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Cahiers de civilisation médiévale

L'histoire des expositions d'art médiéval. À propos du colloque de


l'École Normale Supérieure de Pise (15-16 octobre 2004)
Florence Moly-Mariotti

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Moly-Mariotti Florence. L'histoire des expositions d'art médiéval. À propos du colloque de l'École Normale Supérieure de Pise
(15-16 octobre 2004). In: Cahiers de civilisation médiévale, 48e année (n°191), Juillet-septembre 2005. La médiévistique au
XXe siècle. Bilan et perspectives. pp. 243-250;

doi : https://doi.org/10.3406/ccmed.2005.2914

https://www.persee.fr/doc/ccmed_0007-9731_2005_num_48_191_2914

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Riassunto
II colloquio della Scuola Normale Superiore di Pisa (15-16 ottobre 2004) ha trattato delle grandi
esposizioni di arte medievale dall'Ottocento ad oggi. Qui, il tema viene evidenziato dallo studio della
fase preparatoria ad un evento o anche dall'esame del pubblico oppure dall'analisi di mostre
commemorative. Spesso la mostra riguardante un tema legato al medioevo privilegia la nozione di
Europa. Anche altri punti vengono affrontati corne la dimensione dei cataloghi e la loro utilità oppure il
rapporto con i musei (esposizioni permanenti). Senza dare maggior peso al caso tedesco piuttosto che
francese o italiano, varie mostre vengono citate corne modello ma vengono segnalati anche alcuni
aspetti negativi. Un altro argomento dovrebbe essere ancora meglio evidenziato, a proposito della
storia degli allestimenti sui quali la documentazione è molto scarna. Durante la fase conclusiva, alcuni
punti sono stati discussi come, ad esempio, la necessità di migliorare i cataloghi dei musei in Italia,
particolarmente quelli municipali visto che questi ultimi sono quelli che contengono più opere
medievali.

Résumé
Le colloque de l'École Normale Supérieure de Pise (15-16 octobre 2004) portait sur les grandes
expositions d'art médiéval du XIXe s. à aujourd'hui. Ici, le thème est mis en valeur par l'étude de la
phase préparatoire à un événement ou bien la prise en considération du public ou encore l'analyse
d'expositions commémoratives. Souvent l'exposition concernant un thème qui a trait au Moyen Âge
privilégie la notion d'Europe. D'autres points sont également étudiés, comme la dimension des
catalogues et leur utilité, ou encore le rapport avec les musées (expositions permanentes). Sans
privilégier le cas allemand plutôt que le cas français ou italien, par exemple, plusieurs expositions sont
citées comme modèles mais en relevant également certains aspects négatifs. Un autre sujet devrait
être encore mieux cerné, celui concernant l'histoire des aménagements sur lesquels la documentation
est réduite. Certains points relevés lors de la discussion finale ont mis en évidence, par exemple, la
nécessité d'améliorer les catalogues de musées italiens, en particulier les musées municipaux qui
contiennent généralement le plus d'œuvres médiévales.
L'histoire des expositions d'art médiéval
À propos du colloque de l'École Normale Supérieure de Pise
(15-16 octobre 2004)

RÉSUMÉ
Le colloque de l'École Normale Supérieure de Pise (15-16 octobre 2004) portait sur les grandes expositions d'art
médiéval du XIXe s. à aujourd'hui. Ici, le thème est mis en valeur par l'étude de la phase préparatoire à un événement
ou bien la prise en considération du public ou encore l'analyse d'expositions commémoratives. Souvent l'exposition
concernant un thème qui a trait au Moyen Âge privilégie la notion d'Europe. D'autres points sont également étudiés,
comme la dimension des catalogues et leur utilité, ou encore le rapport avec les musées (expositions permanentes). Sans
privilégier le cas allemand plutôt que le cas français ou italien, par exemple, plusieurs expositions sont citées comme
modèles mais en relevant également certains aspects négatifs. Un autre sujet devrait être encore mieux cerné, celui
concernant l'histoire des aménagements sur lesquels la documentation est réduite. Certains points relevés lors de la
discussion finale ont mis en évidence, par exemple, la nécessité d'améliorer les catalogues de musées italiens, en
particulier les musées municipaux qui contiennent généralement le plus d'œuvres médiévales.

RlASSUNTO
II colloquio délia Scuola Normale Superiore di Pisa (15-16 ottobre 2004) ha trattato délie grandi esposizioni di arte
médiévale dall'Ottocento ad oggi. Qui, il tema viene evidenziato dallo studio délia fase preparatoria ad un evento o
anche dall'esame del pubblico oppure dall'analisi di mostre commemorative. Spesso la mostra riguardante un tema
legato al medioevo privilégia la nozione di Europa. Anche altri punti vengono affrontati corne la dimensione dei
cataloghi e la loro utilité oppure il rapporto con i musei (esposizioni permanenti). Senza dare maggior peso al caso
tedesco piuttosto che francese o italiano, varie mostre vengono citate corne modello ma vengono segnalati anche alcuni
aspetti negativi. Un altro argomento dovrebbe essere ancora meglio evidenziato, a proposito délia storia degli allesti-
menti sui quali la documentazione è molto scarna. Durante la fase conclusiva, alcuni punti sono stati discussi corne, ad
esempio, la nécessita di migliorare i cataloghi dei musei in Italia, particolarmente quelli municipali visto che questi
ultimi sono quelli che contengono più opère medievali.

