genèse des Septante, indiquerait la même hésitation dans les manus-
crits hébreux des Chroniques.
378 REVUE LilBLlQUE.
Sl^y dans MG (A) refiiav (L) 'H6iiX V Hebal, et Gen. (x, 28) dans Saraar. G
22.
(agjtvx) TeSiX(klmoc 2) VriSiX (L) TcciedX JosÈphe 'HSaXo; V Ebal. Mais Smv dans
Chr. 19 mss. hébreux et P, et dans Gen. G (c) 'louGdX PT Éthiopien (codex C de M
Dillmann) Vhdhl, Ce mot manquait à l'origine dans la Genèse des Septante, comme
en témoigne encore son absence dans G (AEM), et il a été introduit sous des formes
diverses dans les divers manuscrits (cf. Flashar, ZATW, XXVIII, 213). La forme
que les Chr. (MGV etc.) ont retenue paraît bien être la plus ancienne.
24. Les noms énumérés dans les vv. 24-27 sont tirés de Gen. xxv, 11-12 dans
l'ordre de la source. Benzinger fait sur les vv. 24-28 la même observation que sur
les vv. 1-4, et qui mérite la même réponse,
G (L) est seul ici à ajouter Katvâv après 'ApcpaÇdô.
Au début du v. on lit comme au v. 17, d'abord uîo\ S/îix (oeuf mss. uiol 6è Stjix)
dans AN et tous les minuscules cités par Holmes et Parsons, excepté les mss. lî)
1)3 108 (c'est-à-dire L), puis AîXàix /.al 'AaaoJo (deux mss. 'Aaoùp) x.ai 'ApçaÇdEB (SaXd
X. T. X.) A et les minuscules 52 74 120 144 158 243, dans les mss. 106 où
dans
manque primo et secundo et 107 où manque y.a.i secundo.
/.«(
Cette teneur du v. dans G (A etc.) utol StÎ[x AîXàjx xa\ 'Aajoup xoà 'ApçaÇaô, SaXdt, :
comparée à celle identique des vv. 17 et 24 dans G (B), démontre que les vv. 11-24,
à l'exception de 17 r^ et de 24 b, manquaient à l'origine dans G, comme en témoigne
encore le codex Vaticanus : on a complété VAlexandrinus et d'autres mss. en insé-
rant les vv. 11-23, mais en laissant tels quels les fragments 17 « et 24 b, qui dès
lors ont constitué dans ces mss. La mutilation de G doit être toute proche
le v. 24.
des origines et il est même à croire qu'elle est imputable au manuscrit hébreu dont
le traducteur se sera servi. Plusieurs leçons de B montrent que ce ins. était en assez
mauvais état.
27. Nin Dlix manque dans G (B), mais se retrouve dans G (VNL douze minus-
cules) 'Â6pà[x aÙT6;. Rittel (SBOT) et Benzinger le retranchent, y voyant l'œuvre
d'un copiste ou d'un rédacteur désireux d'harmoniser le texte de Chr. avec Gen.
XVII, 5. — Ces deux mots ne sont certainement pas primitifs dans G (cf. encore les
mss. 03 108 : 'A6paà;j. ajTÔ; 'A6paaa), et ce fait, vu la manière rapide dont le Chroni-
queur procède dans les vv. 1-4, 24-27, confère quelque vraisemblance à l'hypothèse
d'ime Interpolation. Néanmoins l'addition supposée est en soi peu naturelle : quel
besoin de rappeler le nom primitif du patriarche? Au contraire, l'insertion de xin
omSK' après m2X était tout indiquée et presque nécessaire si cette dernière forme
du nom avait été écrite d'abord. Or, c'est celle-ci que le Chronitjueur lisait dans s.i
source (Gen. xi, 26). S'il l'a transcrite, comme il est possible, il a dû ajouter les
deux mots suivants. Dans ce cas, B serait mutilé ici comme il lui arrive assez sou-
vent (cf. vv. 38, 3!), 50, 54) : la ressemblance des deux formes du nom facilitait
et transporte la qualification de « premier-né >- sur i Ismnrl » régi dès lors par
m'^ln : oiyTai o£ ai Y'Vî'aeiç zpioTOTo/.oj 'I(i|j.a7ÎX. La leçon (le M paraît seule arcep-
tablf : 1 . On ne voit pas pour(|iioi le suffixe .lurail (-lé introduit par lui copiste ; on
comprend bien un contraire qu'il ait été supprimé, surtout après l'additidU des
vv. 32-33 s'ils sont interpolés. — 2. L;i leçon de INI »st celle (|ui .se conforme le
LE PREMIER CHAPITRE DES PARALIPOMÈNES. 370
Dunai, comme dans Gen. xxv, 13, devient dans G Cbr. (B Mxaaâ (A) MaSaâv
(L) xatt MaoTaii. et Gen. (A) xa\ Maiiaix (D) Majav (E) Mxoii'x (L) xal Majjâv.
30. Nï;*2 (dans Gen. xxv, 14, N"C;D1) devient dans G Clir. (B) .Mavaaar; (A) MoL'jn-q
(L) xa\ Maaaa et Gen. (A) xa\ Maaai-f (D) AlavaaïTJ (L) xaî Majarj. Il est à croire qu'à
l'origine, contrairement aux simples de générations descendantes (vv. 1-4 a et
listes
""m (quelques mss. hébreux *nn) G (A) Xoooio (B) Xovôxv (N) XoXSaô (L) 'Xodo
V Hadad P ;joi; 15) ""n, mais Samar. (nombreux mss.) "nn, G (A)
dans Gen. (xxv,
XooSav (EML) Xo8Sà8 (D) XaXoa V Hadar. Il ne semble pas qu'il faille douter même
du heth bien qu'il ait contre lui vingt-trois manuscrits du Peutateuque samaritain.
KQTl, comme dans Gen. xxv, 15; G (ABL) 6ai[xav dans Chr. et dans Gen.
32. Dans 32 a, seuls les noms de Cétura et d'Abraham sont pris de Gen. xxv, 1.
Les vv. 32 6-33 reproduisent Gen. xxv, 2-4, mais en modifiant les formules généalo-
giques; en outre ils omettent les fils de Dadan.
'll~^ 'J2.'à G (B) AaiSàv xai Sa6at. G (AN et quatorze minuscules avec variantes de
détail) ajoute à M et à G (BL) P : xa\ uîo\ AaiSàv TayouriX xai Na88atT)X xai 'Aaaouptsla
Atrcovs-'v (Aotoaslv). V ajoute seulement
xal AaTOja'.s'ia xal filil autem Dadan Assurim :
texte de Gen. xxv, 3 M aV^xST 'JTûbl DIICX 1\-i ]-~ t:n "[IT riNl 'Jl'à nx
:
G -bv i]a6àv xcù rôv 0a'.[j.àv xal tov Aai8av uiol oè Aatôàv èysvovxo 'PayouriX xat ^'aoÔ£rJX
.
xal 'Adouptu. xxt Aaiouasslix xal Ao'ofiefjjL. Les mots xal tov 0at[jiav manquent dans les
mss. bmo et dans Josèphe, xaî manque dans le ms. d et la forme du nom varie
dans les mss. E acdfhilnr : ces mots constituent donc une addition postérieure
dans G. comme il appert d'ailleurs de leur absence dans Chr. d'après tous les
témoins. TaYouTjÀ xa\ NaôoEr.X xxl manque dans le ms. o et dans Josèphe, et diverses
variantes existent dans de nombreux témoins en particulier, le premier xat manque
:
dans les mss. dup. dernier dans les mss. dp. Ces quatre mots ont donc été
et le
ajoutés après coup dans G, bien qu'on les retrouve'dans l'arménien, le bohaïrique et
l'éthiopien.Par conséquent il faut s'en tenir d'abord, et tout au plus, au texte de
M, et il s'ensuit déjà pour les Chroniques que TaYOJïjX xal Na68atr|X xxl dans
G (AN) ont été empruntés à la Genèse des Septante... et ne sont pas originaux dans le
verset. Mais tout le surplus de ces deux mss. est dès lors plus que suspect, et la
divergence de V, dans laquelle l'addition a été évidemment et par principe confor-
REVUE BIBLIQUE 1916. — N. S., T. XIU. 25
380 rSEVUE BIBIJQUE.
Les deux noms Saba et Dadan se trouvent déjà au v. 9, mais parmi les descen-
dants de Chara, conformément à Gen. x, 7 (qui est de l'Écrit sacerdotal, tandis que
Gen. xxv, 3, source du présent verset des Chr., est de J).
xat 'Iaxâ)5 (N 44 56 fiO 64 71 106 119 etc.) 'Haau xaî 'la/.(I)o (cf. Gen. XXV, 25-26).
La leçon primitive de G est certainement gardée par B : la plupart des rass, ont
encore « .lacob » au anormal qui précède 'Hcrrj dans A
lieu d' « Israël », et le xaî
ne laisse aucun doute sur la place occupée à l'origine par ce nom. Cette leçon doit
être celle du Chroniqueur, de préférence à M (PV et G [L] d'ordinaire dépendent
si étroitement de M qu'ils nous renseignent sur son témoignage mais ne le multi-
plient pas). En raison même de son originalité, un copiste ne l'aurait pas imaginée.
D'ailleurs le même procédé est observé au v. 28 où Isaac, bien qu'il soit lui aussi
le second par la naissance, est nommé avant Ismaël, parce qu'il est l'héritier des
promesses (cf. Benzinger, Kittel).
La naissance d'Isaac, mentionnée une première fois au v. 2S, l'est de nouveau
ici, mais cette fois avec une formule analogue à celle de Gen. xxv, 19.
35. Les noms des descendants d'Esaû dans les vv. 35 37 sont extraits de Gen.
XXXVI, 10-14 ou 4-.5a, 11-13, mais la mention des femmes d'Esaii est omise et les
noms de ses fils sont groupés ensemble : le v. 35 est extrait, de cette façon, des
vv. 10 et 14 ou plutôt des vv. 4-5a. 11 y a en outre une divergence au sujet de
Thamna.
30. M ^Sï V Scfilti, mais environ 30 mss. hébreux, 3 mss. grecs (i^ayti) et Gen.
(xxxvi, 11) isi*. D'autre part, G (Chr. et Gen.) Swçap, sans doute ISÏ, tandis
que pour Chr. G (L) a i:£-50jî5 ("ilîi*?; et P ^6j. lEï et ^Eï sont les formes les
, Vj'Zm M (sauf que mot manque dans le ms. 495 de Kennicott) LVP; mais G
le
ra'A'Aaxr, 'FilXt^iÇ htxiv aùif) (aùxô)) xbv 'AaaXrîx. Dans la source (Gen. \\\M, 12) OU
ht : « ... et Thamna hil une concubine «rKliphaz, fils d'Es.iii, et elle enfanta à
Elipli;i/, Amalec. » Thamna, qui dans Gen. est une concubine d'Eliphaz et la mère
I.E PREMIER CHAPITRE DES PARALIPOMENES. 381
d'Amalec, devient donc dans le texte hébreu des Chr. un fils d'Eliphaz. Ce texte
paraît bien, Les diverses leçons de G s'expliquent
néanmoins, garder l'original.
comme une série de tentatives plus ou moins développées pour accorder Chr. avec
Gen.; Ivenn. 495 est une solution radicale. Ces variantes ont un but commun et
témoignent indirectement en faveur de M et de sa dilOculté. Mais comment expli-
quer M? D'après Kittel, les généalogies ont en vue non pas des individus, mais des
tribus ou groupes de tribus, et il est possible qu'au temps du Chroniqueur Thamna
ait prisune place considérable, trop honorable pour qu'on pût dès lors la considérer
comme une femme de second ordre, c'est-à-dire comme un élément secondaire d'une
tribu. Bertheau avait déjà soutenu celte thèse, et Benzinger croit aussi que la di-
vergence des Chr. est intentionnelle. Curtis pense que le Chroniqueur a seulement
mal lu la Genèse, et qu'il a pris « Thimna » pour un nom masculin à joindre aux
noms précédents, lisant ensuite : « il y avait une concubine d'Eliphaz, le (ils d'Esaù,
et elle enfanta à Eliphaz Amalec ». Le même nom se retrouve d'ailleurs au v. 39
(cf. Gen. XXXVI, 22).
37. m" est, dans Gen. xxxvi, 13, précédé du waio et les noms des fils de Rahuel
sont dès lors groupés deux par deux.
38. Les vv. 38-42 reproduisent Gen. xxxvi, 20-28, mais en abrégeant l'introduction
et les formules qui annoncent les fils et en omettant les conclusions ou notices
contenues dans les vv. 21, 24 6c.
descendance des fils de Séir peut avoir avec celle des fils d'Esau. Le Chroniqueur se
contente d'insérer le document.
La forme lU?i"T pour le nom du septième et dernier fils de Séir eist attestée dans
Chr. V. 38 par .MG (L) YP et dans Gen. xxxvi, 21 par M Samar. VPT, dans Chr.
V. 42 par MV et, au moins pour le dnleth, par G (B AL Aaiat&v), et dans Gen. xxxvi, 28
par M. Samar. VPT; la forme dans Chr. v. 38 G
"tiujii au contraire a pour elle
AN 52 56 60 64 71 119 121 1.58), et dans Gen. xxxvi, 21 et 28, G (y compris L). Quant
à G (B). représente les deux derniers noms duv. 38 des Chr. par 'Qvav, leçon basée,
il
comme au v. suivant, sur une mutilation de son texte hébreu. Gunkel se prononce
pour ViTi"! et Skinner pour V»rl"l ou 'rtt7tlà cause de ]i*ii/*i"T, nom du cinquième fils
de lecture aidant, celle de la première consonne. Mais les présomptions sont plutôt
en faveur de M dont la tradition, appuyée comme elle est sur le Pentateuque
samaritain, paraît plus sûre.
39. Au lieu de D'2im (MVP, et dans Gen. xxxvi, 22 P), écrire D'^rt'l avec
Chr. G xa\ A'.aav (L) xal 'H;a.av et Gen. M Samar. T G (y compris L) y.al Aûxav V ei
Ileman.
Ktxi 'AîXàô xaî INa;j.va dans G (B) est une mutilation et une corruption
de yjan ]'i2iS mnxi
en yjQ JT2 s "t
NI.
40. Au lieu de ]^^h'J (MV) écrire yh'J avec de nombreux mss. hébreux, G (L)
"AXouav P (vçui.) et dans Gen. (xxxvi, 23) M Samar. G (A) TwÀtiv (DE) PwXcia VPT;
382 REVUE BIBLIQUE.
en outre, dans Chr., G (B) SwXd[x (A) 'IwU^ (N 52 55 56 60 64 71 119 158) TtoXi;/
(roXdta) et dans Gen.. G (L) TmH'x ont peut-être lu le waw, sauf à l'avoir déplacé.
S^iy est dans G (BN) T(xl^X, de même que, pour Gen. (xxxvi, 23). dans G (AL);
voir le com. du v. 2. D'autre part, Chr. G (A) rao6r;X (L) OuSaX P >\i,ij. et Gen. 1>
Au lieu iMG (L) Sa7iï)£( V Srjjhi, lïi'd est attesté directement par Gen.
de "isu;
(xxxvi, 25) M Samar. G Ar|iojv (L) Aatitôv VPT. L'addition y.x\ 'EXtÇaaà OuyaTTip 'Ava
dans G (AN L) est prise de Gen.
]yà^1 secundo, nom du cinquième fils de Séir, est confirmé ici par G (BA) Aatatôv
(L) Arjfftiv VP, au V. 38 et dans Gen. xxxvi, 21 par tous les témoins, et enfin dans
Gen. XXXVI, 26 par plusieurs mss. hébreux, Samar. G. (ADE L) V contre ]U?n dans
MT, qui est certainement fautif.
"jl^n est attesté par MV Hamram PG (B) T;a.epa)v contre "("iDn qui a pour lui de
nombreux mss. hébreux, G (AN) 'A;i.aSâ (L) Gen. (xxxvi, 26) M Samar.
'A[jLaoa;j. et
VT G (A) 'Aaaox (E) 'A8z(j.a (L) 'Â|xa5â. Curtis choisit le premier et Kittel {SBOT.
BII, Com.) le second, l'un et l'autre, en partie du moins, pour des raisons étymolo-
giques bien fragiles. On doit, pour la Genèse, s'en tenir à la seconde forme, puisque
les témoins (sauf P qu'on peut tenir pour peu si\r en pareil cas) sont unanimes.
Quanta Chr., ses meilleurs témoins, M et G (B), sont en faveur de la première:
les autres ont dû être influencés par la leçon de Gen. il est clair en particulier que :
Chr., à moins que le ms. de Gen. utilisé par lauteur ait été fautif ou mal lu.
42. Au lieu de m71 (MVP et Gen. xwvi, 27, MVPi), y^^l^ est attesté par Chr.
G (B) xa\ Zojxocp. (AN) /.ai 'Ai^ou/.av L xaî Zauiv et Gen. Samar. G (AL) xaî Zouxâa.
On s'étonne que "jpy (M), dernier nom d'une énuméralion, ne soit pas précédé
du vHiw. Il semble qu'il faille choisir entre ]'p'J\ qui est lu par environ 22 mss.
hébreux, G (AN) seconde leçon y.a\ O-jy-i'^ et dans Gen. (xxxvi, 27) par M Samar.
PVT, G (A) seconde leçon y.cà Ojxiv, — et ]p'^il lu par Chr. G lANy première leçon
/.a\ 'Icuaxâv (L) xa\ 'laaxa'v PV et Gen. G (A) première leçon xa\ I'.)jxdt;j. (L) xa\
Mouxdtx, cf. (D) xa\ 'l£orjxâ|ji. La leçon la plus ancienne de G dans Gen. est sans
aucun doute la première leçon de A. appuyée d'ailleurs par D et L; elle a inspiré
la première et la plus ancienne leçon de AN dans Chr., leçon dont on trouve
encore l'écho dans L. Il est à croire rju'il faut lire "(pyi, nom qui se retrouve d'ail-
43. Les vv. 43-50 transcrivent fidèlement Gen. xxxvi, 31 3!» il maii(|ue seule- :
un roi des fils d Israël (Ml'), on lit seulement dans G (B) xal ourot oi 3air/.£î4 aùt'ôv,
à quoi G (AN; ajoute : ot jia^iXeûji/Ti; ^v 'Koo'ijx. zy) toj ^aaiXEjaai pajtXea -oiç ••J'.oTi
LE PREMIER CRAPITRE DES PARALIPOMÈNES. 383
dans celle-ci (xxxvi, 31), lu par G (DE L) et confirmé par la version syro-hexa-
plaire, ou de èv 'IspouaaXrlijL lu par G (,\), nous avons en effet dans Chr. xoT; utoti;
'lapaTJX, conformément à M. Le fait qu'on lit h 'Eôwa dans Chr. G (A\) comme
dans Gen. G (AE et L) est sans conséquence. Mais par qui la teneur primitive de
l'hébreu est-elle conservée? Par M
ou par G (B)? Kittel (SBOT) et Benzinger se
prononcent en faveur de B; Kittel (Corn.) et Curtis, en faveur de M. Le Chroniqueur
a pu abréger le texte de Gen. comme le fait B; mais l'original hébreu de B a pu
aussi être en mauvais état par suite de mutilation, comme il lui arrive ailleurs
(cf. 11 ss., 17 6 ss., 29, 38. .3!)). Il est difficile de se prononcer avec fermeté. Cepen-
dant, comme, à partir de ce moment, le Chroniqueur reproduit sa source assez
complètement et sans en extraire une simple liste, les probabilités semblent être en
faveur de la Massore.
Avant que régnât etc. peut être tiré en deux sens. La Vulgate traduit (Chr.) :
antequam esset rex super fiUos Israël, et les Septante l'entendent de même dans
Gen. : -pb tou paaiXEuaai jîaatXia âv 'Icîpar(X ('IcsouaaXijfj.), et sans doute dans Chr.
Il ne peut être question d'abord de s'en tenir à la leçon bNTJ;''^, bien que ce soit
celle des Septante et de deux mss. hébreux dans la Genèse. Sn'TC,"' iJlS, qui est
moins attendu, a toutes les chances d'originalité, sans compter les témoignages
positifs qui l'appuient. Mais la traduction de V est acceptée par Driver dans Gen.
et par Bertheau, Oettli et Kittel dans Chr. Elle n'est pourtant pas heureuse. Le S
indique ici le génitif, lequel n'a pu être exprimé par l'état construit, le nom "j'^a
ayant dû rester indéterminé Gesenius-Kautzsch, 129 c). On peut alors entendre
(cf. :
« avant que régnât (sur Edom) un roi des fils d'Israël », ou bien « avant que régnât :
(absolument) un roi des fils d'Israël ». Dans le second cas, il est question de Saùl;
dans le premier, il s'agit de David qui conquit Edom et y substitua l'autorité des
rois Israélites à celle des rois iduméens (II Sam. viii, 14). Cette interprétation est
seule vraisemblable : la liste des rois d'Édom est naturellement close le jour où
Édom perd son indépendance (^Dillmann, Holzmann, Gunkel, Skinner, Curtis). —
Fidèle à sa méthode, P intercale avant l'énumération des rois les mots : « et régna
sur Edom », empruntés à Gen. xxxvi, 31.
]2 'jhl devient dans G (B) BâXax u'.b; BtMc. (A) Baiwp (L) Scjrçwp. Cette singu-
"liyn
lière leçon de L se retrouve dans la version arménienne du texte parallèle de Gen.
(xxxvi, 32) elle provient de Nombr. xxii, 4 où l'on trouve, dans les Septante, un
:
tions dans Gunkel et Skinner). En tout cas, co ne saurait tirer argument de ce que
le Targum remplace ici 'jhz par U'j^2 les traducteurs ont été influencés par les
:
lu lieu de riTty helhib, on a n"'"li? gcrc avec G (L) 'EuîO V Auith P t^.a^ et avec
Gen. 'xxxvi, 35) M Samar. VPÏ; mais Chr. G (BN) rsBOai'ix (A) TeOecifx, Gen.
G (ADEL; rseOat'a (— C^r'J?).
Safiai (faute d'onciale; cf. L Sa6aà) et Gen. G (A) SaXapiâ (D) SafJiaXâ (E) SaXai,
Syro-hexa plaire \ya \cr>.
Dans G(B). les VV. 47 6-49 a, de xat àoaaîXeuaEV àv-' aÙTou i]a[Aai à zal (ÎTiéOavEv
iiaoûX, soit donc les règnes de Semla et de Saùl, ont été déplacés et transportés à la
suite du V. .51 après les mots : /al àjiéGavEv 'Aooi. En outre, les indications relatives
à Iladad difl'èrent dans B, comme il sera indiqué en son lieu. G (A) suit M pour l'en-
semble, mais à l'origine ne différait pas de B et a été mis dans son état actuel par
correction d'après l'hébreu « et Hadad mourut ». G (A; retient
: au v. 51 en effet, après
encore la mort de Semla (en double par conséquent
notice relative au règne et à la
puisqu'il a déjà cette notice aux vv. 47 6-48 « conformément à M). Eu outre, il lui
manque au v. 50 deux mots de M, comme il sera noté plus loin. De tout ceci il
résulte que B représente ici encore l'état original de G, dont il se confirme que la
traduction fut faite sur un manuscrit hébreu en assez mauvais état.
48. Au lieu de la leçon ordinaire de G t^; naoà TOTajio'v, on lit dans G (19 108
121 =: L) Toy 7:oTa[j.ûu.
50. A pn S>2, plusieurs mss. hébreux, G (BA) et dans Gen. (xxxvi, 39) MGT
(mais non Samar. P) ajoutent n2,DÎ? Ces deux mots auront été introduits dans la"p.-
version grecque des Chroniques à une date très rapprochée des origines et sans
doute par le traducteur lui-même, probablement sous l'influence de la Genèse des
Septante. Les copistes hébreux auront de même subi l'influence du texte massoré-
tique de la Genèse.
-Tn MG (BA) LrVP et Gen. (wxvi, 39) 40 mss. hébreux, Samar.; mais 'Mr\
Chr. plusieurs mss. hébreux et Gen. MTV, cf. G (D) 'Apao (A EL) 'Aoàô (pour
lin?). Gunkel, Skinner, Benzinger maintiennent la première forme; Kittel {SBOT,
Com.) adopte la seconde. Il peut y avoir eu plusieurs Hadad en Edom comme il
y eut plusieurs Ben-IIadad en Syrie (I R. w, 18 ss. xx, 1 ss. Il R. xiii, 24 s.), : ;
dans Chr. est la moins attestée. D'autre part le traducteur grec a évidemment puisé
dans la Genèse des Septante, dont la leçon a toutes chances d'être une corruption
de "'JZ : il était tout naturel de r.micncr lui inun inconnu ou douteux à mi nom plus
connu. D'autre part, dit Gunkel, il est peu vraisemblable qu'Kdom se soit étendu
jusqu'à Beth Pe'or (F3eut. m, 29; IV, 46; xxxiv. «i; Jos. \in, 20). Voir aux vv. .36
dans G (AIN) elle s'arrête sur le mot IMxTpao. Geu. \v\vi, 39 est conforme au texte
massorétique de Clir. dans tous les témoins, sauf dans G (dont L ne diffère pas) et
« eau d'or » est un nom de lieu, et non pas de personne, et se retrouverait, cor-
rompu en nn7 f", dans Deut. i, 1. La correction est séduisante, et le moins que
l'on puisse dire est que la leçon de M est très douteuse.
Sauf les trois premiers mots, dont l'origine et la portée sont
•51. à examiner, les
vv. 51-54 reproduisent littéralement Gen. \xxvi, 40^- 43a.
La liste des chefs d'Édom est introduite, dans Gen. xxxvi, 40, par une formule
qui la laisse indépendante de la liste des rois les chefs peuvent avoir existé en
:
même temps que les rois ou postérieurement, et même ils pourraient être antérieurs
si les deux listes proviennent de sources différentes. Mais les Chroniques, avant de
résumer la formule d'introduction de la Genèse en ces mots « et les chefs d'Edom :
deux propositions juxtaposées (MGP) donnent à entendre que les chefs ont succédé
aux rois, si bien que V explique Adad autem mortuo duces pro regibus esse coe-
:
î^Sx prend un sens purement local et désigne surtout un territoire (B. Luther,
ZATW, 1901, p. 6). De fait, les noms énumérés dans les vv. 51 à 54 sont en partie
des noms de clans et en partie des noms de lieux (Driver). Ils désignent sans aucun
doute des subdivisions territoriales ou des tribus, peut-être les districts maintenus
par David après la conquête comme bases de son administration. On doit donc con-
sidérer i^'SN comme étant à l'état construit et traduire : « le chef de Thamna etc. »
(Gunkel, Driver, Oettli, Curtis), comme G (Chr. Gen.) semble l'avoir compris, et
non pas : « le chef Thamna, etc. » (Kittel, Kautzsch) comme font G (L) P dans Chr. ;
cette interprétation est d'ailleurs expressément indiquée par les formules d'intro-
386 REVUE BIBLIQUE.
ductiou et de conclusion contenues dans la Genèse (xx.x.vi, 40, 43). La liste des rois
était d'ordre chronologique; celle des chefs est d'ordre topographique.
W. Roliertson Smith (Journal of Philolog;/, 1880, IX. 90), R. Eckardt (ZATW,
1893, 85), C. Siegfried und B. Stade {Hcbr. Wurtcrbuch zum A. T., Leipzig. 1893).
Ed. Meyer {Die Israeliten und ihre Nachbarstammc, Halle a. S., 1906, p. 329 s.)
pensent que s^lSx est à corriger en rjSx, soit dans Gen. xxxvi, 40-43, soit dans
I Chr. I, 51-54. Mais Gunkel fait observer que Gen, xxv, 16, dans un contexte
semblable, parle de « princes » (CVS'bj) d'Ismaël. En fait, ies noms donnés sont bien
ceux des clans ou districts; mais il est assez naturel de désigner les administrateurs
de provinces ou de tribus en se servant du nom même des territoires aux destinées
desquels ils président. Or la tradition tout entière est en faveur deniSx depuis les
introducteurs des maires lectionis jusqu'aux traducteurs grecs et même jusqu'à l'au-
teur des Chroniques, qui a certainement entendu donner une liste de chefs et non
pas de .clans : le contexte antérieur \. 51) en témoigne assez. La question de la
substitution de î^'^x à ^iSx se pose donc tout au plus pour la Genèse; elle n'intéresse
les Septante auront donc lu ISÏ ^'T'X (cf. vv. 36 et 40). Il faut sans doule maintenir
à la fois les celle de M et celle de G, comme le fait sous la forme
deux leçons,
Ernm, Fazoin Chronique anonyme éditée par I'. de Lagarde (Sepluat/inta-
{Fazoïij la
II
Ch. VII, 28 Et il arriva, lorsqu'il eut achevé ces paroles, que les
:
Ch. XIX, 1 : Et il wriva, lorsqu'il eut achevé ces paroles, que Jésus
sortit de la Galilée.
Ch. XXVI, i : Et il arriva, lorsqu'il eut achevé toutes ces paroles,
que Jésus dit à ses disciples.
Il y a lieu de remarquer cette expression tout à fait hébraïque :
constances, et, s'il donne plus de choses que les autres synoptiques
quin'ont pas entendu le Christ, c'est qu'en réalité ces développements
particuliers, plus fidèlement retenus par lui, ont fait partie de ces dis-
cours mêmes. Observation peu démonstrative : car il n'est pas inter-
dit à un témoin de préférer un ordre logique, et, pour donner un
ensemble plus complet sur un point de doctrine, de réunir des paroles
prononcées en des temps divers. Du reste le contenu du premier
évangile ne se présente point en général comme le témoignage direct
et particulier d'un témoin;
il parait plutôt impersonnel, comme la
fixation par de la première prédication des apôtres à .lérusalem.
écrit
Ce n'est pas qu'on doive regarder ces cinq instructions du premier
évangile comme une sorte de marqueterie, une simple compilation, par
laquelle saint Matthieu de plusieurs paroles de Notre-Scigneur aurait
composé lui-même un discours. Non, le discours a été réellement
prononcé dans la circonstance indiquée, mais à son organisme
primitif, la catéchèse de Jérusalem ou l'évangélistc, alin de présenter
un ensemble plus complet, ont ajouté quelques compléments pro-
venant d'autres allocutions.
Tout le monde reconnaît que les miracles des ch. viii et ix ne sont
pas groupés selon l'ordre chronologique les écrits de saint Luc
:
prouvent que ces miracles doivent élic placés à des éi)oques diverses
de la vie de Jésus-Christ. Saint Matthieu a donc eu, en les groupant
ainsi, un dessein didactique, conforme à l'intention générale de son
saint Luc ces mêmes frai;meiits placés, non pas dans les cinq grandes
instructions, que nous trouvons chez lui également, mais dans un
autre contexte, qui explique d'une manière beaucoup plus satisfai-
sante la portée des paroles et l'cmploj des images et des expressions.
Qu'on ne vienne pas dire que Notre-Seigneur a pu revenir plusieurs
fois sur les mêmes enseignements et les donner d'abord dans la
circonstance marquée par saint iMatthieuet ensuite de la manière que
rapporte S. Luc. Ilque certaines sentences ont dû revenir
est vrai
plus d'une fois dans la prédication du divin Maître l'expression de :
(Luc, XII, 21; xviii, 14; Matth., xxiii, 12), ou encore cette locution
proverbiale : « On n'allume pas une lampe pour la mettre sous le
tre savait bien que la répétition est une excellente méthode d'éduca-
tion. Mais il n'en était pas réduit à redire ces enseignements toujours
de la même façon, avec les mêmes images; il devait les reprendre
sous les formes les plus variées. Ce n'est pas d'une bonne e.xégèse de
lui faire répéter mot à mot une leçon ou de lui faire improviser plu-
sieurs fois, absolument de la même façon, le même discours. Il est
dans ces béatitudes, vous êtes dans les meilleures conditions pour
entrer dans le royaume nouveau ; ilest fait pour vous (Matth., v, 3-12).
Après cet appel, le divin Maître, répondant en quelques mots à l'ob-
jection qu'avait dû faire déjà plus d'un pharisien, assure qu'il n'est
pas venu abroger la loi, mais l'accomplir, la conduire à sa perfection
(Matth., V, 17-19).
aborde alors son sujet qui se ramène à ces trois pensées, formu-
Il
excellente que celle des scribes et des pharisiens, vous n'entrerez pas
dans le royaume des cieux (v, 20).
2" Gardez-vous de faire vos œuvres de justice devant les hommes
(v, 38-i2); 5" de l'amour du prochain (v, i3-i7). Dans tous ces exem-
ples le divin Maître défend le mal non seulement dans l'acte exté-
rieur, mais justju au désir et à la pensée. 11 veut qu'on rende le bien
pour lemal et qu'on aime même ses ennemis. Ces développements se
terminent par une maxime qui sert de conclusion à cette partie : être
parfait comme le Père céleste.
Pour expliquer le second point, où il veut montrer qu il ne faut
QUEr.Ol'ES PROCEDES LITTÉRAIRES DE SAINT MATTHIEU. 391
pas agir pour être vu des hommes, comme font les pharisiens, il
pres défauts (vu, 1-6), mais juger l'arbre à ses fruits (vu, 13-20).
La conclusion du discours (vu, 21-27) Il ne suffit pas d'entendre
:
prier; mais il faut demander avec instance leçon illustrée par une
:
faire le bien pour être vu des hommes. Trois exemples sont choisis
parmi les manifestations les plus ordinaires de la piété pharisaïque :
patoire est vaine. Ce sont des apôtres qui ont accompagné lo Snuveur
à .lérusaletn, (ra[)rès !<• récit «le s;iinl Luc <•! précr-ih-iiinicnl ils se
QUELQUES PROCÉDÉS LITTÉRAIRES DE SAINT MATTHIEU. 39:}
sera ouvert.
Prenons un second exemple. L'exhortation au détachement des biens
de la terre et à la confiance en la Providence est présentée dans saint
Luc au chap. xii, 13-34. Un incident, la demande de juger une ques-
tion d'intérêt, amène Jésus à instruire la foule qui l'entoure sur la
valeur des biens de ce monde, en lui proposant la parabole du riche
insensé. Celui-ci ne songe qu'à s'enrichir, qu'à agrandir ses posses-
sions, à construire des greniers plus vastes pour amasser toujours
davantage et jouir en paix de ses richesses. Insensé qui ne fait rien
pour Dieu et qui, la nuit même où il forme ses projets cupides, voit la
mort ruiner ses rêves d'avenir (Luc, xii, 15-21). Après cette leçon, se
tournant vers ses disciples, Jésus les in^dte à chercher le royaume
de Dieu et sa justice et à se confier en la Providence pour le soin des
nécessités de la vie (xii, 22-34). Et il les exhorte au détachement
(33-34).
Ces enseignements sont transportés dans le sermon sur la Montagne,
mais morcelés et détachés des circonstances qui les ont provoqués;
et on n'y voit pas non plus la parabole, qui explique plusieurs des
expressions et des images employées par le Sauveur dans ses conseils
sur le détachement et la confiance.
Les conseils sur le détachement qui terminent, comme une conclu-
sion, les leçons du divin Maître dans saint Luc, sont placés par saint
Matthieu en tête du même enseignement (vi, 19-22). Son exhortation
à la confiance en la Providence (vi, 25-34;, pour les nécessités de la \âe,
reproduit les mêmes expressions que danssaint Luc; mais la parabole
omise n'est plus pour expliquer l'emploi des images et des expres-
là
sions du flivin Maître, par exemple « Les oiseaux du ciel ne sèment,
:
Tous ces enseig-nements n'ont pu être donnés deux fois avec les
mêmes développements, les mêmes expressions, les mêmes images.
