NOTES DE LEXICOGRAPHIE BERBERE. 329
IV
DIALECTE DE KEL-OUI.
Les Kel-Oui, une des plus importantes fractions
des Touaregs, habitent oasis d’Asben ou Air, 1a
« Suisse africaine » dont Barth! a donné fa plus riante
description. C'est 4 lui que nous devons 1a connais-
sance détaillée de cette oasis montagneuse située
entre le Fezzan et le Haoussa. Jusqu’alors aucun
voyageur européen ne T'avait visitée, et depuis,
toutes les tentatives d'exploration sont restées in-
fructueuses. En 1877, Edw. von Bary dut renoncer
ay pénétrer, et, en 1881, le massacre d'une partie
de 1a mission Flatters eut lieu prés du puits d’Asiou,
sur la limite septentrionale de I'Air.
Ce pays, qui compte parmi ses principales villes
Agadés, célébre dans Jes trois dernicrs sitcles?, et
' Barth, Reisen und Entdechungen in Nord- und Central-Africa,
5 vol. in-8%, Gotha, 1857, t. I, p. 340-365, 399-435. Air est le
nom berbere de I'oasis, Asben le nom donné par les Soudaniens.
2 Une description spéciale d'Agadés avec une carte et un plan de
la ville a été publiée, apres les lettres de Barth, dans le Journal de
la Société de géographie de Londres, sous le titre Progress of the Afri-
ean mission consisting of Mssrs Richardson, Barth and Overweg to Cen-
tral Africa, 1831. On y trouve aussi quelques textes et un vocabu-
Jaire du dialecte soudanien parlé dans cette ville et dans le sud-ouest
de Yoasis, depuis l'expédition de Moh’ammed Askia, roi de Tom-
bouctou, au avi" siécle. Barth le nomme Emghadesie, il porte aussi
Jes noms de Songhai ou Sonr’at, Kissour ct Kouérétiini. Le voyageur
allemand Va étudié spécialement dans son travail sur les vocabulaires
du centre de (Afrique (Sammlung nnd Bearbeitung Central- Afrika
ad330 AVRIL-MAI-JUIN 1883.
Tin-Telloust, représente I'Agisymba regio de Marin
de Tyr, cité par Ptolémée, ob Julius Maternus, de
concert avec le roi des Garamantes, fit une expédi-
tion '. Les écrivains arabes n’en font aucune mention
jusqu’a Léon T'Africain qui parle du désert de Hair
et d'Agadés. Peut-étre est-ce vers l'époque de ce
dernier autcur que cette ville recut son nom actuel ,
car il dit que peu auparavant clle avait été entou-
rée de murailles par un certain roi. Les traditions
nationales, recucillics par Barth, rapportent qu’une
population primitive, les Goberaouas, venue du
Haoussa, fut exterminée, a {exception des femmes
et des enfants, par une immigration de Berbers du
nischer Vokabularien, Gotha, 1862-1865). D'autres lexiques de
cette langue qoi se parle jusqu’a Tombouctou ont été recueillis par
Caillé (Journal d'un voyage & Tombouctou , 3 vol. in-8°, Paris, 1830.
t. HL, Vocabulaire frangais-hissour, p. 303-315); Denham, Voyages
et découveries dans le nord et les parties centrales de Afrique, trad.
frang., 3 vol. in-8° et atlas, Paris, 1826, t. III, p. 423-426, Hodg-
son, Notes on the Northern Africa, New-York, 1844, in-8°, p. ur,
Suaing or Sangai, et M. Largeau (inédit), Un dialecte songhai, 1°A-
mara, est connu par une liste de mots donnée par Raffenel. Les mots
cités par John Adams et le capitaine Lyon ne paraissent pas appar-
tenir & ce dialecte. Voir aussi, sur Agadés, Barth , Reisen nnd Entdec-
kangen, t. 1, p. 435-527.
1 Reprenant la these de d’Anville, M. Berlioux (Les anciennes ex-
plorations et les futures découvertes de l'Afrique centrale, Revue de
géographie, 1879, p. 27) a essayé ‘identifier PAgisymba regio avec
le royaume de Cazembe des écrivains portugais, situé au sud de
{équateur; mais cette assertion, appuyée sur une estimation erronée
du systéme cartographique de Piolémée, n’offre pas de vraisemblance.
Cf. dans les Tonareys du Nord (appendice, p. 455) les faits par les-
quels M. Duveyrier a corrobore Lidentification d'Air avec Agisymba
proposée par M. Vivien de Martin dans son ouvrage sur te
Nord de C Afrique dans Cantiquité, Paris, 1863, in-8%, p. 213-223.’
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nord qui se mélangérent ensuite avec le reste des
vaincus. Leurs descendants furent soumis a leur
tour, vers 1740, par une invasion de Kel-Oui. Ceux-
ci altérérent par des mariages la pureté de leur race
et s'attirtrent par 1a, de la part des Touaregs du
nord, le surnom injurieux d'Iklan, «esclaves ».
Les Kel-Oui, nommeés pour la premiére fois a la
fin du siécle dernier par Horneman! qui les dépeint
sous les coulcurs les plus favorables, se divisent en
un grand nombre de tribus, dont Jes principales
sont : les Irholang (Ir’olang) qui fournissent les sul-
tans ou Amenoukal, les Ikaskesan; les Kel-Tafidet, les
Kel-Naggarou, ies Ikadmaouen, les Fadé, les Kel-
Elar, etc. Toutes ces tribus sont soumises 4 un chef
qui réside 4 A’-ssodi. Avec les Kel-Geress, les Itis-
san et les Iseraren, les Kel-Oui forment une confé-
dération gouvernée par Ie sult’an d’Agadés?. Ils ex-
ploitent Jes caravanes qui vont du Touat ’ Agadés,
d'Agadés au Haoussa et du Touat 4 Katchena>.
Leur dialecte, qu'ils appellent Aourar‘ié (Aoura- -
ghié), était jusquici inconnu'’. Je dois le vocabulaire
suivant 4 un marchand arabe de Ghdamés, Belk’as-
sem hou Mousa ben Fil-H'adj Moh'ammed El-
" Voyaye dans Cintériear de TAfrique, trad. frang., Paris, an x1,
in-8*, p. 241.
2 Barth, Reisen und Entleckungen, 1. 1, p. 376-393.
> Hanoteau, i de grammaire «le la langue tamacheh’, p. xxiv.
+ Drapris Reinaud , Rapport sur le tablean des dialectes de U Algérie
Paris, 1856, in-8°, Geslin avait composé un Essai de grammaire du
lialecte touareg parlé & Agadés, mais ce travail resté inédit parait étre
ver.Ju aujourd hui comme les aui manuscrits de cet auteur,
a3,