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Juillet 2015
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Introduction
Si l’enseignement de l’histoire des arts trouve sa place dans l’ensemble des disciplines en raison de
sa transversalité, il occupe une place légitime dans l’étude de l’argumentation. Au lycée, l’histoire des
arts s’intègre à l’enseignement du français à plusieurs titres : utilisation d’une œuvre d’art non
textuelle dans un corpus d’œuvres textuelles, relations qu’un texte entretient avec une autre œuvre
artistique, liens entre toute œuvre d’art et l’histoire littéraire. Un dialogue doit donc s’instaurer entre
diverses formes d’expressions artistiques, dont on ne peut exclure la littérature. À ce titre, une œuvre
d’art, littéraire ou non, peut développer une visée argumentative, soutenir un point de vue, défendre
ou contester une idée. Si les procédés diffèrent, les effets peuvent justifier tel ou tel rapprochement.
Il ne s’agit pas pour autant de rechercher systématiquement la portée argumentative de toute œuvre
d’art. La règle demeure, à ce titre, l’absence de règle systématique, la singularité des textes et des
autres œuvres empêchant, de fait, d’établir toute approche préconçue ou préjugée.
L’étude de l’argumentation en histoire des arts prendra tout particulièrement en considération les
émotions et les esthétiques qui ne sauraient être négligées. Le développement d’une conscience
esthétique exige d’éduquer le sentir et le penser conjointement, sans privilège de l’un sur l’autre, sans
exclusivité de l’un ou l’autre. Autant que le texte, la singularité de l’œuvre pourra induire une
démarche de lecture, un procédé d’analyse ou les choix d’une étude.
On ne négligera pas non plus de faire apparaître des correspondances, des analogies ou des
procédés d’expression qui méritent comparaison. La précision des notions et la spécificité des
analyses ne constituent pas un objectif en soi, mais elles ouvrent le chemin par lequel il devient
possible pour les élèves de ressentir, de comprendre, de s’approprier une œuvre dans son contexte,
et de prendre conscience de leur émotion. Développer cette appréciation suppose d’établir des
passerelles, des liens, des « con-naissances ». L’œuvre demeure l’entrée permanente pour le monde
des arts, ses émotions et ses idées. La culture humaniste est à l’issue du processus : c'est bien
l'œuvre que les élèves doivent rencontrer, et pas uniquement son commentaire ou son analyse,
même s’il est acquis que l’un et l’autre contribuent à cette appropriation.
Le discours de l’œuvre
L’argumentation n’est pas une spécificité textuelle. Nombre d’œuvres sont susceptibles d’exprimer
une idée ou de développer une visée argumentative, en relation avec une émotion. La construction
décloisonnée impliquée par l’histoire des arts permet ainsi au professeur de littérature d’éviter de
réduire sa programmation à une succession de lectures analytiques ou d’explications de textes. Cette
approche reste délicate : elle oblige à mettre en valeur la spécificité du mode de pensée qu’à chaque
époque le texte littéraire et l’œuvre ont en commun, tout en préservant à l’œuvre sa part d’ombre et à
l’élève son droit à une perception personnelle. La lecture de quelques textes comme Architecture
gothique et pensée scholastique d’Erwin Panofsky, L’Art de dépeindre de Svetlana Alpers, l’article de
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Louis Marin « Pouvoir du récit et récit du pouvoir » ou Regarder, écouter, lire de Claude Lévi-Strauss
aideront le professeur à trouver une juste mesure entre une tradition interprétative, une historicisation
légitime et le respect de la dimension polysémique et intemporelle de l’œuvre d’art.
L'on pourrait prendre pour exemple, en lien avec la piste "Grandeur et misère de l'homme" en classe
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de seconde , la manière dont l'art, de la fresque "Adam et Eve chassés du Paradis terrestre" de
Masaccio à L'Evangile selon Saint Mathieu de Pier Paolo Pasolini "humanise" et incarne les figures
bibliques en s'affranchissant progressivement d’un canon de la représentation religieuse pour tenir un
discours poignant sur les limites et la fragilité de la condition humaine. La référence à la lettre du
message biblique s'estompe pour servir de toile de fond à un message, non dénué de transcendance,
mais ramené aux seules proportions de la souffrance et du destin humains.