«Moyen Âge - Moyen Âges. Un siècle d'expositions d'art médiéval», tel a été le thème du colloque qui
s'est déroulé à Pise (15-16 octobre 2004) et qui a conclu deux années de séminaires tenus à l'École
Normale Supérieure par le Professeur Enrico Castelnuovo, ses élèves et collaborateurs1. Le projet, original
et ample, encore aujourd'hui en chantier, était de réfléchir sur les grandes expositions d'art médiéval, qui
ont marqué les études sur ce thème ou, dans certains cas, ont été révélatrices dans le domaine de l'histoire
de l'art, depuis le XIXe s. jusqu'à nos jours.
Les intervenants au colloque et les propos développés sont les suivants: Enrico Castelnuovo (École
Normale Supérieure de Pise): Discours introductif; Arturo Carlo Quintavalle (Université de Parme):
« Les expositions comme structures narratives » ; Donata Levi (Université d'Udine) : « Art du Moyen Âge
en exposition : certains épisodes du XIXe s. » ; Clara Baracchini (Surintendance de Pise, Livourne, Lucques
et Massa) : « Deux expositions et un territoire : le cas lucquois » ; Tiziana Franco (Université de Vérone) :
« Trecento. Peintres gothiques à Bolzano (2000-2004) » ; Francesco Gandolfo (Université de Rome - Tor

1. Paola Elena Boccalatte, Claire Challéat, Elisa Camporeale, Alessio Monciatti, Michela Passini, Cristina Maritano,
Florence Moly, Tiziana Barbavara Di Gravellona, Fabrizio Crivello, Michèle Tomasi, Francesca Dell'Acqua, Sara Abram,
Chiara Piccinini, Eleonora Mazzocchi. Prochainement, les Éditions de l'École Normale Supérieure de Pise sortiront une
publication collective sur les séminaires des années académiques 2002-2004.
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Vergata) : « Les célébrations des personnages historiques à travers les expositions d'art médiéval » ; Carlo
Bertelli (Université de la Suisse italienne, Lugano) : « Images d'Europe : Francs, Lombards, etc. dans les
expositions récentes » ; Gerhard Wolf (directeur du Kunsthistorisches Institut, Florence) : « Icônes en
expositions : entre espace sacré et profane » ; Maria Andaloro (Université de la Tuscia, Viterbe) : « Byzantium :
Faith and Power (New York 2004)»; Philippe Lorentz (Université Marc Bloch, Strasbourg): «L'art du
Ober-Rhein dans le miroir des expositions » ; Adriano Peroni (Université de Florence) : « Moyen Âge en
exposition. Entre archéologie, art et histoire, certaines considérations».
À l'occasion de ce colloque, plusieurs collaborateurs du Professeur Castelnuovo et en particulier Alessio
Monciatti et Chiara Piccinini2, véritables initiateurs du projet, ont élaboré une première liste des
expositions concernant l'art médiéval.
Lorsqu'on étudie une exposition, il est difficile de trouver du matériel sur sa préparation et sur les
controverses au sein du comité d'organisation. Il est très intéressant, quand cela est possible, d'avoir
recours à la correspondance échangée entre les organisateurs. Tel a été le cas pour l'exposition Arte
lombarda dai Visconti agli Sforza, qui eut lieu à Milan au Palazzo Reale en 1958 (exemple d'une
exposition qui fit totalement redécouvrir l'art d'une période et d'une région). À travers la correspondance de
Roberto Longhi, Gian Alberto Dell'Acqua, Ugo Nebbia et Luigi Coletti, Tiziana Barbavara a réussi à
analyser les divergences de vues entre Roberto Longhi et Fernanda Wittgens en particulier. Cette
dernière voulait une exposition «globale» sur le modèle de celle de Zurich en 1948/49, Kunstschâtze der
Lombardei. 500 vor Christus bis 1800 nach Christus, Plastik, Kleinkunst, Buchminiatur, Zeichnung, Druck-
graphik, alors que R. Longhi, qui eut d'ailleurs le dernier mot, opta pour une exposition concentrée sur
les xive et xve s.
En effet, une histoire des expositions est difficile à établir sans connaître la phase préparatoire de
l'événement. Parfois le fait d'avoir retrouvé des documents témoins permet d'éclairer l'image que l'exposition
voulait donner. Il serait très intéressant, dans tous les cas, de connaître la liste des œuvres demandées et de
la comparer avec celle des œuvres obtenues.
Un autre aspect que l'on a tendance parfois à sous-estimer est la prise en considération du public3, pour qui
la visite d'une exposition d'art médiéval requiert une certaine préparation, l'acquisition de certaines
connaissances.
Les expositions d'art médiéval, qui se sont déroulées tout au long d'un siècle, sont analysées ici sous de
nombreux aspects; ainsi, parmi celles qui commémorent un événement important ou «revisitent» une
ancienne exposition, on peut citer trois cas dignes d'intérêt : Bruges, en 2002, qui commémore l'exposition
de 18924 ; Paris, en 2004, qui rend hommage à l'exposition Les primitifs français de 19045, et Sienne qui,
actuellement, prépare une importante rétrospective de la Mostra di antica arte senese de 1904. Un autre cas
est constitué par les expositions qu'on pourrait appeler mémorables, par exemple Pise, Mostra délia scultura
pisana del Trecento 1946/47, coordonnée en partie par Emilio Tolaini; Paris, L'Orangerie, De Giotto à
Bellini. Les primitifs italiens dans les Musées de France, sous la direction scientifique de Michel Laclotte,
1956; Milan, Palazzo Reale, Mostra d'arte lombarda dai Visconti agli Sforza, 1958; New York, The Year
1200. A centennial exhibition at the Metropolitan Muséum, of Art, 1970; Cologne, Die Parler und der Schône
Stil. Europâische Kunst unter den Luxemburgern, 1978; Paris, Grand Palais, Les Fastes du Gothique. Le
siècle de Charles V, 1981.
Doit-on isoler l'exposition d'art médiéval de celles sur les «old masters»? La période du Moyen Âge se
distingue par le fait qu'elle n'est pas riche en noms d'artistes. Presque toujours, si l'objet concerne une
période précédant le XIVe s., ce sont les commanditaires qui deviennent les protagonistes: par exemple, ce
fut le cas de l'exposition de Modène-Nonantola, Quando le cattedrali erano Manche. Mostre sul Duomo di
Modena dopo il restauro, en 1984/85 ou encore de Magdebourg, Otto der Grosse. Magdeburg und Europa,
en 2001.