D'autre part, le contexte de saint Luc est évidemment préférable. Le
souci habituel qu'il a de placer les paroles dans leur cadre historique
nous est un garant que sa disposition des faits et des discours est 1(\
une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais on la met sur le can-
délaljre afin qu'elle éclaire tous ceux qui sont dans la maison. » De fait,
on peut retrouver ce proverbe deux fois dans saint Luc, viii, 10 etxi, 33.
Maison voudra bien remarquer cependant que dans ce second passage
de saint Luc, elle est suivie, xi, 3i, de cette leçon pratique « L'œil :
est la lampe du corps. Lorsque ton œil est sain, tout ton corps est dans
la lumière; mais dès qu'il est malade, ton corps est dans les ténèbres.
Prends donc garde que la lumière qui est en toi ne soit ténèbres. Si
donc tout ton corps est dans la lumière, n'ayant aucune partie dans les
ténèbres, il sera lumineux tout entier comme lorsque la lampe l'illu-
mine de son éclat. » Ces deux sentences forment un tout. Or la se-
conde sentence, détachée de la première, est placée par saint Mat-
thieu à la suite de la seconde partie du sermon (vi, 22-23), tandis que
la première est restée en tête.
paraboles, que Jésus s'éloigna de ne nous oblige pas plus que la là,
remarcpie du verset 3V, à croire que les sept paraboles ont été
prononcées dans la môme circonstance. Cette formule est la conclusion
REVUE BIBLIQUE 191G. — N. S., T. XIII. 26
39G RKVUE RIBLl^UE.
une première (ix, 35-x, 15) qui regarde le moment où il les envoie,
la seconde (x, 16-xii, l)qui se rapporte à une époque plus éloignée.
Dans la première partie, après avoir raconté l'état du peuple
d'Israël sans pasteur et le besoin d'ouvriers évangéliques pour la
moisson spirituelle, saint Matthieu énumère les noms des douze
apôtres. N'ayant pas, comme saint Luc et saint Marc, parlé de l'élection
des douze, à l'époque du sermon sur la Montagne, il se contente,
avant de raconter leur envoi en mission, de rappeler leurs noms. Il
expose alors les instructions que Jésus leur donne avant leur départ.
Cette première partie se retrouve, mais plus résumée, dans S. Marc
(vi, 7-13). Elle a conmie parallèle deux passages de saint Luc : le
dans saint Luc et celles qui concernent les disciples dans le même
évangile, et d'autre pari, entre les instructions aux apôtres dans saint
QUEl.QrKS PROCÉnKS IJTTKRAIHKS [)E SAINT MATTHIEU. 397
que Notre-Seigneur a envoyé les uns et les autres en leur faisant ses
recommandations. Klles ne difTèrent que par le champ d'action,
les apôtres ayant été envoyés dans la Galilée, et les 72 disciples dans
la Décapote et la Pérée. Nous l'avons montré ailleurs [Revue pratique
d'Apologétique, 15 août, p. Gil et 1" oct., p. 5 et suiv,), et nous avons
en même temps pu fixer la date de ce voyage par le rapprochement
du ch. v de saint Jean avec les textes de saint Luc racontant la mission
des apôtres et des disciples. Après la mission des apôtres, Jésus quitte
avis concernant les missions futures dans le monde. Même ainsi enten-
dues, ces instructions ne paraissent guère à propos dans le discours
qui procéda la mission de Galilée. Aussi saint Luc les renvoie-t-il à
une circonstance plus tardive (xii, 1-9 et 51-53), après les sévères
reproches adressés aux scribes et aux pharisiens, héritiers de l'esprit
de leurs pères qui ont maltraité et tué les prophètes envoyés par Dieu
à son peuple. Ce contexte introduit plus naturellement des avis sur la
façon dont les nouveaux envoyés divins devront se comporter, dans
l'avenir, en face de semblables traitements.
Au lieu d'insérer ces conseils à la suite des instructions du Sauveur
à ses apôtres sur leur première mission, comme saint Matthieu, le
second évangéliste les a "fait entrer dans le grand discours sur la
ruine de Jérusalem (xiii, 9-13). Nous verrons plus loin la raison de ce
procédé.
Ce discours de saint Matthieu se termine par la même formule que
les précédents : « Et il arriva, lorsqu'il eut achevé de donner ces pres-
criptions à ses douze disciples, que Jésus partit de là pour enseigner
et prêcher dans leurs villes. »
fin des temps, saint Luc place le temps des nations. « Jérusalem sera
foulée aux pieds par les Genfils jus<prà ce que le temps des nations
soit accompli ^) (\xi, ^\). pendant de ce temps des nations,
Pour faire le
qui sépare les deux événements dans saint Luc, le premier évangéliste
salem (xxiv, 32-35; cf. Marc, xiii, 28-31; Luc, xxi, 29-33); secon-
dement le jour de la catastrophe llnale (xxi, 36; cf. Marc, xiii, 32
et Luc, XXI, 34).
Jusqu'ici entre les trois synoptiques le parallélisme est assez cons-
tant, sauf, comme nous l'avons remarqué, pour le passage emprunté
par le premier et le second évangéliste à un autre discours et inter-
calé entre les deux descriptions des signes, en regard du temps des
nations de saint Luc De plus saint Marc a inséré aussi au milieu de la
description des signes relatifs à la ruine de Jérusalem un fragment
d'une autre instruction que saint Luc nous donne au chap. xii et que
saint Matthieu a fait entrer dans son troisième grand discours.
Mais quand il s'agit de tirer la conclusion de ce grand discours
eschatologique et d'exposer les conseils de vigilance donnés par le di-
vin Maître, on constate plus de divergences entre les synoptiques. Ces
conseils sont très courts dans saint Marc (xin, 33-37) et dans saint
Luc développe beaucoup plus longue-
(XXI, 3i-36). Saint Matthieu les
ment en empruntant à deux autres discours, contenus' dans le
les
chap. XVII, 26-3G et le chap. xii, 39-i6 de saint Luc.
A ces conseils de vigilance saint Matthieu ajoute deux paraboles qui
,
nier (xxv, 31-16), qui ne parait pas venir comme règlement de compte
général, de toutes les bonnes et les mauvaises actions des hommes,
mais simplement comme conclusion d'un discours sur la charité.
Il n'a pas d'autre moyen de les conserver, s'il veut être fidèle à
respecter la division quadripartite, puisqu'il n'a pas eu recours au
procédé de saint Luc. Ce dernier, dans la troisième partie du plan
quadripartite, a donné avant le dernier voyage de Jésus à Jérusalem
doux autres voyages qui sont placés après la section Galilée, comme
s'ils en formaient la suite, mais qui en réalité ont leur point de suture
à divers moments du séjour galiléen. Si ces deux voyages, correspon-
dant, l'un à la première fête des tabernacles (Joan., v), l'autre à la
fête de la Dédicace (Joan., x), ont pu occuper cette place dans le plan
de saint Luc, c'est qu'ils ont été privés de toute désignation précise
de temps et de lieu. Au premier abord (et c'est ainsi qu'on les a trop
longtemps entendus), ils paraissent ne former qu'un grand voyage
qu'on pourrait prendre pour le dernier, mais en réalité cette section
comprend plusieurs départs de Galilée et plusieurs arrivées à Jéru-
salem (1). GrAce à ce procédé, saint Luc a pu ajouter à la catéchèse,
sans briser son plan, les faits et les discours des ch. x à xvii de son
évangile. Il a pu nous faire connaître les circonstances de nombreuses
paroles de Jésus prononcées en dehors de la Galilée et que le premier
E. Levesque.
Le sens que nous avions donnô dans l'article de la Wcvue bililvpic, janvier inin :
Monsieur le Secrétaire,
.le ne puis laisser passer sans protestation les explications de M. Levesque d;ins
un article intitulé : (Jnclqitrs procédés littéraires de s/iint Muttlncu (licrur liibtiquc,
janvier -avril liilO, pages 17 1!), à partir de : « Ces trois constatations, etc. »).
(1) Cf. Uevuc prat. d' apologétique, 1" aortl rjiO, p. l>2%.
QUELQUES PROCÉDÉS LITTÉRAIRES DE SAINT MATTHIEU. 403
à un fait dont il n'a pas parlé et que son lecteur peut fort bien ignorer. Enfin
expliquer l'assertion d'un historien comme une allusion à un fait rapporté par
d'autres historiens me paraît être une méthode fâcheuse et fausse.
Abbé J. ViTEAU.
Voici ma réponse :
Monsieur le Secrétaire,
tout le monde connaît les études sur grec du Nouveau Testament. Malgré
le
quelques-uns. Ce que j'ai affirmé c'est qu'il n'avait pas ce sens dans le passage
de saint Matthieu ;
j'ajoute même qu'il ne peut pas l'avoir.
j'avais bien remarqué cette acception de oî oi pour -tvé;, quelques-uns, dans plu-
sieurs grammaires ou dictionnaires du Nouveau Testament. Je savais même qu'un
scoliaste de Lucien s'était avisé de rapprocher une phrase du Timon, IV, de l'ex-
ont pillé tes temples, oî 0= ils (ou quelques-uns) ont été jusqu'à porter les mains
sur toi à Olympie ». Que dans cette phrase de Lucien oî 81 soit l'équivalent de Ttvé;,
transcat. Mais vouloir justifier le sens de ce passage de Lucien en le rapprochant
du texte de saint Matthieu prétendre y voir l'application de
et la même règle de
syntaxe, c'est en quoi le brave scoliaste s'est un peu fourré le doigt dans l'oeil
(et il n'est pas le seul!]. Il n'y a pas du tout parité dans les deux textes.
Beelen, partitio quidem fit, sed talis ut ii qui dicantur oî o": coc;itandi sint numéro
raulto pauciores quam illi qui iiis opponuntur; quare et in sirailibus locis o'i oi red-
diderim non alii sed nomiulli ».
Mais ce n'est pas du tout le cas de saint Matthieu, xxviii, 16 : « Les onze dis-
ciples partirent en Galilée à la montagne que Jésus leur avait indiquée, xal îôovte;
Les onze disciples sont donc arrivés à la montagne
aÙTÔv zpoa£y.jvr,aav, oi o\ èofaiaTav. »
que Jésus leur avait précédemment indiquée; et eux, les onze, en le voyant,
l'adorèrent. Mais si les onze, c'est-à-dire la totalité des apôtres, l'adorent, que
reste-t-il pour que oî U ait un sens partitif et forme un groupe distinct? Il reste
zéro. Ot Ô£ ne peut être une partie de la totalité, onze, à laquelle on ferait faire
une chose particulière que ne feraient pas les onze, parce que, si les onze adorent,
c'est qu'ils croient, et, s'ils croient, ils ne peuvent être dans le doute. La logique
la plus élémentaire s'oppose donc à ce qu'en cet endroit o- U ait un sens partitif,
il ne peut désigner que ceux-ci, c'est-à-dire les onze, et par conséquent l'aoriste
èôt'araaav ayant le sens du plus-que-parfait, il faut traduire : ceu.\-ci, ou plutôt eux
qui nnùent été dans le doute.
Dans un autre passage de saint Matthieu (x.xvi, 67), o- U a ce sens de quelques-
uns ou plutôt d'autres. « Alors ils lui crachèrent au visage et lui donnèrent des
coups de poing, oi ?>l quelques-uns (ou d'autres) le souffletèrent ». Je préférerais
d'autres à quelques-uns, parce que, dans nos évangiles, en regard de 6 •J.é^^ on trouve
souvent aXXoç ou itepo? à la place de ô os.
2" Que oiardreiv signifie douter, hésiter, je suis tout à fait d'accord avec mon
contradicteur. Aussi daos mon article je n'ai pas traduit autrement ce verbe :
récit des disciples d'Emmaùs les ébranlent, ils ne savent que croire. Enfin quand
le Christ lui-même se présente à eux, qu'ils l'ont devant les yeux, qu'ils l'entendent,
qu'ils le touchent, ils n'osent croire a cause même de la joie inespérée qu'ils ont de le
revoir (Luc, vxiv, 41). Ils ne peuvent croire à leur bonheur : ils croient à l'évi-
dence, mais d'autre part il? n'osent croire. Après la catastrophe qui avait anéanti
toutes leurs espérances, le retrouver, le revoir ainsi plein de vie, est-ce possible ?
c'est trop de bonheur! Ils doutaient, ou plutôt ils étaient comme hésitant encore, tant
leur joie était grande. Ce n'est pas du doute proprement dit que cette hésitation de
leur âme qui croit et n'ose croire, et l'évangéliste appelle cela à;:t<jrîa, incrédulité :
incrédulité qui ucst que l'hésitation d'une foi (|ui croit, mais n'ose s'arrêter à sou
objet, tant il renverse toutes les prévisions humaines. Je pouvais donc renfermer
tous ces sentiments sous le nom de doute ou d'incrédulité. Par cette simple rcuiar-
(|ue, eux qui avaient été dans le doute, « saint Matthieu, disais-je, ferait allusion aux
dilférentes apparitions de Jérusalem qui avaient eu pour but de réduire l'incrédulité
ou les hésitations des apôires ».
Mais, dit M. V. « Kxpli(|uer l'assertion d'im historien, comme une allusion à
:
un fait rapporté par d'autres historiens, me paraît être une méthode f.kheuse
et fausse ». J'ai le regret de liù f.iire (tbserver que s'il ne l'admet pas, il n'est pas
QUELQUES PROCÉDÉS IJTTÉRAIRES DE SAINT MATTHIEU. 405
composant, dans leur cabinet de travail, des récits d'après des archives secrètes ou
des documents inaccessibles à leurs lecteurs, avec la juste prétention de leur apprendre
du nouveau. Un historien de cette sorte ne peut sans rime ni raison faire allusion
à un fait dont il n'a pas parlr et que son lecteur peut fort bien ignorer. Mais nos
évangélistes ne font que recueillir les faits et paroles du Christ quotidiennement
prêches, que les fidèles connaissaient les avoir mainte fois
parfaitement pour
entendus; dont ils recueillaient dans leur mémoire les moindres parcelles pour en
faire la règle de leur conduite, pour en vivre et faire ainsi passer le Christ dans
leur vie, qu'il s'agisse de la catéchèse élémentaire conservée dans les synoptiques,
ou de l'enseignement plus élevé que donnaient aussi les apôtres et que saint Jean
nous a transmis par écrit d'après ses souvenirs personnels après l'avoir souvent
donné de vive voix. On comprend que dans de telles conditions, ce n'est pas
sans rime ni raison, qu'un évangéliste puisse faire une simple allusion à un fait
raconté dans la prédication quotidienne et qu'un autre évangéliste a jugé bon de
narrer. Cela se comprend aisément. Puis c'est un fait, qu'il est facile de constater
dans une étude comparative des évangiles. Il n'y a pas à raisonner contre les faits,
parce que, dit Euripide, ça ne leur fait rien, [xilu yàp aùxo^ oùosv.
E. L
POUR COMMENTER LES PARABOLES
ÉVANGÉLIQUES
Trench, Notes on the Parables of our Lord, qui a joui, chez nos
voisins d'outre-Manche, d'un domi-sièclc de vogue (1).
Vers la lin du xix' siècle, on a réalisé quelques progrès. Les com-
mentateurs^ commencent il faire de sérieux cH'orts pour être métho-
di(jues, mais sans y réussir encore suffisamment.
Je fais surtout allusion au commentaire de Bruce (2), excellent par
bien des côtés, mais (jui Intp souvent a le fort de substituer le pro-
cédé intuitif au procédé déductif. Il croit deviner trop vite ce que le
(1) .lt> w (lis rien de quanlilc d'autres cointnenlaires. O^crils surtout en franrais ou en
anglais.
(2) The pnrabolic Tcarliinj of Christ, qui sera rite da|»r(is la liuitit^inc édition, tS'jO.
POUR COMMENTER LES PARARO[.ES ÉVANCÉLIQUES. 407
qu'elles racontent.
cations.
qui, ayant perdu une drachme sur les dix qu'elle possède, n'allume
sa lampe, ne balaie sa maison et ne cherche soigneusement sa pièce,
jusqu'à ce qu'elle la trouve? Et lorsqu'elle l'a trouvée, ne convo-
que-t-elle pas ses amies et ses voisines, leur disant : Félicitez-moi
donc de ce que j'ai trouvé la perdue? » (Le,
drachme que j'avais
XV, 8-9). A quoi se réduisent les faits essentiels de ce charmant
tableau? A deux choses la femme cherche avec soin sa drachme,
:
et, l'ayant trouvée, court s'en féliciter auprès de ses amies. Les
II
dire qu'il nous faut dégager les leçons principales ou secondaires que
le paraboliste veut nous inculquer.
410 REVUE BIBLIQUE.
qui la termine, soit enfin dans le récit lui-même, il y ait une indi-
cation quelconque, capable de diriger notre recherche et <lc satis-
les sages seules purent se joindre au cortège nuptial, dont les étour-
bonheur, au point qu'il excitait l'envie de celui qui fut l'un des
heureux de ce monde;
Ainsi il arrive que la mort vient subitement renverser les condi-
tions des hommes, les riches échangeant leur luxe pour les tourments
de la géhenne, les pauvres leurs plaies et leurs haillons pour la
félicité du paradis. »
Morale ne pas se fier aux richesses, puisqu'elles sont, par elles-
:
les derniers arrivés et qu'on leur remette un denier. A cette vue, les
premiers s'imag-inent que leur propre salaire va être augmenté; à
leur grand désappointement, ils ne touchent eux-mt'imes qu'un de-
(1) Bruce pense que la clef de la parabole se trouve dans le proverbe : « Beaucoup seront
les derniers qui furent les premiers » (Mt., xix, 30), et il esliine cette fois que la leçon com-
porte un renversement des situations morales, ceux qui étaient les premiers dans le service
de Dieu devenant les derniers, dans l'estime divine, par l'orgueil, la vaine gloire et l'eslime
de soi {op. laud., p. 188; cf. p. 186). On voit l'écart de cette interprétation par rapport à
celle que suggère le schéma parabolique.
414 REVUE BIBLIQUE.
traie ne doit pas être confondue avec les idées secondaires et que
le fait principal doit être retenu pour éclairer, par sa correspondance
et son analogie, la vérité plus haute qu'il s'agit d'expliquer.
Ici intervient une autre remarque, dont très peu d'exégètes ont tenu
compte et qui cependant est de nature à rendre de précieux services.
une correspondance exacte entre les
Faut-il s'attendre à trouver
deux termes de la comparaison qui forment le fond de toute para-
bole? Si on formulait aujourd'hui les articles d'un code littéraire à
l'usage des auteurs modernes, on n'hésiterait pas à répondre par
l'affirmative. Notre besoin de logique, la rigueur de notre esprit de
déduction exigent qu'il en soit ainsi. Personne n'oserait, je pense,
reprendre à son compte les consolations que Rabbi Éléazar ben Arach
prodiguait à son maître Jochanan ben Zakkaï, à l'occasion de la mort
de son fils : « Quelqu'un avait reçu du roi un objet en dépôt et
(dans le sentiment de sa responsabilité) il gémissait tous les jours :
— Toi aussi, ô maître, tu avais un fils qui était versé dans toutes les
branches de la science et qui maintenant est dégagé des péchés de
ce monde. Ne devrais-tu pas t'ouvrir à la consolation, puisque tu as
heureusement rendu ce dont Dieu t'avait confié la garde » (1)? A —
le prendre strictement, le discours de ce rabbin revient à ceci c De :
(1) Me, II, 17, il avait déjà dit, à l'adresse des Pharisiens : Je ne suis pas venu appeler
les justes, mais les pécheurs.
(2) Plusieurs commentateurs pensent que le (ils aine représente \es justes en général.
—
Mais ils oublient que la parabole vise en premier lieu les Pharisiens.
D'autres, tels que Trench, croient qu'il symbolise les justes médiocres, qui accom-
plissent la loi dans un esprit servile, mais se gardent des grandes fautes. Mais com- —
ment reconnaître dans ce portrait les Pharisiens de l'Évangile.'
Pour iJrureip. 2b'i], il représente les Pharisiens avec leurs bons et leurs mauvais rôles,
avec leur correction morale et leur orgueil. —
.Mais peut-on admettre que, par « leurs
bons côtés », ils soient assimilables aux enfants ciiéris de Dieu?
L'argument ad liominem coupe court à toutes ces dilhcultés.
POUR COMMENTER LES PARABOLES ÉVANGÉLIQUES. 417
III
nées, —
tandis que les traits paraboliques n'éclairent la réalité su-
périeure que par comparaison —
de là leur nom de paraboliques,
la parabole étant une comparaison développée.
Allégorique, un trait doit avoir avec la réalité correspondante une
analogie directe et étroite, puisqu'il en est la métaphore.
Parabolique, il qu'une analogie plus indi-
peut n'avoir avec elle
soir, dresse un mur de clôture, épierre son terrain, y plante des ceps
choisis. Mais tous ces traits ont une signification plus générale ils :
« De même que le vigneron fît tout ce qui était en son pouvoir pour
IV
opérée par le Messie entre les justes et les pécheurs sera équitable,
comme celle du vanneur séparant le froment de ses éléments impurs;
elle sera minutieuse aussi, comme celle du vanneur; et, comme elle
encore, elle sera définitive. — Quant au Royaume des cieux, nous
apprenons qu'il ne s'ouvrira qu'au vrai mérite, à la véritable sainteté,
422 REVUE BIBLIQUE.
que la société des bons y sera sans mélange, qu'on y jouira d'un
bonheur sans partage, en dehors duquel il n'y a d'autre perspective
que le malheur sans fm de la géhenne.
La même richesse se retrouve dans mainte parabole du divin Maitre :
Fontarabie.
Denis Buzv S. C. J.
MÉLANGES
PRINCIPES.
qui, je n'en doute pas, vous plaît ainsi qu'à tous ceux qui ont de la
prudence. Si c'est un crime de traduire les belles œuvres des Grecs,
il faut condamner Ennius, Maro, Plante, Gaecilius, Térence, Tullius et
les autres personnages éloquents qui ont emjirunté, non seulement
quelques lignes, mais de nombreux ch;ipitres de longs écrits ainsi et
objet non seulement les faits qui doivent se produire après beaucoup
de siècles, mais aussi des faits rapprochés qui suivent immédiate-
ment l'oracle. Nous autres hommes, nous avons l'habitude de penser
plus à nous qu'à nos descendants. Ézéchias disait Que la paix se fasse :
logue sur Abdias qu'il avait jadis interprété ce prophète, mais que
cette œuvre de jeunesse était à refaire. Rempli d'une sainte ardeur
pour l'étude des Écritures, il avait commenté allégoriquement Abdias
dont il ignorait l'histoire. Son esprit brûlait alors de connaître les
choses mystiques, et, comme il avait lu que tout était possible aux
« Les voies de Dieu sont droites et les justes y marcheront, mais les
voile placé devant nos yeux ne tombera que lorsque nous nous tour-
nerons vers le Seigneur. Alors le droit chemin s'étendra devant nos
de Jean Voici que j'envoie mon ange devant ta race. Quant à nous,
:
Les Juifs, moins que les autres, ne sauraient apporter quelque lu-
mière dans la compréhension des oracles divins. Pour eux tous les
prophètes sont un livre scellé, ce livre dont il est question dans Isaïc xi,
1 Le Nouveau Testament désigne sans ambages celui qui brisera les
1.
tue, l'esprit nous vivifie. Chez eux le brigand Barrabbas est relâché,
chez nous le Christ, Fils de Dieu, est délié, nobis C/n-isius Fiiius Dei
solvitur{i). Nous allons voir précisément comment saint Jérôme s'y
prend pour dégager le Messie de la lettre des oracles inspirés.
Il
dent les événements joyeux. La santé en ell'et est plus agréable après
la maladie, et l'étendue de la douleur se mue en un océan de joie.
Le propbète prédit le temps de la misère afin d'amener l'époque de
l'allégresse. Lorsque les calamités, dit-il, en seront venues au point
d'être comparables aux douleurs de l'enfantement, alors le temps de
la tribulation de Jacob, c'est-à-dire du peuple de Dieu, se changera
en prospérité. »
lique sous lequel il sera désigné et qui résume l'oracle, comme Em-
manuel dans Isaïe. Le Christ réalise évidemment cette condition
mais Diea seul dont règne n'est pas terrestre ni éphémère, mais
le
mais avec irj-xav. désigne une vierge cachée et secrète qui n'a jamais
paru aux reg-ards des hommes et qui est jalousement gardée par ses
parents. » La langue punique qui a des affinités avec l'hébreu appelle
une vierge aima, et même le latin aima pour sancta peut bien
dériver du mot hébreu. Kn tout cas, notre savant a beau faire appel
à tous ses souvenirs, il n'a jamais trouvé qu'une femme mariée ait
jamais été ainsi dénommée, mais il a toujours vu ce nom appliqué à
une jeune fille vierge. Celle-ci donnera le jour à un tils et il &cra
appelé Emmanuel^ ou mieux d'après l'hébreu et la traduction authen-
tique de saint Jérôme Et tu V appelleras du nom d'Emmanuel. Cet
:
enfant donc qui naîtra d'une vierg-e, est appelé maintenant Emma-
nuel par la maison de David parce qu'elle prouvera de fait, en étant
délivrée de deux rois ennemis, qu'elle possède Dieu avec elle. Il serait
également permis de rendre nx"ip par elle appellera en prenant la
vierge pour sujet, Matth. i, 23 présente un certain nombre de diver-
gences, suivant le sens de la phrase plutôt que l'ordre des termes.
Dans cet enfant les Hébreux veulent voir Ézéchias, fils d'Achaz, sous
lequel se place la prise de Samarie, ce qui est malaisé à prouver; les
judaïsants reconnaissent en lui un fils d'isaïe. Pour saint Jérôme le
sens général est celui-ci « Maison de David, conviée par Dieu à invo-
:
une femme contiendra un homme dans son sein. Il paraîtra sans doute
croître en âge et en sagesse après sa naissance, mais homme parfait
il restera enfermé le temps ordinaire dans le sein de la femme. Si
Aquila et Symmaque ont traduit comme lui, Jérôme n'ignore pas que
les LXX et Théodotion ont fait rendre à ce texte un tout autre sens :
r homme dont le souffle est dans les riarines, parce qu'il est regardé
comme élevé. Il se demande pour quel motif les Septante se sont
al)stenus de rendre en grec une prophétie si évidente sur le Christ.
D'autres l'ont traduite d'une façon ambiguë, ou l'ont mal interprétée,
refusaut de dire quelque chose de glorieux à l'adresse du Sauveur.
A la suite d'Origène, notre cxégète rcvendi([ue ce pa:3sage en faveur
du Christ Très-Haut, rappelant pour légitimer ce titre Luc i, 76 :
Tu es sorti jjour. le salut de ton peuple, pour le salut avec ton Christ.
Théodotiou l'Ébionite et Symmaque
se font remarquer par la pau-
vreté de leur sens : Tu
pour sauver ton Christ. Chose in-
es sorti
croyable et pourtant vraie, tandis que ces dcmi-chrétions ont traduit
à la juive, le Juil' Aquila présente une iiiter[)rélation chrétienne! La
Jésus ton Christ. l".rY;AOî- -oX) gmgoh. tov Xaiv cou cti b/jusOv Xpu-iv aou,
version qui s'explique par la manière de ponctuer -jn"''w'a"nN yt'iS.
Hn sait aussi que notre Vulgate contient Ilabacuc m, 18 dans cette
teneur Ego auton in domino gaudebo et exultaho in Deo Jesu mro.
:
Les L\\ ont traduit ly^^i par -m qm~%z\. ;j.;j, 7non Sauveur, terme (jue
l'ange s'est chargé d'interpréter et il sera appelé Jésus, car il
:
sauvera son jteujde [Mntih. i, 21). Nous avons déjà ronianjur plus
h.iul 1.1 léscivf de saint Irrùme ;\ l'égard de linlerprétation cou-
MELANGES. 43^
ici et au chapitre vi, 12, nom qui nous reporte sans eli'ort aux ora-
été réservé aux troupes régulières des lésions. Alors les anges
purent chanter à bon droit Gloire à Dieu dan^ les hauteurs, et,
:
nité, d'autant moins que saint Mallhicu (ii, 0) avait cité lout au long-
ée témoignage. Bethléem est mentionnée, cela suffit. 11 importe
peu .que Ion signale des divergences entre le texte de l'évangile et
ceux des Septante et du texte raassorétiquc. Peut-être Tévangéliste
aurait-il eu l'intention de reprendre la négligence des scribes et des
prêtres interrogés par Hérode, en donnant le texte tel cjii'ils l'auraient
cité? L'exégète ne s'arrête pas à cette supposition qui lui traverse
l'esprit, étant donné que ce n'était pas un cas unique pour les cita-
tions de l'Ancien Testament qui se rencontrent dans le Nouveau. Ces
changements dans l'ordre des membres de phrases, dans les mots,
et parfois dans le sens est imputable à un défaut de mémoire, plutôt
qu'à une inadvertance dans la lecture (1). Jérôme s'en tiendra au
texte hébreu d'où il tire la naissance temporelle du Christ, fils de
David, clans l'humble bourgade de Bethléem, et la génération éter-
nelle du Verbe, créateur des temps, qui n'est point soumis à la mesure
du temps. Pour identifier Éphrata et Bethléem, il se sert de la glose
de la Ceiièse (xxxv, 10) « Rachel mourut et fut ensevelie sur le
:
ses enfants,' elle a refusé d'être consolée sur ses fils parce qu'ils ne
sont plus, saint Jérôme ne pouvait ne pas l'entendre de la désolation
motivée par le massacre des Innocents. Une question se posait
pourtant, comme il le déclare ouvertement, à savoir comment l'évan-
géliste a pu appliquer au carnage des petits enfants un témoignage
où le prophète avait clairement en vue les dix tribus, dont la princi-
pale d'ailleurs est loin d'être Éphraïm ou Éphrata. L'apologiste se
borne à répondre que Bethléem, qui signifie maison de pain, et
en héhreu, (|ui ne [)ouvait donc étie lu que par ceux (jui venaient du
judaïsme: ainsi il ne pouvait avoir l'intention de tromper les chrétiens
convertis de l'hellénisme. Vouloir en imposer aux Juifs était une folie
ou une maladresse folie de lancer un mensonge si évident, mala«
:
(I)Exponilque bénéficia quae in ips7im conlulerit Deus. Dum, inquit, esset puer et
parvulus, et caplus in Aegypto teneretur, intanlum eum dilexi, ut milterem serinim
meum Moysen, et ex Aegypto vocaretn fitium meiim, de quo diri in alto loco Filius :
primogenitus meus Israël... Veteris recordatur historiae quod vocaverit quidem per
Moysen et Aaron, qui vocaverunt eos ut egrederentur de Aegypto.
(2 Luc, II, 34.
440 REVUE BIBLIQUE.
dans le monde pour ouvrir les yeux de ceux qui ne voient pas et
pour aveugler ceux qui voient.
Il ne laisse pas dctre surprenant que Jérôme ait tiré si peu de parti
de l'oracle d'Aegée touchant la venue du désiré des nations et do la
gloire du second Temple. Laissant la paraphrase littérale pour s'élever
à une compréhension plus suhlime, il s'étend avec complaisance sur
l'édifice spirituel qui est tantôt l'Ame, tantôt l'Église. Le seul passage
ou il serre le texte d'un peu près parait tout d'abord assez équivoque.
Après la venue du désiré des nations^ la demeure du Seigneur est
remplie de gloire. Autant le maître est distant de l'esclave, autant la
maison du maître est supérieure à celle de l'esclave. Le contexte
marque ici une opposition entre le Temple et l'Eglise qui est la vraie
maison du Dieu A'ivant, d'après 1 Tim. m, 15. Pourquoi le commen-
tateur n'a-t-il pas tenté un rapprochement entre Aggéc ii, 9 et la
venue de l'Enfant Jésus au temple? Craignait-il d'accorder trop d'im-
portance au sanctuaire des Juifs? Ou n'a-t-il pas jugé à propos de faire
une application que les évangiles ne s'étaient pas permise? Il est
difficile de répondre. Plus exactement, le Christ n'est venu que dans
Jésus-Christ viendra (1 ). »
[A suivre.)
15 (iclitbie 1910.
Y. M. Abel.
Il
L'IIOMlCinE
plus encore que les Romains, la loi comme une révélation divine. Et
même lorsque Tesprit de nouveauté croit se donner libre carrière,
combien d'éléments anciens demeurent! Quelle ne fut pas l'influence
les deux tiers aux enfants du premier lit, le tiers à ceux du second (2).
Ces deux dispositions ne pourraient faire partie d'un même code.
Aussi rien de semblable n'est allég-ué par M. Jastrow à l'intérieur du
Code de Hammourabi. Je ne vois qu'un cas où il insinue un peu de
contrariété. D'après le § 158, le fils qui, après la mort de son père,
a un commerce illicite avec la femme principale de son père, mais
qui n'est pas sa mère, doit être déshérité. Ce serait une modifica-
tion du statut du 157 qui ordonne de brûler le fils qui a commis
i;
l'inceste avec sa mère. Mais on voit assez que l'espèce n'est pas du
tout la même.
Lors donc que M. Jastrow reconnaît dans le Code de Hammourabi
le terme d'un long développement du droit, on peut dire que sa
thèse est prouvée d'avance, car Hammourabi n'était point un Jacobin
légiférant pour l'homme en soi d'après des principes prétendus ration-
nels, mais il a pris soin que le respect des principes et des textes
anciens n'allât pas jusqu'à juxtaposer des solutions de détail peu
conciliables entre elles, quand elles seraient également issues des
mêmes principes. On dans son Code des époques dis-
voit se refléter
tinctes et l'application du droit à des espèces nouvelles, mais aucun
retour sur un même
sujet pour le compléter. En est-il tout à fait de
même pour
Pentateuqûe? c'est ce que nous voudrions examiner de
le
§ 133. Si l'épouse d'un homme, à cause d'uu autre homme, ;i fait tuer son mari,
on la placera sur le pal.
$ un enlant a frappé son père, on coupera ses mains.
19.J. Si
de mine d'argent.
§ 202. Si im homme a frappé la joue d'un homme qui lui soit supérieur, il sera
frappé devant l'assemblée avec une courroie de bœuf soixante fois.
§ 203. Si le fils d'un homme a frappé la joue du fils d'un homme, son égal, il
$ 211. Si en frappant la fille dun homme de basse condition, il l.i l'.iil avorter, il
(1) D'a[)res la traduction piimcps du I*. Sclieil, et celle, cucore inédite, que M. labbc
Cruvcilhier a rédigée pour un ouvrage en itréparation sur Code de llaminourabi el la le
ment relatifs au muchUcnii. que je traduis bomnie de basse condition; je n'ajoute pas
<• libre » à « homme », quoique, par opposition a muchlicnu, le mot amelu désigne ici
une classe su|ifrieure.
MÉLANGES. 445
«J 218. Si im luftdeein a
fait à uu homiue une blessure grave avec le couteau de
bronze et mourir cet homme, ou bien s'il a opéré les yeux d'un homme avec
a fait
le couteau de bronze et a détruit l'oeil de cet homme, on coupera ses mains.
§ 219. Si le médecin a fait une blessure grave avec le couteau de bronze à l'esclave
d'un homme de basse condition,
et l'a fait mourir, il rendra esclave pour esclave.
§ 220. S'il lui a une opération aux yeux avec le couteau de bronze, et s'il a
l.iit
(1) En sens conirairc l'enfant (|ui a Ua\>[)(' son pcre aura les mains (oupco ;<} i;)5i.