Parfois, la Parole dans l'œuvre, et son efficace, se donnent à voir. Citons le cas du célèbre portrait de
Luther par Lucas Cranach l'Ancien. La position de trois quart du personnage, la direction du regard,
mettent en valeur simultanément l'oreille et la bouche, reliées en une continuité signifiante qui associe
l'écoute et la parole. Celles-ci se donnent comme étroitement complémentaires, placées sous le
régime de l'innutrition et de la circulation, dans ce qui peut apparaitre ici comme un manifeste de la
nouvelle religion réformée, À l'inverse, à la fin du XXe siècle, l'essor d'une suprématie dénaturée de la
parole – et de la rumeur – dans le régime de la communication triomphante, en dehors de toute
référence éthique, se donne à voir dans les célèbres Lettres de Sibérie de Chris Marker lorsque le
cinéaste superpose aux mêmes images de reportage trois commentaires audio totalement différents
qui en changent radicalement le sens et la portée. L'absolu dérèglement d'une parole arbitraire posée
sur des images transforme le médium en machine argumentative infernale, au service de toutes les
propagandes possibles : il est du devoir de l'artiste d'en dévoiler les mécanismes pour nous en
prémunir.
Un exemple qui n’a pas valeur de modèle peut illustrer la relation de connaissance et de
correspondance que la littérature tisse avec d’autres formes artistiques, au service notamment d'une
définition de la question de l'homme et de ses valeurs (voir piste pour la classe de première,
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"L’Homme et le Beau" ). C'est la relation esthétique qui est ici plus particulièrement visée à travers la
problématique de la définition du Beau et du canon esthétique. La confrontation entre musique et
littérature donne lieu en effet à des pratiques et à des discours qui reflètent à la fois la construction
d’une réflexion esthétique et philosophique sur le langage, l’évolution des rapports entre l’art et le
pouvoir, et la place de l’homme dans la Cité. La prééminence de la raison, de la mesure et de la
proportion, critères de la beauté, de l’ordre et du bien à la période classique, se heurte depuis toujours
en musique à la fonction expressive, liée ou non au mot. Dans le discours sur les arts et la musique,
l’ « honnête homme » du XVIIe siècle s’efface au XVIIIe devant « l’homme des Lumières ». Littérature
et musique s’orientent vers une prise en compte accrue de l’individu et de sa sensibilité, donc de sa
subjectivité. Pour les élèves, la découverte de la réflexion esthétique du XVIIe siècle peut se fonder
d’une part sur l’observation de l’aspect concret, social et politique des rapports musique-littérature,
d’autre part sur l’analyse des discours argumentatifs qui accompagnent ces manifestations.
Une première approche peut être consacrée à la vie artistique à Versailles : la centralisation du
pouvoir s’accompagne d’une définition du bon goût dont les divertissements royaux et la création des
académies sont les signes extérieurs. En quoi le « beau » témoigne-t-il d’une harmonie cosmique,
modèle de l’harmonie individuelle et civique ? Les comédies-ballets de Molière et Lully, qui placent la
musique au service du texte, se voient peu à peu supplantées par l’opéra de Lully. Celui-ci consacre
l’avènement d’un rapport d’égalité et de complémentarité entre les deux arts, illustré par sa
collaboration avec Quinault dont certains livrets peuvent être étudiés. Comme le démontre Rameau
dans son analyse du monologue d’Armide – rédigée en réponse aux attaques de Rousseau –, Lully a
développé un mode particulier de déclamation musicale, qui a ses antécédents avec Monteverdi et
suit très précisément les affects du livret. L’étude des accents de cette déclamation, des figuralismes
qui traduisent musicalement le sens du mot et des nombreux éléments musicaux et littéraires qui
rendent symboliquement présente, au cœur de l’œuvre, la magnificence royale permettra de mettre
en regard un « beau » idéal avec une expressivité dramatique que revendique le récitatif. Une
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in Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 25, 1979.
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http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Francais/75/4/Pistes_Argumentation_Seconde_final_448754.pdf
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http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Francais/76/4/Argumentation_Premiere_final_448764.pdf
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comparaison avec le devenir de la tragédie lyrique chez Rameau (Hippolyte et Aricie) ou avec le
monde expressif des cantates de Bach sera éclairante sur cette dialectique.
Au XVIIe siècle, Descartes ouvre sa réflexion philosophique par l’écriture d’un Abrégé de musique
(1618) où il définit l'objet et la fin de la musique, en montrant que l'harmonie, la mesure et la
proportion sont les critères de la beauté. Cette approche constitue par ailleurs une référence pour
Rameau au siècle suivant. Si la réflexion esthétique de Boileau est centrée sur le domaine littéraire,
l’auteur recourt plusieurs fois à la métaphore musicale pour définir le Beau en termes d’harmonie,
d’ordre et de mesure. Lorsque se déclenche la querelle des Anciens et des Modernes, Perrault, dans
son Parallèle, montre que l’art doit s’affranchir de la nature par un recours à l’artifice qui témoigne du
degré de raffinement et d’évolution de la société.