2. Alessio MONCIATTI et Chiara PICCININI, Medioevo in mostra. Note per la storia délie esposizioni d'arte médiévale, dans
Arti e Storia nel Medioevo, éd. E. CASTELNUOVO et G. Sergi, IV: // Medioevo al passato e al présente, Turin, 2004, p. 811-845.
3. Francis HASKELL, Antichi Maestri in Tournée: le esposizioni d'arte e il loro significato, éd. Tomaso Montanari, Pise,
SNS, 2001. Haskell analyse le rôle des expositions qu'il définit ainsi (p. 3): «Leur vie a une durée limitée et dès le début celle-ci
est volontairement et consciemment limitée. »
4. Exposition des primitifs flamands et d'art ancien, Bruges, 1902.
5. Primitifs français. Découvertes et redécouvertes, Paris, 2004.
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L'absence, généralement, de liaisons entre les noms et les œuvres au Moyen Âge rend pratiquement
impossible d'organiser des expositions monographiques. Pourtant, d'une façon générale, c'est un « nom » qui attire
le public, les œuvres ne suffisent pas. Récemment, on a eu plutôt tendance à suivre un modèle
interdisciplinaire : expositions constituées par typologies, techniques ou types de matériaux. À ce sujet, les techniques
qui dominent au Moyen Âge (concernant les manuscrits, ivoires, sculptures sur bois, vitraux, etc.) étant
différentes de celles qui seront ensuite à l'honneur au xvie s., les stratégies d'expositions doivent s'adapter.
En Italie, les expositions d'art médiéval se déroulent en général autour d'un personnage (voir le cycle sur
Frédéric II, p. ex. : mission du héros, ses talismans, sa mort, etc.). Mais une figure-guide (un souverain, un
empereur) est-elle nécessaire ? Ce peut être aussi une ville. Souvent, les objets demandés en prêt dans le
cadre d'une exposition sont des œuvres renommées pour attirer le public, plus que pour leur intérêt
scientifique.
Un modèle narratif, en guise d'exemple, pour des expositions sur l'art est l'idée de nation, de race, de
lignée: les Lombards par exemple; ou encore le cas de Mantoue, 1991, Wiligelmo e Matilde. L'officina délia
Riforma, sur les rapports entre les commanditaires et les ateliers ; enfin Sarzana, 1992, Niveo de marmore.
L'uso artistico del marmo di Carrara dall'XI al XV° secolo, au sujet du passage de l'artiste-artisan à l'étude
des matériaux.
Parfois, ce type d'exposition revendique une intention politique précise, et ce depuis YExposiciô d'art antic
de Barcelone et Y Exposition des Primitifs flamands et d'Art ancien de Bruges, en 1902, jusqu'en 1937 avec
la Mostra giottesca de Florence, vitrine de propagande du régime fasciste.
Dans la plupart des cas, le mot « Europe » devient le prétexte ou plutôt le centre d'attention des stratégies
d'expositions; nous en avons un bon exemple avec celles organisées par le Conseil Européen, comme à
Vienne, en 1962, Europàische Kunst um 1400, ou encore à Athènes, en 1964, L'art byzantin, art européen.
Pour l'Allemagne, le rôle de Charlemagne dans la constitution de l'Europe reste un atout-clef, qui a été
largement souligné: Karl der Grosse. Werk und Wirkung, Aix-la-Chapelle, 1965 (organisé par le Conseil
Européen) ; 799. Kunst und Kultur der Karolingerzeit, Paderborn, 1999. Cette dernière exposition comprend
une analyse de l'urbanisme, des lois, du contexte culturel, etc., puis un lien est crée avec la production des
arts comme la peinture et l'enluminure (culte de la personnalité, mythologie du héros). Autre cas
d'exposition récente à ce propos : Otto der Grosse. Magdeburg und Europa Magdebourg 2001 ; et nous pourrions
alonger la liste.
Parmi les nombreux points de réflexion sur notre thème, il est fondamental d'essayer de comprendre si les
expositions ont permis, en quelque sorte, de « reconstruire » l'art médiéval. Aujourd'hui, bien que le Moyen
Âge soit particulièrement à la mode, on peut se demander si les expositions sur cette période représentent
encore une force d'attraction.
En ce qui concerne le problème des catalogues: ils sont de plus en plus imposants avec, en général, une
majorité d'essais par rapport aux rubriques. Ce sont plus des publications scientifiques que des instruments
à emporter avec soi lors de la visite sur place. Il faudrait en définir la typologie et savoir quelles réponses
ils doivent nous apporter. Quel est le catalogue idéal? D'après Castelnuovo, c'est un catalogue limité
(comme celui de l'exposition Les arts sous Charles VI. Paris 1400, Paris, Le Louvre, 2004) de façon à
attirer le public sans l'effrayer. Il doit contenir les rubriques de toutes les œuvres exposées, accompagnées
de contributions de quelques pages seulement. Il peut être complété par une sorte de guide qui puisse être
emporté dans les salles, voire éventuellement par un recueil plus imposant à l'usage des bibliothèques et
des chercheurs.
En ce qui concerne le rapport avec les musées et, parallèlement, la fragilité des objets exposés6, on observe
qu'à l'heure actuelle les expositions se multiplient - ce qui n'est pas sans risques pour les objets exposés. Et
l'on se demande pourquoi elles attirent tant de monde, alors que les musées sont généralement vides. Cela
est probablement lié aux stratégies de communication et aux enjeux financiers mis en œuvre par les
organismes de promotion. Ainsi deux expositions ont connu un très grand succès public: Londres, 1987,
Age of Chivalry. Art in Plantagenet England, 1200-1400 ou la toute récente Byzantium. Faith and Power
1261-1557, New York, 2004. Le cas des expositions autour des impressionnistes à Trévise, Brescia, etc.,
réalisées par Marco Goldin7 («linea d'ombra») a été évoqué: il s'agit d'une organisation extraordinaire,