MÉLANGES. 447
(1) La somme est considérable, puisque la mort à la suite de blessures d'un homme de
qualité n'euiporte qu'une demi-mine d'indemnité (§ 207).
f^'^S REVUE BIBLIQUE.
cours d'une querelle entre hommes. Mais il est très probable que
c'est la pensée du législateur, puisque cette espèce vient immédiate-
ment après l'autre. Pourquoi frapper une femme grosse? C'est sans-
doute qu'elle se sera jetée entre les combattants pour les séparer. La
brutalité de l'un d'eux n'a pas respecté cette généreuse tentative de
conciliation. Le fait est donc en partie volontaire, ce qui explique la
peine infligée, une somme d'argent s'il y a avortement sans plus, le
talion si la femme qui meurt était d'une condition supérieure. Les
deux solutions se retrouvent dans l'Kxode (xxi, 21 s.).
Eidin le troisième cas d'homicide plus ou moins involontaire est
celui du bœuf qui tue en frappant de la corne. Le maître du bœuf
est excusé si l'accident se produit sur la voie publique, et s'il ne
soupçonnait pas que l'animal fût vicieux. S'il était au courant de son
^'ice, il paiera une somme d'argent. Mêmes solutions dans la Bible,
de ce fait qu'elles ne sont pas [)aities du même code. Sans doute, poui'
MELANT, KS. 449
pose de corps distincts. Qu'on les nomme ou non des codes, ce sont
dos groupements d'ordonnances promulgués en des temps différents.
Cela est éclatant pour le Deutéronome, dont le nom grec indique
précisément une seconde loi, une nouvelle promulgation des précep-
tes. Mais cela est clair aussi pour cette série de lois que la critique
Nombres ont été portées dans le désert, pendant la marche des Israé-
lites allant du Sinaï aux plaines de Moab (Num. xxxvi, 13).
Les Hébreux n'avaient qu'à regarder autour d'eux pour voir cette
pratique en vigueur. Le sang versé appelait la vengeance et deman-
dait du sang. Aucune distinction n'est faite, c'est comme un principe
naturel dont le législateur devra régler l'application,
Ex. \XT. 12 Quiconque aura frappé un homme et l'aura tué, sera mis à mort.
13 S'il n'y a pas eu guet-apens (my N^) et que Dieu l'ait mis sous sa main
(ItS njx), je te fixerai un lieu où il pourra fuir. 14 Et si un homme se dresse
(TTi) contre son prochain pour le tuer avec perfidie (r;n"1"2), tu l'enlèveras de mon
autel pour Quiconque aura frappé son père ou sa mère sera mis à mort.
qu'il nieure. 15
18 Si des hommes se querellent, et que l'un d'eux frappe son prochain avec une
pierre ou avecie poing, sans causer la mort, mais en l'obligeant à se coucher, 19 s'il
se lève et qu'il puisse sortir appuyé sur un bâton, celui qui a frappé sera reconnu
non coupable, mais il indenmisera l'autre pour son chômage et devra pourvoir à sa
guérison.
22 Si des hommes se battent, et qu'ils heurtent une femme enceinte et qu'elle
accouche d'un enfant [mort], et qu'il n'y ait pas d'autre malheur, [le coupable]
paiera au mari de la femme selon ce qu'il lui imposera, et qui sera réglé par des
arbitres lDiS"'S2).
23 Et
s'il y a un malheur, tu donneras vie pour vie 24 œil pour œil, dent pour :
dent, main pour main, pied pour pied, 25 brûlure pour brûlure, blessure pour bles-
sure, plaie pour plaie.
26 Quiconque aura frappé l'oeil de son esclave ou l'oeil de sa servante, et l'aura crevé,
devra lui accorder la liberté en échange de son oeil : 27 et s'il fait tomber une dent à
son esclave ou à sa servante, il devra lui accorder la liberté en échange de sa dent.
28 Si un bœuf frappe de ses cornes un homme ou une femme et qu'il en meure,
le bœuf sera lapidé et l'on ne mangera pas de sa chair, et le maître du bœuf sera
déclaré non coupable.
si le bœuf avait coutume de frapper des cornes depuis quelque temps, et que
29 Et
le maître, averti, ait négligé de le surveiller, et qu'il ait tué un homme ou une
femme, le bœuf sera lapidé et son maître aussi sera rais à mort.
30 Si on lui impose une composition nSD), il donnera, pour racheter sa vie, tout ce
qui lui sera imposé.
31 Si (le bœuf] a frappé de la corne un liis ou une fille, on suivra la même règle.
32 Si le bœuf a frappé de la corne un esclave ou une servante, [le maître du
bœuf] donnera au maître de l'esclave trente sicles, et le bœuf sera lapidé.
XXII, Si un voleur est pris en flagrant délit d'elTraction, et qu'il soit frappé et
1
en meure, ce n'est point un cas de sang. 2 Si le soleil était levé, c'est un cas de sang...
20 Fracture pour fracture, œil pour dent pour dent; la blessure (ju'il aura
œil,
faite à un homme lui Quiconque aura frappé une bête la rem-
sera faite à lui. 21
boursera, et quiconque aura frappé un homme sera mis à mort. 22 Vous aurez la
même loi, l'étranger et l'indigène...
Dt. IV, Il Alors Moïse mit à part trois villes au delà du Jourdain, à l'Orient,
12 où pourrait fuir le meurtrier '1 qui aurait tué inAli) s«»n prochain sans dessein
iryr "iSlIZ, lltt. sans connaissance), alors qu'il n'avait pas auparavant de haine contre
lui; il pourrait donc fuir vers ime de ces villes, et sauver sa vie. (Suit la désignation
des villes).
\t\, 2 Tu mettras à part trois villes au milieu du pays dont Ialiv(', ton Dieu, te
donne la possession. 3 Tu te feras un clieniin, et tu formeras trois districts dans le
pays que laiivé ton Oieu te donnera en héritage, pour permettre au meurtrier de
fuir dans ces villes.
4 Voici la règle pour le meurtrier qui y fuira afin de sauver sa vie, celui qui a
frappé son prochain sans dessein, alors qu'il n'avait pas auparavant de haine contre
lui. .5 Tel un homme qui va avec un autre dans la forêt pour ahattre des arbres, il
compagnon qui meurt. Le meurtrier fuira vers l'une de ces villes et sauvera sa vie.
fi Autrement vengeur du sang ("."! Sxa), dans la [première] chaleur de son cœur,
le
de lui, et tu effaceras le sang de l'innocent qui pèserait sur Israël, et ce sera pour
toi un bien.
x\i, 1 Si, dans le pays que lahvé ton Dieu te donne en possession, on trouve
un homme un champ, sans qu'on sache qui l'a frappé. 2 les anciens
tué étendu sur
de la ville et mesureront les distances du cadavre aux villes
et les juges sortiront
des environs. 3 Les anciens de la ville la plus rapprochée du cadavre prendront une
génisse qui n'ait point été employée au travail et qui n'ait point porté le joug. 4 Et
les anciens de cette ville amèneront cette génisse vers une vallée oii l'eau coule
yeux nont rien vu. 8 Accepte l'expiation de ton peuple Israël que tu as sauvé,
lahvé, et n'impute pas un sang innocent au milieu de ton peuple Israël! et le sang
sera expié par rapport à eux. » 9 Ainsi tu effaceras de ton sein le sang innocent...
Num. XXXV, 11 Vous désignerez des villes, qui vous soient des villes de refuge
(la'^pC), où puisse s'enfuir le meurtrier qui enlève la vie sans le vouloir (n^^Cl, litt.
par erreur). 12 Et ces villes vous serviront de refuge contre le vengeur pN';n), de
façon que le meurtrier ne soit pas mis à mort avant d'avoir comparu devant l'as-
semblée pour être jugé. 13 Des villes que vous donnerez [aux Lévites], six seront
pour vous des villes de refuge...
1-5 Les six villes serviront de villes de refuge pour les fils d'Israël et les étrangers
et ceux qui seront fixés parmi vous, afin que tous ceux qui auraient tué quelqu'un
sans le vouloir (ni^vTl) puissent y fuir.
4a2 REVUE BIBLIQUE.
de sang pour lui). 28 Car demeurera dans la ville de refuge jusqu'à ce que meure
il
vous serez; car le sang souille le pays, et il n'est point d'expiation (lEZ'i N"^) pour le
pays du sang qui y a été versé que par le sang de celui qui l'a versé.
Jos. XX, 1 lahvé dit à Josué : 2 Dis aux ûls d'Israël : établissez-vous des villes de
refuge, comme je vous l'ai dit par Moïse, 3 afin que le meurtrier qui enlève la vie
sans le vouloir ."i;;'w^2, litt. par erreur), sans dessein {T\"J~ *^n2, litl. sans connais-
sance), puisse y fuir, et elles vous serviront de refuge contre le vengeur du sang.
1 et il fuira vers l'une de ces villes et il se tiendra à l'entrée de la porte de la ville,
et il expliquera son cas aux anciens de cette ville, et ils le recevront auprès d'eux
dans cette ville, et lui assigneront ime demeure, et il habitera avec eux. fi Et si le
vengeur du sang le poursuit, ils ne lui livreront point le meurtrier, car c'est sans
dessein 'ri"~ f'iz^ qu'il a frappé son proeliain, et il n'avait pas auparavant de haine
NJw nS) contri; lui. 6 Et il habitera dans cette ville jusqu'à ce qu'il comparaisse
pour être jugé, (et, s'il est déclaré non coupable), jusqu'à la mort
(levant l'assemblée
du grand prêtre en fonction dans ce temps-là: alors le meurtrier retournera et ira
à sa ville et à sa maison, à in ville d'où il est parti pour fuir. 7 (Choix des villes,
sans doute le traité le plus complet sur le sujet. Ce sont des leçons
lues devant le Dro/jsie Collège de Philadelphie par M. Mayer Sulz-
berger. L'ouvrage qui les reproduit a pour titre : IJ ancienne loi hé-
braïque sur l'homicide (1^.
L'auteur est manifestement bien disposé pour les Juifs; leur droit,
très supérieur à l'origine à celui des Cananéens, influencé ensuite
dans la pratique par les coutumes cananéennes, l'emporte enfin par
une série de réformes, dont la dernière, celle de .Tosaphat, serait le
couronnement. Le Pentateuque offrirait le reflet de ces transforma-
tions. C'est l'apologie de la nation, sans beaucoup de souci de la
tradition, ni des interprétations reçues.
M. Sulzberger croit savoir que, lorsque les Hébreux pénétrèrent en
Canaan, la loi du talion y régnait, plutôt empirée qu améliorée par la
composition pécuniaire qui permettait au meurtrier d'échapper au
châtiment en versant une somme d'argent à la famille de sa victime.
La loi cananéenne ne distinguait pas entre le meurtre avec prémédi-
tation — que nous nommons assassinat — meurtre passionnel et le
le droit des Hébreux était en possession de tous les moyens qui lui
une méthode peu sûre de le reconnaître dans les usages que la liible
réprouve-le plus lortcment sans dire pourquoi. Pour prouver que les
prêtres se mclaienl indûment de comj)ositions illicites dans des cas
de Samuel « De qui ai-je
d'assassinat, l'auteur allègue la justification :
reçu un ho fer, pour m'en voiler les yeux (1)? « C'était donc l'usager
de prêlres moins scrupuleux. Mais si kofer est bien le terme qui dé-
signe la somme versée pour expier le crime, la com|)Osilinn ou nrhr-
yr'/r/, dans ce cas particuliei' ce mot a le sens cle pot-dc-vin donné au
magistrat pour ([ivil ferme les yeux sur lamauvaise cause d'un plaideur.
Samuel ajoutait : u Et je vous le rendrai. » Il pouvait rendre un pot-
droit d'un clan ou d'une famille, c'est la vie et l'intégrité des mem-
bres de tous ceux qui font partie du clan. Le go'el devra poursuivre
le sang, d'où son nom de go'el ha-dam. D'après M. Sulzberger, ce
nom signifie « celui qui efface la trace du sang, qui délivre le pays
de la souillure qui pèse sur lui ». Que de choses dans ce peu de mots!
Non, le go'el est bien le vengeur du sang. Et la preuve c'est qu'on
prévoit son emportement. Blessé dans ses affections, plus encore
dans l'honneur de sa famille, emporté de colère, il va se jeter sur
l'homicide. C'est pour cela que la loi demande qu'on fasse une route,
pour que l'homicide involontaire ait le temps de lui échapper (1).
j\ous voyons le go'el lia-dam à l'œuvre dans la petite histoire que
la rusée femme de Thecué raconte à David (2). Il importe peu qu'elle
invente son conte n'atteindrait pas le but s'il ne reflétait les mœurs
;
du temps. Un de ses fils a été tué par son frère; la parenté veut punir
le coupable, avec l'intention évidente de s'emparer de l'héritage.
Mais si cette visée est coupable, le droit de vengeance familiale est
limpide, ei\e go'el ha-dani est l'agent de la parenté. Les arguties de
M. Sulzberger ne peuvent rien contre des textes aussi clairs.
Autre innovation non moins téméraire. Elle consiste à transformer
les villes de refuge en véritables prisons. Le meurtrier doit s'y ren-
dre, et s'il refuse, il doit être mis à mort par le vengeur du sang,
devenu un bourreau d'État. Il a un temps raisonnable pour fuir; s'il
de la donner.
L'assassinat n'est autre chose qu'un meurtre, mais avec des cir-
constances aggravantes qui affectent l'acte lui-même. Le Code pénal
les nomme la préméditation (2) et le guet-apens (3), qui n'est en
somme que le cas où la préméditation est le plus manifeste
Au conti-aire l'homicide sans intention de donner la mort n'est
iMifin les jurés charg-és de prononcer sur le fait peuvent dans cer-
tains cas y reconnaître des circonstances personnelles à l'accusé qui
atténuent sa responsabilité, et conduisent à la mitigation de la
peine : ce sont les circonstances atténuantes.
Les Codes mosaïques ne connaissent pas les circonstances atté-
nuantes, mais ils ont prévu toutes les autres espèces, sans arriver,
cela se comprend sans peine, à des notions abstraites très claires et
à une spécification très complète.
Une seule excuse léi;ale est mentionnée; nous la citons pour n'y
plus revenir. C'est le cas du voleur de nuit avec effraction. On peut
le tuer sans encourir la tache de sang, c'est-à-dire que le meurtre
n'est pas imputable. Cette loi se trouve dans l'Exode. Il est étonnant
que Code de Hammourabi ne la contienne pas elle faisait sûre-
le ;
ment partie du vieux droit le plus antique; elle ligurait dans la loi
des Douze tables (1 1.
de hame contre la victime. Donc le vrai meurtrier est celui qui sait ce
(1) Table VIII, 12 : Si nox f'urtum faclum sit, si im occisit, iure caesus eslo.
458 REVUE BIBLIQUE.
tion avait sa raison d'être. Mais, si on les place après les Nombres,
les dispDsitions du Deutéronome n'ajoutent ricm et ne sont pas non
(1) Cf. Code de Hammourabi, § 249 : « si Dieu l'a frappé », pour désigner un accident,
une mort fortuite.
REVUE BIBLIQUE 1916. — N. S., T. XIII, 30
460 REVUE BIBLIQUE.
sèment pour éviter les vengeances. Les Hébreux, comme les autres
n'insiste pas sur la" nécessité de punir de mort le coupable. Elle laisse
donc le champ libre aux négociations entre les familles. Elle n'a pas
voulu se montrer trop indulgente pour le meurtre; elle a évité aussi
trop de sévérité, sévérité qui n'est point toujours au profit de la
répression; on voit aujourd'hui des jurys acquitter des coupables
plutôt que de leur laisser infliger une peine trop dure. Et enfin il
n'avait pas besoin d'être inscrit dans une loi. Il est prévu tacitement
lorsque le législateur promet de désigner un lieu où l'homicide, s'il
n'est pas un assassin, pourra fuir. Aucune loi ne met un coupable à
l'abri de la vindicte publique. Celle-ci suppose donc une vengeance
qui peut être excessive; c'est celle de la parenté.
Le Deutéronome est plus clair, puisqu'il nomme le vengeur du
sang. Le vengeur du sang prend sur lui d'exécuter celui qui a versé le
sang. Le fait tel quel lui suffît; il n'a pas à examiner les circonstances
ni les intentions. Même si une sorte de tribunal intervient et reconnaît
l'homicide coupable d'assassinat, c'est au vengeur du sang qu'il le
livre pour être mis à mort (Dt. xix, 12).
Nombres ne changent rien à cette législation ils la complètent
Les ;
pourrait fuir. Elles ne portaient pas un nom spécial. Dans les Nom-
bres, on relève que ce sont des villes lévitiques, et elles sont nom-
mées des de refuge. Nous ne saurions y voir avec M. Sulzberger
cités
des villes d'internement, quelque chose comme des camps de concen-
tration, et le terme ^Spr: n'oblige point d'adopter ce sens. Quoi qu'il
en soit du sens du verbe — et l'on ne saurait le déterminer, — l'ho-
micide « fuit » vers ces villes parce qu'il y trouvera un refu.ee. On ne
fuit pas vers une prison. Les Nombres ajoutent (jue ces villes assurent
nom de 'edah, l'assemblée des fils d'Israël. Mais comme elle est don-
née pour l'avenir, elle laisse entendre que cette assemblée se tiendra
dans un lieu autre que la ville de refuge, puisque le prévenu reconnu
pour dent, main pour main, pied pour pied, brûlure pour brûlure,
blessure pour blessure, plaie pour plaie » (Ex. xxi, 23 ss.).
Or le code est, d'après la critique, comme d'après la tradition, an-
térieur à celui du Lévitique. Nous avons donc qu'un code plus récent
peut contenir une formule plus ancienne. Mais dansMt. v, 38 la for-
mule est encore plus courte, « œil pour œil, dent pour dent », quoi-
que la rédaction soit plus récente. Il ne faut donc pas regarder le texte
de l'Exode comme un texte glosé, mais comme un développement
législatif. Le Deutéronome reproduit seulement la première partie
de l'Exode (1) « œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied
:
(1) Sauf le début, « vie pour vie » qui d'ailleurs se rattache à ce qui précède : la for-
mule traditioanelle, rappelée à propos du cas vie pour vie, commence à « œil pour œil ».
468 REVUE BIBLIQUE.
Les principes sont les mômes. C'est la loi du talion qui domine le sujet.
elle n'est pas seulement censée révélée par Dieu, comme ce code
prétend l'être; elle est vraiment inspirée par la conception d'un
Dieu juste, plus soucieux de punir le criminel et de sauvegarder l'inno-
cent que de préserver son autel même. C'est bien la loi d'un grand
chef religieux comme Moïse. Depuis la découverte du Code de Ham-
mourabi, on ne voit vraiment pas pourquoi les lois de l'Exode
seraient plus récentes que Moïse. Elles se rattachent à des prin-
cipes plus anciens que lui, et souvent même elles coïncident presque
textuellement avec un droit plus vieux de plusieurs siècles.
Mais on prétend que c'est dans le pays de Canaan que les Hébreux
ont appris à connaître le Code de Hammourabi. Cela reviendrait à
dire qu'ils ont renoncé à leurs coutumes pour embrasser celles des
Cananéens. Or cela est peu croyable, particulièrement en matière
pénale, et cela est, en
contraire à toutes les vraisemblances. Le
fait,
est clair que la Bible a en horreur leurs usages, et que les Hébreux
n'ont pu les combattre qu'en leur opposant leur propre droit, qu'ils
disaient avoir été promulgué par Moïse.
Il y a, nous l'avons noté, dans l'Exode môme, un mot qui fait allu-
conquête par une mesure d'ensemble. Cette variation n'a pas d'impor-
tance; les deux textes regardent l'institution des villes d'asile comme
l'exécution do la loi de iMoïse. Entre la du Deu-
loi de l'Exode et celle
III
(1) Voir <( Dieu et le inonde d'après les conceptions juives au temps de Jésus-
Christ )), dans le dernier fascicule de la fUl., p. 33-GO.
MÉLANGES. 473
nations : il l'a élu d'entre tous les peuples, il l'a constitué le gardien
de la vraie religion et le dépositaire des promesses divines. Cette
élection est la raison d'être de tous les rapports particuliers de Dieu
avec Israël Sans doute, un pacte avait déjà été conclu avec Noé
(1). :
est son peuple (12), le peuple élu (13), le peuple chéri (14), un peuple
saint (15), le peuple qui est appelé du nom du Seigneur (16), qui est
son héritage, c'est-à-dire le lot qu'entre tous les groupements
humains Jahvé se réserva pour lui-même (17). Les Juifs sont « les fils
(8) II Mach. 1, 25; Jub. 2, 20. 31; 15, 30; 33, 11; Ps. Sal. 9, 17 [9].
(12) II Mach. 1, 29; Sap. 9, 12; Ps. Sal. 9, Ifi [8] etc.
(13) Ass. Mos. 4, 2: cf. Eccli. 46, 1; Hén. 56, (J; 62, 11; 93, 8.
(14) Ps. Sal. 9, 16 [8].
(15) III Mach. 2, 6; Sap. 10, 15; 17, 2; Jub. 22, 12; 33, 20.
(16) Eccli. 36, 17; cf. II Mach. 8, 15; Ps. Sal. 9, 17 [9].
(17) II Mach. 1, 26; 14. 15; Ps. Sal. 14, 3 [5]; Jub. 22, 10. 29; 33, 20; III Mach. 6,
3. — Celle conception se rencontre fréquemment dans la littérature biblique; cf. L. Gio,
Les Paraboles d'Hénoch, Paris, 1910, p. 17, note 2.
474 REVUE BIBLIQUE.
de ralliance » (1) ; Dieu les gouverne (2), les béait, les garde et les
protège (3); il les sauve de tous les dangers (4), les favorise de
mille façons (5), leur donne secours contre leurs ennemis (6), combat
pour eux (7), et finalement leur donne la victoire (8). Il leur envoie
sans doute des châtiments ; mais il ne les délaisse pas et surtoutne
les abandonne pas pour toujours aux nations (9), car il entend leurs
cris de détresse et exauce leurs prières (10),
Si Dieu est, en vertu de la création, le roi du monde, le roi de tous
les hommes, il est à un titre plus spécial le roi du peuple juif (H) :
« seul il est leur souverain » (Jub. 15, ^3), et son gouvernement est
une source de bienfaits pour Israël (Ps. Sal. 5, 18 [21]). Tandis que
sa royauté sur les nations s'affirme par des châtiments, il agit à
l'égard de son peuple avec la plus grande miséricorde (Ps. Sal, 17, 3
[3-4-]). La dynastie davidique avait été choisie pour le gouverner
en son nom (Ps. Sal. 17, 5 [4]), et quand des usurpateurs s'em-
parèrent de la couronne, Dieu les jugea par sa puissante interven-
tion (Ps. Sal. 17, 6-12 [5-10]).
Toutefois, le règne de Dieu sur Israël se manifestera surtout à
l'époque messianique (Ps. Sal. 17, 23-51 [21-45]).
Mieux encore que roi, Dieu est le père d'Israël. Cette dénomination
se rencontrait déjà dans le Pentateuque et dans les prophètes : Dieu
est le père du peuple Israélite (12), et celui-ci est son fils (13), son
premier-né (14). Cette dernière expression doit s'entendre au sens de
« fils bien-aimé », bien plus, de « fils unique », et n'implique aucu-
Mach. 1, 11. 25; III Mach. 2, 12; 6, 36; Eccli. 51, 8; Ps. Sal. 13, 2. 4.
(4) Il
Dieu —
est souvent appelé « sauveur » crwirip Eccli. 51, 1; I Mach. 4, 30; Ps. Sal. 3, 7 [G];
:
8, 39 [33]; 16, 4; 17, 3; Sap. 16, 7; 111 Mach. 6, 29. 32; 7, 16. Sur la signification du
mot « sauveur » dans le monde gréco-romain, cf. P. Wicndlmsd, Iwxrip, dans la Zeitsclirift
fiir die neuteslumenll. Wissemchaft, 1904, p. 335-353; A. Deissmann, Licht vom Oslcn,
1908, p. 265 s.
(9) Eccli. 2, 10, 17, 8: Sap. 12, 21; II Mach. 1, :>; 5, 17 .ss. 6, 12 ss. 7, 16; ; ;
Jub. 27, 15; Ass. Mo». 12, 12; III Esdr. 8, 79.
(10)11 Mach. 1, 5, 8; 10, 25 ss. III Mach. 2, 10. 21 5, 25. 35; 6, 17 ss.
;
Ps. Sal. 6,6 5].
; ;
1
(11) Roi d'Israël Eccli. 51, 1; Ps. Sal. 5, 21 s. [18 s.]; 17, 1. 38.51 [1. 34. 46];
:
(13) Os. 11, 1; Jér. 31, 20; 3, 19; cf. Judith 9, 4. 13 (Sept.).
nation dans son ensemble, mais encore les Israëlites considérés indi-
viduellement, en tant que membres du peuple élu, étaient « fds de
Dieu» (2). Enfin, en raison de leur situation spéciale, David (Ps. 89,
27 s.), Salomon (II Sam. 7, l'O, le Messie (Ps. 2, 7) et les anges (3)
reçurent la même appellation.
A l'époque si troublée et si angoissante que les Juifs traversent aux
approches de l'ère chrétienne, ils éprouvent le besoin de rappeler
(1) V. Rose, Études sur les Évangiles, Paris, 1902, p. 133. Cf. aussi Lagrange, La
Paternité de Dieu dans l'Ancien Testament, dans la Revue Biblique, 1908 [p. 481-497],
p. 485. —
Par une conséquence naturelle, le (ils hérite des biens de son père « En procla- :
mant Israël son premier-né, Dieu veut dire que ce peuple jouera dans le monde le rôle du
premier-né dans la famille, et qu'il en fait son « héritier » universel. C'est à litre « d'héri-
tage » qu'Israël tient de lahvé la Palestine, et
que l'hégémonie du monde entier lui est
promise dans un avenir Dans l'antique civilisation égyptienne, le premier-né
lointain...
était seigneur [neb =
Kuptoç) dans la famille; image vivante du père, les lois l'associaient,
même du vivant de celui-ci, à l'exercice de ses droits « (A. Dirand, Le Christ « Premier-
né », dans les Recherches de Science religieuse, 1910 [p. 56-66], p. 59. L'idée d'héri- —
tier, et par conséquent de seigneur, se rattache étroitement à celle de fils premier-né
mais ne s'identifie pas avec elle. Voir les remarques du P. Prat, La Théologie de saint
Paul, vol. II, p. 197.
(2) Deut. 14, 32,
5; Is. 1, 2. 4; 30, 1. 9; 43, 6; 45, 11; Jér. 3, 14. 22; Os. 2, 1.
1;
acceptèrent la légende de l'union des anges avec les filles des hommes]; Job 1, 6; 2 1-
38, 7; cf. Sap. 5, 5; comparer aussi Dan. aram. 3, 25 avec 3, 28 (Sept. : 3, 92 avec
3, 49. 95).
Be7ié Elim : Ps. 89, 7. —
Par contre, dans le Ps. 29, 1 (2) il semble bien s'agir de
«jeunes béliers >; cf. Falluaber, Psalm 29 {28), ein Gerichtspsalm, dans la Biblische
Zeitschrifl. 1904. p. 262.
Benê : Ps. 82, 6 {'!}.
'Elion
(4) III Mach. 5, 7; 6, 3.
(5j Eccli. 23, 1. 4; II[ Mach. 6, 8; Sap. 14, 3.
«le Dieu (1), le fils premier-né (2) et unique (3), et les membres de la
(3) pensée des Juifs ne laisse place à aucun doute; Ps. Sal. 18, 4
Sur ce point la « ta :
rorreclion vient sur nous comme sur un lils premier-né, unique » (w; uîôv TrpwTÔ-oxov
(Aovoyev^); IV Esdr. 6, r>8 « Nos autem, populus tuus, quem vocasti primof^enilum,
:
uni^enilum pour qu'on sache bien à quoi s'en tenir sur le compte des nations,
», et
Iauteur déclare « C'est à cause de nous que tu as créé ce monde: quant aux autres
:
pcujilcs nés d'Adam, tu as dit qu'ils ne sont rien et qu'ils sont semblables à la salive el
leur importance pareille a la j^outle iiui tombe d'un vase (trop jdein) », 6, .it'>.
Cl) Sap. 12, 21; 16, 20; 18, 4; Sib. III 702: Ass. Mos. 10. 3; l'irqé Aboth 3, 22.
1!l.
Dans d'autres passages, les Juifs sont appelés Tratos; ôeoC .Sap. 2. 13:12, 7-20: 19.(1; :
(1) Qu'on se rappelle aussi la formule des prières grecques et romaines Dens deorum :
de ta race (=•/. aoO yà? yévo; ïrj<^iv, cf. Act. 17, 28); délivre les hommes de leur funeste
ignorance et chasse-la de leurs âmes, opère ».
•2) De Somn. II 273, M. I 095. Voir aussi De conf. lincj. 144 s., M. I 426 (sva Trotr.TV'
/.aî TraxÉpa Ttôv &),(.)v). — Dans le même sons, Joskphe, Antt. Prooem. j? 4 : TrdvTwv waT^o
i£ y.iy). oîijTîÔtïj; 6 0ïô;.
3) I Mach. 4, 9; III Mach. 2, ti s.; 6, 4; Eccli. 45, 3. ."i. 19; Sap. 10. 16 ss. : 16-19;
Pirqé Aboth 5, 5 : cf. Judith 5. 12 ss.
tioii en faveur de Jonas (1), de Daniel (2), et des trois enfants dans
la fournaise (3). Le souvenir de tous ces faits s'était profondément
gravé dans l'esprit des Juifs. Des miracles continuaient d'ailleurs
à se produire sous leurs yeux (4), et leur rendaient confiance dans
l'avenir (5).
prodiges grandioses (11), des faits qui dépassent toute attente (12),
(1) m Macl). 6, 8.
'A) II Mach. 1, 19 ss.; 3, 2.Î (= IV Mach. 4, 8 ss.); 10, 28 ss. 15, 12 ss. III Mach. 2. ; ;
(.») L'avènement (lu Messie devait (Hre inaniuc des miracles les plus signalés; IV Esdr.
7, 27; 13, ;ji»; Apoc. syr. IJar. 29, G; cf. Ml. 11, 'i-C; Le. 7, 22. s. Jo. 7. 31. ;
((•>] Eccli. 33 '36i, >\- l\ Macli. 15, 24; Sap. 16, Kl; Ilén. 36, 4.
(8) 42, 17; 48, l'i; cf. 18. C> (.'.); 33 36), G; Dan. 3. 'i3 Test. Sim. 6, 7; cf.
Eccli. :
Ai) De Vila Mosis II 2r>7. .M. 11 174 TàTEpâaTtaè/.Eïva \t.zya.).o\»^^^r,\i.a'ca. vS. il». 2r.G, M. II "G
: ; 1 :
([ui sortent du cours ordinaire et naturel des choses (1), qui parais-
sent plus incroyables que des fables (2), (jui sont considérés comme
impossibles par les esprits habitués à ce qui est renfermé dans le
pour Celui qui a fait l'univers entier et toutes les choses merveilleuses
(ju'il contient (9). — Cependant malgré
conformes des déclarations si
Les miracles ont pour but, tantôt de châtier les impies, tantôt de
xac iiapâ),oya; ib. I 203, M. Il 113 : Ttapiôolov to liyov... 7:apaoo;oTipoi;; Qu. in Ex. II, § '76
(1) De Mos. 1 196, M. II 112 ex toù Trapa^ôyo-^... napà xo -/.aesoTÔ; ieoç; ib. II 266
Vita :
(3) De Vita Mos. II 261, M. II 175 îipô; [lïv Ta; -rnOavà; xai eOXôvou; çavratria; àôvvaT:
:
quadam praepotenti atque arbitraria tommutans eleraenta ». Cf. de Vita Mos. I 211,
M. II 114.
(5) 'E6auu.xTo-jpyïïTo, de Vita Mos. I 203, M. Il 113; De decalogo 44, M. II 187.
(10) L'historien Josépue se montre sceptique à l'égard des miracles. Après avoir décrit
le passage de la mer Rouge, il continue « Quant à moi, j'ai narré toutes ces choses :
comme je les trouvais dans les Saints Livres. Que personne n'estime étrange et contraire
à la raison qu'à une époque reculée, des hommes vertueux aient pu être sauvés en passant
à travers la mer, soit par la volonté divine soit par l'effet du hasard ». Puis il relate un
fait semblable qui seraif arrivé à l'armée d'.\lesandre. Il termine en disant « D'ailleurs, :
chacun peut penser au sujet de ces choses comme bon lui semble » [Antt. II, xvi, 5). Il
donne des explications rationalistes de certains miracles Antt. III, i, 2 (cf. Bell. Jud. IV, :
VIII, 3); III, I, 5. 6; IX, m, 2, ou s'excuse de les raconter « Que chacun apprécie ces :
choses comme il l'entend, dit-il en parlant des miracles du Sinaï; pour moi, je suis bien
obligé de les relater comme ils se trouvent décrits dans les Saints Livres », A^itt. III,
v, 2 cf. III, XV, 3; IX, x, 2: .X, X, 6.
;
—
Josèphe tient évidemment à ménager ses lecteurs
grecs et romains.
480 REVUE BIBLIQUE.
faire »''clater la lionté divine à l'égard dos justes (1). Ils sont aussi
des jYjy.sta (2), c'est-à-dire des signes- des perfections de Dieu, et
avant tout de la véracité de sa parole (3).
xMais le don le plus précieux que Dieu eût fait au peuple élu,
c'était celui de la révélation. Non. content de veiller sur Israël et
note avec douleur qu'il n'y avait plus de prophète en Israël (i).
Du moins il n'y en avait pas qui fût pleinement reconnu comme tel.
Simon Macliabée est proclamé chef temporel et spirituel de la nation,
en attendant que « paraisse un prophète digne de foi » (^5), et .losèphe
constate la même incertitude dans la succession des prophètes à
partir du règne d'Artaxerxès (a. 4.64-Ji-24) (6).
prophète »; F Mach. 4. 'i6 on prit les pierres de l'autel des holocaustes, et on les plaça
:
dans un lieu convenable, k en nftcndani qve vint vti prophète |>our donner une df'rision
à leur sujet ».
><] Conirn Ap. F, 8. Le sens di- la phrase n'est pas très clair les Juifs n'accordent pas :
la tncme créance aux libres ccrits depuis le rè^ne d'Artaxerxès, qu'aux préc<^dents. 5ià to
daient pas exactement». D'après «elle dernière traduction, les prophètes ne manquaient
MÉLANGES. 481
pas, il se produisait seulement des interruptions dans leur succession cf. G. Aicheh, Das
Alte Testament in der Mischna, Freiburg, 1906, p. 12). La première traduction laisse
ouverte la question de savoir s il était venu de vrais prophètes après Artaxerxès c'est :
possible, mais on n'est pas au clair sur ce point. Nous préférons cette manière de tra-
duire, parce répond mieux aux autres témoignages que nous avons énumérés,
qu'elle
ainsi qu'à la pensée de Josèphe (cf. p. 480, note 4). On ne voit pas pourquoi l'historien
exigerait une série de prophètes un seul, vraiment authentique et reconnu comme tel, eût
;
(3) Antt. XIH, X, 3; cf. Test. Levi 18, G et le commentaire de Charles in h. 1., p. 64.
Le même récit se trouve dans le Talmud, Sola jér. 24'', bab. 33% et dans le Midrasch
Rabba sur le Cantique des Cant. 8, 7. — Josf:PHE rapporte aussi que parmi les Esséniens
plusieurs se faisaient fort de prévoir l'avenir à force de s'exercer par l'étude des Livres
«
Saints, les purifications variées et les paroles des prophètes », et il ajoute qu ils se
trompaient rarement dans leurs prédictions [Bell. Jud. II, vm, 12). 11 cite trois exemples
de prédictions esséniennes réalisées Antt. XIII, xii (= Bell. Jud. I, m, 5); Antt. XV,
:
yTJTT,; Y^fp ÉÀcyîv EÎvat [Antt. XX, v, 1); l'Égyptien Tipocpritri; sivai )iywv [Antt. XX, vm, 6).