La musique n’est plus destinée à conforter une norme sociale et à consolider la prégnance du
système monarchique. Elle relève d’un langage universel, mais soumis à une approche individuelle.
« L’art du musicien consiste à substituer à l’image insensible de l’objet celle des mouvements que sa
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présence excite dans le cœur du contemplateur .» Comme elle ne s’adresse plus à des sujets mais à
des individus, la musique devient l’un des objets de réflexion du siècle des Lumières.
Le travail sur la place de la musique dans la littérature d’idées aux XVIIe et XVIIIe siècles permet de
percevoir les enjeux artistiques et politiques des débats sur l’esthétique. On explore ainsi la variété
des genres et des formes de l’argumentation de la fable à l’article de dictionnaire. L’histoire des arts a
toute sa place dans le cadre de cette perspective. L’étude de la langue donne lieu à une comparaison
entre langage littéraire et langage musical ; la réflexion peut également s’ouvrir sur d’autres genres
artistiques tels que la peinture et offrir la possibilité d’une interdisciplinarité avec la musique, voire les
mathématiques.
La relation entre la littérature et le monde des sciences et des techniques offre un autre exemple
original pour illustrer l'intersection entre disciplines dans le cadre de l’enseignement de l’histoire des
arts. Mené en interdisciplinarité (Histoire, Mathématiques, Sciences de la vie et de la Terre, Sciences
physiques), un travail sur Léonard de Vinci (1452-1519) s’inscrit dans le cadre de l’histoire des arts,
dans le champ scientifique et technique, autour de la thématique « Arts, contraintes, réalisations » ou
« Arts, sciences et techniques ». Cette étude permet d’appréhender la période de la Renaissance, de
déterminer le regard des artistes et des scientifiques sur leur époque et le monde, et de faire état des
connaissances scientifiques. On peut tout particulièrement associer cette piste à la question "L'homme
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J. J. Rousseau, Essai sur l’origine des langues.
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et le savoir" . Les supports de l'étude sont constitués par les manuscrits de Léonard dans lesquels se
décèle sa propension à regarder tout, et tout le temps : il dessine ce qu’il observe, il note ses
réflexions, il dessine ses rêveries et ses projets grandioses, il manifeste enfin un esprit de libre
examen. Son avidité de connaissance et de compréhension va de la géologie à l’astronomie, de
l’anatomie aux mathématiques. Esprit libre, il s’attache aux transformations des choses, à la
métamorphose des formes et aux mouvements infinis qui les animent, amorçant la rénovation de la
science. Le professeur peut donc demander aux élèves de choisir un manuscrit et de l’observer, à
l’aide des outils à sa disposition, que ce soit le zoom, l’inversion (le miroir), la traduction, les
commentaires, visant ainsi à faire converger art et sciences du vivant dans une perspective historique.
Il met en évidence le rôle essentiel de l’observation et de la représentation dans la connaissance du
monde vivant. Il travaille les images de science, de l’illustration naturaliste ou anatomique aux
représentations actuelles du vivant, en tant qu’elles sont le reflet de l’évolution des connaissances
scientifiques, puisqu’à leur origine les images témoignent de la découverte du monde. Il peut
également travailler l’art et la matière pour permettre aux élèves d'identifier les techniques de l’artiste
(matériel, perspective, sfumato, etc.) et explorer les dessous de ses œuvres. Les élèves prendront
ainsi conscience du rapport entre sciences et art dans l’identification des œuvres, dans leur
restauration et leur conservation, à travers la connaissance des techniques du peintre.
Ce détour permet d’offrir aux lecteurs une certaine conception de l’idéal social et des sciences, mais
aussi de développer une critique sévère de l’époque, notamment en ce qui concerne le domaine
religieux. La fiction se met alors au service de la réflexion et de la contestation. Selon quelles formes
et à quelles fins les fictions prennent-elles position sur la question du savoir, de la connaissance et de
la religion ? Les œuvres littéraires permettent l’expression organisée d’idées, d’arguments et de
convictions et elles participent ainsi à la vie de leur temps, notamment dans le domaine des sciences
et de la religion.
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http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Francais/76/4/Argumentation_Premiere_final_448764.pdf
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