6. Roberto Longhi a écrit souvent sur ce sujet, de façon parfois polémique.


7. Goldin est à la tête d'un puissant organisme privé de promotion culturelle, qui organise de nombreuses expositions en
Italie.
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une véritable gestion d'agence, avec de gros financements, la proposition de voyages organisés pour visiter
des expositions, etc. Les musées sont immobiles, les expositions ne le sont pas, mais elles sont souvent
utiles pour les musées8, leurs fonctions de conservation, de collection, se rejoignant, même si, bien souvent,
la présence d'une exposition dans un musée n'augmente pas l'affluence de ses visiteurs dans les salles de
collections permanentes.
Au XIXe s., on s'est interrogé sur le Moyen Âge, ses limites chronologiques, sa perception. Lorsqu'on citait
des peintures définies comme «primitives», on considérait la période 1330-1550 (on y incluait même la
génération après Raphaël). Signalons le cas d'une exposition-type du XIXe s. dont la conception du Moyen
Age est différente de celle d'aujourd'hui : Londres, 1862, Collection of Works of Art on Loan at South
Kensington, organisée par John Charles Robinson. La section consacrée au Moyen Âge et à la Renaissance
était divisée en vingt-deux catégories correspondant à des typologies différentes. La subdivision par
typologies paraissait la classification la meilleure pour répondre aux exigences didactiques (dans une optique
semblable aux grandes expositions industrielles et manufacturières de la fin du XIXe s.). Il s'agissait donc
surtout d'un Moyen Âge d'architectures mais aussi d'objets, avec une prédilection pour les maîtres anciens ;
la focalisation était forte, laissant un peu à part la notion de contexte général.
Au cours du colloque de Pise, Clara Baracchini9 a présenté deux expositions qui ne se sont pas concentrées
sur un personnage ni sur une ville mais plutôt sur un territoire ; le choix fut d'exposer des objets médiévaux
jusqu'au XVe s., sans mettre en valeur une personnalité artistique: ainsi, Lucques, 1990, Ornamenta eccle-
siae. Oreficeria sacra a Lucca dal XIII al XV secolo et Lucques, 1995 Scultura lignea. Lucca 1200-1425, qui
ont concerné la sculpture sur bois et l'orfèvrerie. Bien dans la lignée de l'activité qui caractérise un bureau
de direction des Beaux Arts, a été réalisé un catalogage total en suivant les critères dudit organisme puis
après une première orientation et la constitution de schémas d'interprétation, on a tenté de déterminer la
typologie des objets. L'importance a été donnée à la restauration, à l'analyse des documents d'archives et
de la distribution territoriale, par conséquent à l'analyse croisée des typologies - le tout accompagné d'un
catalogue ; une nouvelle forme d'analyse étant par ailleurs proposée, sur Internet. Même si le territoire de
la province de Lucques est très étendu, le choix a été de tout exposer (sans faire de sélection) : environ 250
objets d'orfèvrerie et 65 sculptures. Par la comparaison de plusieurs objets, il a été possible de constituer
des groupes ou familles, de faire des rapprochements entre des artistes et de donner une bonne chronologie
(surtout dans le cas des croix de procession).
Un autre cas analysé dans le cadre du colloque : les manifestations autour de l'art du XIVe s. à Bolzano, qui
se sont déroulées entre 2000 et 2004 et en particulier l'exposition de 2000, Trecento. Pittori gotici a
Bolzano. Cette manifestation a été combinée avec la publication d'un atlas qui constitue le catalogue
complet des peintures murales présentes à Bolzano, y compris l'enluminure (mais en excluant la peinture
à caractère profane). Dans l'atlas, le catalogage est topographique: 14 églises y sont analysées, avec une
introduction historique et un plan de l'édifice avec toutes les peintures ; une sorte de parcours idéal pour le
visiteur avec la reproduction photographique intégrale, en noir et blanc. La région de l'Adige et la période
concernée sont marquées par l'influence de Guariento sur l'école locale (contact avec l'école de Padoue).
Sa présence est documentée dans l'église des dominicains. La production picturale de la région de Bolzano
étant presque exclusivement murale, une exposition était difficile à imaginer sans offrir des propositions
d'itinéraires. En outre, parallèlement à l'exposition, sont offerts une visite guidée de certains lieux souvent
fermés au public ainsi qu'un cahier didactique (destiné également aux lycéens et étudiants) avec une
documentation mise à jour sur l'histoire locale, sur le XIVe s. en général, sur la ville de Bolzano, sur la
vie quotidienne et la culture matérielle.
Certains aspects négatifs des expositions d'art médiéval ont été relevés par Francesco Gandolfo. Ces
manifestations ont changé; elles sont de plus en plus réalisées à grande vitesse et confiées à une
organisation spécialisée ; il arrive que les catalogues s'en ressentent.
Depuis l'après-guerre, on retrouve davantage d'expositions d'art médiéval consacrées à un personnage
important (j'ai déjà mentionné le cas de Charlemagne par exemple qui est très fréquent). Pourquoi cette