:
65, 4; Test. Levi 18, 6; T. Juda 24, 2; Apoc. syr. Har. 13. 1; 22, 1. Une baraitha
déclare, Sota 48'^ « Depuis la mort d'Aggée, de Zacharie et de Malachie, le saint Fsprit
:
fut enlevé aux Israélites, et à sa place vint la Balh Qol ». Ce furent donc là les derniers
prophètes. —
Sur la Balh Qol, cf. F. "Weber, Judisclie Théologie, 2" éd., Leipzig 1897,
p. 194 s.; G. Dalm.vn, Die Worte Jesu, 1898, p. 167 s.
482 REVUK BIBLIQUE.
recherche exégétique elle-même > (La»;iia>(;e, I.v Messianisme chez les Juifs, p. lil).
{'.l) R. Prsnchim 66". — Piiii.on. après avoir énurnéré certaines prescriptions de la Tiiora,
ajoute : [lypîa ôè àX>.a âni toûtoi;, ciaa xat ÈTtî àypâçwv àOwv xai voiii'tJiwv (M. Il <•''': fragm.
ap. Ki.>Kii., Praep. ev. VIII, vu, 6; cf. Leg. ad Caj. 115, M. Il 562).
MÉLANGES. 483
(1} Cf. aussi dans la Mischna, Pea II, 6; Eduj. VIII, 7; Jad. JV, 3 une halakha : <(
début de l'insurrection des Macbabées, les Juifs préférèrent se laisser massacrer plutôt que
de tirer l'épée (I Mach. 2, 34-38); les Romains se virent linalement obligés de renvoyer
de leurs armées les contingents juifs (Josi;pnE, Antt. XIV, x, 11-19), qui avaient cependant
autrefois glorieusement servi sous les étendards de l'Egypte et de Rome. Il était défendu
de s'éloigner, le jour du sabbat, de plus de "i.OOO coudées de sa demeure (cf. Act. 1, 12).
11 était pareillement interdit d'arracher quelques épis (Philon, De vita Mos. Il 22, M. Il
137; cf. Mt. 12. 1 s.), car c'était là une sorte de moisson. On avait même prohibé d'ac-
corder aux malades les secours de la médecine (cf Luc 6, G-10; 13, 10-17; 14, t-6 etc.).
(3) Cette tendance s'accentua particulièrement à partir du i" siècle (cf. WcnER, op. cit.,
p. 106-108).
(4) JoikviiE, Antt. XIII, x, 6 : Jean Hyrcan « abrogea los coutumes imposées au peuple par
les Pharisiens et punit ceux qui les observaient. Les Pharisiens avaient enseigné au peuple
beaucoup de pratiques qu'ils tenaient de la tradition deJ pères (vôixiixâ iiva na.piooaa.w xû
oiQfxio 0'. <l>apicraîoi èx îiaTspwv o:aoo'/rj:), mais qui n'étaient pas inscrites dans les lois de Moïse,
et que, |>our ce motif, les Sadducéens rejetaient disant qu'il ne fallait considérer comme lois
que ce qui élail écrit et qu'on ne devait point observer ce qui venait de la tradition des pères
(âxEÏva Stïv rjycïcOa'. vojiijxa rà yzYÇiH\L\}.i'jyi, xà S' iv. Trapaoôaswç Tôiv TiaTiptov [ir, TTipeïvJ ».
Cf. XIII, XVI, 2 : xaxà Tr,v ita-pwav Tiapciôoatv ; X, IV, 1 : r) xwv jrpssê-jTspwv Trapâoocii;.
(.5) I Mach. 1. 49. 52. 56 S. ; III Esdr. 5, 51; 9, 40-46; Test. Levi 13, 4; 14, 4; 16, 2;
Nepht. 8. 7 ; Aser 2, 6.
Y.) III E^dr. 8, 7-12. 90; 9,48; Test. Levi 9, 6; 13, 3; 19, 1 s. ;Rub.6, 8; .Tud. 26, 1, etc.
Mach. 6,
(7) II 1 ; III Mach. 7, 10. 12; III Esdr. 8, 21-24 ; Test. Levi 13, 2; Rub. 3, 8;
Jud. 18, 3, etc.
(8j Sib. III, 719; III Esdr. 8, 19; Tisl. Gad 3, 1.
484 REVUE BIBLIQUE.
Elle est un principe de vie, car « celui qui garde la Loi, con-
serve sa vie >• (Eccli. hébr. 32
36 2i cf. 45;'">; 17, 9); et Hillel , ;
(1) Sib. III, 252-260; cf. Eccli. 45, 17; Arist. 15.— Elle est appelée f.oi de Moisr :
III Esdr. 8, .3; 9, -W; Test. Zab. 3, 4; - Livre de Moïse : 111 Esdr. 7, fi. 9; 5, 4;»; cf.
(2) Pirqé Aboth II 7; cf. aussi le bel élo^e de la Loi, lait par Nicolas de Damas, l'historio-
graphe dllérodf (.losKi'iii;, Antt. .\V1, ii, •4).
(3)11 Mach. 6, 23; Arist. .'M.S; IV Mach. 5, 2.-..
(4) II Macb. 6, 23; Arist. 45. 171 III Sib. : 27fi. 284. fiOO. 7(18.
Dans ces conditions, les Juifs hellénistes avaient beau jeu avec la
philosophie grecque. En s'appropriant ce qu'elle contenait de meil-
leur, les apologistes d'Israël ne faisaient que rentrer dans leur bien,
et il leur était ainsi facile de montrer l'incomparable supériorité du
Judaïsme.
Ces prétentions exorbitantes se heurtaient pourtant aune redoutable
objection. Si tous les grands génies de la Grèce ont puisé leur science
dans la Thora, pourquoi aucun d'eux ne l'a-t-il citée d'une manière
explicite? — L'auteur de la Lettre d'.Vristée se préoccupe de résoudre
le problème. On s'est abstenu de citer la Loi, par respect pour
dit-il,
(1) Ap. Elseb., Praep. ev. XIII, xu. — On ne sait ce qu'il faut penser au juste d'un
témoignage de Cléarqle de Sou, philosophe grec du rv"m" siècle av. J.-C, d'après
et
le([uel Aristole se serait rencontré avec un Juif qui communiqua une partie de sa
lui
sagesse (Josèphe, C. Ap. I 22, ct\JI 16; Reinacit, Textes d'auteurs grecs et romains relatifs
au Judaïsme. Paris, 1895, p. 10 ss.). — Herjuppe Callimaque de Smyrne, philosophe péri-
patélicien du m' siècle av. J.-C, aurait aussi allirmé que « la philosophie introduite en
Grèc€ par Pythagore, fut empruntée par lui aux Juifs » (cf. Reinacii, p. 40; Joséphe,
C. Ap. I, 22: cf. Il, 41 et Antf. IV, viii, 49). — On est bien enclin à croire qu'il s'agit
dans les deux cas d'interpolations juives.
(4) Lpg. ail. I 108, M. I 65. Cf. Quaest. in (ien. III i^ 5 : « Heraclitus libros ronscripsit
de nalura, a thcologo nostro mutuatus senlentias de contrariis ». Quis rer. div. liaer. 214.
M. I 503 : « N'est-ce pas là la doctrine dont se glorifie, comme d'une trouvaille, le grand et
célèlire Heraclite et qu'il plaça à la base de sa philosophie'? Or, c'est une véritable décou-
verte de Moïse... » Quaest. in Gen. IV g 152 : « Heraclitus, furlim a Moyse dempla lege et
sentenlia, dixit... »
(5) Quaest. in Gen. IV g 167 : « Nonnulli juniorum novissimorumque ab ipso Moyse
tamquam a fonte acceptantes sententiam... » Quod omnis probus liber 57, M. II 454
;
:
« Zenon semble avoir puisé cette doctrine, comme à sa source, à la législation des Juifs ».
Cf. De mutât, nom. 167 s., M. I 603.
(6) De spec. leg. IV 61, M. II 345,
486 REVUK BIBLIQUE.
Ce qui vient d'être dit sur la Loi écrite, s'applique en général seu-
lement au Pentateuque, la partie la plus sainte et la plus considérée
de la Bible. On aurait tort d'en conclure que d'autres livres n'aient
point été pareillement regardés comme divins.
Le livre de Y Ecclésiastique suit de très près les anciens écrits
bibliques, dans l'éloge qu'il consacre aux ancêtres d'Israël (c. 44-49).
il fait allusion Thora (44-45), à Josué (46, 1-10), aux Juges
à la
(46, 11-12), aux livres de Samuel (46. 13-47, 11 aux livres des Rois 1,
(1) Andr. Ehekiiaktek, Der Kanon des Allen Teslamenls zur Zeil des Ben Sira, auf
(= Allteslamenll. Abh., herausg. von ISikel, 111 Bd. 3 Heft), Munster, 1911, conclut son
enqu«He par ces mots : « Le Siracide n'élail pas seulement familiarisé avec la lillérature de
l'A. T., mais dans la composition de son livre il a utilisé abondamment les écrits de ses
prédécesseurs. On ne peut douter qu'il n'ait utilisé les cinq livres de Moïse, les Prophètes
antérieurs [— Josué, Jufjes, les deux livres' de Samuel, les deux livres des Ilois), les Pro-
phètes postéiieurs : Isa'ie, Jérémie, Ézéchiel, et les Hagiographes : lesPsaumes, les Pro-
verbes, Job. les Lamentations, l'Ecclésiaste, Esdras, Néhémie et les deux livres des Para-
lipomènes... L'utilisation des douze Petits Prophètes peut être dillicilemenl contestée... Il
Cantique, Esthcr et Daniel... Il n'y a aucune référence au livre de Ruih... Pour ce qui
regarde les deulérocanonifjues, le Siracide a pu avoir sous les yeux Tobie et la Sagesse,
[>eut-ètre aussi Itaruch >>
(p. Wi s.; cf. aussi p. 77).
(2j On appelle livres protocanoniques de l'A. T. les livres qui
otil toujours tu un carac-
tère sacré aux yeux des Juifs.Ce sont ceux (|ui figurent dans nos lUbles hébraïques.
Les deutérocanoniques .sont ceux dont le caractère sacré ne fut déliuilivement admis
i|ue par une fraction du juilaïsme et ne se lisent que dans les Septante. Ce sont Tobie,
Judith, la Sagesse, l'Ecclésiastiiiuc, Bariich avec l'Epitre de Jérémie, les deux livres des
Machabées, et les fragments deutérocanoni(|ucs, c'est-à-dire les additions au livre d'Eslher
(10, 'é-16, 2i), la prière d'.\/arias et le canlic|uc des trois enfants dans la fournaise
Loi, les prophètes, et les autres livres » avaient déjà été traduils en
grec à sou époque. Mais il est impossible de connaître l'étendue de
ces « autres livres » (1).
Le second Machabrcs 2, 13-15) fournit d'autres indica-
livre des
tions : fonda une bibliothèque où il réunit les livres
« Néhéniie, dit-il,
concernant les rois et les prophètes et les écrits de David, et les lettres
des rois au sujet des dons sacrés » de môme Judas Machabée « recueil- ;
lit tout ce qui avait été égaré pendant la guerre ». Dans ce passage,
il est à tout le moins question des livres des Rois (« Prophètes anté-
mains des Juifs et qui sont leur meilleure consolation (l Mach. 12, 9;
cf. II Mach. 8, 23 Izzy. {ùiiXoz). On les groupait donc sous une dési-
r^
gnation commune (3 .
(1) L'appellation par laquelle cette troisième catégorie de livres est désignée, est très
vague : 6 v6[j.oi; xal o\ :rpo9f|Xat xai Ta âW.a ta xar' a-jxo'j; ï)xo)vOu6yixÔTa, —ô vô(jio; xai ol
TipocpriTai xal là aX/.a Tri-pia ptoXia, — tûv ptSXi'wv.
6 v6(jlo: y.al aï Tipoç-ziTsTat xai xà ),&i7ià
(2) La correction proposée par Riessler [l'eber Nehemias und Esdras, dans la Bihlische
Zeitsclirift, 1904, p. 27,, d'ai)rès laquelle il faudrait lire « livres du roi Salomon » au lieu
de « lettres des rois au sujet des dons sacrés » ("îiSw "I^D "ilSD, au lieu de "i^SD
D^D'^UT "iD^D) est une conjecture sans fondement.
(3) Ailleurs on trouve les expressions ti fi{6Xo; (Arist. 31G), pi6Xoç ôia6r,xr); (Eccli. 24,
:
23),
PiêXîov ôta6/,x-/i; (I Mach. 1, 57), xà piêXi'a xoO vô[xo'j 'I Mach. 1, 56), r, ypaçr, (= l'Écriture,
Arist. 168); mais dans tous ces passages il n'est question que du Pentateuque.
(4) Mt. 5, 17; 7, 12: 11, 13; 22. 40; Le. 16, 16. 29. 31; 24, 27; Jo. 1, 46; Act. 13,
15. 27; 24, 14: 28, 23; Rom. 3, 21.
(5) Il semble bien d'ailleurs que par cette expression on ait désigné parfois toute l'Écri-
ture. Cf. Mt. 11, 13.
(6) Cf. ScHiiRER, GeschicMe des jiidisc/ien Volkes, vol. II, p. 534, n. 127.
488 REVUE BIBLIQUE.
sante de l'autorité accordée même aux livres qu'ils n'ont pas eu l'oc-
casion de citer.
saïe qui dit : " Lallamme ne t'embiasern point ))(*2); il nous faisait
(1; Quelques iiiiteurs (p. e\. Aiciii-it. o/>. ni., \\. '.». ii. :>., après IliiiiN, Die mrssianischen
Weissafiungcn, Freiburg i. 15.. 1H9"J, II, p. '278) ajoutent encore à cette liste : Josué. les
.listes, le 11" I. des Rois. Jonas, Sopfionie. lUilh, les Lamentations, les deux livres des
l'aralipoincnes. Mais tout dépend du concept plus ou moins ('Iroil (|u'on se fait de la
(i citation •. Cf. NN . Dittmau. Trsiami'iilvm in .\ovo
Vrtus Pie nllteslnmcndic/ien —
Parritleli-n dis A'. T. im Worllnut dcr l'rtcxle und der ScptuiujinUt zusatnmenge-
Ktellt, tli.llinKcn, lOOJ. p. 28b-My>..
(2, Isaïe 43, '2.
MELANGES. 480
244 s.: ib. 22 s.; Adv. haer. 8, «, P. G. 41, 213: ib. 76 Aetii c. 5, P. G.
43, 277 s.;
énumèrent les 22 livres du canon hébreu Méliton de Sardes (ap. Eiseb. B. E. IV,
:
xxM, 14, P. G. 20, 3960; la liste actuelle n'en contient cependant que 21, Esther étant
omis), ORiGiiNE [EJLpos. in Psalm. 1. P. G. 12, 1084; ap. EusEit. //. E. VI, xxv, 2, P.
G. 20, 580 s.), S. Cyrille de Jérls.alem (Catcch. IV, 33, P. G. 33, 496-500), les Canons
490 REVUE BIBLIQUE.
DE Laodicée (can. 60, P. L. 56, 721), S. Amchilo^ue Ad Seleuc, ap. Gkeg. Naz., Carm.
II, 7, P. G. 37, 1593), Rui'iN {Comment, in symb. 36, P. L. 21, 373).
(\) chiffre de "H (les .Juges et Ruth, Jérémie et les Lamentations sont regardés
Le
comme des livres distincts) semble avoir été plus commun parmi les .Tuifs. Dans son
Prolof/us Galeatus, S. .Jérôme dit qu' « un certain nombre de personnes » comptent 24
livres de l'Ancien Testament [P. L. 28, .554). Dans sa Préface à Daniel il déclare sans
restriction que chez les .Juifs l'I-'criture se divise en trois parties la Loi qui comprend :
cin(/ livres, les Prophètes qui en forment huit, et les Mafiiographes qui sont au nombre
de onze {P. L. 28, 1294). Total vingl-quatre. —
C'est le cbiilre qu'on rericonire liabituel-
lement dans la littérature rabbini(iue b. Baba Balhra 14''-15'': 0. Taaiiitli 8^; Sche-
:
(2)Sur le canon de Josèphe on peut consulter W. Fei.l, Der Bibclhanon des Flavius
Jo.sr/j//, dans la Biblische Zeitschrift, 1909, p. 1-16. 113-122. 235-244. Sur le canon —
des .Juifs en général J. FiiRsi, Der Kanon des A. T. nach den Ucberliefcrungen in
:
Ein Kapitel der Gcschichte des altteslamentl. Kanons, Leipzig, 1905 (cf. reccnsion du
P. Laurance, dans la Revue Biblique, 1907, p. 612-614). — Die Religion des
Boi'sset,
ModiiK, The Définition of the Jeuish Caiîon and the répudiation of Christian .Scrip-
turrs, dans Essays in modem theology and related sul)jecls (offerts par différents
savants à On. A. Bnior.s ]>our sa 70* année), New-Vorii, 1911, p. 99-125. Fn outre les —
arliclrs sur le Canon de lA. T. dans les Diclionnaires de Vigouroux, ("heyne, liaslings,
de la Je«ish Encyclopaedia, cl toutes les Introduelinns générales à l'A. T.
MÉLANGES. 491
Les Juifs de Palestine avaient coutume de lire les livres saints dans
la lang-ue nationale. Les Pharisiens étaient gens à conceptions étroites
et mesquines ils étaient surtout fort attachés aux traditions anciennes.
;
textes les plus futiles. Les écrits rabbiniques ont conservé le souvenir
de discussions fort anciennes sur la canonicité des Proverbes (1), du
Cantique (2), de l'Ecclésiaste (3), d'Esther (i) et d'Ézéchiel (5). L'auto-
rité du Cantique et de l'Ecclésiaste
était pfirticulièrement menacée.
— Si donc on en Palestine à révoquer en doute le
n'hésitait pas
caractère sacré de livres depuis longtemps admis aux honneurs de la
lecture publique, personne ne trouvera étrange que les rabbins ne
se soient point empressés de reconnaître une autorité canonique à
des livres de date relativement récente, qui ne prenaient point garde
à leur casuistique subtile et formaliste, et dont plusieurs étaient
rédicés en grec. —
Néanmoins on ne semble pas les avoir positive-
ment exclus du nombre des livres sacrés. Us jouissaient d'un certain
crédil ainsi, l'Ecclésiastique est plusieurs l'ois cité dans le Talmud
;
(1). Cf. Zu.Nz, Die fjollesdienatlichen Vortnuje der Judcn, Berlin, 1832, ]>. 100-105:
SciiiJREn, op. cil., vol. II, p. ;56".), noie 14; Box and Oestkiu.e^, dans CnAiti.ES, Apocryplia,
vol. I, [•. ?.97 s.
(2) Pour Tobie, cf. Simpson, dans Ciiaiii.es, op. cil,., \n\. I, |>. 17G-1H0. 1!I8. Tour Judidi,
cf. Cowt.EY, ib., p. 2i3-2'É7.
.i) Anlt.. Prooeiii. 3; .\, .\, fi; X.\, xi, 2; cf. C. Ap. I, 1. 10.— On ne saurail, il est vrai,
tirer de conclusion ferme de ces faits. .losèphe, qui n'a aucune réfi'rence ;\ .lob. au\
Proverbes, au Cantique, à IKcclésiasle, utilise .sans scrupule aucun le IIP livre d'Ksdras
tXl, m, 3), la lettre du Pseudo- Arislée (XII, ii), des niidrascliiiii juifs parliculiiToinenl
l>our lliistoire îles patriarches cl de .Moïse; voir aussi le roniau d'Alexandre, .M, viii] et
(5) Quis rcr. div. haer. 258 ss., M. I 510; cf. Sib. IIl 582.
MÉLANGES. 493
nitivement arrêté soit par une tradition ferme, soit par une autorité
compétente (l).
Quelles qu'aient été les opinions des Juifs sur le nombre de leurs
livres saints, une chose était certaine à leurs yeux c'est que ces :
écrits avaient une origine surnaturelle. Ce sont les « saints livres » (3),
les <c sajntes écritures » (4), les « oracles » (5), les « oracles di-
(1) A. EiîERHAKTER, op. cit., p. 5i-77, s'est efforcé de prouver que dans l'Ancien Tes-
tament aussi, et jusqu'à l'avènement de Notre-Seigneur, il existait un organe ollicielle-
ment chargé par Dieu de veiller au maintien de la doctrine révélée, en particulier
de se prononcer sur l'inspiration et la canonicité d'un livre. Cet organe ne serait autre
que le sacerdoce. —
Mais cette théorie ne peut s'appuyer sur aucun fait historique
et elle se heurte au témoignage positif de Josèphe [C. Ap. I, 8), qui, prêtre lui-même,
devait connaître les prérogatives du sacerdoce. Enfin, à l'époque que nous étudions,
le haut sacerdoce était gagné aux doctrines des Sadducéens qui niaient l'existence
des anges, l'immortalité de l'àme, la résurrection des corps, rejetaient la tradition
orale et considéraientThora comme seule loi obligatoire. Comment, dès lors, lui
la
C. Ap. I, 10. —
al Upai YP«?«i Philon, De Abr. 61, M. Il 10.
=
(5) yj?riii).o-. Philon, De fuga 56. 58, M. I 554; De vita Mos. II 188, M. I 163 cf. De
: ;
mains.
La vérité est l'apanage obligé des paroles de Dieu. Les paroles de
l'Écriture sont des « paroles de vérité » (4), qu'il n'est pas permis
d'accuser de mensonge (5). Le vrai j)rophète ne peut dire que des
choses conformes à la réalité, tandis que la caractéristique des faux
prophètes est d'être des « prophètes de mensonge » (6).
Les auteurs sacrés sont en effet des prophètes, et parlent au nom de
Dieu. — Les Juifs palestiniens ne se sont guère souciés de creuser
cette idée : il leur suffisait de savoir que la Loi écrite n'est que la
copie des « tablettes célestes >> (cf. plus haut p. 38'i', note G) ;
que, « par
la bouche des prophètes », c'est le Seigneur qui a parlé (Hén. 108, 6)",
et que toutes leurs prédictions doivent se réaliser (ib.; cf. Test.
Benj. 3, 8; Josèphc, Antt. X, x, 4; X, ii, 2; X, xi, 7). Ils croient
que les prophètes sont en rapports étroits avec le Saint-Esprit (Asc.
Is. 3, 14), et que leurs paroles viennent « du ciel » (Test. Benj. 3, 8).
Mais ils n'ont pas approfondi la notion de l'inspiration. Ils intro- —
duisent les citations scripturaires par des formules variées :
lon ce qui a été dit » : i»2n:w. Cf. dans le N. T. Le. 2, 2V ; Act. 2, IG;
(1) ol ôsïoi xP^i'^t"^' • Pliilon, De mut. nom. 7, M. I ôT'J: Hcoû Xôyi» : Aristée 177; 6e6-
(2) i Upo; Xôyo; : Philon, De .wmn. I 191. M. I fJ'iO : De ebrict. 143, M. I 379.
lz)tsjYA Osto; : Philon, De migr. Abr. 130, M. I 4.")G; plus haut, p. 384, note 7.
cf.
Test. Gad. 3, 1; llén. 99, 2; 104, 9 s.; cC. plus haut p. 384 la Loi, source de vie
:
(4)
et de lumière.
(5) Ilén. 104, 9. On considère comme un
la Loi, de réduire à crime -< de rendre vaine
néant les paroles pour ainsi dire, par une conduite
des prophites » et de « chanjçer »
désordonnée, ce qui doit être immuahlement vrai (Test. Leyi 16, 2 Ncpht. 3, 2 Ilén. 99, ; :
2; 104, 9 s.). A plus forte raison, mérilerait-il des malédictions celui qui oserait allentcr
à leur inté{;;rité par des additions, par des suppressions, ou par quelque modification que
ce soit (Aristee 311).
(Gj Asc. Is. 2. 12. 15; 3, 1 : cf. Sih. III 808-8;>8.
MELANGES. 495
tombe en extase, sans cependant perdre conscience, et il dicte à cinq secrétaires des
choses qu'ils ne comprennent pas. En quarante jours, non seulement les vingt-quatre livres
sacrés, mais encore soixante-dix livres à doctrine ésotérique, sont composés (IV Esdr. 14,
37-44).
(2) 71 c; Jon 534 a-c; Ménon 99 c.
Timée —
Le concept platonicien de la mantique
répandu à ré|ioque de J.-C. Cf. Cicéron [De divinationel, 66 s.) « Deus inclusus
était fort :
Arlus
Phoebados irrupit Paean, mentemque priorem
Expulit atque hominem toto sibi cederejussit
Pectore, bacchatur démens aliéna per aniruni.
496 REVUE BIBLIQUE.
dans les saints livres (il s'agit do la Thora) a la dii^nité d'oracles »;•
car Dieu se sert de leurs organes pour manifester ses pensées » {De
spec. leg. I 65, M. Il 222).
Que donc entendre par prophétie? Le philosophe explique
faut-il
(1) L'occasion lui en csl fournie un texte des Seplanle, (icn. 15. 12
|>ar ('dinnie If : <
soleil recouchait, une extase tomba sur Abraham «. Il se peut que l'expression czataoi;
(= élal (le celui qui est hors de lui-même; ait contribué à lui faire accepter la théorie
platonicienne.
MELANGES. 497
langue, pour exprimer tout ce qu'il veut : les frappant par un art
invisible et harmonieux, il en tire des sons d'une eurythmie et d'une
symphonie parfaites » [Qiiis rer. div. haer. 2()3-2G6, ]\1. I 511). —
I.'élôment divin chasse donc Télément humain, la conscience per-
sonnelle s'en va, toute réflexion est supprimée. « Le prophète ne
profère absolument rien de lui-même, mais il est interprète : un
autre lui suggère tout ce qu'il énonce, aussi longtemps qu'il est
transporté et sans conscience (àvOsucd -/sycvwç èv àYvcix);car le rai-
sonnement l'a quitté et a abandonné la citadelle de l'àme, tandis que
l'esprit diviny établit sa demeure et lui fait prononcer les oracles
qu'il veut, mettant en mouvement tout l'organisme de la voix »
[De spec. II 343). La personnalité du prophète dispa-
leg. lY 49, M.
rait : transforme pour ainsi dire en instrument de musique
il se
auquel l'artiste fait rendre les sons qu'il veut. Ce qu'il dit ne pro-
vient pas de son propre fonds, mais de l'esprit divin qui a pris pos-
session de lui (i). Bien qu'il soit « l'interprète de Dieu (2) », il ne
comprend pas les paroles qu'il émet (3), il ne sait même plus ce qui
se passe autour de lui (4), il est, pour ainsi dire, dans un état
d'aliénation mentale : « abscessus mentis extra se exeuntis » [Qu.
in Gen. III § 9). — En résume
« Propheta putatur aliquid dicere, :
proprium tamen non dat edictum, sed interpres est alterius, qui
mittit aliqua in ejus mentem; proindeque quidquid personat ac pro-
fert verbis, totum verum est ac divinum » {Qu. in Gen. III § 10).
Il est l'organe passif et purement matériel de la divinité.
qui est écrit dans les saints livres, dit-il, a la dignité à' oracles » [De
vita Mos. II 188, M. II 163 s.); Moïse a composé « les saintes Écritures
sous l'inspiration de Dieu » (ajvsvpa'isv jçrjY-^aaij.Évcu Beoj; De vita
Mos. II, 11, M. II 136); les écrits des Nebiini ne sont autre chose que
« des oracles rendus par les prophètes » [De vita contemplât. 25, M. II
475); « celui qui a écrit les Psaumes » n'est pas « un homme quel-
conque, mais un prophète » [De agricult. 50, M. l 308). Il se mon-
tre si peu avare du don de prophétie qu'il l'accorde généreusement à
tous les hommes justes dont parle l'Écriture {Quis rer. div. haer.
259 s., M. I 510). — Philon ne voyait aucune raison de distinguer
(1)-Qmw rer. div. haer. 259 s., M. I 510; De vita Mos. I 281, M. II 125.
(2)De spec. leg. 1 65, M. II 222; De praem et poen. 55, M. II 417; de spec. leg. IV 49,
M. II 343.
(3) De vita Mos. I 274, M. II 12i; De spec. leg. I 65, M. Il 222; cf. Josèphe, Antt. IV,
VI, 5.
oracles des livres des rois » [De conf. linq. 149, M. I 4*27).
<( quelqu'un des disciples de Moïse dit » [De congr. erud. gr. 177,
M. I 544); « quelqu'un d'entre le chœur divin » [De ebr. 31,
M. I 362).
Isaïe = « quelqu'un des anciens prophètes rend témoignage » [De
somn. II 172, M. I 681; De exsecrationibus 158, M. II 434).
cf.
Osre =
" on trouve cet oracle dans quelqu'un des prophètes »
(I) Celle formule imprécise se rencontre assez souvent « Il (Jacoli) dit quelque part » :
familiers (1). Moïse est i;Tand à tout point de vue (/)^ spec. leg. II
106). C'est auprès de cet ami de Dieu que Philon s'est fait initier aux
grands mystères, bien qu'il n'ait pas dédaigne d'aller aussi à l'école
du prophète Jérémie, qui est « non seulement initié, mais encore
initiateur », et qui dans ses transports divins a prononcé de nom-
breux oracles {De cherub. i9, M. I liS). Le Pentateuque doit se
placer sur un rang à part Philon ne veut même pas qu'un autre
;
que Moïse ait écrit le dernier chapitre sur le point d'être enlevé au :
propre mort [De vita Mos. II 291, M. II 179; cf. .losèphe, Antt. IV,
VIII, 48).
qui est mortel habite avec ce qui est immortel » [Quis rer. div. haer.
265, M. I impossible à l'écrivain sacré d'exprimer les
511). S'il était
sait initié aux grands mystères [De cherub. 49, M. I 147). — D'ail-
(1) D'après une Iradilion juive, les prophètes devaient s~e rattacher au Sinaï par une
succession ininterrompue et clairement établie. Josèphe (C. Ap. I, 8) semble y faire allu-
sion.
oOO REVUE BIBLIQUE.
vait qu'elles étaient toutes, mot pour mot, identiques. S'étant « retirés
dans un témoin que la nature, la terre,
lieu solitaire, dit-il, sans autre
l'eau, l'air, le ciel, dont ils allaient révéler la genèse mystérieuse —
car la création du monde est le commencement de la Loi, ils pro- —
phétisaient, comme transportés par la divinité, sans divergence au-
cune tous s'accordèrent dans les mêmes mots et dans les mêmes
:
(1) Josèphe {Anlt. XII, ii, 2-14; C. Ap. II, 4) se contente de rt-suiner la lettre d'Aristée.
L'auteur de la Cohorlalio ad Graecos (c. 13), attribuée faussement à S. Justin [P. G.
6, 265 s.), orne la légende de détails nouveaux, sans doute d'apros des récits juifs.
ne Il
L.W.Wir, 10; P. L. 37, 1115 s.), TnÉonoiiET {in Psahn. praef. /'. G. 80, 8G4), ;
saint l'Mri.ASTiiE de Brcscia {/farr. 142; /'. /.. 12, 1277 s.), saint Isiiioke de Séville
'i:iym. VI, IV, 1-2; P. L. 82, 2.36; De Kccl. O/f. I, \ii, 4 s.; P. L. 83, 747 s.), saint
Jli.ien de Tolfde {De comprob. ael. sertae III, 16-18; /'. L. 96, .".7<i-57<s), le Ciironicon
Pascmale (/'. G. 92, 42.'.), Ceoiices i.i: S^ncei.i.e {Chronogr., éd. Dindorf, p. .Mr.-518):
ViMKNT de IJeauvais {Spi-c. iloclr. I. XVII, c. xl), Denys le Chartreux (in (;enrsim
fiifirrfitio 1-3; Opc.ra oinnia, Montreuil, 1896, t. I, p. 5-12), Sixte de Sienne l/iibtiolfi.
Sacra, 1. VIII, haer. xiii), Am.ki.o Uoc.ca [Opéra, t. i, y. 276; t. II, |». 8), I'ieiihe .Mokin
(l'réf. à l'édilion romaine de l.'.H7).
Saint Jkiiome s'élève contre ces légendes avec sa vigueur habituelle [l'rol. in Gcn.:
MELANGES. 501
hébreu a les deux fois 2"ip (1). Il fait dériver de profonds enseigne-
ments de passages qui en réalité constituent des erreurs de traduc-
tion [Qiiis rer. div. haor. SSIt 5s., M. I 514 : -rpaosj; au lieu de Taç^sJç).
(1) Cf. A. EiiF.nsiiEiM, The Life, nnd Times of Jésus the Messinh. 12' éd.. r.ondon, Iflor..
vol. Il, a|/|)pndi\ IX : List of OUI Testament passarjes messianically applied in anrient
rabbinic writings, p. 710-741.
MELANGES. Îi03
tical est négligé, des analogies lointaines deviennent des bases d'argu-
mentation serrée, des métaphores sont interprétées au sens propre (1).
C'est le triomphe de la lettre; l'écorce de la parole divine est dissé-
quée, mais le noyau leur échappe : les magniliques doctrines de la
Loi et des Prophètes sur la grandeur de Dieu et ses exigences morales,
les sublimes exemples de vertus oii'erts par les personnages de l'An-
cien Testament, en un mot, la valeur proprement religieuse de la
Bible, tout cela disparait sous un fatras d'explications juridiques et
de légendes puériles.
Suivant que les Docteurs de la Loi cherchaient dans le texte sacré
une réponse aux questions d'ordre pratique que posait la vie quo-
tidienne ou une matière à exhortations édifiantes et développe-
ments légendaires, leur commentaire est rangé dans Vhalacha
(nz"^- = voie, usage) ou dans Y liaggada [T\~z,r\ récit). =
L'haggada était volontiers cultivée par les Juifs. C'est ainsi que
l'histoire de la création, Adam et Eve, Hénoch, Abraham, Jacob et
ses fils. Moïse, Isaïe, etc. devinrent le centre d'une foule de légendes
dont il nous reste quelques spécimens dans les Jubilés, la Vie
d'Adam et d'Eve, les livres à' Enoch, V Apocalypse d' Abraham, les
Testaments des Douze Patriarches, Y Assomption de Moïse, Y Apoca-
lypse d'Élie, le Martyre et F Ascension d'Isaïe, les apocalypses
d'Esdras et de Baruch. L'haggada ne resta d'ailleurs pas circons-
crite à la Palestine; dans les écrits des Juifs hellénistes, chez Dénié-
trius, Eupolémus, Artapan, Philon et Josèphe, elle occupe aussi
une place importante. Ne permettait-elle pas de glorifier, en face
du monde gréco-romain, si méprisant pour leur race, les grands
hommes du peuple hébreu, et de mettre en circulation des doctrines
à la propagande desquelles on tenait particulièrement?
Cette manière d'exposer l'histoire sainte n'allait pas sans quelques
inconvénients. Les libertés qu'on prenait avec le récit inspiré étaient
grandes. Non seulement on l'ornait d'additions qui, le plus souvent,
ne trouvaient qu'un point d'attache artificiel dans le texte, mais
on n'hésitait pas à supprimer ce qui pouvait gêner, on modifiait
le texte et parfois on allait jusqu'à dire exactement le contraire,
malgré tout le respect que, théoriquement, on professait à son
égard. Les Jubilés font disparaître ce que massacre des Siché-
le
(Ij Noir II;. Mmiiin, Ix Livre des Julnlés, ilans Kli., l'-Hl, p. .>r.)-:{4n.
MELANGES. 505
de la lettre écrite.