8. Cf. Enrico Castelnuovo, «II grande museo d'arte in Italia e all'estero alla fine del XX secolo: tradizione, problemi
attuali, prospettive », dans Gli uffizi. Quattro secoli di una galleria, Florence, 1983, p. 563-584.
9. Voici son opinion sur certains points développés au cours du colloque: ne pas oublier l'importance du rôle des
panneaux explicatifs pour illustrer les œuvres dans les salles. Le catalogue, volontairement dans la même lignée que
l'exposition, doit être conçu comme un instrument à offrir pour poursuivre la recherche : chaque œuvre exposée est reproduite et
accompagnée d'une fiche analytique, ainsi que de la bibliographie correspondante.
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exigence et non pas « l'art carolingien », par exemple ? Gandolfo analyse cela comme la disparition de l'idée
artistique et l'arrivée de l'Histoire au premier plan. Les catalogues aussi donnent davantage d'espace à
l'approche historique. Ainsi, revenant sur l'exposition d'Aix-la-Chapelle (1965) Karl der Grosse..., il note
qu'il s'agit d'une grande exposition de type assez traditionnel sur le contexte carolingien et surtout sur
certains chefs-d'œuvre : Charlemagne et la centralité de l'Europe (idée constante : Carolus magnus pater
Europae). En 2001, c'est une comparaison avec Rome, Carlo Magno a Roma, exposition surtout de copies,
de calques, etc. comme alternative à l'objet original (alors que sa mise en valeur devrait être toujours au
premier plan). L'Allemagne reste un exemple de nation où les expositions d'art médiéval sont
extraordinaires pour la qualité des objets et la capacité d'organisation interne.
Dans le cas de la célébration d'un personnage en Italie, par exemple à l'occasion du jubilé, c'est
régulièrement la figure de Boniface VIII qui est exaltée (toujours le même pape !). Il y a quelques années, c'était
Frédéric II avec des résultats peu encourageants, si on fait une comparaison avec l'événement de Stuttgart,
1977, Die Zeit der Staufer. Geschichte, Kunst, Kultur.
Les expositions territoriales ont plus de mérite et surtout reflètent davantage le véritable travail (la
véritable contribution) de l'historien de l'art (par exemple Urbino, 1998, Fioritura tardogotica nelle
Marche); il s'agit de fournir du matériel, de mettre un point fixe sur une génération de peintres, pour
les futurs chercheurs et ainsi d'entraîner de nouvelles réflexions.
La France est citée par Gandolfo comme un véritable modèle où les historiens de l'art savent faire leur
métier: ainsi, à Fontevraud, en 2001, L'Europe des Anjou. Aventure des princes angevins du xme au XVe s.,
l'exposition est caractérisée par une série de thèmes proposés, correspondant à des faits artistiques, le tout
dans une optique artistique et non pas historique. De même, Paris, 1998, L'art au temps des rois maudits.
Philippe le Bel et ses fils. 1285-1328, ou encore la toute récente, Dijon, 2004, L'Art à la cour de Bourgogne.
Dans ces trois cas, c'est l'art qui détient la part du lion et nous permet de comprendre la mentalité d'une
époque ; ceci devrait être l'objet principal de toute exposition d'art.
Citons tout de même un cas intéressant pour l'Italie : Bassano del Grappa, 2001-2002, Ezzelini, signori délia
Marca nel cuore dell'Impero di Federico 11° : même si cette exposition avait un ton historique, la nouveauté
est venue du fait que ce sont les œuvres exposées qui ont véritablement été au centre de la constitution du
catalogue. Ce modèle est donc à suivre.
Il faut espérer que les «choses qui concernent l'art» soient considérées pour elles-mêmes et non comme
des instruments destinés à la seule célébration d'événements qui, dans de nombreux cas, ne les touchent
pas directement. Un événement historique est souvent ce qui détermine le choix d'une exposition d'art
médiéval : cela permet une réflexion critique, l'occasion de comparer des œuvres entre elles et de les réunir
alors qu'elles sont souvent dispersées dans le monde entier. Mais les promoteurs ont parfois une autre
vision : ils recherchent la notoriété, la publicité, etc.
Carlo Bertelli réfléchit sur la mode du Moyen Âge, probablement due à l'énorme succès du film Le nom de
la rosé de Jean-Jacques Annaud, même si on y voit une réalité médiévale transformée; le texte même
d'Umberto Eco ne permet pas une bonne orientation dans l'histoire et c'est probablement cette idée de
l'indéchiffrable qui fascine le public. D'où la multiplication de bandes dessinées sur le Moyen Âge et de
manifestations populaires, qui permettent de maintenir élevé le goût de la vulgata pour la période
médiévale. À l'heure actuelle, si l'on veut attirer le public, en plus de l'exposition d'objets, il faut utiliser de
nouvelles techniques, en privilégiant ce qui a trait à la vie quotidienne, en créant des sortes de
reconstitutions (p. ex. la vie de cour, la présentation d'une cuisine avec des objets retrouvés dans les fouilles, etc.).
Comme exemple d'expérience personnelle, Gerhard Wolf cite deux expositions dont il a dirigé
l'organisation: Rome, 2000-2001, Roma aurea. Dalla città pagana alla città cristiana et Gênes, 2003, Mandylion. Il
volto di Cristo. Dans ce dernier cas, il s'agissait de concentrer l'attention sur un seul objet, pratiquement
« magique », de grande valeur aussi bien religieuse qu'historique ; de plus, l'espace était réellement d'origine
médiévale, dans le cloître du Musée diocésain. Wolf fait des comparaisons avec les deux expositions new-
yorkaises sur Byzance : 1997, The Glory of Byzantium. Art and Culture of the Middle Byzantine Era.
A.D. 843-1261 et 2004, Byzantium. Faith and Power 1261-1557.
L'exposition de certains objets sacrés médiévaux pose un problème : il faut considérer, dans le cas des icônes,
que leur prêt présente un réel problème «physique»; leur réunion, au sein d'une exposition, est rare et
lorsque cela se produit, il s'agit d'un véritable événement. En effet, l'icône est un objet de vénération
liturgique dont le transport appartient à un véritable rituel. La façon dont la tradition orthodoxe expose les
icônes dans l'église constitue l'iconostase ; dans de nombreux cas, ces icônes sont habillées de métaux, de tissus
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colorés, d'ornements en tout genre et leur présentation dans une exposition ou un musée les enlève de leur
contexte. Elles sont alors considérées comme un objet historique, de façon topographique, chronologique ou
typologique : il faut choisir si on veut les transformer en œuvre d'art ou bien les maintenir dans un contexte, le
leur. En 1988, dans la basilique Sainte-Marie-Majeure à Rome, eut lieu une exposition extraordinaire des plus
anciennes icônes de la Vierge (réunion unique en son genre: De vera effigie Mariae: antiche icône romane).
Il serait intéressant de reconstituer l'histoire des aménagements d'une exposition ; c'est l'aspect le plus
éphémère et en même temps le plus perceptible au premier abord par le visiteur. Une réflexion est à faire sur le
parcours spatial à créer pour y présenter des œuvres. À ce propos, le cas de New York est exemplaire:
première apparition des icônes les plus importantes du Sinaï, du début du XIIIe s., et possibilité de les admirer
de près (reconstitution presque grandeur nature de la basilique du Sinaï pour y présenter les icônes).
Maria Andaloro10 réfléchit sur la manifestation de New York en 2004. Parmi toutes les typologies exposées,
le pourcentage privilégie les icônes (cent vingt-deux au total) par rapport aux objets d'orfèvrerie par
exemple, aux manuscrits, aux tissus, etc. On observe une répercussion sur la perception: icônes de
différents formats, certaines de dimensions tout à fait monumentales, de grand impact pour le visiteur. Le
catalogue de cette manifestation est monumental, absolument pas consultable au sein de l'exposition. Sa
structure s'articule autour de cinq sections avec des articles comprenant des études approfondies
accompagnées de fiches techniques et de photographies. Aucune image d'ensemble ne permet d'apprécier l'effet
visuel de la formule de présentation des œuvres. Le catalogue, en quelque sorte, réduit et neutralise un peu
l'impact visuel ; il ne s'agit pas de son équivalent car, bien sûr, il présente les objets exposés, mais il rentre
dans le cadre d'une tentative de rationalisation.
Un autre exemple d'analyse (Philippe Lorentz) est celui de l'art dans la Vallée du Rhin connu, en réalité,
grâce aux expositions tenues entre 1895 et 2001. On recense une vingtaine d'expositions qui sortent un peu
de l'ombre des diocèses aussi importants que Bâle, Constance, Strasbourg ou Spire. Il s'agit d'une région
qui connaît une difficulté d'identité en fonction de son système géopolitique. La période du gothique tardif
reste l'âge d'or pour la région et, sur le plan artistique, on trouve des créations de haut niveau. Aussi bien
du côté français qu'allemand, la stratégie des expositions est équivalente et elles se sont déroulées surtout
après la Seconde Guerre mondiale et jusqu'en l'an 2000. Quelques exemples : Paris, 1948, Chefs-d'œuvre de
l'art alsacien et lorrain, ou Karlsruhe, 2001, Spâtmittelalter am Oberrhein.
À partir des années 50, ce seront surtout les musées qui prendront le relais, c'est-à-dire qui exposeront des
œuvres médiévales: Strasbourg, Karlsruhe, etc.
L'exposition idéale selon Adriano Peroni est celle qui présente peu d'objets et est accompagnée d'un petit
guide imprimé, pour apprécier surtout les restaurations ; elle doit donc être de petite dimension et avec une
réelle exposition de chefs-d'œuvre.
Nous sommes en train de vivre une sorte de déclin des musées ou plutôt une recherche d'équilibre; le
visiteur «intelligent» visite aussi bien le musée que l'exposition. Veillons à éviter les expositions
documentaires qui exposent des calques de sculptures ou des fac-similés de manuscrits ; on risque de perdre le sens
de la crédibilité de l'œuvre originale.
Les techniques artistiques conditionnent l'exposition: les manuscrits, par exemple, imposent la vision
obligée de certaines pages seulement; l'orfèvrerie et l'ivoire ont des exigences d'exposition particulières.
La peinture, les tableaux sont plus faciles à exposer.
Toujours selon Peroni, ce qu'il reste d'une exposition, c'est son catalogue qui essaie même de remplir le
vide laissé par les objets absents de l'exposition et donc de donner le cadre général d'un problème. Par
exemple, Brescia, 2000, II futuro dei Longobardi. L'Italia e la costruzione dell'Europa di Carlo Magno:
exposition à caractère historique, avec des exemples archéologiques, des documents, etc.
Sur les différents thèmes développés, et dont les participants ont discuté en conclusion du colloque, je
reprends certaines interventions; selon Marco Collareta, notre rôle est partagé entre le caractère concret
d'une seule œuvre, qui est parfois le véritable protagoniste, et une série de problèmes sur la réflexion
globale des structures artistiques. Le catalogue valorise l'histoire de l'art, mais il s'agit d'un livre qui
accompagne l'exposition au moment de son inauguration, qui réfléchit sur le travail de préparation et il
est préférable de ne pas le faire sortir après la fermeture de l'exposition, comme c'est parfois le cas. Selon