Les ThérapeiUcs d'Egypte (Philon, De vila contempl. 28. G5. 78,
M. II i75. iSl. i83 s.) ainsi que les Esséniens (Philon, Quod omnis
probus lih. 82, 51. II 458) étaient des partisans résolus de l'allégo-
risme.
Le système atteint son apogée avec Philon. Nous nous contenterons
de résumer en peu de mots ses principes exégétiques. De même —
que l'homme se compose de corps et d'àme, ainsi l'Écriture possède
un sens littéral et un sens spirituel (2).
1" Philon défend avec énergie, contre certains allégoristes exa-
gérés, le sens littéral de la législation mosaïque et des lignes princi-
pales de l'histoire primitive (3).
(1) CicÉROx, Pro Flacco 28-67; Tacite, Hist. V, 8; Maa'éthon (Mïiller, Ilist. Graec.
Fragmenta, vol. II, fragm. 42. 50. 52); Posido.mus d'Apamée (Millier, vol. III, fragm. 14);
Apollonius Moi.on (Joséphe, C. Ap., II, 14. 33. 3G).
2, 8) n'est-ce
: pas lui faire injure que de penser qu'il ait planté des
arbres et cultivé la terre? Ou aurait-il besoin d'un jardin pour se
délasser (7)? Dans tous ces textes, l'interprétation allégorique est
seule admissible.
4.° Le sens littéral est encore à abandonner quand il contient des
difficultés insolubles, des contradictions ou des invraisemblances.
—
Dieu n'a pas créé Eve d'une cote d'Adam. Gomment croire qu'un os
peur, car je suis nu »), puisque les deux coupables s'étaient fait des
(3) De Josepho 28, M. Il '16; cf. De spec. leg. III 17H, M. II 321».
(2) Cf. Leg. ail. II 89, M. I 82; Quod det. pot. ins. 13 s., M. I 194.
(3) De fu(ja 54, M. I 554; cf. Leg. ail. III 40 s., M. I 95.
(8) Grâce à cette méthode, Philon put retrouver dans le Pentateuque les théories plato-
niciennes des Idées, la création du monde par l'intermédiaire des Puissances, les doctrines
pythagoriciennes sur Ips nombres, le système stoïcien du Logos, en particulier du Logos
diviseur, et une foule d'autres doctrines grecques.
REVUE BIBLIQUE 1916. N. S., T, xm. — 33
508 REVUE BIBLIQUE.
dre des cléments moraux, ils sont pour la plupart convaincus que
leur qualité d'enfants d'Abraham suffit à leur donner droit à toutes
les faveurs divines.
Ils maintiennent la notion traditionnelle du miracle, (|ui constitue
une dérogation au cours naturel des événements il atteste la toute- :
Le crédit tout spécial que les Juifs accordent aux cinq livres de Moïse
ne les empêche pas de reconnaître une origine divine à un grand
nombre d'autres. Mais ici s'accuse une divergence très nette entre le
Judaïsme palestinien et celui de la diaspora le second n'hésite pas :
Les uns et les autres « scrutaient les Écritures », mais n'y trou-
vaient point « la vie éternelle » (Jo. 5, 39) ; ils étaient trop préoccupés
d'en tirer ce qui flattait leur orgueil de Juifs ou leur amour-propre
510 REVUE BIBLIQUE.
IV
(1) Le présent article forme le premier chapitre du 30° volume de la coileclion des Studi e
Tesd, publiée par la Bibliotlieque Vaticane : G. Mercati Se la versione del codice Veneto
greco VII sia di Simone Atumano, Arcivescovo di Tebe, Rirerca storica con notizie e
documenli siilla vila dell'Atuuinno, Rome, l'JKl. Nous remercions vivement l'auteur de
nous avoir communiqué les bonnes feuilles de ce travail en nous autorisant à les repro-
duire. N. D. !.. R.
'2) Crnecus Vendus. Pentateuchi Proverbiornin Hutli Canlici Ecclesiaslac Threno-
rum Danielis versio graccn. E.r unico bibliothecac S. Marci Venetae codice, etc.
(Lipsiac IS?.*)), i.xv-lxix.
(3j Nella prefazion«> al (iraecus Ven., \i sg.
{^) Mnnalsschrifl fur Gesrhichte iind Wis.ien.ichnfï des Judcnthunis XXIV (iS't,)
fclfi s;,-;;. Non (! vcro (lie opli ne riténua autctre Scmarja da Negropontc, <ome ^;li fa dire
qualcuno, ad c^. il Vigoureux.
MELANGES. SU
gr. Vil é autografo dal foglio i ail' lxxxi'. Onde non é luogo a dub-
(1) Cf., ad Nestlé in RealencyklopUdie fur prot. Théologie utid Kirche ' III, 24;
es., E.
ËHRHÀRD in Krumbacher Geschichte der byz. Litteratur- 12.3, 125: Swete An iniroduc-
tion to the 0. T. «i Greek ^ 56 sg.
512 REVUE BIBLIQUE.
bio suir età del traduttore, che è l'età stessa del codice, e cioè la
seconda meta del secolo xiv o, al più basso, il primo principio del
secolo XV. II Bessarione medesimo (1395-1.V72), già possessore del
ms., se bene s'appose nel chiamare « nuova » la versions, tuttavia ci
ritiene dall'avvicinarla troppo ai giorni di lui,, perché non conobbe
nulla aflfatto deU'autore (1); si direbbe che egli se ne sia procurato il
ecc.
Il Delitzsch ad escludere come un'assurdità che l'autorc
si afl'rettô
f\) GF.nnARDT, p. XXIV sg., « cf. p. XVII n. 1 : « réveai; v.aX â)).a tt,; 7ta),atâc ypa^?,;. v£a
Tivi; ép(iïiv£'a. àpjrETai àiro toO Tf),ou; toû (îiQ.îou xatà 'louôaîou; iiOva Iranslatio iii
(2) « Hanc precalionern ab au<;lore vcrsionis profectarn ossn in coKitalioncni cadorc non
potesl. Suspicor esse inlercessinnetn pro anima aucloris a Latino quopiam adscriplain,
qui quarn malura morle abreplus sit, compcrliiin habehal ». Prcfa/.. <il., p. mii s^.
MELANGES. 5i:i
(1) Non ardisco aggiungere che la sua scrittura greca, tuttochè d'un aspetto singolare
(« rarum ne dicam unicuin praebeat aspectum » Gebhardt, p. xxvii), e le « inusitate »
:
abbreviazioni rivelino una niano straniera, avvezzalasi di poi aU'aHabeto greco la stra- :
(1) Nei codici a due e più lingue (v. indicati alcuni a p. 13, n. 2) si osserva semprc una
laie disuguaglianza nelle linee dei testi derivali o secoudarii, quanle voile i copisli voUero
farle corrispondpre a quelle del leslo principale.
(2) Dictionn. de la Bible, III 291. Il Gebhardt, p. lxvii, n. 2 é i)iù cauto, e dicesem-
plicemente : « Grediderismcinbranain qtiartanariarn ab eo disectam el ila dimidiatam esse,
ul unius columnae latitudo rolinquerelur. Forlasse hoc modo a forma codicis llebraici,
quem ante se babebat, duas Tel plurcs columnas in singulis paginis exbibento, idcirco dis-
cessil, ne qui hiinc codiœin Ilebraeo more disposiluin legorent, coliunnarnm in eadem
pagina duplicalione confiindennlur ».
(3] " naluralmenlc », per la tendenza che lulli hanno a faïc allô slcsso modo ne'casi
Dico
uguali. E coMf fallu ne' codici biiingui con due tesli paralleli in colonne parallèle (non
al margine) Barber, gr. :y'i\, Palat. gr. 232, Valt. grecl 69.5 e lOTit, Criplense Av II, lulti
:
greco-lalini, e Val. lat. 81 e gr. 113fi, Olloh. gr. 208, che sono lalino-greci. iNel Salterio
penlagiotlo Val. Barber, or. 2. che dcv'esseri' compilazione ordinala da un Copto, si inir6
invece alla corrispondenza |)crfclla ddle facciate del libro aperlo. ossia délie facciaU* di
Ironie, e menire nel f.' si pose V l'anneno, 2" arabo, 3" il coplo, V il siriaco, 5" l'elio-
I
cosi di seguilo. V. fuori del nostro proposilo l'Ottob. gr. 258 che ha il lalino aggiunlo
alla meglio nel margine esteriore; in esso la nécessita non permise di lare diversamenle.
MÉLANGES. îilK
(1) L'ordine : Proverbi, Rut, Gant., Eccl., Treni, si Irova nel codice di Pietrograd
dell'an. 1009. ein-quelli delMuseo Britannico: Harleian. 5710-11 dell'an. 1230 c, Add. 15251
dell'an 1448, Orient. 2201 dell'an. 1246, ed è indicato coine quello giustoe secondo la tra-
dizione Palestinense nel trattalo Adath Deborim dell'an. 1207. Cf. Ginsbirg Introduction
to Ihe Massoretico-critical édition of t/ie Hebrew Bible (1897) 2, 6, 7. L'ordine Rut, :
Gant., Eccl., Treni, è nei codici 7 c 8 di Ginsburg, ib. 4. Più voile poi ne' mss., come neile
stampe, vennero per l'uso liturgico riuniti al Pentateuco i cinque Megilloth Cant., Rut, —
Treni, Eccl., Ester—, tanto in bibbie complète quanto a parte (ib. 3); ma ail' uo|io noslro
sarebbe bene trovare proprio codici, ne' quali gli Agiografi del Greco-Veneto, cosi ordinati
coi Proverbî in testa, vengano subito dopo la Legge, quantunque sia possibile che il tra-
duttore abbia avuto un codice per la Legge e un altro per gli Agiografi, e questi non sia
riuscito a terminare. La ricerca rai tirerebbe troppo fuori di strada nemmeno la tenfo.
(2) V. Gebhardt, p. xLvn sgg.
:il6 REVUE BIBLIQUE.
seconda meta del secolo XIV un tenlativo del génère, anzi il tentativo
ancora più grande di un'intera Bibbia ebraico-greco-latina, con una
versione nuova del N. T. in ebraico, fu in parte compiuto da un
monaco basiliano del monastero di Studio in Costantinopoli, di fcde
Romana, stato vescovo nellltalia méridionale e poi in Grecia, legato
del papa in Oriente per la riunione délie Chiese, che dimorù e mori
in Roma Simone Atumano.
:
fl) Su lui V. C. MoiiMiEm; O. S. \\. Hmhdph de Iliro der leiztc Vertrefer dcr allrfi-
misclicn Liturgie \ lî)M = Hccueil de travaux piitiliés par les membres des confé-
rences d'histoire et de philolorjie dell' Universilà di I.ovanio. Fasc. 29. Il II voluiiic coi
testi. u>rilo nel 1915 (? v. Theolotj. Iterue 1915 col. 96), non ho ancora vedulo.
MÉLANGES. 517
greco (1), in uno scritto finora non ritrovato (2), ma veduto ncl
secolo XVI dairagostiniano J. Latomus (lô2'i.-1578) (3) e nel scguente
dal doinenicaiio M. Harney (f 170 V), lasciù questa testimonianza, che
l'Harney ricopiù (i) nel codice Vindobon. Suppl. gr. 52, il Treschow
stampô nel 1773 (5) e Kollar di nuovo nel 1790 (6) con qiialche dif-
fercnza.
inio parère, malamcnte meglio il Moiilberg ib. 22 « ... ex graeco, edocuit ». Ne riferirei
:
(4) Nel 1704, dice MouLBEur. 1. c, ma credo per equivoco coll'anno di morte del P. Har-
ney. Questi com[irô il codice nel 1666, e non deve aver tardato tanto a studiarlo e ad
aggiungere varie notizie nei fogli di guardia. — Che Harney non Irascriveva dalla Corsen-
donca del Latomus è manifeste -.
in questa il passo non ce, non c'é nemmeno una citazione
esplicita; e c'é discordia nell'anno.
(5) Tentamen descriptionis codd. veit. aliquot graecorum N. F. mss. 86 sg. Stampa :
« A. D. McccLXXx, ... opus in très paginas tribus linguis dislinctas », e con una virgola
avanti « totum » fa morire prima il papa e ritenere l'opéra da Simone! Mi attengo al Kol-
lar e al Denis bibliotecari in Vienna.
(6) Ad P. Lambecii comment, de aug. biblioth. eues. Vindob. libros VIll Supple-
mentorum Mohlb. ha riprodotto la nota in pezzi staccati, a pp. 20.
liber 1 [éd. Denis] 22.
21. 22. — Sul ms. cf. Gregory Textliritih des .Y. T. 128 e v. Soden Die Schriften- I
des N. T. I 107, i quali troppo separano per tempo mentre non è da distinguere aflatto)
ilpossesso dellHarney da quello dei Domenicaci di Bruxelles, e trascurano la notizia del
Latomis, che il ms. fu portato da Roma, e quella dell'editore Hoyberg (cf. Moiilb. I 25 sg.)
che esso « anno 1633 per praedecessorem nostrum Matlhiam Bakelium annuente conventu
donatnm fuit loanni Woverio aerariiregii Belgicicommissarioseu assessori, quiidemin His-
panias ad ducem comitem Olivarium, regiae Maieatatis supremum consiliarium transmisil ».
lo dubito perô di questo invio, forse pensato ma non eseguito : perché altrimenti lllarney
non avrebbe ritrovato il codice nel 1666 proprio all'auzione vanden Wouwere. L'Oli-
vares, clie « spogliô del meglio parecchie biblioteche del regno » (Graux), non credo
avrebbe rimandato mai il ms.
(7) Latomus éd. ha « 1383 ». Chi dei due lesse meglio? oppure ce errore di stampa in
qualcuno? Raoul lu di certo a Roma nellinverno 1381-1382 (v. Mohlberc I 19 seg.', men-
tre Simone si trovava in Tebe al tempo dell'espugnazione fattane dai Navarrini avanti
laprile 1380 e alla flne del maggio 1383 stava per intraprendere un viaggio in Oriente délia
durata possibile d'un anno.
518 REVUE BIBLIQUE.
presse il papa.
Notizie, corne ognun vede, particolareggiate, précise, che Radolfo
avrà forse potuto ricevere in parte — circa il piano e l'inizio del
lavoro — da Simone stesso nel primo soggiorno romano del 1381
circa, ma péril resto avrà saputo, dopo la morte avvenuta nel 1386
c, sia per informazioni trasmessegli da amici. sia piutosto per ricerche
fatte da lui medesimo durante il secondo soggiorno in Roma alla fine
del 1396 c nella prima mctà del 1397 (2).
Ci sono tuttavia due punti oscuri. Quanto del lavoro Simone aveva
realmente compiuto? tutto il Vecchio Testamento? una buona parte?
o... solo le tre pagine che avrebbe presentato al papa, secondo la
interpunzione del Kollar? Inoltre come mai nel primo e nel secondo
caso i tre testi paralleli poterono essere distribuiti in tre pagine
diverse? salvo un incomodo perpetuo e per l'autore e per i lettori,
incomodo di cui persino Fuomo più inipratico si sarebbe accorto
subito nel primo foglio e avrebbe cercato liberarsi.
Ora io tanta impraticità non posso credere cosl facilmente (3), e
molto mcno che Simone abbia prcsentate tre pagine sole al papa, :
che poi per queste sole tre pagine di saggio Radolfo abbia scritto e
« papa totum retinuit ». Per questi motivi e anche per rispetto del
1) Koi.LAR (lopo <( opiis » rnetle virgola, a torto. penso; MoiiLiiEiir. I 21 la tralascia, ma
inlonde ui^iialiDcnle clie Simonin abhia presenlato al papa saggi dcU'opera u Proben dieser
Arbeit >/), non l'opéra, e non lascia Irapelare d'aver senlilo diflTuoIlà vcruna nel passo.
'2j Cf. MoiiLBEiu; I 40. l'er queslo in<:lino a credere che Io scrillo sniarrillo fosse degli
ulliiiii anni (i:}y7-1403) di Hadolfo.
i3> I lellori non s'impazientiiiu :e prima e qui c poi .sono dovuto scendcre a quisquilie,
a scioccliexze, délie quali mi vergogaerei, se non avessero, contro l'altesa, qualche
ulilità.
MELANGES. 510
che Uadolfo voile indicare che Topera ave va « le pagine », ossia cias-
cuna pagina, distinta, divisa in tre lingue, insomma in tre parti, puta
a tre colonne, una per lingua, appunto comc erano nel Nuovo Tcsta-
mento triglotto del nostro Simone, secondo la descrizione apertissima
di Sisto da Siena, che trascriviamo qui appresso (1). E percio, noncre-
dento facilmente ammissibile per il tempo di Radolfo l'uso délia
parola « pagina » per « colonna » [cûJ.:; =
pagina), che permet-
terebbe di salvare « très », inciino a sospettare in « très » una cattiva
lettura del compendio all'apparenza abbastanza vicino di « iiabens »
(hés) e a restituire provvisoriamente « opus habens paginas in tri-
:
(l)Per ispiegairni in qualche modo il « très paginas « senza toccarlo, avevo pensalo che
Simone, o per economia di tempo e di spese, o per la diflitoltà di trascrivere l'ebraico e
cli farvi benc corrispondere linea per linea le due versioni, non avesse composte la Tri-
glolta in un codice solo, a tre colonne per pagina (o per le due pagine di frontej ma in
tre codici, l'uno ebraico, già scritlo da altri, l'altro greco, come il Veneto, e il terzo la-
tino. e questi con le stesse divisioni di testo, di pagine e di linee come nell'ebraico, e cosi
présentasse tre pagine distinte in tre lingue, una per ciascuna. Ma questa spiegazione,
mentre non corrisponde di più aile parole, non ripara alla mancanza délia costruzione. E
poi, se all'autore un taie processo di lavoro poté fornare d'un certo comodo nel tradarre.
punto comodo sarebbe riuscita l'opéra ai lettori nell'uso. Inoltre egli non fece cosi nel
Nuovo Testamento, e non è versimile che egli abbia nelle due parti seguilo un processo e
una forma esteriormente tanto di\ ersa per non dire che si avrebbero ottenuli
; tre codici
diversi, uno ebraico, uno greco, uno latino, e non un'opera trilingue.
520 REVUE BIBLIQUE.
2. — Il Nuovo Testamento.
Sisto non dice di aver veduto, ma pure colla sua stessa ammira-
zione e vivezza di scrivere ben dimostra di avère maneggiato l'opcra
di Simone, nella qnale loda la corettezza del tcsto grcco, la fedeltà
(1) liihliotheca snnrta, libro IV, alla parola « Simon lai. ». éd. Vcnet. 1560, p. iR9,
(1) Cf. la sua descrizione della Poliglolta del Giustiniani, ib. 327 : « in unuin corpus,
OcTAPLA inscriptum, redegit, tanto artificio, ut in singulis pa'ginis octo columnas dispo-
neret; in quibus omnes praedictae linguae, propriis characteribus expressae, totidem
lineis totidemqiie verbis sibi correspondentes, uno eodeinque aspectu cernerentur... ».
(2) Non oso escluderlo aflatto, perche Sisto uso il volume I del N. T. del Giustiniani e
noi abbiarao solo frammenti della prefazione di questi, e rimane sempre possibile, benchè
non sia forse molto probabile, che egli vi desse altre notizie sul nostro .\tumeo oltre
quella conservata.
(3) Cf. Della Bibbia polUjlolla di A. Gvaslmiani vescovo di Nebbio. Rafjionaniento di
un Accademico Labronico. Bologna 1818, pp. 20; Della... Racjion. del P. G. B. Si-o-
TORNO. Genova 1820, pp. 24. Due scritti di eguale titolo e di uno stesso'autore, ma di
redazione affalto diversa, che ho potuto leggere per favore del 0. Premoii barna-
ch.""" P.
bita. Citerô solo l'ultimo dei due, clie riproduce con miglioramenti tutta la sostan/a del
primo.
f)22 REVUE RIBLfQL'i:.
Ecco il passo in latino, quale sta con altri pezzi délia prefazione
nella BibliotJieca univei^salis di Corrado (lesner, secondo una copia che
se n'era fatta in Roma nel 1517 il francescano, poi protestante rifor-
mato Corrado Kûrsner, latinamente Pellicano, suU'esemplare forni-
togii dal Giustiniani (1). Se l'errore nel nome di Simone probabil- —
mente nato da uno scambio délia S con la vicina figura / o dalla
sigla
seguente sillaba la iniziale del cognome (2) —
risalga all'originale, o
piuttosto (come inclino a credere) alla copia del Pellicano o ad una
mala lettura del Gesner, non lio il mezzo di decidere ;
perô non puô
esser diibbio che si tratta dello stesso « latomaeus » di Sisto da Siena
e délia stessa traduzione ebraica, ossia del nostro Simone Atumano
arcivescovo di Tebe.
Il Giustiniani nella prefazione, dice il Gesner, « Deinde novo initio Hebraeos lec-
tures alloquitur.
Hebraei fratres quicumque hune legitis librum, ne gravemini quaeso sermonis incu-
ria enim euni e Graeco sernione in Hebraeum traduxit lacobus latomeus trans-
: qui
ferre singiilatim verba, non etiam sententias, voluit, ne corruptum ab eo
aliquid ab ullo posset praetendi. Eo pacto effectum est ut structus verbo-
rura duriusculi cvaserint et conformiores Graecae quam Hebraicae ac Lati-
nae linguae, etc. » (3).
(1) Il Pnllicano si ricopi6 intera,' i»are, la prefazione, di oui Gesner riferisce solo passi
trasrelti, poi alcuni versetli del c. I di S. Malleo e due lellero al Card. Sauli (soli estratti
ne (là il Gesner), nelle quali il Giustiniani i'avverliva di aver (inito il Nuovo e coniincialo
il Veccbio Testamento e lo pre^ava di fare in modo clie l'opéra si slampasse.
(2) Se l'errore risalisse al Giustiniani stesso, avrebbesi (ma chi lo puo sapere?) una
prova sicura, clie Sisto, lutlocli»; conoscenle degli Kvangeli polif^lolli di lui, non dipesc
totaltnentc da esso nella noiizia su Simone.
(.3) Ed. 154.">, f. 105.'. L'" etc. » •• del Gesner. Chi sa clie non sonuisse qualclie accenno,
sia pure lievissimo ma Simone!
ini|iortnnte per noi, alla vita o ai lavuri di
li) T. XantmoI'OI LOS Échos d'Orient V (r.»02) 32.5
in «On voit diflirilemenl utilité
: I
pratique d'une (l'uvre de ce f^etire; mais elle révèle un helléniste de première force, un
admirateur de lanticiuilé classique ipii, >ans doute, par pur dilellanlisme, consentit ù
s'atteler a cellr rude besogne. >-
MELANGES. 523
octaplo, in due voliiiui (l), che cgli lascio cogli altri suoi scritti e libri
alla patria Gcnova, purtroppo meno diligente custode del nobile e
glorioso leg-ato. Sisto da Siena ne vide ancora un volume, i quattro
evangeli (2) : poi nessuno.
Non mi sotl'ermo a chiedere, se per avventura il Giustiniani, il quale
ag"giunse ovunqne aile lingue esotiche una traduzione letterale, fece
sua anco la versione latina di Simone dal greco, e se mai ne abbia
conosciuto il Vecchio Testamento trig-lotto e voluto adottare in qualchc
parte la versione latina dallebraico. Dopo la perdita délie opère, nella
mancanza di ogni testimonianza, chi osa affermare o negare? Solo
per il Salterio — se pure Simone lo tradusse mai — ardirei negarlo,
dichiarando il Giustiniani nella dedica a Leone X, che la sua fatica
principale, fu nel tradurlo, dall'ebreo e dal cadeo (3).
Per la stcssa ragione e per non avventurarmi in ricerclie che non
sono da me, accenno soltanto alla possibilità, che in taluni de più
recenti codici greco-latini del N. T. sec. xiv-xvi — quelli, ad es., coi
tre testimoni celesti nel g-reco — si celi una parte del lavoro di
Simone, la parte di utilità più comune, giacchè l'ebraico tentava
pochissimi. Naturalmente, bisognerà cominciare dall'esame del testo
(1) Egli stesso nel 1. V degli Annali délia repubblica di Genova (coraposti verso i
fine délia vita) all'an. 1470, éd. 1537, f. ccxxmr; éd. 1854, t. II, p. 464 : « Ho compilato
tutto il novo testamento in greco, latino, hebreo et arabico, scritto per una gran parte
di mia raano, si corne già compilai il stampato Psalterio, la quale opéra del novo testa-
mento che è in doi volumi, cosa non mai più cosi compitamente da alcuno attentata, si
coraprende ne i libri che ho donato alla città; et o posto mano anchora a compilare il
vecchio testamento in simile forma... ». Le ultime parole mi fanno dubitarè che egli non
abbia linito, e forse nemmeno condotto innanzi molto il V. T., sebbene nella seconda
letteraal Gard. Sauli annunciasse che presto l'avrebbe finito, e sebbene già nel 1516
lamico suo Leandro Alberti de viris illuslribus Ord. Praedicalorum (1516) f. 128
sembri darlo per fatto e compiuto. —
.Vnche lo Spotorno p. 7 sg. sostiene altrettanlo,
riferendosi ai passi del Salterio in cui sono citati gli scolii al Peatateuco, ai Proteti e al
N. T., intendendo 1' « extremam manum imponere » d'una semplice trascrizione
e
dell'opera già « formata ». Ma « compilare » non è solo a trascrivere »; e, del resto, chi
puô credere che i testi vari délia Poliglotta, de' quali aveva i codici, se li trascrivesse
egli una prima voUa a colonne, ecc, per trascriverli una seconda, con doppio spreco di
fatica e di tempo? Gli scolii, non ne dubito, li avrà composti a se durante gli studi pre-
paratorii, e potè Agostino benissimo cilarli cosi, anche prima di coraporre insieme i testi
e le versioni.
(2) Libro cit., alla parola « Huius tam praeclari
Augustinus Nebiensis », p. 327 sg. : «
tum^K —
Lo Spotorno, genovese, a p. 16 dice « per la maggior parte, e forse per sempre,
perduta » la fatica, cioé fuori del Salterio.
(3) « Accesserunt (qui fuit praecipuus labor) novae ex Hebraeo et Chaldaeo inter-
pretaliones ».
latino; il quale ove fosse di una nuova versione letterale e non délia
Volgata, cimporrebbe da se la questione.
ardivo consegnarla aile stampe prima d'avere cogli occhi miei osser-
vato la scrittura di alcune notizie autobiografichc, che un vescovo
di Gerace eletto precisamente nel giugno 13V8, e qumdi Simone
l'Atumano, si era segnate al principio dell'esimio codice Lauren-
ziano 32, 2 (1), stato certamente suo, e che già il Bandini nel cata-
logo dei codici greci Laurenziani e recentemente il Lo Parco hanno
pubblicate (2). Possedendo nell'edizione del Gebhardt un facsimile
qualunque délia parte autografa del Veneto, volevo almeno assicu-
rarmi che essa non diffetisse dalla scrittura délie notizie autobiogra-
fichc cosi grandemente da cscludere afl'atto l'identità délia mano;
perché, sebbene i vari indizi da me raccolti facevano credermi di
essere davvero suUe tracce del traduttore, a me stesso non sembra-
vano tali da rendere improbabile ogni altra origine. Invece, una
prova materialmente visibile a chiunque délia identità délia scrit-
tura, la speravo meno, bon sapendo per esperienza quanto le impres-
sioni in proposito siano varie a seconda degli osservatori e raramente
sicurissime.
'Ottenuto qui in Roma il ms. per liberalità dei chiarmi direttori
délie biblioteche Laurenziana c Casanatense G. Biagi e I. Giorgi, ai
quali debbo e rendo moite grazie, al solo vederlo ebbi il piacere di
constatare che la scrittura délie notizie autobiografichc, non che
irriducibilmente diversa da qucUa dei fï. I-Lxxxr^ del codice Veneto VII,
era simile ad essa neU'aspetto générale : nervosa, serrata, arrull'ata e
piena di abbreviazioni, quale di chi scrive per se anzichc per allri e
(1) Di questo inanoscritto, cbe è di un prej'io unico per diverse tragédie di Euripide
(cf. I'ALi,Y-WissovvA VI
DiETERicii in 124'J sg. vou CuRisT-ScuMiD GcschicMc der
;
griech. Lilteratur I 387), molli si sono occupati e G. Vitelli Inlorno ad alcuni luoghi
delta Ifigenia in Aulide {\811 fra le Pubblicnzioni del R. Istiluto di sludi superiori
;
Simone c dice délie poslille di lui (senza affermare di averle lelle) « cum alibi lum ia :
Helena notulas margini adspersil, quales ab oliosis lecloribus prolundi soient nam ;
nuovo Testamento (1), che sta nella pagina racdesima délie notizie e
fu scritto avanti quella almeno del 7 dicembrc t3i8, e poi gli argo-
menti dellAlace (f. 1') e dell'Elettra (f. 11'') e non poche postille,
alcune lungho, altre brevissime, nei margini délie tragédie di Sofo-
cle e di Euripide. Tutte queste scritture sono parimenti libère, tor-
taose, arruffate, zeppe di compendi e difficili a leggere, benchè diil'e-
cf. S. Berger, Histoire de la Vulgate 335 n° 93; codd. Vatt. lat. 1 e 17 sgg. Non sorpren-
derebbe che Simone, ne' primi tempi délia sua venuta in Occidente, si sia voluto render
conto délia Bibbia che vi circolava, e allora ne abbia ricavato per propria nieinoria l'ordine
dei libri sacri e scrittane la lista nel suo prezioso codice dei tragici greci. Con se non,
avrà poi avuto lanti codici allora...
(2) Fino dal principio délia guerra i codici Marciani furono niessi al sicuro in altra
città remota dai confini, « e finchè le cose non tornano al loro vecchio stato... è... impos-
sibile servirsene », come mi scriveva il ch. Dr. A. Segarizzi, bibliotecario délia fondazione
Querini Stainpalia.
526 REVUE BIBLIQUE.
(Ij E ciù é tanto vero, clie Simone non ha pensato nemanco a scriver\i il proprio nome.
MELANGES. 527
1° l'époque archaïque ;
'2"de la dynastie d'Ur et de la monarchie
celle
d'Hammurabi; 3° celle des Kassites et de leurs successeurs.
il) Par cette expression de « dieux solaires », je ne prétends pas prendre parti dans la
question de savoir si les divinités de la Babytonie ont ou n'ont pas une origine astrale;
je désigne ainsi ceux que le consensus général croit avoir été considérés comme dieux du
soleil à un moment de leur histoire.
528 REVUE BIBLIQUE.
PKRIODE ARCHAÏQUE.
un souvenir des armes de l'Age de pierre (7; (i. 20^ BN. 72). L'émi-
(1) Nous nous reporterons aux publications suivantes Catalogue des Cylindres orien-
:
Lorsque Samas est dieu-juge, il est assis (Ward 270 et suiv.) ; il con-
serve aux épaules ces rayons qui le font recon-
naître (BN. 72; Heuzey, Découvertes en Chaldée,
pi. 30, n" IV). Il tient parfois la masse, plus sou-
vent le sabre dentelé (figure III, BN. 72).
Nergal? — Il est un autre dieu, à rayons de
flamme issus de ses épaules, dont les représen-
tations ont été isolées par Ward (chap. ix,
n"^ ISO-liO). Ce dieu, debout, attaquant un en-
nemi qu'il terrasse, possède certains attributs qu'il
partage avec Samas
les rayons de flamme, :
De G. 18P' j.
C'est qu'en effet Nergal, s'il est le dieu des enfers,
le seigneur des batailles et de la peste qui pourvoient
son domaine, est aussi un dieu solaire; ce caractère
n'est pas tout à fait tombé dans l'oubli, mais c'est le côté terrible
du soleil qui tient ici la première place. Nergal est le soleil de midi,
(1) D. Babbar-ra = L't-ta-e (= ë]-ne = si-it i. Sarnas, Cf. XVI, 44, 86; 100.
530 REVUE BIBLIQUE.
dont la chaleur accable, celui qui dessèche, brûle, et tue par son
ardeur meurtrière. C'est pour tel que le reconnaît Salmanasar H sur
les portes de Balawat (V, 5). L'identification de Ward, si elle n'est
pas prouvée, est plausible; nous avons, en tout cas, dans cette re-
présentation, le personnage d'un dieu solaire.
Le dieu aux flots. — Ward a. également pensé attribuer à Samas
les figures d'un dieu assis, des épaules duquel partent non plus des
rayons de flamme, mais des rubans ondulés tombant à terre qui re-
présentent des flots, comme on le voit par comparaison avec les
flots qui découlent du vase aux eaux jaillissantes (Ward, n*"* 283-
300''). Quelquefois des poissons semblent remonter ces flots, jus-
qu'au dieu, ou bien ils sont figurés à côté de cette bande ondulée.
Le dieu accueille les suppliants, ou parait juger un homme-oiseau
que l'on conduit captif devant lui. Dans ces
représentations, le dieu n'a pas, d'ordinaire,
les caractères de Samas, ni le poignard
dentelé, ni surtout les rayons aux épaules,
qui sont, à l'époque archaïque, la caracté-
ristique du dieu solaire (figure V, Ward
285). J'hésite donc à attribuer cette repré-
sentation à Samas; elle me paraîtrait plutôt
convenir à Ea, dont il n'y a pas lieu de
fixer ici les caractères (De C. 83'"^). 11 faudrait ne reconnaître Sa-
mas dans ce rôle, illustrant évidemment un mythe qui nous échappe,
que lorsque ses caractéristiques : rayons, poignard dentelé, l'identi-
fient (BN. n° 72, où les flots manquent et où des poissons semblent
remonter vers le dieu).
(1) The rising Sun; American Journal of Anhxologij, 1887, i>l. V-VI. tig. 1, 5, 10
MÉLANGES. 531
rentes : oii bien c'est une sorte de palme dressée, telle qu'on en
voit le prototype dans les monuments de l'Elam (figure Vllï, De C.
181"''), ou bien c'est un arbre véritable de la forme du cyprès, mais
moins élancé (figure IX, Sceaux inédits des Rois
d' Âgadé, Revue d'Assijriohgie, VI, 1). Ces arbres
(1) Ktude sur les intaillcx sxtsiennes : Mémoires de la iJélryiilion en Perse, t. XII,
1911, p. 97.
(2) Sceaux inédits des Kois d Ayadé; Hevue d'Assyriolofjie, IV, 1, 1897.
MÉLANGES. 533
Samas. —
Dans le dieu debout, barbu, long vêtu, coiffé de la
tiare à cornes, une jambe portée en avant et appuyée sur un monti-
cule, nous retrouvons le type du Samas en soleil levant de la période
archaïque le dieu tient encore le poignard dont les dentelures sont
;
(1) Cylindres et légendes inédits; Revue d'Assyriologie, XIII, 1, 1916, n" 14.
MÉLANGES. 537
sur cet attribut, qu'on trouvera résumées par Pinches (1). Je crois,
ainsi que Ward, que c'est tout simplement une altération de l'anneau
et du i)àton que tiennent les divinités (notamment le Samas de la
tablette d'Abu-Habba). C'est, en tout cas, un attribut des dieux
solaires qui rappelle leur qualité de dieux-juges.
Le vase. — Onze fois, un petit vase figure dans le champ du
cylindre, et neuf fois, le dieu assis l'élève devant lui (fi-
p. 103.
(5) Lepsius, Denkm., VI, pi. CXVII.
(6) Jastrow, The religion ofBabylonia and Assyria, 1898, p. 157.
;38 REVUE BIBLIQUE.
3 C. 1 II
540 *
REVUE BIBLIQUE.
(1j Eil. Pollier, Éludcsur les rases peint!, de t'Arropo/c de susc : Mvmoircx de In Délé-
yi'i fois), OU c'est le disque dans le croissant (;20 fois). Il faut donc
conclure, cet emblème étant gravé à la tête du dieu, à une pince où
il doit le délinir, qu'à l'époque d Tr et au temps de la monarcbie
sort du Mèslam », tomple qui lui était consacré à Kutha (1), et le dési-
gne comme dieu de la région infernale. Dans ce cas, il réunit les
attributs des dieux juges : le vase et le bâton de mesure. La présence
du cercopithèque et l'emploi indifférent du dis(]ue ou du croissant
assurent son caractère solnire.
L'im;ige d'une déesse guerrière à ses côtés, sur deux exemplaires
(BN. 227, 228), a-t-elle rapport au mythe de la descente d'Istar aux
enfers, ou bien est-ce une représentation d'Ereskigal, sa parèdre?
Peut-être l'artiste a-t-il voulu rendre les deux aspects d'Ereskigal,
représentée une fois p^r la p;irèdre habituelle de Martu (Sala)?
Reine des enfers, c'est Ereskiual qui s'adjoint Nergal pour les régen-
ter, et qui l'aide à pourvoir son royaume.
(3) T. G. Pioches, Babylonian and Assyrian Religion, p. 60. — Jastrow, Aspect o/' reli-
gions belief and pratice in Babylonia and Assyria, New-York, 1911, p. 92.
(4) Id., p. 92.
(5) Id., The religion o/Bab y lonians and Assyrians, Boston, 1898, p. 106.
La lance. —
Son attribut est la lance, dressée la pointe en l'air
nous verrons plus loin, à propos des laidurrus, cpi'une ins-
(BN. 173 ) ;
(1) Ed. Pollier, Cérttmiqiic pcinle de Susc; Mémoires de lu Délcfjation, l. .Mil, l'.M'J,
(lieu. Si les textes sont peu d'accord pour l'identifier (les uns le rap-
prochent de Samasl), les autres de Ninib)(-i). ce n'en est pas moins
un dieu à caractère solaire.
Nin-subur. —
On invoque fréquemment Nin-subur (lu jadis :
(6) Inscrip. Sumer et Alikad, p. 290. — IdentiKée avec Gula, Beitrdge zur Assyriologie,
V, 644, 1 ; Br. 11033. Ninsianna = Istar, Br. 11028.
:;46 REVUE BIBLIQUE
MELANGES. :iiT
aux cylindres : Uo C. 109, 20(1. -220. 225; BX. 113, 13(1, 108, 170,
210, 21V, 251, 257, 20(). Doux sont dédiés à Ninsianna, deux à Sa-
inas, un à Martu, un à Ninsuhur, et les autres sont des représenta-
tions de dieux solaires,ou en portent les attril)uts (cercojntlièque,
foudres, vase, Làton de mesure). La mouche fait donc partie des
attributs des dieux solaires; si nous acceptons que Ninsianna soit
un des aspects de Nergal, la mouche peut être attribuée à Nergal;
c'est d'autant plus vraisemblable qu'un cylindre Kassite (voir plus
loin), corrobore cette hypothèse.
La tête de profil. — Dans nombre de cylindres qui représentent
des dieux solaires XXIV, BX. 100), on remarque, parmi les
(fii^ure
les cylindres dédiés à Nergal que nous avons relevés; cependant les
représentations au milieu desquelles elle se rencontre, ne contredi-
On voit ce symbole dans les cylinrlres sui-
sent pas cette attribution.
vants De C. 131, 171, 230; G. i2, ii. 76; BN. 9V, 100, 118, 121,
;
127; Cugnin 33; Scheil 23. Deux sont dédiés à Samas, un à Martu, un
à Adad; trois représentent le dieii debout, le pied sur un monticule,
donc un dieu solaire, et tous les symboles de ces cylindres (cercopi-
thèque, bâton courbe) sont en faveur d'un dieu solaire; c'est l'attri-
107, 132, 160, 170,232'" ; BN. 100, 100, 12:>, 128, I6.">, 19'i, 206, 281.
Trois sont dédiés à Samas, un à Ninib, deux représentent Samas le
vase, bâton de mesure (un de ces cylindres est dédié à Isum). Dans
ces divers cas, Gilgames et Eabani forment un groupe symétrique,
selon les lois de Tépoque archaïque. Deux fois (BN. 170, 210). une
sorte de tortue accompagne ce groupe; sans en comprendre la
signification, il est é\ident qu'elle rappelle l'épisode
du cylindre reproduit par Lajard (2 , où Ion voit
(iilgames revenant de la pêche, et portant une tortue
suspendue à un bâton.
Enfin Gilgames et Eabani sont considérés comme
'
« tenants » des dieux; ils maintiennent les piliers
EPOQUE KASSITE.
De C.
MKI. ANGES.
sont ]os attributs de ce dieu (fia. XXX. BN. 297 n Or Marduk. parmi
les multiples dii^nités qui lui ont été conférées, détient celle de dieu
de la végétation, d'où l'adjonction de ces symboles à ceux qu'il pos-
sédait déjà comme dieu solaire. Le capridé est d'ailleurs un type ha-
bituel de la glyptique de l'Elam (1). .
Le chien. —
Le chien paraît un rappel des chiens de Marduk :
257), Nin-subur (De C. 255 , Lugal-banda (\Vard 517 . dont rien, dans
le dieu et ses attributs, n'ajoute ni ne retranche au type du dieu
solaire à l'époque Kassite.
Lorsque des cylindres sont dédiés à Belit, parédre de Marduk
(Ward 531, 535), la représentation est celle de Marduk debout, ou
d'un dieu assis ayant à son côté le bâton de mesure, et devant lui,
sur un trépied, un objet dans lequel Ward reconnaît la lance de Mar-
duk. Dans une dédicace à Adad et Belit Ward 5281, la tigure de
Martu représente le dieu: la grenouille lui sert d'attribut.
Marduk —
Deux de ces cylindres donnent lion à
et Tiamat.
d'intéressantes observations. L'un -Ward 526, British Muséum;, dédié
à Marduk, oilre l'image du dieu tel que les A.ssyriens le figureront :
les deux.
(1) HeiiZ' y. Catalof/ue des antiquilés c/ialdécnnes du Musée dti Louvre, n" 126.
(2) N" 1. Mémoires de la délégaiion en Perse, t. I, 1900, article Kudurrus.
s.
(3) Les 'leur dragons sacrés de Babyloiw ; Revue d'Assyrioiogie, t. VI, 3, 190i5.
554 lŒVUt; BIBMOUE.
Adad.
Dans deux cas, Ramman-Adad « léclairant » est représenté selon
la mode de l'Ouest. Sur le fragment .')
b de Suse 2), le
sur les kuduiTus, et, par suite, la masse à double tête de lion de
CONCLUSIONS.
Les données que j'ai exposées ci-dessus sont d'ordre général; elles
ne prétendent pas tout expliquer et souffrent de nombreuses excep-
tions.
du cylindre peut n'avoir aucun rapport apparent avec
L'inscription
la scène représentée Ainsi, le De C. 95, dédié à Enki, offre l'image
:
ceux que nous connaissons, n'en avaient pas moins leur importance.
Il convient enfin de tenir compte du lieu d'origine des cylindres.
nité dont il est l'attribut, lorsque le dieu principal est déjà déterminé
par ailleurs (ainsi le Ward i68, du Metropolitan Muséum, dédié à
Adad et à Sala; en plus des deux divinités, sont gravés : le taureau
porteur des foudres, le croissant, l'étoile) ; le fait est rare et ne se cons-
tate que sur des cylindres datant du déclin de la deuxième période.
Les autres attributs ont également plus pour fonction de reporter
sur le dieu solaire honoré dans le cylindre, les qualités dont sont
parés les autres dieux, que de rappeler ceux dont ils sont les qualifi-
catifs habituels. Ce sont surtout des attributs convenant aux grands
dieux, tous plus ou moins dieux de vaillance et dieux de justice; les
dieux solaires rentrent essentiellement dans cette catégorie, il est
naturel qu'ils soient pourvus de ces attributs.
A la troisième période, le dieu, hiératisé, a perdu beaucoup de ses
caractéristiques; quelques emblèmes et surtout la dédicace l'iden-
tifient. Pendant ce temps, les kudurrus procèdent résolument par
symboles l'attribut indiquant la qualité d'un dieu devient le dieu
;
faire aux oxigenccs dun panthéon toujours plus riche, grouper plu-
sieurs divinités sous la mémo effigie, les dédicaces et les attributs
s'efforceront de guider les fidèles (2^ période).
Au moment où la confusion, conséquence de cette pratique, risque
de devenir ioextricable période), le souci des règles iconographi-
(.'5'
Ci. Contexau.
VI
MATTHIEU VU, i-27, D'APRÈS UN PAPYRUS DE LA BIBLIOTHÈQUE
NATIONALE
(1) Inventaire Copte 144. Cf. L. I)ela|)orte, Calaloyue sommaire des manuscrits
:
copies de la Bibliolfièque nationale, n" 144 [Hevue de l'Orient chrétien, 1913, p. 390).
Le leuillol numéroté iK (16) au recto, mesure 33 cm x 23 cm ."•. Le texte est écrit sur
2 colonnes de .35 ou 3i lignes.
(2) Voi/ar/f il l'Oasis de Tlièhcs et dans les déserfs situés o lorient el ii l'occident
de la Tliébnide, fait pendant 1rs annérs ISlô, IS 10. isn et islspnr M. Irvdéric Cail-
liaud (de IS'antes): rédifjé et publié par M. Joinanl. Paris, 1821.
(3) E. Ledrain, Départi ment des Médailles. Inventaire de la rotleclion éyijpticnne
(manuscrit) 1903. H. 0.32. Larj;. ii,2:{
: Papyrus copte. Dialecte Ihéhain. Écrit de chaque
.
coté sur deux colonnes. (Publié dans le VoyaRc à l'Oasis de Thèbes de Cailliaud, pi. .\XXI.)
(4) Hevue tiihlù/ne, juillet IsyG-janvier 1K97.
f5j Tlie coptir version ofthc .\eir Testament in Un- soulhrrn diatect, olheririse ratlrd
MKLANC.KS. 06 1
santés, bien que la copie soit mainte fois erronée ou incomplète dans
les passages moins lisibles sur l'original. Il a donc paru utile de
conflexe, par exemple sur l'ii de inn au verset 13; ailleurs encore
c'est une sorte d'accent grave, sur la première 11 de coikvo'.'coii
au verset 8, iia(j au verset suivant. Dans le texte imprimé
sur l'ji de
nous sommes d'employer partout le trait horizontal. Les
obligé
lettres restituées sont placées entre crochets celle dont il subsiste [ J
;
sa/iidic ayicl thebaic, with apparatus literal, english translation, register of fragments
and estimate of tlie rersion. Oxford, 3 vol., 1911. La liste des fragments sur papyrus con-
nus de l'auteur se trouve auv pages 344 et 34."» du 3" volume.
(1) AVtO et, omis dans tous les manuscrits utilisés par Horner-
TOVAAb) dans le manuscrit 108: les autres portent LineTOVAAB ce qui est saint.
(6) C;T(;I, étacisme pour AIT(;I, coinine dans le nianuscrit 118. De même, au verset
(7) TApGTGTIlcrilK;, avec les manuscrits 71, 108, 12C,. Les autres portent
TAp(;TII<rill(;.
(8; (|llA(rïllG ra trouver, comme dann le manustril 126. Dans les autres on lit
. (9) Gi", avec les manuscrits 118 «'t 12(j, au lieu de II"!".
(12) Dans les manuscrits utilisés par Horner le verset 14 commence par la particule
(14) GIIAIIOVt| se trouve dans les manuscrits 71, 116 et f. Les autres ont 6THA-
Hovq.
(15) IliaAqTAVG, au lieu de ^yAC|TAVG.
(16) GqîOOV mauvais, lapsus calami pour GHAHOVq bon.
L. DKi.APOini:.
(M) (ITUU'I'ppo, comme dans le manuscrit V2i\. Les autres portent (;'I*U U'r(;|)()-
J'ai prolité d'un petit séjoar qu'il m'a ét<'' donné de faire dans
l'ile de Rouad pour rechercher les quelques débris de monuments
anciens échappés au ravage des temps et surtout à la destruction
des hommes. Ce travail archéologique m^a été facilité à tous les
points de vue par le lieutenant de vaisseau M. Albert Trabaud, qui
depuis le débarquement des troupes françaises à Rouad (l*^"^ sept.
1915) occupe le poste de confiance de gouverneur de l'Ile et le
remplit avec autant d'intelligence que de dévouement.
En mettant le pied sur ce coin de terre phénicienne, M. Trabaud,
fidèle à fran(;aise déjà séculaire, a eu à cœur de con-
une tradition
naître de recueillir tout ce qui pouvait rester des différentes
et
cultures qui se sont succédé à Rouad. Il a formé ainsi de ses propres
deniers un petit musée fort intéressant auquel il m'a invité à puiser
à volonté. Lui-même m'a prêté le concours de son crayon et de
son hal)ile pinceau pour la reproduction d'un grand nombre de
pièces et, à maintes reprises, il s'est fait mon guide à travers les rues
tortueuses de la cité ou des roches aiguës de l'ile. Aussi, je prie
M. Tralmud de vouloir bien agréer ici, une fois de plus, mes sincères
remerciements pour tous ses bons ofiices.
L'ile de Rouad fait partie d'une ligne de récifs qui court parallèle-
ment à la côte, à la distance de deux à trois kilomètres depuis Tripoli
jusqu'à la hauteur de Tortose. Cette digue naturelle, interrompue
oà et là par de larges passes, et cachée généralement sous l'eau à
des profondeurs variables, émerge aussi par endroits et forme une
série dilots tels que Ramkin auprès de Tripoli, el-Qeneis, Abou Ali,
cl-Hebeiseh ou ei-Abbas et, tout à fait au nord, Rouad.
La petite lie de Rouad, dont le pourtour est d'environ deux kilo-
mètres, fut habitée dès la plus haute antiquité citée dans la nomen- :
166 REVUE BIBLIQUE.
5) Salmanasar. monolithe, II, 93; HH.. l'.MO, p. 6'i s. Le contingent d'Arvad, 200 hommes
seulement, est un des moins considérahles : les Arvadiens étaient marins plutôt (|uc soldats.
(6) Prisme de Taylor, II, 49; Ji/l., 1910, p. 508.
tion perse, Arvad formait avec Tyr et Sidon la ligue des trois villes
phéniciennes ; sous les Séleiicides, les « filles » d'Arvad florissaient
sur le littoral, elles s'appelaient l*altos, Balanée, Karné, Enydra,
Marathos, Simyra (1); bientôt elles furent éclipsées par Antaradus
(Tortose), qui devint la rivale d'Arvad.
Lorsque Arabes envahirent la Syrie, Arvad fut rasée par
les
Moaviah, lieutenant d'Omar. Depuis longtemps d'ailleurs, Arvad
avait cessé de compter dans l'histoire; elle n'a plus été à la suite de
cette ruine qu'une misérable bourgade de pécheurs.
La colonie phénicienne qui jeta son dévolu sur ce récif, pour y
construire une ville, y fut invitée par la nature même des lieu.\. L'îlot
est orienté du nord au sud, ou plus exactement, du nord-ouest au
Fig. 4. - Digue exliaiissce par une assise de gros blocs entre les deux havres de Uouad.
lai'geui' du l)loc coninie si on avait voulu les couper en deux (fig. 4-).
d'avoir élé placés là après coup pour l)oucher une large baie. Ce
dispositif est-il fortuit? je l'ignore, mais je ne crois pas en tout cas à
l'existence d'une porte en pareil endroit. n peu plus bas, à gauche,
(
mur lui-même ait été exploité comme une carrière et les gros blocs
débités pour les constructions postérieures. L'escarpe n'a pas toujours
été respectée non plus et le rocher se trouve taillé un peu dans tous
les sens.D'une façon générale, cependant, il existe du côté de la mer
une sorte de fossé large mais peu profond, précédant une muraille de
roc aux parois tourmentées, haute de deux à trois mètres et large de
deux mètres environ, qui marque vraisemblablement le tracé de la fa-
meuse enceinte. En arrière de cette muraille, du côté de la ville il y a
toujours un passage dont la largeur varie entre dix et vingt mètres.
Dans la contrescarpe intérieure, au-dessous et en avant des maisons
abondent de plus en plus les vieilles citernes et les vieilles
actuelles,
maisons défoncées (1) (tig. 8). La plupart des citernes affectent la
forme d'une poire (fig. 9).
qu'un chemin de ronde avec un coin de terre pour ensevelir les morts.
Les maisons bâties toutes en pierre accusent une certaine aisance; les
rues sont très étroites, mais généralement à l'intérieur de chaque
demeure il y a une petite cour avec un arbre et quelques tleurs.
Les Rouadais sont à peu près tous naviiiateurs et pécheurs d'épon-
gés. Avant la guerre, ils faisaient sur les côtes de Caramanie et de
Syrie un cabotage lucratif. Ils entreprenaient de fré((ueiits voyages
;Y Chypre et en Kgypte et leurs plus grandes goélettes s'en allaient jus-
qu'il Malte et en Italie. Actuellement cette flottille chôme et plus de
deux cents embarcations sont ancrées dans les ports ou halées au sec.
Les monuments anciens, nous l'avons dit eu commentant, sont
rares à Rouad. Les deux châteaux sont purement arabes et mémo
d'assez basse épocjue. L'inscription gravée au-dessus de la porte du
grand chAteau est complètement détériorée. Celle du petit château
donne la date de l'édifice.
gieuse. Jon'ai vu ffu'un petit chapiteau en marbre blanc qui pût leur
rire certainement attribué.
Il serait intéressant de retrouver et de fouiller le vieux cimetière
(1) Sur la première estampille nous avions lu sans hésiter KACCANOY; la seconde,
laite avec le même sceau, porterait plutôt KACCIANOY. ^ " est pas facile de déterrai-
o76 REVUE BIhLTQUn.
verse aXs' =
235, comme il arrive souvent dans les inscriptions de
Phénicie (2).
L'inscription phénicienne se compose de deux lignes d'un déchif-
ner si la barre prise pour un I, à la lin de la li^ne 1. est réellement une lettre ou bien un
.'*J*1,T-... j-
-r-i^rSiT'^
:;*'ii> -^-^
-C:^
'
/ :/.,
j* . - < .-»
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x:-**^
". *""'.5---
^v-" %
'."•' "
a!»>-'
, .-^
niRONiouE. ;n7
**
? ?
xin, NI" « vivre ^), soit pour un nom divin accolé à nin'kTy (1).
Là première lettre qui suit est douteuse on dirait un n mal formé, :
et surtout dun galbe dillercnt de tous ceux qui ligurent dans l'ins-
cription et qui sont uniformes.
La deuxième lettre que nous transcrivons -c ?j pourrait faire penser à
un K nabatéen. mais le grand trait oblique qui la coupe devrait dans
ce cas être orienté à droite; ce trait doit être étranger A l'inscription
et la lettre serait un ta. Le signe qu'on voit ensuite se trouve de nou-
veau à la sixième avant-dernière place de la ligne, c'est peut-être
un 2, mais, dans les inscriptions phéniciennes écrites avec un alpha-
bet analogue, nous n'avons pas trouvé de cas où la haste du 3 soit
si franchement recourbée à gauche. On distingue ensuite un a, et
après un signe abîmé, un 'i.
. . îSaDT2(n) et nï£C3T2
fils d'un tel, petit-fils d'un tel a consacré k ... L'objet consacré n'est
tendue de 'Ep[j.r,ç dont l'esprit rude serait mieux rendu par un n que
par un La deuxième divinité est Melqart mpSaSi.
x. :
Knfin vient la date, annoncée par l'expression nU7a que suivcMit les
tiois lettres grecques employées dans l'inscription grecque, mais en
ordie inverso lAE ou -235. L'ère doit être exprimée par les leltirs
(jui terminent l'inscription : on lit d'abord r:2a, qui se traduirait
« depuis la construction ». Los lettres qui suivent, —
il y en a peut-
II. —
Inscription grecque gravée sur un bloc de basalte employé dans
la construction du grand château (fig. li). La pierre, longue de 0'°,60 et
NÂYTHKÀITHN
,;lNCn OPUjKâI
^-YTOlCkAG^EHI
/lAEYCENonANTtuNENAPrECTA
'M $ A « N Al O'E K P N Y
sur l'autre 0"',67, cassé un peu dans tous les sens et portant sur une
face quelques grandes lettres latines au milieu desquelles on a gravé
des ouàsems 15). Hauteur moyenne des lettres 0,08. Les petites
(fig.
(1, Iti'nan a déjà pulilif un riioiiiMiicnl de <c i^eiirc. oi' li^urenl dos Icllrcs isolées de
dale indi'IcriiiiiitM' en mhnc lenijis que la inonlion des années \iV.V> cl 10:t3, inserilcs,
scinlde-l-ii, jiar di's marins français de passafje h Rouad, ( f. Mis^ioti de l'hcnirie, \>. 33.
A noter s|iécial(iiitnl les j;roupes 1. (' el T M (jui 8e suivent comme ici I. C et F M.
CHRONIQUE. :iRi
bas, mais proba!)lom(Mît intact sur les cotés. Margeur ()"',V7, hauteur
0"',35, épaisseur 0"',13. Sur le devant, dans un cadre en creux pro-
fond de trois millimètics, large de 0"',U et haut de 0"',22, sont
sculptés en relief trois petits personnages debout. Le premier, en
allant de gauche à droite, porte la barbe; il est vêtu d'une tunique
C(5rNA ITi^.ANUOT
C
Fig. 17. Via. r' a.
jé-r -
bustes adossés, plus gi-ands <\uo nature, séparés les uns des auti-es
par de gr;i;irl<s leuilles d'acanthe. Deux J)ustes ont complètement
CIIUONIQIIK. ;x3
Les deux autres bustes n'ont plus de tète; l'une a dû être enlevée
peu avant l'occupation de l'ile, car la cassure est encore relative-
ment fraîche. J)c la quatrième tête il reste l'extrémité de la barbe; les
poils ne sont nullement détaillés et le travail paraîtrait assez grossier.
Ceci contraste singulièrement avec l'ensemble du buste dont le torse
nu et les bras sont parfaitement modelés.
(1) La bande de spirales fait le tour du bol; il en est de même des feuilles qui décorent
le pied. Le dessinateur s'est contenté d'indiquer l'une et lautre de ces décorations sans
les reproduire en entier.
CHUONIQUE. iS7
38
588 REVUE BIBLIQUE.
série faible, ou à la série forte de poids double les mines les plus :
poids 56 grammes ;
il manque un assez
0,0 ifS
gros fragment. On
distingue vers le cen-
....0,03
tre quelc[ues débris
de lettres illisibles.
le mieux conservé de
tous; à peu près in-
tact (fig. 26 d) ;
poids d
21 grammes. Dans le Poids en plomb.
carré du milieu il y
a un signe difficile à déterminer. On dirait un H grec, dont la se-
conde haste serait un peu empâtée.
Le musée de M. Trabaud renferme encore nombre de menus objets
trouvés à Rouad, intéressants à connaître et qui, il faut l'espérer,
seront publiés un jour. Signalons en passant une petite tête :
T\OUfAlD
..fxï%.
Fig. 27. — Tête en terre cuile. Fia. '2». — Tête en émail bleu.
et est écrit sur les quatre faces. Les caractères hiéroglyphiques ont
un peu souffert; néanmoins on
pourrait encore les déchiffrer en
grande partie.
La collection de M. Trabaud
contient au^i plusieurs pièces
intéressantes au point de vue
numismatique il y a en par-
:
(1) Les notes du Père Savignac ont été revues par iM. Tisserant, auquel appartient en
particulier l'interprétation de l'inscription gréco-phénicienne. Au nom du R. P. Savignac
nous lui exprimons tous nos remerciements. — (N. D. L. R.)
RECENSIONS
fallait aussi tenir compte des diCFérences ; il ne dissimule nullement son dessein de
montrer la supériorité religieuse et morale des conceptions bibliques. Son ouvrage
est donc, dans un sens, une apologie. Mais cette apologie ne conclut pas au secours
divin que nous nommons révélation. Ce mot n'est pas prononcé, ni aucun autre qui
suggérerait une intervention bienveillante de Dieu dans l'œuvre de Moïse et des
Prophètes qui a son point culminant en Jésus de Nazareth. S'il y a apologie, c'est
celle du peuple juif, auquel revient toute gloire, à prendre à la lettre ce que dit l'auteur
(p. 4} : « ce qui donne à l'histoire des Hébreux sa valeur propre depuis une certaine
période, c'est l'introduction d'un élément qui, comme expression du génie particulier
du peuple, change graduellement toute la physionomie de leur attitude au sujet de la
vie ». Les Hébreux ont d'abord eu la même religion que les autres Sémites, et ce
niveau est très bas, puisque l'on avait un culte pour les arbres, les sources et les pier-
res, la pierre sacrée étant celle « où la divinité est censée demeurer ou qui est la divinité
elle-même » (p. 26). —
Que la divinité soit censée demeurer dans la pierre d'après les
Sémites, on le reconnaît, mais que la pierre soit la divinité, c'est une erreur telle-
ment grossière que M. Jastrow serait peut-être embarrassé de la noter chez aucun
peuple. Et il est parfaitement invraisemblable qu'à une époque quelconque les
Hébreux aient immolé à leur dieu tous leurs premiers-nés, comme cela est admis
(p. 29 s.). Quoi qu'il en soit, le peuple hébreu s'élève peu à peu, nous dit-on, au
monothéisme moral, c'est-à-dire à « une vue du gouvernement divin fondée sur une
interprétation spirituelle et morale de l'idée de Dieu » (p. viii). Pourquoi cette —
réussite? en quoi le peuple hébreu était-il supérieur à Babylone? Était-ce parce que.
594 REVUE BIBLIQUE.
nomade à l'origine, il avait conservé une idée plus pure de Dieu et du devoir moral?
Mais celte opinion irait contre la base historique de M. Jastrow; au début tous se
valent. Et il ne dissimule pas les résistances opposées par le peuple à Moïse et aux
Prophètes. D'où est donc venue l'inspiration de ces grands hommes ? Les penseurs
grecs sont très manifestement l'expression la plus haute des qualités du peuple grec.
Ils ont l'empreinte de son génie, ils sont portés par l'opinion, encouragés par elle,
ils reçoivent beaucoup avant de donner. I^a mort de Socrate n'est qu'un épisode
presque isolé, où la politique joua un grand rôle. Tout autre est dans Israël le carac-
tère des hommes de Dieu, qui parlent au nom de Dieu, qui se disent envoyés de
Dieu. Est-ce à des illuminés, ou à des imposteurs, qu'est dû le splendide progrès
auquel la superbe Babylone demeura étrangère? Ce n'est certes pas la pensée de
M. Jastrow et peut-être a-t-il voulu laisser à ses lecteurs le soin de s'écrier : le doigt
de Dieu est là. Voici en eflet une civilisation arrivée à son apogée, dans une cité
dont le prestige domine l'Asie. Elle est reine dans les arts, reine dans les sciences.
Et le seul souvenir qu'elle ait laissé est celui d'une religion qui a dégénéré en magie.
Les Chaldéens sont dans le monde gréco-romain les trafiquants d'un art occulte,
le type de la superstition vénale, des pratiques louches. Eu même temps venait de
la Judée la religion qui devait peu à peu s'imposer au monde civilisé. Le contraste
est violent. N'a-t-il d'autre cause que le génie d'un petit peuple, appartenant à la
même race, imbu d'abord des mêmes idées, adonné aux mêmes pratiques? Digitus
Dei est hic.
secours spécial accordé par Dieu à sa créature. Nous le suivons maintenant dans ses
cinq conférences : les relations entre les Hébreux et les Babyloniens, les récits de la
Création, le Sabbat, les fins dernières, la morale.
I. Le point de départ est l'hypothèse fait une assez
sumérienne. Pourtant l'auteur
large place aux Sémites. Même ils du nord-est ou du
seraient venus les premiers, et
nord-ouest, c'est-à-dire du pays d'Amourroa ou des Amorrhéens, plutôt que de
l'Arabie, comme on le soutient généralement. Voilà donc les Sémites installés dans
la vallée de l'Euphrate, et aussi bas que INippour, cultivateurs, possédant une cer-
taine civilisation, quand les Sumériens conquirent le pays et imposèrent leur écri-
ture, développée cependant avec la coopération des Sémites. La langue la plus
anciennne des inscriptions est le sumérien. Les Sumériens avaient leurs dieux (|ui se
fondirent plus ou moins avec ceux des Sémites; parfois le dieu conqiu'rant devint le
père du dieu vaincu. Les Sumériens baissent au milieu du Z'^ millénaire, au temps
de Sargon d'Agadé; puis il se produit une réaction sumérienne, et enfin, vers l'an
2000 av. J.-C, les Sémites dominent définitivement avec Hammourapi.
Sur quoi on peut se demander si les traditions dont il s'agit sont sumériennes ou
sémiti(|ues? Pour ceux qui n'ont d'autre critère que l'écriture et ce (|ii"ils croient
être une langue spéciale, il ne saurait plus être question de traditions sémitiques,
puisqu'on découvre maintenant presque toutes ces traditions en sumérien. Et en
effet, comment
les Sémites auraient-ils imposé leurs traitions aux conquérants, qui
les ontcomplètement dominés par ailleurs? Il hiudra donc <|ue M. Jastrow modifie
si
rien de matériel. On ne voit pas ce qui manque à cette religion pour être le mono-
théisme moral. Son infériorité serait le nationalisme. lahvé serait le Dieu d'Israël,
comme Camos le dieu de Moab. Mais M. Jastrow, qui s'exprime d'abord de la
sorte (p. 36), a soin plus loin de marquer les différences (p. 282). Et s'il était vrai de
dire que : « Le favoritisme ou le rapport spécial à un peuple particulier est en lui-
même une limitation aux qualités morales d'un tel pouvoir » (p. 36), cette limitation
ne cessa jamais dans Israël, car on ne voit pas que la faveur accordée par Dieu aux
Israélites soit moins soulignée par les Prophètes et dans le Talmud lui-même que
dans l'œuvre de Moïse. L'idée d'un Dieu absolument transcendant n'est pas incom-
patible avec l'idée d'un choix et d'une faveur; ce qu'il exclut, c'est la partialité, le
parti pris de soutenir son peuple malgré ses fautes; mais cela ne paraît pas plus au
temps de Moïse, qu'au temps d'Amos. Parmi les diverses formules de M. Jastrow, je
donne la préférence à celle-ci « Ils ^les prophètes) n'avaient pas conscience de pro-
:
duire un nouveau point de vue; ils tiraient simplement des corollaires d'une vue du
gouvernement divin esquissée par Moïse lui-même, et suggérée par l'expérience
nationale » (p. 283). C'est-à-dire que leur oeuvre lut moins la proclamation du mono-
de Dieu de châtier son peuple s'il s'obstinait dans le mal. La position privilégiée
d'Israël n'était pas sans inconvénient dans l'ordre temporel. Les prophètes durent
faire comprendre aux Israélites que s'ils étaient punis plus durement, étant d'ail-
leurs moins coupables, c'était à cause de leur mission qui exigeait d'eux plus de cor-
respondance à l'amour divin.
De sorte que ce prétendu favoritisme, loin de limiter le caractère moral de Dieu,
mettait au contraire dans tout son jour sa sainteté et sa justice, comme il est dit si
souvent au peuple élu soyez saints, parce que je suis saint. Loin que le génie du
:
596 REVUE BIBLIQUE.
peuple hébreu ait été le principe d'un progrès indéfini, ce fut son nationalisme étroit
qui risqua de nouveau de compromettre les attributs divins en promettant aux cir-
concis un traitement privilégié dans le dernier jugement lui-même. Mais cette dé-
viation n'empêchait pas tout à fait qu'on conservât une haute idée de Dieu. C'est un
exemple du mélange d'éléments plus ou moins purs dans les sentiments religieux,
mélange dont il faut toujours tenir compte. Les habitants actuels de Palestine ont
une sorte de culte pour les arbres, et cependant ils sont musulmans. Pourquoi donc
mettre les patriarches au-dessous des fétichistes parce qu'ils ont cru certains lieux,
certains arbres et peut-être certaines pierres, stèles ou autels, spécialement consacrés
à Dieu et honorés de sa présence ?
A la fin de son premier chapitre, M. Jastrow indique une application de cette force
qui transforme chez les Hébreux une vue purement ph\sique du gouvernement de
l'univers enune conception morale de la Providence, et c'est le mythe d'Adapa qui
serait devenu le récit de la chute du premier homme. A proprement parler, il entre
ainsi dans l'examen détaillé des traditions, mais nous n'entendons pas chicaner l'au-
teur sur ce léger défaut de composition. Ce qui est plus grave, c'est que cet exemple
typique ne fournit pas la preuve demandée.
Le mythe d'Adapa serait composé de deux légendes, l'une symbolisant le change-
ment des saisons, l'autre destinée à expliquer la présence de la mort dans le monde.
Ce dernier point est le seul qui Or il est assez clair que le mythe
nous intéresse ici.
toire exceptionnelle; Adapa n'est pas le premier homme, son cas ne regarde que lui.
Il est inutile après cela de suivre M. ,histro\v dans l'analyse littéraire qui dissèque
le récit de la c'est le mythe de M. Langdon {RB., eod. loc.) qui
Genèse. Désormais
en sera rapproché, parce que du moins il y a up arbre et un fruit, élément carac-
là
que les mythes babyloniens sont à l'origine la victoire de l'été sur l'hiver, plutôt que
de vraies tentatives d'expliquer comment s'est fait le monde. La raison en serait que
la Création babylonienne est le triomphe des dieux de la lumière, de la chaleur, de
la stabilité, sur des forces aveugles déchaînées comme la tempête. El assurément les
M. .lastrow a très bien mis en relief le caractère matérialiste de ces mythes. Peut-
être même se montre-t-il un peu sévère pour la religion babylonienne; c'est à peine
s'il y trouve une note religieuse un peu profonde (p. 88). On peut faire crédit à ces
âmes desentiments élevés; nul ne sait où s'arrête l'action de la grâce qui éclaire les
RECENSIONS. ;'97
hommes. Mais eufin il faut reconnaître que les poèmes reliiziieux sur la création
mettent en scène des forces naturelles luttant contre d'autres forces naturelles. Les
vainqueurs sont plus forts, plus nobles, dune essence plus pure, mais ils ont en
somme la même origine dans les (lancs de la même nature.
Il était facile de mettre ea contraste la création de t(»ut par la parole d'un pouvoir
spirituel et moral, et M. .lastrow n'y a pas manqué. Mais il veut que ce concept su-
périeur se soit dégagé des vieux mythes qui auraient été communs aux Hébreux et
aux Babyloniens, et que Ton reconnaîtrait encore sous la forme déûnitive que leur a
donnée le génie hébraïque. 11 distingue cependant plusieurs séries. Chose assez
étrange, le deuxième récit biblique (Gen. 2, 4-24) est regardé comme plus rationa-
liste que le premier (Gen. 1-2, 3). On y constate une absence totale d'éléments my-
douk pour façonner le monde. J'insiste sur le dessein bien marqué de M. .lastrow de
mettre en bonne lumière la beauté religieuse du récit de la Genèse. Ce qu'il appelle
l'élément mythique, il prend soin de le réduire à une sorte de figure sensible, iné-
vitable quand l'homme veut s'exprimer sur des sujets aussi relevés. Quand la Bible
dit que l'Esprit de Dieu planait sur la surface de l'abîme, il n'y a qu'à admirer
viathan décrites comme d'énormes serpents sont le reflet, sous la forme de métaphores
poétiques, de la personnification originaledu chaos primitif, comme d'une période
où monstrueux avaient la domination » (p. 107).
les êtres
intégrale de récits exacts sur les origines jusqu'à Moïse, ou acceptation des mêmes
mythes avec leurs concepts religieux par les Babyloniens et les Hébreux, épurés
chez ces derniers avec les progrès du monothéisme moral ?