10. Au sujet du rapport exposition-catalogue: différence entre deux systèmes, l'œuvre figurative (la perception) et le
catalogue (le langage, la description).
L'HISTOIRE DES EXPOSITIONS D'ART MÉDIÉVAL 249

Andaloro, il faut maintenir la mémoire d'une exposition et c'est le catalogue qui en est le meilleur
instrument. Il faudrait proposer également un troisième instrument, visuel (documentaire), pour développer
une certaine sensibilité dans le récit de l'exposition. Pour Antonino Caleca, il est nécessaire de créer une
sorte de guide (ou petit catalogue) comme instrument simple de compréhension d'une exposition (en
mémoire de, ou pour qui ne l'a pas vu): un fascicule comprenant le plan de l'exposition, la mise en
place (disposition) de toutes les œuvres et une brève description pour les identifier. Ce pourrait être
également un moyen de propagande, à faire circuler. Haskell (que rappelle Gandolfo) faisait une analyse
intéressante à ce sujet, à savoit l'« inutilité » du catalogue au point de vue scientifique car le catalogue
exhaustif n'existera jamais. Pour le Moyen Âge en particulier, sa valeur est variable et ne dépend pas de
ses dimensions: par exemple, le catalogue maniable de l'exposition milanaise de 1958, déjà cité, a fait
véritablement évoluer l'histoire de l'art ! Aujourd'hui, les catalogues sont gigantesques, parfois pléthoriques.
En effet, on cite encore les vieilles expositions, tandis que les plus récentes se perdent dans nos mémoires.
Pour Castelnuovo, même si parfois le parcours au sein d'une exposition est complexe et ne met pas
particulièrement le visiteur «à l'aise», il faudrait maintenir le rôle des panneaux explicatifs dans chaque
salle, sans reprendre les propos du catalogue mais avec des textes clairs, réalisés ad hoc.
Enrica Pagella souligne que les collections des musées municipaux sont celles qui contiennent le plus
souvent des œuvres médiévales: le fait qu'en Italie, ces musées soient en difficulté depuis des années a
peut-être provoqué la crise des expositions d'art médiéval. D'autre part, l'aménagement est un élément
fondamental aussi bien pour l'exposition que pour le musée: il faudrait presque y consacrer un budget
(travail d'architecte, dessins des panneaux, contacts fréquents avec les commissaires, etc.). Encore pour le
cas italien, un autre problème n'est pas résolu, qui concerne le temps de préparation d'une exposition. En
Allemagne, une exposition est décidée en moyenne quatre ans avant son ouverture, ce qui est impensable
en Italie où la décision n'est guère prise qu'un an avant.
Pour la France (rapporté par Lorentz), l'exposition de 1981 du Grand Palais Les fastes du gothique.
Le siècle de Charles V ne serait plus envisageable actuellement, à cause du manque de public lors de
l'exposition de 1998, dans le même lieu, L'art au temps des rois maudits. Philippe le Bel et ses fils. 1285-
1328. Aussi, pour revenir sur le problème de la taille des catalogues, Paris 1400 est un bon exemple : le
catalogue, plus concis, a été très apprécié du public. Lorentz qui, au départ, semblait frustré par la
limitation des notices, a ensuite compris que l'on peut dire l'essentiel en étant bref. Ce catalogue qui
comprend, d'ailleurs, une bibliographie exhaustive pour approfondir certains aspects, constitue une
véritable étape dans la recherche. Le rôle de l'historien de l'art est de diffuser, de proposer au public quelque
chose de clair et lisible, mais en privilégiant toujours la qualité.
Elisa Camporeale cite le cas du Burlington Fine Arts Club, institution londonienne à caractère privé, qui
proposait à une époque déjà reculée des solutions d'avant-garde : les expositions médiévales, émules de celle
de Manchester, 1856, Exhibition of the Art Treasures of the United Kingdom, présentent des catalogues dès
1890 environ, avec des photographies de plus de la moitié des objets exposés, une étude en introduction de
chaque section et des notices complètes ; deux expositions par an, en moyenne, de haut niveau. Le problème
cependant était le public, limité aux associés ou à quelques personnes de leur connaissance.
On ne saurait clore cet exposé sans faire un clin d'œil à l'actualité, avec l'exposition qui vient de se clore à
Paris, au Louvre, La France romane. Au temps des premiers capétiens (987 -11 52) x\ et qui présentait un
parcours complet, avec des œuvres pour la plupart issues des collections du Louvre, par exemple du
Département des Sculptures ou de celui des Objets d'art, mais aussi prêtées par des musées, trésors et
dépôts lapidaires. L'une des volontés des commissaires (dont le commissaire principal Danielle Gaborit-
Chopin) a été de montrer au public la variété des régions françaises : la Bourgogne avec les reliefs de Saint-
Lazare d'Autun, les manuscrits de l'abbaye de Cîteaux; la production des grandes abbayes normandes;
certaines œuvres clefs des «terres romanes» du Languedoc ou de la Provence, etc. Enfin, l'apogée du
XIIe s. était essentiellement marquée par les chapiteaux historiés, l'émaillerie champlevée et les statues
reliquaires d'orfèvrerie. C'est là l'exemple d'une exposition attirante pour un public même jeune, à la