(1 On verra au Bulletin une nouvelle manière de voir de l'auteur qui semble modifier tout
cela.
098 REVUE BIBLIQUE.
précise des récits à travers les siècles. Les strates adamique, noachique, etc., du
R. P. de Hummelauer, qui depuis... personne ne les a pris au sérieux. La Com-
mission biblique a autorisé à relever dans les trois premiers chapitres de la Genèse
des traits allégoriques. Rien n'empêche, en soi, que ces allégories ou ces méta-
phores aient été empruntées à des traditions babyloniennes. Ce qui ne leur a pas
étéemprunté, c'est le fait même de la Création totale par un pouvoir spirituel, fait
dont elles n'ont pas le moindre soupçon. Ceci nest
n'est pas sorti de cela, car ceci
hébreu qui a produit cette abstractioii. D'après l'Église, cet enseignement unique et
sublime est dil à la Révélation. Mais elle n'a pas déterminé quel était le contenu de
toute la Révélation primitive, ni aflirmé qu'il s'était conservé tel quel à travers les
âges et qu'il n'avait pas été réitéré, pour être défendu contre l'erreur, à des hommes
choisis par Dieu, comme Abraham ou Moïse. Dans ce cas, pour faire comprendre à
un peuple grossier, comme disait saint Thomas, des vérités surnaturelles, les chefs
religieux des Hébreux ont pu se servir d'expressions courantes et de traditions po-
pulaires empruntées aux Babyloniens. Encore est-il que, pour le premier chapitre
de la Genèse, les ressemblances se réduisent à presque rien. Ce qu'il y a de commun,
ou pour mieux dire l'état de désordre, qui fut primitif à Ba-
c'est l'origine liquide,
byloDC, et suivit chez les Hébreux l'acte créateur. Ce chaos est représenté chez les
Babyloniens par Apsu et Mmmnu, deux personnifications de l'Océan, chez les Hébreux
par deux expressions (tolai ivabolm) dépourvues de mystère, et employées dans
d'autres cas à propos de circonstances historiques. L'abime liquide des Babyloniens
devient Tiamat, le monstre qui lutte contre le dieu organisateur. C'est bien le
même mot que le tehom hébreu, mais tiamat signifie aussi la mer, et c'est le sens
constant de tehom. Il est vrai que la Bible connaît des monstres qui ont lutté contre
Dieu. Mais elle les nomme Rahab et Lévialhan, qu'on ne trouve pas dans la littéra-
ture assyro-babylonienne. D'après M. Jastrow, ce ne sont pour Job, pour Isaïe, pour
les psalmistes, que des métaphores poétiques. Mais n'estompe-t-il pas un peu trop
ces ligures saisissantes? Ce sont bien, pour ies écrivains sacrés, des êtres réels et
redoutables. Ils ont lutté contre Dieu à l'origine; c'est une première esquisse de la
lutte des auges réprouvés (1). Mais, encore une fois, on ne voit pas qu'ils aient une
origine babylonienne.
Au surplus, les Livres Saints reprochent constamment aux Hébreux leurs aposta-
sies. Il serait bien étrange qu'adonnés au culte des dieux étrangers, ils aient fermé
la porte aux mythes qui les glorifiaient. Nous ne prétendons pas que ces mythes
n'aient jam;iis pris pied en Israël, encore moins chez les ancêtres d'Abraham.
Mais, en fait, nous n'en voyons guère de traces à propos de la Création. Il en serait
autrement à propos de la tradition du déluge, mais M. Jastrow ne l'a point traitée
dans le corps de son livre, et son importance doctrinale est incontestablement
moins grande.
IH. Le chap. m s'occupe du sabbat. Depuis longtemps on le cherche à Babylone. On
crut l'y avoir découvert, iors(ju'on lut sur un texte lexicographicpu' connue deux
termes équivalents : le jour du repos du creur, et clifibaltuin, lermc i|ui paraissait
identique au sabbat des Hébreux, le jour de repos par excellence. Mais une autre
tablette du même genre, publiée en 1904 par M. Pinches, a expliqué avec plus de
précision que le chaballum est le quinzième jour du mois, c'est-à-dire sans doute le
(1) ilalialj est sans doulc en connexion avec la mer Job, 9, 13; 26, 1-213; Is. 51, '.»; l's. 89,
11), mais c'e^^t un inonslrc distinct.
RECENSIONS. 599
pleine lune, est cherché de si loin que c'est assurément un des points les plus faibles
de son livre. Le jour de l'expiation est rapproché des jours tristes et néfastes où
les Babyloniens interdisaient certaines actions, surtout à certaines personnes. Mais
le jour de l'expiation est le dixième du mois, et son caractère de tristesse regarde les
péchés passés et non point les conséquences d'un acte posé en un mauvais jour.
L'observance du sabbat avait quelque chose de triste et d'austère, mais surtout
avec les surcharges de l'esprit rabbinique naissant. M. Jastrow reconnaît qu'à
l'origine ce fut un jour de repos. C'est à ce titre que le christianisme l'a adopté en
le plaçant au jour de la résurrection du Seigneur. Or il se trouve (jue cette institu-
Babyloniens.
IV. Il en est l'objet du ch. iv,, qui a pour objet la vie après la
autrement de
mort. Sur ce point Hébreux ont eu pendant longtemps sinon toutes les idées des
les
Babyloniens, du moins des idées semblables sur la situation des âmes après la
mort, rassemblées dans une sorte de royaume souterrain. Il y avait naturellement
cette différence essentielle que les Babyloniens, polythéistes, donnaient à ce
royaume pour roi et pour reine des divinités spéciales, tandis que le Chéol hébreu
n'avait point d'autre maître que lahvé, qui d'ailleurs n'y recevait pas le culte que
lui rendaient les vivants. Les Babyloniens en sont restés là. Comment les Hébreux
en sont-ils venus à promettre un sort différent aux pécheurs et aux justes? ce fut,
d'après une opinion assez commune à laquelle se rallie l'auteur, en tirant une con-
clusion contenue dans le dogme de la justice de Dieu et qui se dégagea peu à peu
dans Israël. Puis, au temps des Macchabées, le dogme de, la résurrection apparut
comme la manifestation suprême de cette justice. Les espérances individuelles du
salut de chacun après la mort se développèrent en même temps que l'espérance
messianique collective. En tout cela M. Jastrow n'accorde aucune influence à des
doctrines étrangères, car l'individualisme spiritualiste des Grecs aurait plutôt con-
duit à l'immortalité de l'âme seule. On est cependant étonné que les Égyptiens et
les Grecs aient eu des conceptions assez arrêtées sur les rétributions après la mort
levé le voile, et nous comprenons par l'enseignement de saint Paul que l'espérance
de la béatitude réservée aux saints ne pouvait s'appuyer que sur sa promesse, et sur
la mort et la résurrection du Christ lui-même. La rétribution des Grecs était, si l'on
peut dire, une rétribution plus que pélagienne, où l'homme entrait de plain-pied
aux champs Elysées. L'Égyptien ne pénétrait aux champs d'Valou que grâce à des
formules magiques. Dieu exigea des Hébreux qu'ils s'en rapportassent à lui jusqu'au
jour où il révéla que la vie éternelle est une grâce en même temps qu'elle est
méritée. M. Jastrow insinue (p. 2.31) que depuis la Réforme on est en réaction contre
le système paulinien. C'est confesser que le Protestantisme actuel est diamétralement
à traiter, parce que le plus complexe, parce que les livres sont moins sûrs garants
de la pratique que des croyances. Peut-être M. Jastrow a-t-il été un peu sévère pour
la morale babylonienne, car la raison peut beaucoup sur ce domaine, comme le
prouve l'exemple des Grecs et surtout d'Aristote. Mais il a raison de dire qu'elle
était dominée par un principe matérialiste, tandis que la morale des Hébreux avait
pour ressort la spiritualité et la perfection de Dieu. Le Rabbinisme ne lui paraît pas
avoir fait échec à ce dévelopîïement c'est méconnaître l'étroit nationalisme, l'im-
;
minutie multipliant à l'infini l'observance, plus de crainte servile que d'amour, qui
donnent au Talmud une physionomie si ingrate. Jésus n'est point le Maître le plus
accompli de cette école; il a promulgué une loi vraiment nouvelle par l'esprit, et
cet esprit sut vivifier les catégories rationnelles d'Aristote, tandis que la raison tour-
nait le dos au labyrinthe des solutions bizarres où se complaisait la subtilité des
Rabbins. Évidemment M. Jastrow a voulu être impartial, mais les Hébreux n'ont
jamais à se plaindre de ses jugements. On trouverait des vues plus dégagées de
nationalisme dans le petit et substantiel ouvrage du P. Dhorme sur la religion
assyro- babylonienne.
Roybon (Isrre).
M. le Pasteur Cart n'a survécu que (pielqucs mois à la publicatidu de son voyage
au Sinaï et à Pétrn, Mous aurions aimé à le remercier «lu bon souvenir qu'il a gardé
de ses guides. Il nous reste le devoir de présenter son œuvre ,iu public de la Revue.
RECENSIONS. 601
Cet ouvrage comprend un récit (p. 1-35Ô) et un appendice considérable sur la géo-
graphie de l'Exode (p. 35y-.j21\
Le récit commente l'itinéraire suivi en 1!)0() par la caravane de l'École biblique,
dirigée d'abord par le Père Savignac, puis, à partir de Nakhel, par le Père Jaussen.
La nouveauté de ce parcours consista à passer de 'Ain Qedeis à Pétra par l'intermi-
nable ou. Djeràfeh. Le cberain de Suez au Sioaï par l'ou. Feiràn, du Sinaïà Xakhel
et de Nakhel à 'Ain Qedeis avait été suivi par les caravanes précédentes. M. Cart a
su présenter ses impressions et ses observations d'une façon très personnelle et fort
intéressante. Dans le cours du récit sont déjà amorcées certaines discussions qui
nomenclature ancienne; c'était déblayer le terrain
fixent le rapport des sites avec la
en vue des conclusions de l'appendice. Par exemple M. Cart soutient comme on l'a
fait ici que l'ancien habitat d'Édom, le pays de Séir, se trouvait au sud de la
(1)
Palestine, aux environs du dj. Maqra, et qu'il n'a été transporté à l'est de T'Araba
au dj. Chéra actuel, que par suite de l'envahissement d'Édom sur les plateaux orien-
taux. Nous n'insistons pas sur l'itinéraire, illustré de photographies fort bien venues,
quelques-unes empruntées au P. Savignac, comme aussi le diagramme de l'itinéraire
de 'Ain Qedeis à Pétra. M. Cart, nous l'avons dit, se montre très aimable envers ses
monastique (2), c'est qu'il est décidément bien difficile de vaincre le préjugé pro-
testant. On s'étonne davantage qu'étant Suisse, et par conséquent familier avec la
haute montagne, il ait tant peiné à l'ascension du Serbal. Les hauts blocs de granit
rose, escalier pour des géants, sont encore très accessibles aux simples mortels, mais
à la condition de ne point porter sur le dos un gros appareil photographique. Le
lard absolument opaque dans les Alpes à certains levers de soleil théoriques.
La discussion de la géographie de l'Exode nous retiendra plus longtemps.
M. Cart ne se croit nullement obligé de soutenir la véracité des écrits bibliques,
et le mot de mythes revient souvent sous sa plume. Pourtant il est soucieux de
ne, point suivre en disciple aveugle les systèmes fantaisistes d'une critique débridée.
Il accepte dans ses grandes lignes l'analyse littéraire du Pentateuque, telle qu'elle
est reçue dans l'école de Wellhausen, et il s'efforce, comme nous l'avons fait
dans cette Revue, de dégager de la Rédaction définitive les itinéraires de l'écrivain
jahviste, de l'élohiste, du Deutéronome, de la source nommée Code Sacerdotal,
du catalogue des stations qui se trouve dans les Nombres. Mais tandis que nous
avons reconnu les mêmes grandes voies, avec des jalons portant des noms dif-
férents, M. Cart croit pouvoir distinguer deux traditions différentes sur le lieu du
Sinai.
Mais d'abord le point de départ. C'est, comnae on sait, le pays de Gochen,
dont l'emplacement à l'ou. Toumilât ne souffre plus de contestations, encore qu'on
puisse hésiter sur les limites précises. M. Cart, très réservé et très défiant des
précisions impossibles, est cependant assez convaincu que le passage de la mer
et le ravissement de la foi, ils trouvaient une compensation suffisante à leur existence solitaire
et amoindrie mais voix qui sont des gémissements, des plaintes et des cris de révolte, quand
;
la chair parlait haut, quand le doute étreignait les cœurs, les plongeant dans le désespoir d'un
martyre inutile et dérisoire » (p. 1G3). Toute vie chrétienne, digne de ce nom. n'est-elle pas un
martjTC dérisoire pour ceux qui doutent, et la prière, l'esprit de sacrifice, loin détre les tares
d'une vie amoindrie, ne sont-ils pas, pour un croyant, les meilleurs remèdes contre le doute?
602 REVUE BllîLIQUE.
Rouge, ou plutôt, comme s'exprime le texte, de la mer des Roseaux {^=^^D a''), eut lieu
au lac Timsah, mnis il tient encore plus fermement que ce lac était alors un lac
d'eau douce, comme le prouve le nom même de mer des Roseaux, car les roseaux
ne croissent pas dans Teau salée. En effet, au temps de l'Exode, la mer n'aurait
pas eu ses limites plus au nord qu'aujourd'hui.
Laissons de côté ce dernier point. M. Cart admet cependant qu'au temps de la
XVIII'^ dynastie un canal joignait le Nil à la mer Rouge. Ce canal, traversant la
dépression des lacs Amers, la remplissait naturellement d'eau, et cette eau était
salée, comme le prouve le nom de lacs Amers qui se trouve dans Strabon (wii,
24-25) lorsqu'il parle du canal. Si la mer Morte venait à s'évaporer d'un seul coup,
le Jourdain la remplirait de nouveau d'eau douce qui serait bientôt aussi salée que
celle d'aujourd'hui. était-il pas de même au lac
Alors pourquoi n'en Timsah?
La nature du donc si différente? Et si l'eau qu'ont passée les Hébreux
sol est-elle
n'était pas salée, assurément ils auraient pu la nommer une mer, n'ayant pas de mot
spécial pour un lac d'eau douce, mais ils n'auraient pas donné le nom de mer
des Roseaux en même temps à ce lac et à la mer Rouge au golfe élanitique
(Ex. 23, 31; Num. 14, 25; 21, 4). Le nom a pu se déplacer, c'est-à-dire gagner
en étendue, mais non pas sauter d'un lac d'eau douce fermé à la mer Rouge.
Du moins cela serait peu naturel. Quant au nom de mer des Roseaux, il s'explique-
rait très bien par le mélange des eaux du canal du \il et des bassins salés. Quand
on aborde la mer ^Forle aux immenses champs de roseaux d"Aïn Fechka, source
qui sourd dans la mer îMorte, on pourrait la nommer la mer des roseaux. Et pour-
tant c'est le mare salsissimum. L'existence du canal allant de Pithom aux environs
de Suez prouve bien que la mer ne s'étendait pas jusqu'à Pithom où Iléroopolis
(Tell el-Maskhouta), couvrant entièrement le Sérapéum et le seuil de Chalouf. Mais
il y avait des bassins d'eaux salées jusqu'auprès de Pithom, et cela suffisait pour
qu'on pût nommer, coiïjiiie on le faisait, le golfe de Suez sinus heroopoUticus à une
époijue de petite navigation. C'est dans le même sens que les Hébreux ont pu
nommer mer des Roseaux les lacs Amers et peut-être le lac Timsah aussi bien que
le golfe d'Aqaba.Quant à prétendre que le passage de cette mer eut lieu plutôt
au Timsah qu'aux lacs Amers, c'est s'avancer beaucoup sans preuves.
lac
D'ailleurs M. Cart a tout à fait raison de soutenir contre M. Naville que le mil-
liaire Ab JJro in Cltisma M. VUll signifle qu'on est au neuvième mille sur la route
d'Héroopolis à Clysma, et non pas que la distance entre ces villes est de neuf milles.
On l'approuve surtout de ne pas transporter le séjour des Hébreux loin de
l'Egypte, sous prétexte que Munir ou Musri dans les inscriptions cunéiformes dé-
signe parfois un autre pays qua la vallée du INil (I). Le ??m.sr/ cilicien est peut-être
un nom semblable phonétiquement, ayant une origine propre. Mais si l'on concède
que le nom de mu^ri s'est étendu à toute la péninsule sinaïtique et même jusqu'à
l'est de r'Araba, ce n'est point une raison pour situer à la périphérie des événements
(|uc lii nible place à la limite intérieure de l'Egypte proprement dite. D'ailleurs si
^1. Cart se montre ici très ferme partisan de la tradition, nous verrons que sa thèse
de Madian, c'est-à-dire de l'autre coté du i;olfe d'Aqaba. Que serait-on allé faire si
Musil, prêtre catholique autrichien, sans adhérer au système de ces savants, leur
aurait cependant fourni une base topograpliiquo, s'il était vrai qu'il eût découvert le
Sinaï dans les terrains volcaniques du Harrat el-Aouêrez. et spécialement au dj. Hala
el-l>fdr. Comme il fallait s'y attendre, le système de Wellhausen a été poussé à
l'extrême. D'après M. R. Weill, Qadès est tout, le Sinaï c'est l'au-delà, l'inacces-
sible, un concept mythologique.
M. Cart proteste contre ce radicalisme. Il ne lui paraît pas démontré que le Sinaï
ait été un volcan, ni qu'il ait été au pays de Madian. ni que le pays de Madian ait
été seulement au delà du golfe d'Aqaba ou élanitique. Ces conclusions sont 1res
solides, mais peut-être l'auteur les a-l-il mal étayées, et non sans quelque apparence
de contradiction. Cette contradiction consiste à placer Madian au sud de la Palestine
(p. 382), auquel cas le Sinaï pourrait fort bien être en Madian, sauf à dire plus loin
qu'Hobab, partant du Sinaï, retourne à son pays de Madian, qui dès lors ne serait
pas au sud de la Palestine (p. 430). M. Cart croit pouvoir soutenir pour Madian la
même thèse que pour Séir. Madian, désignant à l'origine un pays au sud de la
Palestine, aurait été transporté plus à l'est avec la migration des tribus. Or c'est
plutôt le contraire qui a eu lieu, si l'on défère à l'autorité des géographes anciens,
très fermes sur le site de Madian, marqué par une ville. Mais rien n'empêche
d'admettre que la sphère d'influence de Madian et surtout les migrations des Madia-
nites se soient étendues à l'est de la péninsule. De cette façon tout s'explique
aisément sans recourir à cette exagération de placer le cœur de Madian dans la
péninsule sinaïtique.
Wellhausen n'était pas autorisé à rayer le Sinaï de l'itinéraire des Israélites sous
prétexte qu'il était au pays de Madian. Mais donné une autre raison, non plus il a
topographique mais littéraire. Il serait question de Qadès dans Ex. 17 et dans Num.
20; de la manne dans Ex. 16 et Num. 11; du choix des Anciens dans Ex. 18 et
Xum. il. Entre ces récits doubles du même événement se trouve la législation
sinaïtique. Wellhausen et après lui Meyer en concluent que le Sinaï a été intercalé
dans une tradition où il ne figurait pas d'abord. Qu'on l'enlève et les épisodes
racontés deux fois se soudent et reviennent à l'unité. M. Cart se refuse à admettre
une solution aussi violente. La difficulté serait sérieuse si eu efTet les textes faisaient
aller les Israélites de Qadès au Sinaï et du Sinaï à Qadès. Mais Ex. 17 ne parle pas
ouvertement de Qadès ; il y est question de Massa et Meriba. Le recenseur (1) avait
pensé que Meriba, qui est bien Qadès, avait été ajouté à Massa par un glossateur.
M. Cart va plus loin et pense que Ex. 17. 1-7 doit être placé après les récits sinaï-
tiques. avoue ne pouvoir rendre compte des raisons de ce déplacement. Il
Mais il
est cependant très aisé de faire une hypothèse satisfaisante, hypothèse que nous ne
proposons que comme solution ad hominem dans l'hypothèse plus générale des
documents. Un exemple analogue fera comprendre ma pensée. Marc parle d'un
aveugle guéri par Jésus au sortir de Jéricho (Me. 10, 46-.52}. Luc place un miracle
semblable à l'entrée de Jéricho (Le. 18, 35-43). L'auteur d'une synopse aurait
naturellement mis deux miracles, l'un avant d'entrer à Jéricho, l'autre après, en
reproduisant intégralement les textes. Un critique, lisant la synopse, eût été porté à
n'admettre qu'un miracle. Mais oserait-il, pour souder les deux miracles en un, nier
des sources. Le Rédacteur avait dans ses documents deux récits de miracles de la.
source à Qadès, deux mentions de la manne et des anciens. Il désirait conserver
le plus possihie les textes anciens. Rien de
plus aisé en plaçant une série de récits
avant, raiilre après le Sinaï. Mais cela même suppose que le Sinaï figurait comme
le point central de la tradition. Donc niême en admettant que Ex. 17 soit une
allusion à Qadès, il est beaucoup plus simple de supposer une interversion chronolo-
"ique que de rayer le Sinaï dont le nom est attaché à la mission de Moïse.
Quoi qu'il en soit de ces modalités dans l'argumentation, nous constatons donc
avec M. Cart l'accord des documents sur la suite des lieux : Egypte, Sinaï, Qadès.
Mais, d'après lui, l'accord cesse lorsqu'il s'agit de déterminer la situation de la
sainte montagne. Elle est toujours située au sud de la Palestine, mais la tradition
vers le sud. L'élohiste met trois jours de marche et trois stations entre l'Horeb et
Qadès, l'Horeb étant situé vaguement au sud de la péninsule. Il en est à peu près de
même de la tradition du Code Sacerdotal (P) et du Deutéronome. D'ailleurs M. Cart
n'essaie aucune identiflcation précise avec les lieux que nous connaissons; le Sinaï
du jahviste est un sommet voisin d"Aïn Qedeis; le Sinaï du Sud est encore moins
clairement désigné par la tradition biblique postérieure; celle des moines n'est
qu'une conjecture sans valeur.
Il nous semble que le scepticisme de M.
Cart sur ce dernier point est excessif. Il
n'est même pas tout à fait en harmonie avec cette déclaration « Ce n'est donc pas :
une absurdité, comme le prétend Weill, que d'essayer des localisations; l'absurdité
consiste à croire^ju'un palestinien n'ait rien su de la presqu'île et que, dans cette
ignorance totale, il ait inscrit à la Ole des noms géographiques qui ne correspondent
à rien » (p. 447). Les auteurs bibliques ont évidemment voulu informer leurs lec-
teurs; M. Cart les suppose bien informés; il serait assez naturel qu'on pilt aboutir,
bonne probabilité. Mais c'est se priver d'utiles rensei-
d'après leurs données, à une
gnements que d'exclure Raphidim de l'itinéraire de E (p. 439), et de ne point faire
état du désert de Sin. Ce désert est, d'après Ex. 16, t, entre Elim et le Sinaï.
M. Cart ne veut pas y voir le désert de Ramleh parce qu'il ne se termine pas au
dj. Moûsa. Mais la désignation est beaucoup plus vague. Il faut l'entendre d'un
désert entre la région d'Élim et la région des montagnes où se trouve le Sinaï. C'est
ce que le même verset suggère expressément en plaçant une station intermédiaire.
Serait-ce que l'écrivain sacré ne savait rien de ce désert?
Mais nous n'insistons pas sur l'application au sol des données de la tradition.
Cette tradition, d'après M. Cart, s'est gravement transformée chez les Hébreux au
cours des siècles. Il s'agirait d'un désaccord entre les documents, beaucoup pUis
important que la détermination des lieux.
Dans ce système, le Sinaï primitif au fond c'est Qadès. Aussi les arguments pour
le m(-ttre à proximité d'Aïn Qt^deis sont ceux de Wellhausen pour placer en ce lieu
Le principal de ces arguments c'est (|ue le rendez-vous de Dieu avec Moïse et son
peuple était à trois jours de marche de l'Egypte. Cela exclut le sud de la péninsule
et coïncide suffisamment avec 'Aïn Qedeis où l'on reconnaît Qadès. Faut-il répéter
<ine cette distance de trois jours ne (igure que dans la requête que Moïse doit
adresser et adresse au Phanion (Kx. 3, 1«; 5, :] : 8, 23;? Moïse n'av.iil pas à dire
an IMi;uaon où il prétendait aller. Il indique une distance assez courte, qui laisse
IlECENSIONS. 60:i
croire au Pharaon que les Israélites se proposent de revenir. Mais ce qui paraît décisif
à M. Cart, c'est que le jahviste conduit en ellet les Israélites au Sinaï en trois jours
(Ex. 15, 22). —
Oui, à la condition de supposer que ces trois jours sont de J, et
qu'ils s'entendent de l'Egypte au Sinaï, ce qui est absolument indémontrable et tout
à fait contraire au contexte actuel.
Les autres preuves sont-elles plus solides? C'est d'abord le cantique de Débora
(Jud. 5, 4-5), où le Sinaï est en parallèle avec Séir et le champ d'Édom. Mais
JM. Cart reconnaît que dans le texte actuel : « à savoir le Sinaï u, ne peut être qu'une
glose. Elle est venue naturellement sous le calame d'un lecteur auquel les beaux
vers du Cantique ont rappelé la théophanie du Sinaï. La reconstitution de Winckler :
« le Sinaï trembla » n'est qu'une conjecture. Elle n'est pas même très heureuse, car
si lahvé est sorti du Sinaï, cette montagne n'a pas tremblé devant lui ; les montagnes
qui ont tremblé sont celles de la Palestine méridionale qui se trouvaient sur le pas-
sage de lahvé. Elles sont seules dans la perspective de la poétesse qui voit l'effet
produit par l'arrivée de lahvé sans préciser son itinéraire autrement que par la
frontière sud de la terre d'Israël. Dans Deut. 33, 2, c'est bien le Sinaï qui est le
point de départ. Le poète met sur le même plan Séir, Paran, et, d'après une correc-
tion nécessaire d'Ewald, Meribath-Qadès. Mais on ne peut pourtant pas assimiler
Séir eV Paran, ni Paran et Qadès. Il y a donc un groupement de lieux distincts.
Paran est au sud de Séir et de Qadès. Pourquoi le Sinaï ne serait-il pas au sud de
Paran? Et pourquoi un auteur qui aurait écrit, d'après M. Cart, vers le temps de
la réforme de Josias (621), se serait-il écarié de la tradition dominante depuis l'élo-
histe pour s'inspirer d'une ancienne tradition qui eût placé le Sinaï en plein pays
d'Édom?
Certes on ne songe pas à nier les translations topographiques au cours des âges.
Mais encore faut-il avoir des indices sérieux pour les découvrir. Une tradition hé-
braïque très ferme et contenue dans plusieurs documents place le Sinaï fort loin,
au sud de la péninsule. Il faudrait d'autres raisons que celles qu'allègue M. Cart
pour n'y voir que l'altération d'une tradition plus ancienne. D'autant que les noms
changent moins que les combinaisons qui s'y rattachent, et que le nom du Sinaï
offrait à la tradition un solide point d'appui.
Les théoriciens qui s'affranchissent de tout respect pour la tradition jugeront sans
doute que iVI. Cart est bien timide. Mais la fin de l'itinéraire leur offre une agréable
surprise. On eût pu croire que c'était tout le peuple d'Israël qui avait suivi Moïse
de l'Egypte au Sinaï, puis à Qadès l'est. Mais
et au pays de Canaan envahi par
nous apprenons enfin qu'il faut distinguer entre les tribus judéennes et les tribus
israélites. Les tribus judéennes, Juda, Siméon, Lévi, avec les clans apparentés de
Caleb, des Qénites, des lérakhmélites, ont en effet pénétré en Egypte. Sorties du
pays de Gochen, ces tribus judéennes ont été initiées par Moïse à la religion de lahvé,
à Qadès et au Sinaï qui ne forment qu'un seul lieu. Comment Moïse lui-même avait-il
été amené à adorer le Dieu du Sinaï? C'est un fait accidentel, « un phénomène d'ordre
psychologique ». L'expression ne nous déplairait pas si elle contenait le concept
de la révélation. L'auteur l'insinue peut-être quand il dit que « Moïse est entré en
contact avec le Dieu du Sinaï » (p. 508). Du moins Moïse n'aurait pas simplement
adopté la religion des Madianites ou des Qébites, comme on l'a dit si souvent sans
fondement. Les tribus judéennes, solidement organisées par Moïse à Qadès, devenues
elles aussi les adeptes de lahvé, se lancent à la conquête de la Palestine par le
sud. Elles réussissent à Khorma (Num. 21, 1-3) et poursuivent dans ce nouveau
pays le cours de la conquête.
G06 REVUE BIBLIQUE.
Or. il y avait à l'orient du Jourdain, continue iM. Cari, d'autres clans faisant partie
du grand groupe des 'Ibrim qui sont les Khabiru d'el-Amarna. Ces clans ou ces
tribus sont les fils d'Israël, et l'auteur ne dit nulle part qu'ils aient eu une accoin-
tance spéciale avec les tribus judéennes, qu'il ne range même pas parmi les 'Ibrim.
Ces tribus Israélites ont attaqué d'abord les Amorrhéens qui occupaient la rive
gauche du Jourdain, puis envahi peu à peu et conquis le pays qui fut depuis le centre
de leur puissance, la montagne d'Éphraïm. Elles ne connaissaient pas lahvé. Plus
tard elles fusionnèrent avec les tribus judéennes et adoptèrent leur dieu.
Ce système n'est pas nouveau-, il est presque devenu classique dans une certaine
école.Sa base est le dualisme incontestable des royaumes de Juda et d'Israël. Il faut
cependant avouer que la tradition représente ce dualisme comme un schisme, c'est-à-
dire comme la rupture d'une unité antérieure, et personne ne peut nier que l'unité
ait existé au temps de David et de Salomon. De plus la tradition laisse voir ouverte-
ment un antagonisme encore antérieur, mais elle prétend que cet antagonisme fut,
comme après Roboam, un relâchement des liens primitifs. Le système que nous
avons en vue prétend, lui, qu'Israël et Juda —
pour employer deux expressions rac-
courcies —
se rencontrèrent en Palestine, et que l'unité primitive d'Israël n'est qu'un
mythe. Historiquement on connaît des peuples qui ont fusionné, mais cite-t-on des
cas où la tradition Jeur ait prêté une existence antérieure commune? En tout cas il
faudra montrer comment une pareille erreur a pu naître, et surtout comment
limité s'est formée, comment un peuple a imposé à l'autre sa religion et ses cou-
lors de la grande victoire chantée par le cantique. Cette victoire fut due à Jaèl,
femme Qénite dont le dieu était lahvé. L'exploit triomphant de Jaël était celui de
son dieu. On s'imagina que lahvé était venu du Sinaï pour sauver Israël qui l'adopta
pour son compte. Heureusement la tradition ne nous présente pas de faits ni d'ex-
plications aussi invraisemblables. C'est donc parce qu'une femme Qénite a i-oupé la
têtede Sisara que tout Israël —
celui du nord, le seul véritable Israël a répudié —
son dieu pour adopter celui d'une étrangère! Et en vertu de quel principe ce dieu
étranger se serait-il intéressée Israël? Combien plus naturelle la tradition qui nous
dit qu'il est venu du Sinaï pour sauver son peuple ! Sans doute il résidait au milieu
des siens par l'intermédiaire de Tarche, mais il n'avait pas pour cela quitté le Sinaï,
et Débora pouvait distinguer comme JNIoïse une assistance par l'ange de la Face et
une assistance personnelle. Klie, le prophète d'Israël, n'alla-t-il pas encore à l'IIoreb
plusieurs siècles après pour se trouver dans un contact plus immédiat avec lahvé ?
L'exemple dÉlie est une réponse décisive à ce que dit M. Cart a on est surpris :
que, si lahvé est le dieu reconnu par ces tribus, il n'iiabite pas la Palestine, au
milieu de ses (idëles, mais soit Cftnsidéré connue résidant encore au Sinaï » (p. .>11).
Les critiques ont été vivement émus des indices si fréquents d'hostilité entre
Juda Cl Israël. INIais l'étonnant est (|ue cette hostilité n'ait jamais empêché le sen-
timent d'une unité profonde. Si le règne de David avait été une conquête, il n'edt
laissé (jue des souvenirs amers dans Israël, et la réaction aurait été jus(pr;ï l'apos-
tasie crimplète. On sait que ce ne fut pas le cas, et que Juda, même lorsqu'il vit
séparation, qui ail raconté comment toutes les tribus réunies avaient suivi Moïse
depuis l'Egypte jusqu'en Canaan, en passant par le Jourdain et Jéricho?
Le sentiment de fraternité explique seul ces tendances profondes à l'unité. Il
n'exclut pas, on le sait assez, les haines. Dans l'histoire primitive d'Israël, les tribus
du nord jouent le premier rôle; elles ont toujours été, jusqu'à la ruine de Samarie,
les plus riches et les plus fortes. On s'explique tout naturellement l'eiïacement
de Juda dans ses montagnes arides. Mais Juda prend l'essor avec David, et Salomon
fixe à Jérusalem le centre de la religion. N'est-ce pas assez pour qu'Ephraïra et
son groupe aient éprouvé une violente rancune et essayé de s'affranchir? Mais tel
était l'empire d'une tradition reconnue de tous, que ni Éphraim ne renonça à lahvé,
différente. Rien n'empêche d'admettre que Juda ait mieux réussi par le nord ce
qu'il avait manqué par le sud. Mais supposons un instant que les deux traditions
soient inconciliables. D'après M. Cart, deux cas. De quel
il s'agit de Juda dans les
droit préfère-t-il la première tradition à la seconde? N'est-il pas très naturel que
Juda, uni à ses voisins, déjà installé sur son territoire, se soit étendu du côté
du JSegeb? L'expédition a en elle-même sa raison d'être. Mais suffisait-il de prendre
Khorma en partant de Qadès pour conquérir Hébron et les environs de Jérusalem?
Le texte est muet sur cette conquête, il regarde en somme la prise de Khorma
comme un épisode sans résultats, une victoire sans lendemain. Et de plus il l'attri-
Il est vrai que l'itinéraire qui va de Qadès en Palestine par Edom. par Moab
et les pays d'outre-Jourdain est assez étrange. Il le serait tout à fait, si la tradition
n'avait soin de nous dire qu'on a essayé l'itinéraire direct, mais qu'on a échoué.
de la nature du sol, les plus hautes montagnes du pays. Qui a parcouru ces
collines enchevêtrées, séparées par des vallées profondes, qui sont de vrais préci-
pices, doit comprendre qu'on ait désespéré de monter dans ce pays.
Un détour par un pays plus accessible, avec des pâturages, n'était pas pour
étonner des nomades. On croyait pouvoir compter sur la complaisance d'Édom
et de Moab pour atteindre les vastes plaines du désert oriental. L'itinéraire, dans
l'ensemble, se retrouve très bien sur le sol. Les royaumes amorrhéens furent une
proie facile. Israël exercé aux combats put enfin se mesurer avec les Cananéens,
non sans l'aide de son Dieu. La conquête se fit sous la direction de Josué, ce héros
d'Ephraïra. Qu'il reste bien des points obscurs dans cette histoire, on en convient
volontiers, mais qu'on ne nous demande pas de croire que l'orgueilleux Ephraïra,
si sûr de sa supériorité, récemment converti au lahvisme, ait sacrifié toutes ses
traditions nationales pour mettre son héros et l'arche de son dieu à la remorque
de Moïse, l'initiateur des Judéens au culte de lahvé.
Il faut être bien hardi pour corriger, soi-disant dans le sens des vraisemblances
orientales antiques, une tradition qui est l'expression sincère de ce temps et de ce
608 REVUE BIBLIQUE.
milieu.Par là nous n'entendons pas, est-il nécessaire de le dire, soutenir les chiffres
énormes qui font circuler dans le désert des millions d'Israélites. Si l'on fait
Le R. P. van Kasteren- revient dans De Siiidim, revue des Pères jésuites hollan-
:
dais, sur la fioale de s. Marc (xvi, 9-20). Ici même (1) il a déjà traité cette question
et a cru prouver l'authenticité de ces 12 versets par leur ressemblance avec Héb.
i-ii, 4. Dans sa nouvelle étude l'auteur croit pouvoir indiquer la source de la finale.
Voici d'abord en quelques mots l'état de la question.
La finale du 2^ Évangile se présente à nous sous une triple forme : 1. finale ion-
grue ou canonique; 2. finale brève; 3. finale canonique complétée par le logion de
Freer.
Ce logion, découvert en 1906, connu en partie par s. Jérôme, se lit dans le
ms. Freer entre les vv. 14 et 15. et y supprime un hiatus manifeste. Ou trouvera le
l'opinion du même exégète (4); — admettons que l'Epitre aux Hébreux dépende de la
finale du 2'' flvangile, et que cette finale soit de la même main que le reste de l'E-
vangile. Dans la RB. 1902) le R. P. avait considéré comme authentiques entre les
vv. 14-15, les paroles rapportées par s. Jérôme : ces paroles, disait-il, rappellent,
par le style , la finale canonique, et suppriment l'hiatus entre les versets 14 et 15(5).
Dans sa nouvelle étude l'auteur rejette cette hypothèse. Et, en effet, depuis la
Freer, intercalé cependant entre les v. 14 et 15 par une main autre que celle de
Marc.
Cet Aristion, dont nous ne savons vraiment que le nom par Eusèbe et par un seul
ms. des Évangiles de l'an 986 qui porte ce nom en tête de la finale de iMarc, — cet
Aristion nous semble un dens ex machina dans la nouvelle hypothèse du P. van
Kasteren. Aristion doit être la source de la finale canonique et du logion Freer. Mais
est-ce que Aristion a composé des ouvrages, déjà avant Marc, pouvant servir de
source à celui-ci? Nous n'en savons absolument rien (2).
écrit d'Aristion (comme le veut le P. van Kasteren pour s. Marc et l'auteur du logion Freer). Il
s'agit là plus probablement, sinon sûrement, de discours ou traditions orales d'Aristion (4, 7).
2) Si le témoignage du ms. d'Edschmiazin mérite foi, il faudra le prendre tel qu'il est, et dire
que la finale n'est pas de Marc, mais d'Aristion. Ici le P. van Kasteren n'est pas très conséquent.
r.lO REVUE BIBLIQUE.
(quoi qu'en dise le R. P. van Kasteren) entre ces douze derniers versets du chap. xvi
et le restede l'Évangile.
Après examen objectif de la tradition diplomatique et patristique (1), personne ne
peut nier que la finale du deuxième Évangile se trouve dans des conditions aussi
favorables que n'importe quel écrit du N. T. considéré comme inspiré et canonique.
Or la reconnaissance, par les plus anciens témoins, de la canonicité de cette finale
aurait raconté plus en détail dans son beau style si expressif. En critique aussi il
Rome.
F. J. VOSTK.
La Revue a déjà parlé de ces fouilles. d';ibord dirigées par l'un des nôtres, le
Le rapport a été confir à M. Cluimouard, qui semble avoir pris soin de garder la
réserve l.i plus modeste, mais qui a dû laisser voir sa parfaite compétence dans l'anti-
quité grecque. Dans les circonstances si périlleuses où les fouilles ont été poursui-
vies, avec le concours d'obus qui ont rais à jour une tombe, mais aussi blessé un
travailleur, on pu découvrir qu'une partie d'une nécropole grecque. Il n'est pas
n'a
douteux que ce de la ville d'Eléonte ('EXa'.où;), colonisée par les Athéniens,
soit celle
Adèle à Athènes, et qui existait encore sous Justinien. Alexandre en partit pour aller
conquérir lAsie. Le rapport rappelle l'histoire de la cité, les tentatives d'identilica-
troue, taillé à grands plans, sans accoudoir et sans autre ornement qu'une languette
arrondie aux deux angles du dossier, est assise une déesse dans une pose hiératique
qui rappelle celle des statuettes égyptiennes. La forme schématisée est réduite aux
contours, aux saillies des seins et des jambes. Le vêtement, dont on voit le bord
supérieur arrondi, s'étale sur le corps qu'il enveloppe étroitement, sans un pli. La
tête porte une Stéphane surhaussée. La chevelure encadre le front de trois rangs de
frisons. Le visage, avec ses yeux proéminents, son nez fort, ses lèvres épaisses et
un aspect morose.
closes, présente — l""^ moitié du v° siècle ». De la même époque
une Déméter du beau style classique. Si la statuette égyptisante est vraiment une
Déméter, n'y a-t-il pas là un indice important sur les origines du culte d'Eleusis,
dans le sens qu'a soutenu M. Foucart.^ L.)
BULLETIN
civil et de l'iiutoiité religieuse. Le texte capital sur ce thème est la décision sur le
tribut dû à César (Me. 12, 13-17 et parallèles). M. Liberty n'a eu garde de l'omet-
tre et l'a commenté judicieusement. Mais il était naturel qu'ayant choisi ce sujet, il
s'efforçât d'y ramener tout ce qui pouvait y avoir trait d'une façon quelconque. Il
fallait d'abord exposer l'idée que se faisaient les Romains de leurs droits et de leurs
devoirs comme maîtres du monde civilisé, et, en regard, les tendances qui avaient
prévalu chez les Juifs. Les Sadducéens sont représentés comme une aristocratie
égoïste, amie du plaisir, exerçant sans scrupule sa domination, soucieuse de ména-
ger les Romains puisqu'il le fallait, mais plus hostiles au fond que les Pharisiens au
joug politique étranger. Ces traits sont justes. Il est un peu forcé de les dépeindre
comme des brigands afin de leur appliquer plus directement l'apostrophe de Jésus
aux vendeurs du Temple. Les Pharisiens sont plus sincèrement disposés à laisser
agir Rome dans l'ordre politique, parce qu'ils attendent de Dieu le triomphe de leur
nationalisme étroit. Les Hérodiens estiment que le judaïsme doit s'entendre avec
l'empire, afin d'obtenir des Césars un traitement de faveur qui sauvegarde ses inté-
rêts vitaux.
Dans tout cela rien qui ne soit décrit d'un trait sobre et précis. Mais voici la nou-
veauté de l'ouvrage et, semblc-t-il, une originalité ()ui ne va point sans une illusion
subjective. M. Liberty est persuadé que le récit «le la tentation de Jésus au désert est
(I) The polit irai relations of ChriM'a mxnislry, witli a uew study ol llic Teniplalion ancJ au
appenilix on • the powers of Ihe Sanhédrin », hy Slcphen LinERTV. M. A., etc., in-»" de xxiv-
i;i7 p|i. numplircy Milford. Oxford, elc, i'A\i.
BULLETIN. 613
pleinement symbolique, et que les tentations, ou plutôt les réponses aux tentations,
marquent l'attitude de Jésus en face des trois tendances politiques du judaïsme, et
sont par là même une indication pour la pratique de l'Eglise avec les pouvoirs du
monde. Jésus y figure moins pour sa personne, opposant sa conception du messia-
nisme à celle que lui suggère Satan, (|ue comme renouvelant l'ancienne expérience
d'Israël, tenté dans le désert, étant ici comme le type du peuple nouveau. Pour en
venir au détail, vouloir se nourrir de pain sans attendre l'ordre de Dieu, c'est la
politique sadducéenne qui cherche ses satisfactions sans se soucier de la grande pro-
par des entreprises hardies contre les Gentils à la façon des Pharisiens; adorer
Satan pour posséder l'empire du monde, c'est le propre de la faction hérodienne.
Cette .exégèse est assurément subtile, mais combien faut-il y mettre du sien pour
trouver ensuite dans le simple évangile ces allusions aux intrigues politiques du
temps! Sans compter que les Pharisiens sont ici confondus avec les Zélotes, qui
n'étaient que leur extrême droite, ou plutôt formaient un parti à part, d'après
Josèphe. De sorte que le commentaire de M. Liberty n'est sans doute qu'une brillante
amplification dont un prédicateur pourrait très bien tirer parti; ce n'est pas l'expli-
cation naturelle du texte.
Autre opinion de justifier. Le gouvernement de Rome n'empê-
qu'il est difficile
chait pas leSanhédrin de mettre à mort. Si donc les Juifs ont tout fait pour que
Pilate prenne la responsabilité de la condamnation de Jésus, c'est qu'ils pensaient
que le crucifiement, avec ses hontes, était le supplice le plus propre à ruiner sa
cause. La question cette fois n'est pas nouvelle, et M. Liberty n'apporte pas d'argu-
ment nouveau pour son système. Les textes évangélistes y résistent. D'ailleurs si le
Lumen vitae, Vespérance du salut au début de l'ère chrétienne (1). Comme pro-
(1) Petit in-8° de 282 pp. Paris. Beauchesne, 1916.
614 KEVUE BIBLIQUE.
croire que leur parole reflète l'émoi de leur zèle, plutôt qu'une conviction formée,
sur des points ou les disciples n'en devaient pas savoir plus que le Maître n'en avait
voulu savoir » (p. 235 s.).
(1} ^VlI,I.|A»^ WoiiriF.i.. Thr coplic ï'saUer in llie Frrer collection, iii-4" ilc xxvi-llj pp., (! pl:in-
ches. New-York, The Macmillan Company, 1910.
(•2 The Hi'hrew Partirle "1U?N, b) Cari Gaenssi.f., thèse de doctorat en pliilos<)(iliie à II iiiver
site de Chicago, in-8" «le 142 pp. Mars VJVi.
BULLETIN. 615
employé presque comme adverbe, puis comme nota relatlonis, l'an et ses composés
s'emploient aussi comme conjonction. Dans certains cas i*kL*x marque la cause, mais
M. Gaenssie s'étonne qu'on n'ait pas encore distingué la clause simplement causale,
et la clause causale qui est en même temps relative. Or lui-même ne détruit-il pas sa
distinction? Car, du moins dans la traduction, il faut choisir, et nous pouvons
adopter cette règle de l'auteur que quand lUN a un antécédent auquel il peut aisé-
ment se rapporter, la construction relative doit être préférée à la conjonction.
JN 'est-ce pas avouer que nous ne sommes plus dans la clause causale? Par exemple
II Sam. 2, 5 : Soyez bénis de lahvé [n'H "TOnn Dniuy "1U;n] : si l'on traduit avec
la Version révisée that ye, •parce que vous avez fait cette charité, la proposition est
causale; mais si l'on traduit avec la Vulgate : Qui fecistis misericordiam hanc, la
construction est relative. L'idée de cause n'apparaît plus formellement, quoiqu'elle
soit naturellement contenue dans le sens général. Mais, quoi qu'il en soit de ce
point, l'analyse de M. Gaenssie est claire, la discussion des exemples judicieuse. Il
y
a toujours profit à traiter à fond des siyets restreints lorsque l'auteur est à même
de les rattacher aux grandes lignes de la grammaire.
Pays voisins. —
La Revue a donné cette année même (p. 262 ss.) une analyse
du document « sumérien » que M. Langdon a publié sous ce titre alléchant :
et d'expliquer cette mansuétude du lion parce qu'il n'y avait plus rien à dévorer.
'1) Journal of Un: American Oriental Soctely, vol. M, Part I, Juiu l'JUi. -. The So-called Epie
of Paradise », p. 90-114.
616 REVUE BIBLIQUE.
M, Langdon que « mon roi » u'est pas le jardinier Tagtoug (ou, comme prononce
M. Priuce, Tagkii ou Taggou). « Mon roi » serait Ea lui-même, monté sur un
bateau pour diriger l'inondation. Et eu effet « mon roi » est bien Ea, qui permet
puisque le héros est maudit pour avoir mangé de ce fruit. L'expression de cette
malédiction était fort obscure dans l'anglais de M. Langdon. iM. Prince traduit :
« Il ne verra pas la face de la vie au moment où il mourra », The face of life, at the
Urne ichen lie dies, hc sliall not behold. Comme il ne peut être question d'ajouter ce
vers aux couplets de M. de la Palice, il faut entendre que Tagkou ne sera pas
immortel, et il semble, par ce qui suit, qu'il est assimilé aux autres hommes pour la
tête, le pied (?) et les yeux. Dans le texte Langdon, on pouvait croire que cela était
dit des deux créatures données à la déesse par Éa pour la dédommager du malheur
de son favori. Mais ces deux créatures deviennent deux sanctuaires.
Nous étions d'avance d'accord avec M. Prince, qui ne voit aucune liaison histori-
que entre l'épilogue et le récit qui précède. « Dans Rev. III, on semble faire allu-
sion à un conseil des dieux qui décide le traitement qui convient à chaque maladie.
direction deNintou. la mère du pays, mais toujours avec l'assentiment d'Éa »(p. 94).
M. IMorris Jastrow junior, assurément très compétent pour tout ce qui regarde la
religion assyro-babylonienne, propose une autre interprétation très dillV'rente (1).
D'après ce savant, notre texte est une vue sumérienne sur l'origine des choses.
Nous sommes dans un pays où il n'y a encore ni bêtes, ni gens, quoiqu'il y ait une
cité où Enki (Ea) habite seul avec Ninella, sa fille et son épouse. Si le lion ne dévo-
rait pas. si l'on n'avait pas mal à la tête, ce n'est pas qu'on fût heureux ou en proie
à la sécheresse, c'est qu'on n'existait pas, faute d'eau. La déesse demande ces eaux,
et elles vont en effet couler, mais à la suite d'un rite de fécondation. L'union du
dieu et de la déesse serait racontée avec le réalisme le plus cru. Après cela vient
l'inondation, qui dure à peu près neuf mois, comme la gestation. Il ne saurait évi-
demment être question d'un déluge destructeur : Ea monte dans son vaisseau divin.
Takkou est un dieu comme un
il n'a donc pas éehappé au déluge, et il ne
autre-,
figure plus dans l'histoire des arbres.Son rôle est épisodique et peu clair.
TS'ous voyons ensuite Ousmou, messager d'Enki, instruire quelqu'un, probablement
le premier homme ou l'humanité, de l'usage des plantes et des arbres. Mais il n'en
interdit aucun; si l'homme doit mourir, ce n'est pas qu'il ait désobéi; c'est sa desti-
née. Ce que nous avons nommé l'épilogue est l'énumération des dieux créés pour
remédier aux fléaux qui atleiiiiient les troupeaux et les hommes; tout se termine
par une invocation à ces dieux.
En prenant les choses de la sorte, M. .lastrow devait comparer le nouveau texte à
deux documents assyro-babyloniens déjà connus (2). L'un est la grande épopée de
l'organisation du monde par Mardouk, vainqueur des monstres et en |»artieulier de
(1) Mi-nic Ucviie, mcmc numéro : The Sumerinn Vieu) of Bcijitiuinun, |>. IW-l.l.'i.
ii) Us snni imblii's. Ira<liiils et dons Choix de textes religieux assyio-liahylo-
(((iiitiiciili-s
2, 5 ss.). Si l'on voyait une chute de l'homme à propos de l'arbre dans le texte
Langdon, la comparaison proposée par M. Jastrow serait beaucoup plus frappante.
Mais il se refuse à l'y trouver. Les analogies seraient donc relatives seulement à la
fertilité donnée au sol par l'eau, et à la production des hommes. Il faudrait aussi
(/?/}., 1916, p. 259 ss.). absolument parallèle pour la forme extérieure aux tablettes
de Langdon, traitant manifestement du déluge dont le héros a un nom différent de
Tagkou, le texte Langdon doit traiter d'autre chose. I^'argument, disons-nous, n'est
pas concluant, parce que le texte Poebel commence par la création, et il n'y a rien
d'impossible à ce que le héros du déluge ait eu différents noms, selon les traditions,
même en sumérien, d'autant que le nom du héros de Poebel n'est pas celui du
héros dans le poème de Gilgarnès. Mais nous avions déjà noté combien le déluge est
invraisemblable de la part d'Ea, le dieu sauveur, et après constatation que le pays
avait besoin d'eau. La solution proposée par nous n'était qu'une échappatoire, si
le déluge était certain comme il fallait le croire sur l'autorité de M. Langdon, mais
il n'en est rien. La preuve du déluge, c'était l'existence du bateau, monté par un
homme destiné à y échapper. Mais nous avions encore noté que « mon roi », qui
monte dans le bateau, n'était pas Tagkou; d'après M. Prince, M. Jastrow et de l'aveu
de M. Langdon lui-même, c'est le dieu Éa, dont parle son messager. Alors le dieu
monte dans sa barque pour diriger l'inondation qui amène la fertilité dans le pays,
etil n'y a pas de déluge.
Ce point admis, que penser du début? L'hypothèse d'une sécheresse, proposée par
M. Prince, ne repose sur rien; elle est peu en harmonie avec le texte, car une séche-
resse ne fait pas périr tout le monde. Et il eût été plus à propos de la décrire direc-
tement que de constater que les bêtes de proie ne dévoraient plus parce qu'elles
n'avaient plus rien à dévorer, ou que le mal de tête et les ophtalmies avaient disparu
parce qu'il n'y avait plus personne. Mais ne peut-on pas faire la même objection au
système de M. Jastrow? Il était si simple de dire : il n'y avait encore ni bêtes ni
gens. D'autant que la cité existe. D'autre part on ne peut trop insister sur ce point.
Comme le prouve le texte parallèle, les cités ont été créées avant les hommes. Et
dans deux vers du Recto, 7 et 10, il est dit expressément que Éa et la déesse y
habitaient seuls. Il se pourrait donc que le poète ait désigné l'absence des êtres en
constatant qu'ils n'exerçaient pas leur activité ordinaire.
618 REVUE BIBLIQUE.
D'après cette interprétation, il est difficile de ne pas voir un liomme dans Tagkou,
quoiqu'il soit qualifié de dieu, ce qui serait naturel s'il était le fils d'Éa et de la
déesse. Il semble, quoique le texte soit lacuneux, que c'est le même auquel le dieu
transmet ses instructions sur les arbres dont il pourra manger. Quoique la prohibi-
tion de la cassia ne se trouve pas actuellement dans le texte, du moins tel qu'on
l'interprète, la malédiction qui suit s'explique au mieux si l'homme a mangé d'un
fruit défendu. M. Jastrow objecte (ju'on n'eût pas regardé comme interdit l'usage
d'une plante considérée comme un remède utile. Mais il fallait précisément que
l'obéissance portât sur un objet de valeur. Il eiU été trop simple d'interdire un
poison.
L'homme ayant mangé de la cassia est déclaré mortel et assimilé aux autres
hommes. Ce n'était donc pas le premier homme, et il n'y a jusqu'à présent aucun
indice que les Babyloniens — ou les Sumériens — aient connu un premier homme,
père de tous les autres. D'après eux les hommes sont créés, non le premier homme.
L'idée d'un péché orginel ne résulte donc pas de notre poème. L'auteur ne lui
avait sans doute pas donné une unité très stricte, et nous maintenons, avec
MM. Prince et Jastrow, que l'épilogue n'est nullement une suite de l'histoire.
Pourtant on ne peut négliger l'idée qui circule à travers toute cette liturgie. Au
début il n'y a pas de maux,une recette divine pour connaître
et l'épilogue est
les dieux qui préservent de certains maux. Dans le corps du morceau, on voit le
favori d'une déesse, peut-être son fils, perdre l'immortalité et devenir semblable
aux autres hommes, parce qu'il a mangé d'un fruit défendu. Ce n'est point un récit
de la chut*,du premier homme, fatale à toute Sa descendance, mais c'est une leçon
pour tous les hommes, car, si un homme instruit par les dieux a manqué l'immor-
talité, et s'est trouvé exposé aux maux qui amènent la mort, que tous apprennent
à demander aux dieux, et ils savent désormais auxquels, le remède de leurs maux,
et qu'ils ne s'y exposent pas par désobéissance.
M. Jastrow a promis une étude détaillée d'un texte aussi important. Il faut
attendre ses explications, et sans doute d'autres encore, avant d'en posséder le
sens définitif.
pour signifier « première année depuin que tel événement s'est produit
: ». De
sorte que « l'année d'un roi » désigne l'année pleine qui a suivi son avènement.
Cet usage ne paraît pas douteux, car dans (certains cas un événement important
devrait, sans ce recul, s'être passé dans le premier mois de l'année, date de la
tablette. Peut-être pourmit-on usage de cette clef dans la question si difficile
faire
est a noter pour la question de l'ArioR de la (lenèse (14, t). Kudur-mahuk lni-
mt-me ne portail pas le nom de roi, mais celui de père du pays d'Euuitbal. Il parle
du clair outendfim'ut (|uc Dieu lui a donné ». Itu aurait ici un sens collectif, « le
dieu » pour « les dieux » ; mais ce serait en tout cas une manière d'exprimer que
les dieux forment un groupe qui est « la divinité ». On sait que les (Irecs s'expri-
maient de la même façon, parlant de Dieu, sans rejeter pour cela le polythéisme.
Sous les Séleucides on copiait encore des textes « bilingues ». L'un d'eux vient
d'entrer au Louvre. M. Thureau-Dangin qui l'a interprété avec sa maîtrise ordinaire
lui donne le nom d'exaltation d'Ichtar. Ce serait « en quelque manière la contre-
partie du célèbre récit de la descente d'Ichtar aux enfers » (p. 141).
Le dieu suprême, Anu, a lui demandent de la prendre
possédé Ichtar. Les dieux
pour femme légitime, de donner la royauté du ciel. Anu y consent, et Ichtar
lui
devient Antum. Voici les paroles d'Anu sur l'ordre qui règne dans les cieux :
Dans les éternels fondements du ciel et de la terre, dans les immuables ligures des
<•
Pour les deux dieux, les veilleurs du ciel et de la terre, qui ouvrent la porte d'Anu,
Pour Sin et Samas il y eut deu\ parts égales, le jour et la nuit;
De la base au sommet du ciel ils ont fait connaître leurs mesures du temj)s.
Comme des épis se presse la niasse des étoiles du ciel. »
On que Sin et Charaach sont la lime et le soleil. Leur rôle est le même que
sait
celui Genèse leur assigne (Gen. 1,14 ss.}, mais dans la Bible ce sont de
que la
simples créatures, créées pour leur ofûce ici les constellations sont les immuables :
figures des dieux. Le lune parmi les étoiles, serrées comme des épis, n'est-ce
pas déjà :
(1) Christus, Manuel d'histoire des religions, par J. Huby, in-8" de xx-l3l8 pp. Paris, Beau-
chesne, 1916.
(•2) RB., 1W3, p. 1.-; ss.
(3) 1904, p. 27-5o; 188--21-2.
WRB., 1904, p. 45.
REVUE BIBLIQUE' 1916. — N. S., T. XIII. 40
620 REVUE BIBLIQUE.
paraît, somme toute, avoir été admise dans toute sa pureté que par un petit nombre
d'adhérents (2) ». On pourrait se demander si l'insistance vraiment étrange des
Achéménides à glorifier Ahuramazda, sans d'ailleurs rejeter les autres dieux, ne
s'expliquerait pas mieux par le parti pris d'écarter un rival, qui serait le génie du
mal, que par un sentiment plus ou moins monothéiste. Zoroastre, lui, est un apôtre
convaincu du dualisme, et c'est l'importance suprême de sa doctrine. La réforme
de Zoroastre mérite donc beaucoup moins que celle des Achéménides le nom de
religion Mazdéenne que lui donne M. Carnoy. Ou plutôt la religion des Achéménides
est la religion Ahuramazdéenne. La séparation des mots ou le renversement de
Ahura et de Mazdâh qui se trouve dans l'Avesta, loin d'être une preuve d'antiquité,
indique la réflexion théologique; on ne trouve chez les Grecs que la l'orme des
Achéménides.
On pourrait encore recommander Christus même aux personnes qui n'ont aucun
goût pour rhistoire des religions, ne fut-ce que pour l'esquisse d'un si beau trait qui
dessine la vie de l'Eglise chrétienne. Le nom du R. P. Rousselot se retrouve dans
toule cette partie, avec celui de MM. Huby, Brou, et de Grandmaison. Le charme
de ces pages, où l'érudition, la pensée théologique et mystique, se fondent dans un
sentiment si ardent de la beauté intellectuelle et morale du christianisme, sont,
hélas! en ce qui regarde le P. Rousselot, des novisswia verba. Ces derniers fruits
d'un talent déjà mûr inspirent les plus amers regrets à ceux qui ont connu ce reli-
gieux si sympathique, tombé bravement au champ d'honneur. Nous voudrions ne pas
lui attribuer une note assez embrouillée, destinée, à ce qu'il semble, à atténuer cette
depuis la mort de saint Thomas d'Aquin, s'est perdue l'intelligence des grandes idées
scolastiques » (p. 11-51). Il fallait bien rappeler que l'école dominicaine était de-
meurée fidèle au thomisme et en conservait la tradition. IMais on insinue qu'elle n'a
pas échappé au danger d'en perdre l'esprit en en gardant la lettre, et qu'elle n'a pas
osé « réformer pour conserver ». Et, en effet, les thomistes n'ont jamais eu l'intention
de réformer saint Thomas. A-t-on été plus heureux quand on a voulu en tirer sinon
le molioisme, du moins le congruisme.?
architecte aux fouilles de INI. Bliss, ont naturellement le plus grand intérêt. Les
premiers rudiments pour l'ori^anisation de rhal)itat humain sont les grottes, dont les
plus heaux types onl été relevés par M. Macalister à Gézer. C'était l'installation des
races néolithiques, vers 3000 av. J.-C. Les Sémites supplantent ces troglodytes vers
2Ô00. Tout leur elfort se porte vers les lortifications, et ils réussissent à élever de
fortes murailles autour de hauts lieux très restreints. — Nos lecteurs ont présent à
la mémoire le groupement comparatif de ces enceintes dans le Canaan, du P. Vir-
rieurs, la victime était remplacée par une lampe entre deux vases, symbole du sacri-
fice. Que pense M. Diekie des constructions saloraonieunes.? Il a vainement cherché
l'appareil du Temple, quoiqu'il attribue certaines pierres des murs actuels à cette
époque, with some cevtainli/ (p. 32). Mais le Temple fut construit par des architectes
phéniciens, bien supérieurs aux Juifs, et n'eut pas grande influence sur le dévelop-
pement normal de l'art juif. Lorsque Hérode rebâtit l'enceinte dont nous admirons
encore certaines parties, ce fut une œuvre du génie romain mis au service du judaïsme.
— Notes sur Damas, par M. F-. G. Newton. —
1. Arche romaine^ au nord de la
croix » et remplacée par une mosquée. L'église moderne, selon toute apparence,
était la crypte de l'église byzantine. Cette découverte est incontestablement favorable
à l'authenticité, car on sait le goût des Byzantins pour ces sanctuaires commémoratifs.
— Notes archéologiques, par M. Joseph OfTord. VI. Une inscription récemment décou-
verte concernant la guerre juive d'Hadrien. Cette inscription est latine, elle a été
découverte à Gérasa, et publiée dans le Journal of Roman studies. Elle émane des
papyrus dont il a été question ici même (fiB. de cette année, p. 291). IX. Notes juives,
spécialement sur les documents égyptiens qu'on peut rapprocher de l'Exode. —
Recensioîis et Bonnes paroles sur le passé et l'avenir de l'École biblique
notices.
et de cette Revue, dont on est touché et reconnaissant.
Avril 1916. —
Notice sur M. le Colonel sir Charles Moore Watson, président du
Comité, décédé le 1.5 mars 1916. L'École biblique française se range parmi ceux qui
ont ressenti le plus vivement cette perte. — Notes de circonstance sur les habitants
modernes de la Palestine, par MM. Masterman et Macalister (suite). Toujours le
(es) dans le sens d'une unité de poids qui s'est rencontrée sur deux ou trois échan-
tillons récemment découverts. Un poids est naturellement l'expression d'imc valeur.
Le sens serait « Et tout Israël descendait vers les Philistins pour faire forger chacun
:
son soc de charrue ou son eth (hoyau?), et sa hache et son aiguillon; et l'imposition
était un payam pour les socs de charrue et pour les cthim, et trois q'dlechùn pour
les haches et pour mettre une pointe à l'aiguillon ». D'après M. Pilcher, un imynm
seulement successeur-, c'est donc bien Jéhu qui est qualifié fils d'Omri sur l'obélisque
de Salraanasar II, quoiqu'il n'ait été que son quatrième successeur. — Sur Bel-
chazz^c, fils de Nabonide. — Un
araméen sur les côtés d'une tablette baby-
texte
lonienne prouve définitivement qu'un paras équivaut à une demi-mine. C'est à noter
pour le commentaire de Daniel 5, 25. —
D" H. Clay TrumbuU and Kadenh-Bornea,
I\I. le Professeur Camden M. Cobern s'en prend vivement à M. Lawrence qui s'était per-
mis de trouver trop lyrique la description de 'Ain Qedeis par M. Trumbull. Et sans doute
M. Lawrence n'entendait pas rabaisser les mérites de M. Trumbull. Or M. Cobern
écrit :
/)• Trumbull, like most of as Amcricans, enjoyed using a rather tropical and
à la grande histoire. Le portrait qu'on nous donne de lui au moment de son activité
palestinienne fait entrevoir l'indomptable fermeté de ce Chef. — M. Watson est
remplacé par M. Léonard W. King, assyriologue distingué du British Museiuii. —
Miss Estelle Blyth, (jui connaît si bien Jérusalem où elle a vécu jusqu'à la guerre,
est secrétaire assistante intérimaire en l'absence de M. G. Ovenden, (jui sert dans
l'armée.
— Le Q. SlatemenI donne quelques détails sur ce qui se passe à Jérusalem. Nous
nous en sommes abstenus, soit parce que la Hevae a toujours ignoré les événements
politiques, soit à cause de la diflicidté de savoir au juste ce (|u'il en est. ^'a-^-on pas
lu dans les journaux les plus graves que les 'lurcs avaient transformé le (lolgotha
en champ de tir.' Or il est fort douteux qu'on ait tiré à la cible même au Pseudo-
Calvaire de Gordon qui est enclos dans un cimetière musulnaan, terrain sacre.
BULLETIN. C23
prunté l'oiseau Gozal au babylonien! oh! fort indirectement! mais pourquoi pas à la
Bible? XIV. Les Habiri des tablettes de Tell el-.\marna et les Hébreux. Renvoi à la
Propagation de fléaux par les insectes et les rongeurs dans l'A. T. et sur les mo-
numents. XVL Le Chéol et le pays babylonien des ombres. XVIL Inscriptions
juives de Rome. X^ HI. Un nouveau manuscrit de Paris concernant l'astronomie
hébraïque. Ou date en passant, d'après Mrs. \\ alter Maunder, le livre de Jubilés
du viu« s. ap. J.-C. ! XIX. Belchazzar et Gobryas le Mède. — Table des poids an-
ciens que possède le Musée du Fund. — Recension et notes. — Notes et questions.
« Monsieur le Directeur,
« Je lis dans votre instructive Revue (1) que l'auteur d'un ouvrage tout récent,
M. Vandervorst, professeur au Grand Séminaire de Malines, « pense que l'oracle
d'Isaïe14, 4-21 doit s'entendre de Sargon », qui fut, à la fin de son règne, roi de
ce n'est pas Sargon seulement qui fut à la fois roi d'Assyrie et de Babylone. Ses
deux prédécesseurs et son successeur furent aussi plus ou moins longtemps dans le
même cas. Il n'y a donc rien de surprenant à ce que l'un ou l'autre de ces mo-
narques ait été appelé par le prophète hébreu leur contemporain : 7'oi de Babel, aussi
bien que roi d'As$ou?\
« Agréez », etc.
« Monsieur le Directeur,
ce qui fait aussi qu'il est impossible de trouver dans l'A. T. le ou les textes auxquels
l'auteur sacré fait allusion. La chose serait peut-être diirérente s'il était question là
de la jalousie divine.
« Or cette citation biblique est destinée à celui qui veut être ami du prouver que «
soit hostile à Dieu, soit l'objet de l'inimitié de Dieu, ennemi de Dieu pouvant avoir
cette double signification. Et c'est en effet ce qu'elle dit assez clairement si l'on
traduit : « C'est pour la Jalousie (divine) que convoite l'esprit qu'il a fait habiter en
nous «, c'est-à-dire que par la convoitise il s'expose à la jalousie et par conséquent
au courroux divin.
« il habite est donc bien ennemi de Dieu; il l'est même doublement
Celui en qui ou
dans deux sens de cette locution, puisqu'il se révolte contre Dieu, qui a mis en
les
en l'homme son souffle ou esprit, l'Écriture sainte dit (implicitement) que (s'il con-
voitel. cet esprit, « c'est pour (s'exposer à) la jalousie s non qu'il en ait l'intention, ;
naturellement, mais tel est le réxnltat inévitable de la convoitise. Cf. pécher -po;
OavaTov Jean 5, 16; II Pier. 3, 16 etc.
I
« Je reconnais que partout ailleurs dans le N.T. çOovo; désigne la jalousie humaine.
Mais le synonyme rr,Ào; se disant de Dieu aussi bien que des hommes, pourquoi n'en
serait-il pas de même de oOovoçi'Et opy/j, O'jao;, exoix/jatç, notions analogues, dési-
i^nant souvent (sans article) la colère ou la vengeance divine, pourquoi ce substantif
n'aurait-iP^as pu s'employer de la même manière dans le même sens (1)? En tout
cas, le mot hébreu correspondant est quelquefois employé ainsi. Cf. Éz. 8, 3 et .5 :
limage de jalousie, excitant la jalousie (de Dieu, 59, 17. évidemment) ; Is.
« Il est vrai aussi que la jalousie de Dieu est généralement rendue en grec par s^ao;.
Mais rpo; rr//.ov eût été amphibologique, parce que ce terme désigne souvent
l'amour ardent de Dieu pour ses fidèles. Saint Jacques a préféré le synonyme, comme
il a substitué immédiatement après £;:i;:o0£t à £7:t0u(X£t, et ailleurs roXuarXay/vo; à
-OKMlKlOC, (5, 11).
<> Al. Coppieters a fort bien expliqué ce qui suit : « iVIais il donne une grâce plus
grande », c'est-à-dire y>i/».s forte (non que la tendance à l'envie, mais) que la concupis-
cence, naturelle à l'esprit humain. Je l'avais expliqué de même dans l'article en
question. Le reste du passage est assez clair.
(( Qu'il me soit permis de faire observer en terminant qu'avec l'interprétation que je
vienb d'exposer brièvement, il est aisé de comprendre pourquoi la citation débute
par rpo; çOovov (c'est l'idée capitale de la phrase,, tandis que cela est inexplicable
dans la supposition, généralement adoptée, qu'il s'agit de la jalousie humaine.
n Dans l'espoir que vous voudrez bien communiquer ces quelques remarques à
vos lecteurs, je vous prie d'agréer », etc.
(1) Cf. aussi r, ôOvaiAi;, la l'uissaiice (divine). Maith. 26. Ci, oie. Nous (lisons de iiièmc lu l'rovi-
clcn<'c.
<^ j '
-jumr
TABLE DES MATIÈRES
ANNEE 1916
Le Gérant : J. Gaiulda.