11. François Avril la présente dans Art de l'enluminure, n° 12, mars-avril 2005, p. 69-70, en indiquant son double
parcours, thématique et géographique ainsi que la richesse du matériel exposé ; elle comprend près de 300 pièces (sculptures,
relevés de peintures, objets précieux, manuscrits et aussi objets provenant de fouilles). Parmi les 70 manuscrits exposés certains
ne l'avaient pas été depuis 1954 lorsque Jean Porcher organisa l'exposition mémorable de la Bibliothèque nationale, Les
manuscrits à peintures du vif au XI f siècle.
250 CAHIERS DE CIVILISATION MÉDIÉVALE, 48, 2005 FLORENCE MOLY

présentation claire et variée, qui permettait d'apprécier les différents thèmes (la mutation de l'an mil, avec
le château et le village, l'Église, les grands centres de création, etc.) grâce à un panorama d'œuvres aux
techniques différentes et bien mises en valeur.
L'exposition idéale reste en tout cas, pour Castelnuovo, celle qui met en lumière un territoire, garantit la
conservation de la mémoire et favorise les restaurations. L'important est également de bien s'accorder sur
les contributions à demander aux historiens : elles doivent être utiles et une mise en scène rigoureuse est
nécessaire. De plus, le catalogue n'est pas le prisme d'une exposition, il en est un miroir partiel et le plus
réussi est probablement, comme on l'a vu, celui que l'on peut transporter dans l'exposition même12.
Enrico Castelnuovo a su parfaitement organiser, mobiliser et stimuler des spécialistes de secteurs différents.
Son rayonnement ne se manifeste pas qu'à travers ses publications mais aussi par toute la culture qu'il
diffuse, mettant en valeur les périphéries par rapport aux grands centres. Il a su créer une école de pensée
et ses élèves, tout en gardant leur personnalité, ont une façon commune d'appréhender la recherche13,
perceptible notamment dans leurs publications.
Florence Moly
II Molino - Strada Noce 38
I - 50028 Tavarnelle (Firenze)

12. P. ex., celui de Paris, 2004, Primitifs français. Découvertes et redécouvertes.


13. P. ex., le volume Artifex bonus, dir. Enrico Castelnuovo, Rome/Bari, Laterza, 2004, est le fruit d'une étude
approfondie sur l'artiste médiéval, qui s'est développée dans le cadre de ses cours à l'E.N.S de Pise à partir des années 90. Treize
profils critiques de différents auteurs analysent l'artiste médiéval du point de vue de sa formation, de son profil professionnel et
culturel ainsi que de son rôle dans la société.

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